an, il faudrait réduire les émissions de 6% par an.
En d’autres terme : la croissance verte ne peut
pas être le sésame unique pour garantir la durabilité.
La dimension sociale négligée
De plus, la « croissance verte » omet une dimension fondamentale du développement durable : la
justice. Partout dans le monde, les inégalités progressent. Une récente étude
de l’OCDE vient
d’ailleurs confirmer que le fossé entre les riches et les pauvres dans les 34 pays de l’OCDE n’a
jamais été aussi grand depuis trente ans. Aujourd’hui, le revenu moyen des 10% les plus riches
représente neuf fois celui des 10% les plus pauvres. L’écart de revenu s’est aussi creusé dans les
pays de tradition égalitaire comme l’Allemagne, le Danemark et la Suède passant de 5 à 1 dans les
années 80 à 6 à 1 aujourd’hui.
Il est donc indispensable que la Déclaration finale qui clôturera la Conférence « Rio+20 » inclue
aussi les questions de redistribution, les conditions de travail dignes dans le sens de l’agenda du
travail décent de l’OIT ainsi que l’égalité des chances.
C’est dans ce sens que le mandat de négociation de la Suisse devrait aller. Or, jusqu’ici les as-
pects sociaux manquent et notre pays se concentre sur l’économie verte en oubliant la dimension
sociale. Travail.Suisse demande à la Suisse de reprendre les dispositions pour une « transition
juste pour la population active, et la création de formes de travail décentes et des emplois de quali-
té » présentées dans les décisions de l’ONU prises lors des négociations sur le climat à Cancun
(2010) et à Durban (2011).
Cela veut dire concrètement :
- La participation des travailleurs et travailleuses pour gérer les changements économiques,
restructurations d’entreprises et la nécessité d’acquérir de nouvelles formations vu
l’impact que le changement climatique et la nécessité de réduire massivement les gaz à ef-
fet de serre auront sur l’économie et l’emploi.
- Le respect des droits du travail et autres droits de l’homme pour assurer cette transition
juste.
- Un socle de protection sociale pour la justice sociale et une mondialisation équitable dans
le sens de la recommandation en discussion à la Conférence internationale du travail.
Un tel programme de développement durable devra pouvoir être financé. C’est pourquoi, nous
demandons aussi que l’on se penche sérieusement sur la mise en place d’une taxe sur les tran-
sactions financières internationales. Le dérèglement des marchés financiers est à l’origine de la
crise économique mondiale que nous avons connue en 2008 et 2009 et dont les conséquences se
font encore sentir aujourd’hui, en Europe en particulier. L’adoption d’une telle taxe aurait l’avantage
de mettre le grain de sable nécessaire dans les rouages de la finance internationale pour enrayer
la spéculation tout en permettant de dégager des ressources pour financer un monde plus durable
et plus juste.
Thomas Coutrot et Jean Gadrey, « La croissance verte en question », ETUI Policy Brief. Politiques écono-
miques, sociales et de l’emploi en Europe, no 3/2012.
OCDE. 2011. Toujours plus d’inégalités : pourquoi les écarts de revenus se creusent. 450 p. 2011. Paris