Financement de l’entreprise, risque et rôle des banques Analyse de « Les confessions d’un homme1 ordinaire » D’Etienne de Callataÿ Nicolas Morenville, Rose Ndjendje et Thomas Neuville er 1 Master en Sciences-Economiques, orientation générale, à finalité spécialisée Année académique 2009-2010 Professeur : Alain de Crombrugghe 1 « Economiste » 1 Economics School of Louvain/UCL • Place Montesquieu 3 • 1348 Louvain-la-Neuve Economics School of Louvain/FUNDP • Rempart de la Vierge 8 • 5000 Namur Tables des matières Introduction ………………………………………………………………………………….. 3 Partie I : Causes et conséquences de la crise ………………………………………………… 4 A. Responsabilité partagée des différents acteurs …………………………………… 4 1. Responsabilité des institutions financières ………………………………… 4 1.1 La responsabilité individuelle ………………………………….…. 4 1.1.1. Les modèles internes de gestion des risques …….……... 4 1.1.2. Gestion actif-passif ….…………………………………. 5 1.1.3. Les gages des crédits hypothécaires ….………………... 5 1.1.4. Les innovations financières ….………………………… 5 1.1.5. Les incitations à la performance ….……………………. 6 1.2. La responsabilité collective ……………………………………… 6 2. Responsabilité de Monsieur Tout le Monde ……………………………….. 7 B. Les effets de la crise ………………………………………………………………. 7 1. Effets de la crise sur le système financier …………………………………. 7 1.1. Modification du paysage financier ………………………………. 8 1.2. Régulation plus intensive du secteur financier ………………….. 8 1.3. Changements dans le mode de fonctionnement des institutions .... 8 1.4. Rentabilité du secteur financier ………………………………….. 9 2. Effets de la crise sur la croissance économique …………………………… 9 2.1. Effets sur l’investissement ………………………………………. 9 2.2. Effets sur la consommation ………………………………..…… 10 3. Effets de la crise sur l’inflation et les taux d’intérêt …………………….... 10 Partie II : Solutions à la crise et vision critique …………………………………………….. 11 A. Plan de sauvetage européen et américain ………………………………………... 11 1. European Economic Recovery Plan ……………………………………… 11 2. The American Recovery and Reinvestment Act of 2009 ………………… 12 3. Similitudes entre les deux plans …………………………………………. 13 B. Crise de 1929 vs crise 2007 ……………………………………………………… 14 1. Ressemblances ……………………………………………………………. 14 2. Divergences ………………………………………………………………. 14 C. Problématique de l’aléa moral dans l’attitude des autorités ………………………15 1. Aléa moral de la part des institutions financières ………………………… 15 1.1. Aléa moral dû à l’injection de liquidité ………………………… 15 1.2. Aléa moral dû aux garanties publiques …………………………. 16 1.3. Aléa moral dû à la recapitalisation des institutions financières … 16 1.4. Solutionner le problème d’aléa moral …………………………... 17 2. Aléa moral de la part des épargnants ………………………………………17 D. Autres pistes de sortie de crise ……………………………………………….….. 18 1. Théorie keynésienne VS théorie classique ……………………………….. 18 2. Pensée d’Attali et microfinance …………………………………….…….. 19 Conclusion ………………………………………………………………………………….. 21 Bibliographie ……………………………………………………………………………….. 22 2 Introduction Au cours des pages subséquentes, après avoir rappelé les causes de la crise financière actuelle en distinguant la responsabilité des institutions financières de celle de Monsieur tout le monde, nous allons traiter des effets de cette crise sur le système financier, sur la croissance économique ainsi que sur l’inflation et les taux d’intérêts. Ensuite, nous nous pencherons sur les solutions et nous présenterons les différents plans de relances européens et américains. Enfin, nous nous efforcerons de comparer la crise actuelle avec celle de 1929 avant de traiter de l’aléa moral qui est un problème au centre de la crise que nous traversons. Ce sujet nous affecte tous dans la mesure où cette crise financière a des effets dans la sphère réelle et influence toutes les économies du monde. Tout d’abord, nous évoquerons brièvement les causes de la crise financière actuelle. Celle-ci trouve son origine dans le comportement des institutions financières mais la responsabilité de Monsieur tout le monde est également en cause. Concernant la responsabilité individuelle des banques, les modèles internes de gestion des risques, la gestion actif-passif, les gages des crédits hypothécaires, les innovations financières et les incitations à la performance sont autant de problèmes qui ont contribué à la crise actuelle. L’interdépendance entre les institutions et leur difficulté à se coordonner renvoient à la responsabilité collective de ses mêmes institutions. Concernant la responsabilité de Monsieur tout le monde, les épargnants et investisseurs privés ont donné aveuglément leur confiance au manque sans se soucier de savoir ce qui se cachait derrière le rendement élevé qu’on leur proposait. Ensuite, nous évoquerons les effets de la crise sur le système financier qui a été chamboulé, sur la croissance économique qui s’est fortement dégradée et enfin nous traiterons des effets sur l’inflation et les taux d’intérêts. Par la suite, nous aborderons la partie centrale de notre travail, à savoir les solutions apportées à la crise, en adoptant une vision critique. A cet égard, nous parlerons des plans de relance européens et américains qui s’inspirent des méthodes keynésiennes mais dont les moyens sont singulièrement plus importants outre atlantique. Un rapprochement avec la crise de 1929 sera ensuite effectué en soulignant les similitudes mais également les nombreuses divergences. Enfin, nous traiterons de l’aléa moral qui a joué un rôle crucial dans la crise et qui n’est pas évident à solutionner. A cet égard, nous distinguerons les différents types d’aléa moral et nous donnerons quelques pistes de solutions mais qui ne sont pas toujours aisées à mettre en place. Enfin, la conclusion résumera notre propos. 3 Partie I : Causes et conséquences de la crise A. Responsabilité partagée des différents acteurs Avant d’aborder la responsabilité des différents acteurs, l’auteur identifie une des causes majeures de la crise. Ainsi, il apparaît que le mécanisme de crédit y a joué un rôle central. Loin de critiquer ce mécanisme, l’auteur nous en rappelle l’utilité économique et collective. Grâce au crédit, les meilleurs projets, et non uniquement les projets de ceux qui disposent de suffisamment de moyens pour les financer, peuvent voir le jour. En ce qui concerne le crédit hypothécaire, celui-ci permet aux emprunteurs de se loger sans devoir disposer de la totalité du capital pour devenir propriétaire. Plus encore, les crédits subprimes ont permis à des gens qui, pour des raisons de solvabilité, n’auraient pas eu accès au crédit d’en bénéficier. Le crédit a connu une grande expansion au cours des dernières décennies. Cette expansion peut s’expliquer par une trop grande confiance envers les perspectives économiques de moyen terme. Une conjoncture favorable, reflet d’une croissance économique soutenue et stable, a ainsi suscité l’octroi de plus de crédit. C’est également cette stabilité qui a généré de l’instabilité. Elle a conduit à une plus grande prise de risque dans le chef des institutions financières. Celles-ci ont également pris plus de risque car elles disposaient de modèles plus sophistiqués de gestion des risques. Ce point sera abordé plus en détail ultérieurement. Nous allons maintenant aborder la question de la responsabilité des différents acteurs. A ce titre, l’auteur ne désigne pas les institutions financières comme seules responsables. Il en présente deux autres, à savoir les pouvoirs publics et Monsieur tout-le-monde. Pour ce travail, nous n’avons fait choisi d’aborder uniquement la responsabilité des institutions et de Monsieur tout-le-monde 1. Responsabilité des institutions financières Tout d’abord, concernant la responsabilité des institutions financières, il faut distinguer deux niveaux de responsabilité. Le premier est celui de leur responsabilité individuelle. Le second est celui de la responsabilité collective de toutes les institutions. 1.1. Responsabilité individuelle Pour ce qui est de la responsabilité individuelle des institutions, l’auteur retient cinq domaines dans lesquels des défaillances ont eu lieu. 1.1.1. Les modèles internes de gestion des risques Selon les accords de Bâle II, la responsabilité de mettre en place des modèles mathématiques internes de gestion de risques était laissée aux banques. En se basant sur les normes de fonds propres exigées par Bâle II et grâce à des modèles financiers de plus en plus précis, les institutions se sont arrangées pour détenir uniquement le minimum de fonds exigés. Pour maximiser leur bénéfice par rapport à leurs fonds propres, les banques ont augmenté le volume des crédits qui présentaient un risque faible et qui ne requéraient donc pas une grande quantité de fonds propres. Mais ces modèles ont conduit les institutions à mal mesurer les risques parce que celles-ci n’ont pas tenu compte de l’évolution de l’environnement. Ainsi, l’évolution de la structure du marché hypothécaire américain n’a pas été prise en compte par ces modèles. La hausse de la titrisation a ainsi eu pour conséquence une augmentation des 4 risques de défaut alors que les modèles prédisaient des risques moins importants pour ces crédits. En plus de mal calculer les risques qu’elles prenaient, les institutions ont ignorés d’autres risques jugés exceptionnels. Les modèles de gestion n’ont pris en compte que les risques qui se produisaient avec une probabilité de 95 ou 99% et ont ignoré les 5 ou 1% restants. En se basant sur une analyse de corrélation et de décorrélation historiques entre risques, certains étaient supposés se compenser. Ils n’ont pas tenu compte du fait que certaines corrélations peuvent s’éliminer face à des chocs nouveaux. 1.1.2. Gestion actif-passif A ce sujet, l’auteur retient essentiellement le risque d’illiquidité auquel font face les banques. Ce risque a pris de plus en plus d’ampleur ces dernières années du fait d’un glissement dans la structure de l’épargne des agents. Ainsi, le niveau d’épargne a diminué à cause du faible rendement offert par l’épargne traditionnelle. Les épargnants ont donc voulu investir autrement, dans des actifs offrant une rémunération plus grande. Il faut également signaler que banques ont aussi poussé leurs clients à investir dans des activités plus rentables pour elles. 1.1.3. Les gages des crédits hypothécaires Etant donné que les prix sur le marché immobilier étaient en croissance continue, les banques ont prêté de plus en plus. En principe, les prêts octroyés par les banques doivent l’être à concurrence de 80% du prix du bien gagé. Ce gage leur sert de couverture en cas de défaillance de l’emprunteur. Dans ce cas, elles ont consenti des prêts supérieurs à ce seuil de 80% suite à la hausse des prix de l’immobilier, convaincu que cette hausse allait perdurer, permettant d’abaisser le ratio entre le montant prêté et la valeur du gage et rétablir ainsi la qualité du gage. Les institutions financières n’ont pas tenu compte du fait que les prix ne pouvaient pas monter jusqu’au ciel et qu’il arriverait un moment où ils finiraient par baisser. Mais il n’y a pas eu d’amélioration du ratio de couverture des gages suite à la hausse des prix. Au contraire, une bulle immobilière s’est créée. Cette bulle a été alimentée par la forte croissance économique qui a poussé la demande à la hausse, par le faible niveau des taux d’intérêts réels ainsi que par les innovations financières qui ont permis d’allonger la durée des prêts. Nous avons aussi assisté à l’apparition d’une nouvelle classe d’emprunteurs qui, grâce à de nouvelles régulations, a désormais accès au marché du crédit. 1.1.4. Les innovations financières Les innovations financières ont conduit à une complexification des produits financiers, ce qui a rendu plus difficile la gestion des risques. Les départements internes de gestion des risques n’étaient plus en mesure de comprendre et de contrôler les risques encourus. Cet accroissement de la complexité a également facilité les dérives individuelles au sein de certaines institutions comme ce fut le cas à la société générale2. Ainsi, les institutions devaient faire appel à des agences de notations pour évaluer leurs produits mais ces agences n’ont pas été totalement impartiales parce qu’elles étaient rémunérés en fonction des produits qu’elles validaient. Elles avaient donc intérêt à valider le plus de produits possibles sans tenir compte du risque qu’ils présentaient. D’autre part, les relations commerciales entre les agences de notations et les entreprises ne se limitent pas à la 2 La banque française a subi des pertes considérables suite à des prises de position sur des contrats à terme. 5 simple notation, ce qui pousse les agences à faire preuve de clémence pour l’activité rating afin de ne pas dégrader les relations avec leurs partenaires3. Enfin, les performances élevées de ces nouveaux produits financiers ont incité les institutions financières à privilégier le profit à court terme. 1.1.5. Les incitations à la performance L’effet de levier est ici mis en cause. Cet effet de levier a permis de démultiplier le return des investissements fait par les institutions mais ce return impliquait une prise de risque. Si les institutions ont acceptés de prendre de tels risques avec des actifs dont ils n’étaient pas sur de la qualité, c’est parce qu’il y avait des incitations à la performance. Ainsi, les institutions étaient incitées à accroitre leur rentabilité à court terme. C’est cette recherche de rentabilité qui a poussé les banques à développer des produits financiers peu transparents sans se soucier de l’intérêt de leurs clients car les commissions touchés sur ces produits étaient élevés. 1.2. Responsabilité collective Après avoir abordé la responsabilité individuelle des institutions, l’auteur remet en cause leur responsabilité collective. Il pointe notamment l’interdépendance entre les institutions et leur difficulté à se coordonner. En ce qui concerne l’interdépendance des banques, celle-ci s’est amplifiée à cause du phénomène de titrisation4. Ainsi, pour tenter de réduire le risque auquel elles faisaient face, les banques ont réparti au maximum ce risque5. Mais la titrisation a conduit à une série de problèmes. Les crédits ont été subdivisés de telle sorte que le risque final a été disséminé entre plusieurs investisseurs. Il était ainsi devenu difficile de savoir qui détenait les actifs les plus risqués. De plus, étant donné cette dispersion du crédit, il est devenu difficile pour les institutions ayant émis des crédits risqués de contrôler la qualité de ces crédits. Ne sachant plus qui détenait quoi, un climat de méfiance s’est alors installé entre les institutions. Par précaution, chaque opérateur a alors supposé que les autres détenaient des actifs risqués. Ceci a eu pour conséquence une contraction du crédit sur le marché interbancaire. Les banques se prêtaient plus difficilement entre elles. De ce fait, même les institutions qui n’avaient pas investit dans des actifs potentiellement risqués se sont trouvées en difficulté. L’autre élément remis en cause pour la responsabilité collective des institutions est la difficulté de coordination entre les institutions financières. Une fois de plus, c’est la titrisation qui a rendu difficile cette coordination. Sans titrisation, lorsqu’un emprunteur se trouvait en situation de non remboursement, il pouvait s’arranger avec son créancier pour pouvoir rééchelonner sa dette. Mais la titrisation a augmenté l’anonymat des investisseurs et cette solution n’était plus possible. Le seul moyen pour le créancier de récupérer de l’argent en cas de défaillance de l’emprunteur est la saisie du bien et sa vente forcée. Mais cette situation crée une inefficience économique car une vente forcée entraine de nombreux couts. De plus, il est devenu difficile pour les institutions d’identifier les actifs dits toxiques ainsi que les institutions qui les détenaient. Il aurait été bénéfique pour tous que les institutions publient les actifs risqués qu’elles détenaient. Malheureusement aucune institution n’a voulu le faire. Ceci a eu pour conséquence une amplification de la méfiance entre les institutions. Dans ce cas, une approche coordonnée aurait limitée la propagation de la crise. Si les 3 Giot, P., Economie financière et gestion des risques, syllabus, 2009-2010. Mécanisme qui permet de transformer des créances en titre négociable. 5 En jargon financier on parle de granulation, on essaie de fragmenter autant que possible le risque. 4 6 institutions avaient su se coordonner entre elles pour arrêter à temps les dérives liées à la titrisation, les pertes liés à la crise auraient été moindres. 2. Responsabilité de « Monsieur tout-le-monde » Les institutions financières ne sont pas les seules à avoir joué un rôle dans le déclenchement de la crise que l’on connaît actuellement. Il faut aussi mettre en cause la responsabilité de monsieur tout le monde aussi bien des épargnants que des investisseurs. Ainsi, le reproche d’avoir investi dans des actifs qui offraient un rendement élevé sans chercher à connaître le risque réel que comportaient ces actifs, est fait aux investisseurs. Bien que les banquiers aient joué un rôle dans la décision des individus d’investir dans une classe d’actif risqué et qu’ils auraient dû mieux les informer sur cette dernière, les investisseurs ne peuvent pas être totalement déresponsabilisés. En effet, ils ont fait preuve d’une grande naïveté. Leur seule préoccupation a été de vouloir se faire de l’argent facilement grâce à des investissements qui offraient un return élevé. Maintenant que le risque a mal tourné, toute la faute ne peut pas être mise sur les banquiers. Les investisseurs ont acheté sans trop se poser de questions. On peut aussi engager la responsabilité des emprunteurs dans la crise. En effet, ceux qui, se sachant incapable d’honorer leurs dettes, ont quand même pris la décision de contracter ne peuvent être déresponsabilisé, pas plus que celui qui a contracté des emprunts trop risqués. B. Les effets de la crise Selon Etienne de Callataÿ, la crise va appauvrir la société dans son ensemble à travers trois effets. D’une part, il y aura une perte du patrimoine privé qui se traduira par une diminution de la valeur des entreprises par le biais d’une contraction de leurs bénéfices. D’autre part, nous assisterons à une contraction du patrimoine public par le biais du ralentissement économique qui réduit les recettes de l’Etat et augmente ses coûts. Enfin, il y aura un effondrement du capital social qui se traduit par un ébranlement de la confiance des acteurs économique. L’ampleur directe de la crise, c’est-à-dire son coût pour l’économie dans son ensemble est évalué par le FMI à environ 2200 milliards (USD). D’autres sources plus récentes nous apprennent qu’en octobre 2009, le coût de la crise pour l’économie mondiale serait de 3400 milliards (USD). Il n’est pas facile d’évaluer l’impact global de la crise sur l’économie. Les fluctuations dans les estimations sont dues « en grande partie à la hausse de la valeur des titres de placement»6 selon une expression du FMI. En effet, les cours boursiers ont considérablement augmenté depuis leurs chutes au début de la crise. Mais le FMI appelle à être prudent car l’instabilité des marchés est encore très importante. Le point suivant sera consacré à l’étude des effets de la crise sur le système financier, élément qui mérite de plus amples explications. Par la suite, nous étudierons les effets de la crise sur la croissance économique pour enfin montrer brièvement les effets de la crise sur l’inflation et le taux d’intérêt. 1. Effets de la crise sur le système financier 6 Le Figaro, FMI: la crise ne coûterait plus «que» 3.400 milliards, in Le Figaro.fr, [en ligne], http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2009/09/30/04016-20090930ARTFIG00461-cout-de-la-crise-en-baisse-pourle-fmi-.php, page consultée le 23 novembre 2009. 7 La crise va avoir un impact très fort sur le système financier, celui-ci ne ressemblera pas à ce que nous avons connu dans le passé. L’auteur identifie quatre changements importants qui vont bouleverser le paysage financier. Le premier est la modification du système financier. Le second est la régulation plus intense qui va se mettre en place dans le système. Le troisième se retrouve dans le mode de fonctionnement du système et le quatrième et dernier changement aura un impact sur la rentabilité du secteur. 1.1. Modification du paysage financier Cette expression fait référence aux multiples restructurations et fusions qu’il y a déjà eu dans le système. Prenons par exemple les USA. Lehman Brother est tombée en faillite, plus précisément en concordat judiciaire. En Belgique, Fortis Holding à du se séparer de ses activités d’assurance. Nous avons aussi assisté à une série de nationalisation d’organismes financiers, chose qui paraissait impensable à l’heure de la privatisation. Néanmoins, cette nationalisation laissera la place à une série de privatisation dans l’avenir7. 1.2. Régulation plus intensive du secteur financier Il est évident que le secteur financier à connu une dérégulation très forte, à cause des mécanismes de titrisation, des progrès de la mathématique financière etc. Cependant, les pays du G20 se sont mis d’accord pour une meilleure régulation du système, comme le dit Christian Noyer dans la revue de la stabilité financière en septembre 2009 : « Le principe général est de trouver un nouvel équilibre entre, d’une part, la discipline de marché, la concurrence, le dynamisme et l’innovation financière et, d’autre part, la nécessité de limiter les risques et leur répercussion au niveau mondial et d’éviter l’arbitrage réglementaire. »8 Etienne de Callataÿ ne plaide pas pour plus de régulation mais pour une meilleure régulation du système. La raison est que la régulation coûte cher et que les petites institutions n’ont pas les ressources nécessaires pour mettre en place une régulation importante. Dès lors, toujours selon l’auteur, cela va avoir des conséquences négatives sur la concurrence car nous allons assister à encore plus de concentration dans le système bancaire. 1.3. Changements dans le mode de fonctionnement des institutions L’auteur pointe ici l’importance de ce qu’ont appelle l’effet de levier. En réalisant cette opération, les grandes banques américaines et surtout européennes ont négligé le financement par capitaux propres. Cependant, il est évident qu’à la suite de la crise, il va être plus difficile pour le système financier de s’endetter. Premièrement, l’aversion au risque étant plus élevée, les banques vont avoir plus difficile à accéder au crédit. Deuxièmement, le secteur financier doit avoir compris que s’endetter de manière excessive crée un risque quand le système connait de grosses difficultés de façon brutale. Troisièmement, les entreprises endettées seront pénalisées au niveau boursier s’il apparaît que leur ratio d’endettement est trop élevé. Enfin, des règles seront prises au niveau des pouvoirs publics pour freiner le recourt à l’endettement. Tous ces éléments vont peser sur l’offre de crédit de la part des banques mais aussi sur la demande de crédit de la part des entreprises, qui seront plus frileuses à recourir à l’emprunt. De Callataÿ, E., Les confessions d’un économiste ordinaire, Zellik, Roularta Books, 2009, p.73. Noyer, C., Quelle régulation financière pour l’après-crise, in Revue de la stabilité financière, n°13, septembre 2009, p. 2. 7 8 8 1.4. Rentabilité du secteur financier La mathématique financière a permis aux organismes financiers de dégager une rentabilité sans précédent. Cependant, il est évident que la recherche du profit à court terme les a poussés à faire fit du danger que représentait ces profits « faciles ». La chute n’en sera que plus douloureuse car beaucoup d’éléments vont peser sur la rentabilité des organismes financiers et pas seulement sur le court terme. L’auteur en dégage toute une série. C’est le bénéfice par action des entreprises, reflet de sa rentabilité, qui va connaître un déclin. A titre d’exemple on peut mentionner l’accroissement des coûts de régulation ou la hausse des coûts de financement. 2. Effets de la crise sur la croissance économique Au niveau macroéconomique, la crise va peser sur les principaux indicateurs du PIB, symbole de la croissance. L’auteur pointe deux grandeurs sur lesquelles la crise aura un impact négatif, l’investissement et la consommation. Cependant, il ne faut pas oublier que bien d’autres valeurs macroéconomiques telles que les importations, les exportations, la consommation publique etc. ont elles aussi connu de fortes baisses depuis l’éclatement de la crise. Avant de détailler les dires d’Etienne de Callataÿ, donnons quelques chiffres pour la Belgique 9. Le PIB à décru d’environ 1,7% au quatrième trimestre 2008 et au premier trimestre 2009. Les exportations ont enregistré une baisse importante en Belgique, -15% en base annuelle pour 2009 (même si la situation s’est améliorée au 2ème trimestre). Les importations ont connus le même recul avec une contraction d’environ 14% sur base annuelle en 2009, dû à une diminution du revenu disponible des ménages. Tous ces chiffres nous informent sur la gravité qu’a eue la crise financière sur l’équilibre macroéconomique de notre pays. Examinons maintenant plus en détail ce que nous dit Etienne de Callataÿ à propos des conséquences de la crise sur l’investissement et la consommation. 2.1. Effets sur l’investissement Examinons l’effet de la crise sur l’investissement des entreprises. Comme nous l’avons mentionné plus haut, les entreprises sont moins actives sur le marché du crédit parce qu’elles veulent moins s’endetter mais également parce que les intermédiaires financiers sont plus réticent à leur prêter des fonds, parce qu’ils connaissent des coûts de financement plus importants. Ce faisant, la formation brute de capital de la part des entreprises est en nette diminution. Mais qu’en est-il du financement par fonds propres, notamment par l’émission d’action ? Là aussi, les perspectives sont plutôt sombres car la situation boursière n’est pas très attractive en ce qui concerne l’émission de nouveaux titres. Nous l’avons vu, les entreprises ont des difficultés à se financer pour réaliser des projets d’investissements. Cependant, l’envie d’investir n’est pas toujours présente. Les entreprises sont réticentes face à l’incertitude qui prévaut sur la situation économique future. En fait, il est 9 Bureau Fédéral du Plan, La croissance économique atteindrait 0,4 % en 2010 et 1,9 % en 2011 après une décroissance de 3,1 % cette année, in Bureau Fédéral du Plan, [en ligne], http://www.plan.be/press/press_det.php?lang=fr&TM=34&IS=67&KeyPub=845, page consultée le 24 novembre 2009. 9 important actuellement pour les entreprises de conserver un maximum de liquidité vu que l’avenir est incertain. Pour donner quelques chiffres, l’investissement a diminué de 5.09% en 2009 en Belgique. 2.2.Effets sur la consommation La consommation des ménages fonction croissante de leurs revenus disponibles et fonction décroissante de leur taux d’épargne. Or, ces deux éléments vont être influencés par la crise financière. D’une part, le revenu disponible va chuter à cause notamment d’une croissance lente des salaires et d’une contraction des revenus non salariaux. D’autre part le taux d’épargne des ménages va augmenter et cela parce que leurs emprunts vont se réduire et également parce que le taux d’épargne était resté trop faible ces dernières années. 3. Effets de la crise sur l’inflation et les taux d’intérêt C’est durant l’été 2008, à cause de la flambée des prix du pétrole, que l’inflation s’est considérablement accélérée dans la zone euro. Néanmoins, il semble que la situation inverse est entrain de se produire et l’on va assister à une diminution sensible de l’inflation avec des taux nuls voir négatif durant le futur proche. Cela à cause de plusieurs éléments tels que la chute des cours des matières premières, une diminution de la demande, des salaires bas etc. En ce qui concerne les taux d’intérêts, ceux-ci sont et resteront très bas durant les années à venir. Il est intéressant de d’examiner les réponses différentes de la FED et de la BCE en ce qui concerne leur politique de taux. Selon Pascal Salin10, la politique de la FED visant à abaisser les taux de manière rapide n’est pas une bonne solution car la crise actuelle a été déclenchée parce que les taux d’intérêts sont restés très bas pendant une longue période. Ce qui a permis à la bulle immobilière de se former11. 10 Pascal Salin est professeur émérite à l'Université Paris-Dauphine et membre du Conseil académique de L’Institut Constant de Rebecque. 11 Salin, P., La crise financière, causes, conséquences et solutions, in L’institut Constant de Rebecque, [en ligne], http://www.institutconstant.ch/paper.php?id=60, page consultée le 24 novembre 2009. 10 Partie II : Solutions à la crise et vision critique A. Plan de sauvetage européen et américain Une des premières mesures que les Etats ont prise pour contrer la crise a été de venir au secours des banques en difficultés par l’injection massive de moyen financiers dans ces institutions. En Belgique, aucunes grandes banques n’y a échappé : Fortis, Dexia, KBC et Ethias ont été sauvées par les pouvoirs publics. Pour donner quelques chiffres, l’Etat belge a investi plus de 19.9 milliards d’euros dans le système financier belge. Et on peut dire que, sans cette aide, la crise aurait encore été plus importante. Il faut aussi souligner que, malgré les coûts énormes que ces aides ont représentés, l’opération sera neutre voir bénéfique pour les pouvoirs publics et cela pour trois raisons principales12. Premièrement, l’argent que l’Etat a investi dans les banques va donner lieu à la perception de dividendes. De plus, l’Etat pourra ensuite revendre ses actions et en tirer une plus-value intéressante. Il ne s’agit donc pas d’un investissement à fonds perdus. De plus, l’Etat recevra un intérêt sur les fonds qu’il a prêté. Ensuite, l’aide que l’Etat à apporté aux banques est une aide exceptionnelle, alors que d’autres dépenses budgétaires sont plus récurrentes13. Enfin, les banques sont, en quelque sorte, le « ciment » de l’économie en tant qu’organisme de crédit et laisser tomber les banques en faillite aurait été une erreur (cf. supra). Mais ces aides n’étaient en définitive qu’un « pansement » et il fallait également mettre en œuvre des solutions à plus long terme. Ces solutions sont présentent dans les plans de relance mis en place au niveau européen et américain. Ces mesures à plus long terme étaient basées – comme les mesures à court terme – sur la théorie de John Maynard Keynes. Cette théorie nous apprend que l’intervention publique est essentielle dans une stratégie de sortie de crise. Pour Keynes, il faut soutenir la demande et non l’offre pour permettre à l’économie de redémarrer. L’Union Européenne et le gouvernement des Etats-Unis ont appliqué les principes de cet économiste mais, nous le verrons, avec des différences. Commençons par détailler le plan de relance européen. Par la suite, nous étudierons celui des USA pour enfin présenter les différences les plus essentielles. Tous les éléments présents dans cette section proviennent du Bureau du Plan, plus précisément d’un rapport publié en avril 200914. 1. European Economic Recovery Plan C’est en novembre 2008 que la Commission Européenne a révélé son plan de relance de l’économie européenne. Il n’est pas facile de mettre en œuvre un plan de relance au niveau européen et cela pour deux raisons. Tout d’abord, les pays membres de l’Union Européenne n’ont pas tous réagi de la même manière face à la crise. Dès lors, les remèdes qu’il faut leur 12 13 De Callataÿ, E., Les confessions d’un économiste ordinaire, Zellik, Roularta Books, 2009, p. 69. Ibidem. 14 Van Brusselen, P., Fiscal Stabilisation Plans and the Outlook for the World Economy. Do countercyclical fiscal measures offer any hope of recovery for the world economy? An evaluation of fiscal policy effectiveness in the face of a global recession, Bruxelles, Bureau Fédéral du plan, [en ligne], http://www.plan.be/admin/uploaded/200906111040040.nime_01_09.pdf, avril 2009, pp. 20-33. 11 apporter varient d’un pays à l’autre. Ensuite, le passage à la monnaie unique à obliger les pays européens à se plier à des règles budgétaires très strictes, notamment en matière de déficit budgétaire et de dette publique. Or, pour combattre la crise, il a fallut sursoir à ces règles pendant un laps de temps limité. Ainsi, quatre types de mesures ont été proposés par la Commission Européenne pour limiter l’impact de la crise sur l’économie européenne15. En premier lieu, une augmentation des dépenses publiques en biens et services. Deuxièmement, un accroissement des subsides en faveur des investissements réalisés par les entreprises. Troisièmement, une réduction des contributions versées par les entreprises aux caisses de sécurités sociales nationales. Enfin, une réduction des taxes indirectes, comme la TVA. Toutes ces mesures ont pour but de redynamiser l’économie européenne. Concrètement, tout d’abord, cela se fit par le biais d’un soutient à la consommation privée et publique en ce qui concerne l’augmentation des dépenses publiques et la réduction de certaines taxes (ce qui en terme macroéconomique revient à augmenter G et C), ensuite en poussant l’investissement des entreprises à la hausse (c'est-à-dire augmenter I). Enfin, une intervention sur le marché du travail incite les entreprises à embaucher plus lorsqu’il y a une réduction des contributions aux caisses de sécurité sociale. De manière générale, les quatre pistes énumérées ci-dessous ont un triple impact sur l’économie européenne. En premier lieu, elles influencent le PIB réel. Ensuite, elles agissent sur la consommation privée. Enfin, elles ont un impact sur le taux d’inflation. Examinons plus en détail l’impact des quatre politiques par le biais de chiffres donnés par le rapport du Bureau du Plan. Le tableau ci-dessous résume les conséquences présentes et futures des politiques mises en place sur certains indicateurs économiques. Il est à noter que ces chiffres représentent une moyenne au niveau européen. Comme nous l’avons mentionné ci-dessus, les économies des pays réagissent différemment aux solutions mises en place. Examinons plus en détail les chiffres. Pour les 12 pays de la zone euro, les mesures fiscales directes, c’est-à-dire les réductions d’impôts et de taxes ainsi que l’augmentation des dépenses publiques, représentent un montant total de 73 milliards d’euro. Les mesures indirectes, comme les garanties de crédits et de prêts, se chiffrent à environ 169 milliards d’euro. Cela représente un montant total de 271 milliards d’euro pour la zone euro, ce qui correspond à 3% du PIB nominal de la zone. Nous observons que grâce aux mesures présentées plus haut, le PIB réel de la zone euro s’est accru de 0.77% en 2009 et augmentera de 0.62% en 2010. La consommation privée s’amplifiera de 0.23% et de 0.18% en 2010. Nous assisterons de plus à la création de 200.000 emplois en 2009 et de 163.000 en 2010. Cependant ces mesures ont un impact plutôt négatif sur les finances publiques en augmentant le déficit public et la dette publique. En effet, la plupart de ces mesures sont financées par l’emprunt. A noter que les effets de ce plan déclinent progressivement dans les années suivantes (estimation)16. 2. The American Recovery and Reinvestment Act of 2009 Le président Obama et le Congrès américain ont compris très tôt qu’il était indispensable de mettre sur pied un plan d’action pour contrer la crise commencée en décembre 2007. En février 2009, le congrès américain a donné son accord pour la mise en place de l’ARRA (American Recovery and Reinvestment Act). Ce plan recommande une augmentation des 15 Van Brusselen, P., Fiscal Stabilisation Plans and the Outlook for the World Economy. Do countercyclical fiscal measures offer any hope of recovery for the world economy? An evaluation of fiscal policy effectiveness in the face of a global recession, Bruxelles, Bureau Fédéral du plan, [en ligne], http://www.plan.be/admin/uploaded/200906111040040.nime_01_09.pdf, avril 2009, p.20. 16 Ibidem, p. 28. 12 dépenses publiques ainsi que des réductions de taxes directes et indirectes. Au total, ce plan recommande l’injection d’ 787 milliards (USD) dans l’économie américaine, cet argent provenant des pouvoirs publics. Cela représente 5.52% du PIB américain en 2008. Ce qui est assez considérable. Les buts principaux de ce plan sont similaires à ceux du plan européens. Il s’agit tout d’abord de stimuler la consommation privée en ce qui concerne les réductions d’impôts et l’augmentation des dépenses publique. Ce plan à aussi comme but d’augmenter la demande de travail de la part des entreprises pour réduire le taux de chômage. Ce plan va être mis en place durant une période de 10 ans. Néanmoins, la majorité des fonds seront utilisés entre 2009 et 2011. Analysons l’effet de ce plan sur le PIB réel américain 17. Celui-ci va augmenter de 1.16% en 2009 et de 2.25% en 2010. La consommation privée va s’accroitre de 0.68% en 2009 et de 1.51% en 2010. L’emploi va progresser de 0.30% en 2009, ce qui représente environ 454.000 personnes. L’effet est encore plus fort en 2010 avec une hausse de l’emploi de 0.54% soit 809.000 personnes. Ce plan à cependant un effet négatif sur les finances publique, comme le plan européen, car on voit la dette publique s’accroitre. 3. Similitudes et différences entre les deux plans Les deux plans d’actions sont similaires car ils utilisent tous les deux la théorie de Keynes qui appelle à une augmentation des dépenses publiques pour sortir de la crise. Dans les deux plans, on assiste à une augmentation des dépenses publiques mais dans des proportions sensiblement différentes. En effet, il apparaît clairement que les Etats-Unis ont débloqué beaucoup plus de moyens. Paul Krugman a d’ailleurs appelé à développer plus de moyens pour sortir de la crise, étant en faveur d’un nouveau « New Deal ». Pour lui, le fait que les Etats-Unis voie sa dette publique augmenter de façon spectaculaire est un mal nécessaire pour sortir de la récession. La dette publique des USA a atteint au deuxième trimestre 2009 84% du PIB18. Cette dette publique est financée de trois manières19 : grâce à des TIPS (titres garantis contre l’inflation), des titres non-négociables à maturités variables et via l’émission de titres émis sur le marché (Bonds, Bills, Notes). Ces sont les éléments de la troisième catégorie qui financent en majorité la dette des Etats-Unis, les deux autres catégories étant en stagnation. En Europe, nous sommes beaucoup plus prudents car nous sommes dépendant des règles européennes en matière de dette publique (cf. Supra). Cependant, même en Europe, la dette publique ne cesse de s’accroitre. Prenons le cas de la Belgique. La dette publique représentait environ 90% du PIB en décembre 2007 et des analyses prévoient une augmentation de cette dette qui pourrait atteindre 97% du PIB en 2009 et 102% en 201020. Cet accroissement de la dette aura pour conséquences des politiques budgétaires plus restrictives lorsque la croissance sera revenue. 17 Van Brusselen, P., Fiscal Stabilisation Plans and the Outlook for the World Economy. Do counter-cyclical fiscal measures offer any hope of recovery for the world economy? An evaluation of fiscal policy effectiveness in the face of a global recession, Bruxelles, Bureau Fédéral du plan, [en ligne], http://www.plan.be/admin/uploaded/200906111040040.nime_01_09.pdf, avril 2009, p.31. 18 Economie et crise au USA, in blog Le Monde, [en ligne], http://criseusa.blog.lemonde.fr/category/dettepublique/, page consultée le 24 novembre 2009. 19 Ibidem. 20 Trends Tendance, La dette publique belge à 102% du PIB en 2010, in Trends Tendance, [en ligne], http://trends.rnews.be/fr/economie/politique-economique/12-1635-48609/la-dette-publique-belge-a-102---dupib-en-2010.html#, page consultée le 24 novembre 2009. 13 B. Crise de 1929 vs crise 2007 Beaucoup d’analystes sont tentés d’établir des parallélismes entre la crise de 1929 et la crise de 2007. Même si certains rapprochements peuvent être faits, il semble que la crise actuelle soit sensiblement différente, que ce soit concernant les causes mais aussi sur les conséquences potentielles. Etienne de Callataÿ ne fait pas de rapprochement entre les deux évènements principalement pour deux raisons que nous allons détailler. Premièrement, le contexte économique étaient sensiblement différent en 1929 par rapport à aujourd’hui. Deuxièmement, les solutions apportées à la crise de 1929 ont également été distinctes de celles apportées en 2007. Avant de détailler ces divergences, examinons les ressemblances. 1. Ressemblances Selon Bernard Marrois21, les similitudes sont au nombre de deux. Premièrement, les deux crises ont démarré dans l’économie américaine avant de se propager à l’Europe et enfin frapper les pays émergents22. Cette contagion a été plus rapide en 2009 du fait de la globalisation des économies au niveau mondial. Deuxièmement, dans les deux cas, la crise a touché l’économie réelle via deux canaux : la raréfaction du crédit et la chute du pouvoir d’achat (à cause de l’effet revenu négatif). Cependant, l’effet sur l’économie réelle a été beaucoup plus dramatique en 1929 avec un accroissement spectaculaire du taux de chômage qui est passé de 6 à 25% entre 1929 et 1933 et une chute de la production industrielle de 50%23. En 2009, les conséquences ont été certes sérieuses mais dans des proportions sensiblement inférieures (cf. supra). 2. Divergences Comme mentionné plus haut, il y a deux types de divergence : une divergence de contexte et une divergence de solutions. Nous nous focaliserons principalement sur l’examen des solutions. En ce qui concerne le contexte on peut dire que l’absence d’organisme de régulations - qui ne seront mis en place qu’à partir des années 30 -, l’absence d’organismes financiers internationaux comme le FMI ou la Banque Mondiale et l’exubérance des capitalisations boursières en 1929 ont favorisés la crise à cette époque. En 2009, le système financier est beaucoup plus régulé et la coopération internationale s’est considérablement améliorée, ce qui a permis de combattre plus efficacement la crise. Examinons maintenant plus en détail les différences en 1929 et 2009 concernant les solutions apportées à la crise. Premièrement, soulignons les réactions de la FED. En 1929, celle-ci va réduire les taux d’intérêt mais ne va pas injecter de liquidité dans l’économie. Dès lors les banques n’ont pas su faire face aux retraits massifs et vont progressivement tomber en faillite24. De plus, elle a relevé ses taux trop tôt en 1929. La situation a été très différente en 2008-2009. Quand la FED 21 Bernard MAROIS, diplômé d'HEC, titulaire dit MBA de la Columbia University de New York et docteur d'État en sciences de gestion, est professeur de finance au Groupe HEC. Il est par ailleurs Président du Club Finance Internationale. Il a publié de nombreux ouvrages et articles dans des revues spécialisées. 22 Marrois, B., 1929, 2008 : ressemblances et différence, in CFO-News, [en ligne], http://www.cfonews.com/1929,-2008-ressemblances-et-differences_a7011.html, page consultée le 25 novembre 2009. 23 De Callataÿ, E., Les confessions d’un économiste ordinaire, Zellik, Roularta Books, 2009, p. 86. 24 Raynier, B., 1929/2007 : Même crise, in FOREX.fr, [en ligne], http://www.forex.fr/index.php?option=com_content&task=view&id=312&Itemid=50, page consultée le 25 novembre 2009. 14 a abaissé ses taux, nous avons assisté à « un assouplissement monétaire spectaculaire »25. Deuxièmement, l’attitude des autorités à également changé. En 1929, l’ultralibéralisme prévalait. Dès lors, l’Etat américain à laissé bon nombre d’institutions boursières tomber en faillite. Ce qui n’a pas été le cas en 2008-2009, si on excepte Lehman Brothers. De plus, alors qu’il a fallu quatre ans pour que le gouvernement américain intervienne (New Deal du président Roosevelt), le gouvernement américain et les gouvernements des pays européens ont régit très rapidement en 2007 et ont dès le début mis en pratique les enneigements de Keynes. Enfin, en 1929, nous avons assisté à « un nouveau repli protectionniste »26 à cause de l’adoption du Smoot-Hawley Act de 1930. En 2009, les risques d’un tel repli sont quasiment inexistants. C. Problématique de l’aléa moral dans l’attitude des autorités 1. Aléa moral de la part des institutions financières Les institutions financières jouent un rôle crucial au sein de l’économie, à tel point que leur faillite créerait des problèmes majeurs avec des réactions en chaîne (crise systémique). C’est pourquoi il était primordial que les états interviennent pour sauver celles en difficultés durant la crise. Cela étant dit, ces institutions bénéficient d’un filet de sécurité et sont incitées à prendre davantage de risques dans la mesure où un bon déroulement des opérations augmenterait significativement leurs bénéfices alors qu’une aide leur serait apportée dans le cas où cela se passerait mal. Aux USA, cet aléa moral a été accentué par le fait que la Fed est toujours venue en aide au secteur financier lorsque le besoin s’en est fait ressentir en baissant ses taux, notamment après le krach de 1987, l’éclatement de la bulle Internet ou les attentats du 11 septembre 2001 pour ne citer qu’eux. Certes, le problème ne venait pas toujours directement du secteur financier mais le discours de la Fed, présidée par Alan Greenspan, a toujours été clair, assurant une intervention rapide et efficace dans ce secteur. Il est ainsi bon de rappeler qu’une banque centrale ne doit pas chercher à surprendre ni à nuire aux institutions financières mais elle ne doit certainement pas non plus être perçue comme l’amie de ces institutions pour éviter tout aléa moral. Malgré le non-sauvetage de Lehman Brothers, les actions des différents gouvernements ont encore renforcé ce problème d’aléa moral. Nous allons maintenant nous efforcer de détailler les différents types d’aléa moral. 1.1. Aléa moral dû à l'injection de liquidité Suite à la crise financière, les banques centrales ont injecté massivement des liquidités dans le système financier. Elles ont aussi accordé des prêts aux différentes banques en admettant des garanties plus risquées. Enfin, elles ont également permis à des institutions para bancaires de profiter des facilités de prêts qu’elles offrent en les requalifiant de banques. A ce niveau, le problème d’aléa moral est au centre des débats. En effet, on peut évidemment se demander si les banques centrales n’ont pas donné un mauvais signal en se jetant ainsi au secours des institutions financières au bord du gouffre, situation provoquée par leur mauvaise gestion. A cette interrogation, Walter Bagehot27 répond qu’il est crucial que les banques De Callataÿ, E., Les confessions d’un économiste ordinaire, Zellik, Roularta Books, 2009, p. 86. De Callataÿ, E., Les confessions d’un économiste ordinaire, Zellik, Roularta Books, 2009, p. 86. 27 Bagehot, W., in Finance-Banque, [en ligne], http://www.finance-banque.com/banque-n-f-it-banca-tablede.html, page consultée le 03 décembre 2009. 25 26 15 centrales solutionnent le problème d’illiquidité en prêtant uniquement aux institutions solvables, tout en veillant à ce que les taux soient assez pénalisants pour contrer le problème d’aléa moral. Mais il est souvent difficile de différencier illiquidité et insolvabilité et on ne peut nier que, même à taux pénalisants, un sauvetage a toujours tendance à créer de l’aléa moral. 1.2. Aléa moral dû aux garanties publiques Afin de rétablir la confiance, les pouvoirs publics ont relevé à 100.000 euro la garantie offerte aux épargnants sur les dépôts. Cette mesure, à la base transitoire, est sans doute vouée à perdurer, comme le prouve les exemples de l’histoire. A propos de cette garantie, il est important de signaler qu’elle est fournie par deux fonds, le Fonds de Protection des Dépôts et des Instruments Financiers et la Caisse des Dépôts et Consignations, chacun responsable pour une garantie de 50.000 euro. Il faut insister sur le fait que le premier, financé en partie par le secteur, n’a pas vu son financement grimpé suite au relèvement de la garantie et que le second est assimilé à une recette de l’Etat. Ainsi, en cas de nouvelle crise, les banques ne devront pas fournir plus que ce qu’elles ont du fournir lors de la crise actuelle, ce qui renforce encore davantage l’aléa moral. Par ailleurs, les pouvoirs publics ont accordés la garantie de l’Etat aux emprunts des institutions financières, moyennant une rémunération. La rémunération adossée à cette mesure permet, au contraire des autres mesures, d’éviter le problème d’aléa moral en ce qu’elle récompense celles qui n’ont pas besoin d’y faire appel et qu’elle dissuade les institutions de prendre trop de risque, auquel cas elles risquent de perdre beaucoup d’argent. 1.3. Aléa moral dû à la recapitalisation des institutions financières Concernant la recapitalisation, il est important de parler du dilemme du coût de l’aide. En effet, une aide trop bon marché nous ramène de nouveau au problème d’aléa moral alors qu’une aide trop onéreuse entraînerait une hausse du crédit octroyé à la clientèle par les banques. Dans le cas où on recapitalisation n’est pas possible, la nationalisation s’impose presque de facto. Signalons qu’une nationalisation doit normalement aller de paire avec la création de bad banks pour solutionner le problème d’aléa moral et pour compenser les efforts budgétaires consentis avec l’argent du contribuable. Les bad banks sont des entités indépendantes créées pour isoler des mauvaises créances et permettre aux institutions financières en difficultés de poursuivre leurs activités sans restreindre le crédit Il faut aussi comprendre que cela part du principe que la dépréciation de ces mauvaises créances sont temporaires. En effet, dans le cas qui nous occupe, à cause de l’asymétrie d’information et du manque d’information tout court sur les produits dérivés, personne ne savait quel produit était associé à tel actif potentiellement toxique. Ainsi, la valorisation de ces produits était nettement inférieure à ce qu’ils valent réellement. La création de bad banks permet donc de solutionner ce problème temporaire. Et le seul agent capable de prendre le risque d’acquérir un grand nombre de ces produits afin de diversifier le risque est l’Etat. L’idée est de rétablir la confiance en les banques qui auraient refilés leurs actifs toxiques aux bad banks créées par les autorités. Ces dernières ont le temps et 16 l’envergure d’attendre que le prix de ces produits redevienne cohérent avec son prix intrinsèque. Cela étant dit, le système des bad banks n’est pas sans inconvénient. Tout d’abord, il est très difficile de déterminer un prix juste pour ses actifs. L’idéal serait une reprise à un prix supérieur au cours mais là encore se pose le problème d’aléa moral et de non sanction des fautifs, en plus du problème d’entrave à la concurrence. Enfin, l’Etat ne peut pas non plus altérer sa solvabilité en rachetant toute une série de créance douteuse. Ces problèmes d’actifs toxiques disparaissent lorsque les institutions sont nationalisées. Mais des exemples de nationalisations massives en Allemagne ou en France nous montrent que ce n'est pas du tout la solution idéale dans la mesure où les institutions publiques sont rigides et inefficientes et que les prises de risque sont souvent minimes. Or il faut savoir prendre des risques pour saisir les opportunités. 1.4. Solutionner le problème d’aléa moral Il existe évidemment des mesures additionnelles qui permettent de réduire voire de solutionner ce problème d’aléa moral. Deux mesures peuvent être envisageables. D’une part, on pourrait adapter le contrôle prudentiel en fonction de la taille du bilan des banques pour tenir compte du risque systémique. Ainsi, l’exigence de fonds propres serait plus que proportionnelle à l’augmentation du bilan d’une banque. Mais bien que le risque systémique soit à prendre en compte de manière rigoureuse, cela ne réglerait nullement le problème d’aléa moral des plus petites banques. En outre, des économies d’échelle et des synergies seraient alors perdues. D’autre part, on pourrait instaurer le paiement d’une prime d’assurance. Encore faut-il que cette prime soit assez contraignante pour décourager une prise de risque excessive. Par ailleurs, il faut également signaler que l’octroi d’une garantie aux institutions financières doit faire l’objet d’une contrepartie afin de préserver les intérêts du contribuable et surtout de ne pas créer une distorsion de concurrence en donnant des avantages à certaines sans récompenser les bonnes. Dans ce dernier cas, nous pourrions dès lors voir s’appliquer la loi de Gresham qui ferait que les mauvaises banques chasseraient les bonnes. 2. Aléa moral de la part des épargnants Le problème de l’aléa moral se pose aussi du côté des épargnants. En effet, suite au sauvetage des banques et au relèvement du plafond de l’assurance dépôt, une certaine confiance est revenue du côté des ménages. Mais ce regain de confiance renforce le problème d’aléa moral dans la mesure où le petit épargnant sera encore moins incité à sélectionner une banque en retenant un autre critère que le seul rendement proposé. En effet, étant donné que l'Etat lui garantit ses dépôts et qu'il sait dorénavant que l'Etat ne laissera jamais tomber le système bancaire, il sait qu'il ne court aucun risque et qu'il peut aveuglément placer ses avoirs dans la banque de son choix, idéalement celle proposant le rendement le plus élevé. Ceci nous amène à un second problème d'aléa moral. En effet, le relèvement de la garantie incite l'épargnant à placer ses avoirs dans la banque qui offre le plus grand rendement étant donné qu’il récupérera de toute façon son argent. Cela dit, en faisant abstraction de la garantie fournie par l'Etat, l'épargnant lambda n'a pas forcément la capacité de comprendre qu'un rendement plus élevé entraîne de facto un plus grand risque, même si cela nous semble évident. De plus, ce même épargnant lambda n'est 17 certainement pas à même de mesure la solvabilité d'une institution financière. Même les professionnels n'ont pas su le faire correctement lors de la dernière crise. A ce propos, il faut se demander si le service du banquier peut s’identifier à celui d’un médecin. Dans ce cas, le problème de sélection de la banque qui propose le plus grand rendement ne se poserait pas dans la mesure où le banquier, à l'instar du médecin, renseignerait l'épargnant sur les risques (même minimes) qu'il court en plaçant son argent dans une banque proposant un taux plus élevé. En connaissance de cause, l'épargnant pourrait alors juger si le risque qu'il prend est suffisamment couvert par le différentiel de taux. Le banquier le renseignerait aussi sur le produit ou le service qui lui convient le mieux ou, à défaut, l'orienterait vers une autre banque plus en rapport avec son profil. Cette hypothèse est bien évidemment illusoire mais la question mérite d'être traitée dans la mesure où Monsieur Tout le monde n'a pas les capacités d'analyse d'un professionnel. Pour régler ce problème, il est indispensable que les taux d’intérêts soient contrôlés pour éviter que l’institution en difficulté n’attire pas des fonds qui risquent de disparaître. Il faut aussi éviter qu’une augmentation des taux de la banque A n’induise un relèvement général des taux de la concurrence pour ne pas que les coûts de financements n’augmentent et ne plongent les institutions dans des problèmes. Ainsi, il faudrait limiter la garantie aux dépôts qui offre un taux d’intérêt en ligne avec les taux du marché ou imposer un taux maximum, quitte à pénaliser les déposants. Cela a été pratiqué aux USA en 1930 et cela se pratique en Belgique pour les carnets d’épargne. En effet, une défiscalisation de ces carnets est conditionnée au respect d’un plafond en matière de taux. D. Autres pistes de sortie de crise 1. Théorie keynésienne VS théorie classique Pour sortir de la crise, deux grandes écoles de pensées économiques s’opposent aujourd’hui. D’un coté, on retrouve la pensée keynésienne, menée par Paul Krugman, de l’université de Princeton. De l’autre côté, on retrouve John Cochrane, économiste classique de l’université de Chicago. Tout d’abord, les keynésiens, soutiennent que, pour stimuler l’économie en période de crise, la meilleure solution est une intervention de l’état. Il faut stimuler la demande pour relancer l’économie. Etant donné qu’il existe une relation entre le revenu et la consommation, pour inciter les ménager à consommer, il faut augmenter leur revenu, notamment via une réduction de l’impôt. Pour sa part, l’école classique défend plutôt l’idée qu’une intervention étatique est toujours pire, quelque soit le comportement des marchés des actifs. Pour justifier une non-intervention du gouvernement, les classiques invoquent la théorie de l’équivalence ricardienne. Selon cette théorie, une augmentation de la dette publique actuelle pour relancer l’économie se traduira dans le futur par une augmentation de l’impôt. Si les agents sont rationnels, une diminution des impôts ne les poussera pas à consommer aujourd’hui mais plutôt à économiser en prévision de la hausse future des impôts. Mais, selon les keynésiens, l’équivalence ricardienne n’est valable que si l’économie est en situation de plein-emploi, ce qui n’est pas le cas de l’économie américaine. 18 Pour les économistes de l’école de Chicago, le seul moyen de stimuler l’économie après une crise est de faire tourner la planche à billets. En augmentant ainsi la masse monétaire en circulation (augmentation de l’offre de monnaie), on obtiendra une baisse du taux d’intérêt. Et c’est cette baisse du taux d’intérêt qui permettra un rebond économique en stimulant l’investissement et en décourageant l’épargne des ménages. En réponse à cette solution, les keynésiens soutiennent qu’un abaissement des taux d’intérêts pousserait les investisseurs à conserver leurs liquidités car en situation de récession, d’une part, les entreprises n’anticipent pas de bonnes ventes et, d’autres part, il est plus difficile d’obtenir des prêts bancaires. Un abaissement des taux ne permettrait donc pas de relancer l’économie. Pour sortir de la crise actuelle, c’est plutôt la théorie de Keynes qui a été mise en place. En effet, comme mentionné précédemment, aussi bien en Europe qu’aux Etats-Unis, l’Etat a injecté des liquidités pour relancer l’économie. 2. Pensée d’Attali et microfinance. Dans cette section, nous allons aborder une solution proposée par Jacques Attali pour sortir de la crise. Plutôt que de faire appel aux théories économiques et aux mécanismes macroéconomiques existants, Jacques Attali28 propose une toute autre alternative. Selon lui, la microfinance constitue la meilleure solution pour sortir de la crise actuelle, bien qu’elle ne représente qu’une faible proportion des échanges dans le système bancaire mondial. Le système financier actuel doit être repensé. Jusqu’à présent, le principal souci des institutions financières a été de faire du profit à n’importe quel prix. Comme nous l’avons déjà évoqué, des crédits ont été octroyés à des agents sans que ces institutions s’inquiètent de la solvabilité de leurs débiteurs. Les banques ont fait primer leur intérêt sur l’intérêt de leurs clients. Attali remet en cause les principes qui régissent la finance actuelle. Il propose donc une solution basée sur des principes exactement inverses à ceux pratiqués par les banquiers. Ainsi, la microfinance répond à toutes les critiques faites au système actuel. « C’est une finance éthique, responsable, au service de l’entreprise et fondée sur la connaissance intime du client ». Détaillons à présent les principes qui régissent la microfinance et dont devrait s’inspirer la finance actuelle. Tout d’abord, les crédits octroyés par les organismes de microcrédit ont pour objectif d’aider les clients à générer des revenus. Ces crédits les aident à développer une affaire, un commerce qui va leur rapporter des revenus et non les endetter. Ces crédits ne sont pas accorder pour faire de la spéculation comme c’est parfois le cas dans le système bancaire que nous connaissons. Si ce principe avait été appliqué, certains types de crédits tels que les subprimes n’auraient jamais existé. Ensuite, dans le microcrédit, le mode d’octroi des crédits est important. Les agents de la microfinance connaissent bien leurs clients, leurs besoins et leur capacité à rembourser leurs emprunts. De plus, le risque n’est pas perçu de la même manière par les organismes de microcrédit et les banques. Les institutions de microfinance gardent dans leur bilan les crédits qu’elles accordent et en supportent donc le risque tandis que les banques ont de plus en plus recourt à une méthode qui consiste à transférer de plus en plus de crédits hors de leurs bilans. Attali, J., La microfinance comme solution à la crise financière, in L’Echo, [en ligne], http://blogs.lecho.be/fairstreet/2009/08/jacques-attali-la-microfinance-comme-solution-%C3%A0-la-crisefinanci%C3%A8re.html, page consultée le 01 décembre 2009. 28 19 Enfin, « la microfinance est au service des entreprises et non d’elle-même. Elle considère que sa finalité est d’aider les clients à faire des profits et non d’en faire elle-même ». Ce n’est pas le cas des institutions financières. Comme nous l’avons dit précédemment, l’objectif des banques a été de maximiser leurs profits à court terme. En conclusion, selon Attali, une reforme du système financier actuel passe par la mise en application des principes qui régissent la microfinance. « Il est essentiel de faire de la finance une industrie au service des autres et non d’elle-même ». Pour la presentation de vendredi, voici quelques suggestions - Developpez surtout le thème de l'alea moral, un des themes recurrents de l'analyse de ce livre, - Dans l'analyse des causes, examinez eventuellement la difference entre les causes individuelles et les causes "collectives" : Les bulles sont un phenomene collectif (M Tout-lemonde et le systeme bancaire y ont contribue). Il y a-t-il moyen de les eviter (en reduisant l'alea moral systemique? ou en jouant sur d'autres incitants?) ou des les traiter (au risque de creer de l'alea moral? mais les nationalisations ne font pas que creer de l'alea moral). Ceci permettra une discussion avec le travail de Holz et Penson sur le livre de COLMANT. En outre : Comparer Colmant – de Callatay – Attali sur l’intervention de l’Etat dans les banques. 20 Conclusion. Nous avons étudié dans ces quelques pages, l’analyse d’Etienne de Callataÿ concernant une des crises financières les plus graves depuis celle de 1929. Cette économiste nous livre une analyse complète en examinant successivement les causes, les conséquences et enfin les solutions de ce séisme financier. Il est évident que nous ne pouvions pas nous focaliser sur tous les éléments présents dans cet ouvrage. C’est pourquoi nous nous sommes concentrés essentiellement sur certains points. Après un bref rappel des causes et des conséquences, nous avons tout d’abord examiné les plans de relances mis en place par les Etats-Unis et la Commission Européenne. Par la suite nous avons tenté de relever les similitudes entre la crise de 1929 et la crise actuelle. Le point suivant a été consacré à un élément mentionné à plusieurs reprises par l’auteur : l’aléa moral. Enfin, nous nous sommes consacrés à l’étude d’autres solutions possibles pour faire face à la crise. Il est bien évident que nous n’avons pas fait le tour du sujet et qu’il existe encore de très nombreuses problématiques qui mériteraient d’être approfondies. Pour conclure, il ne faut pas se réjouir trop tôt ni s’attendre à ce que la crise prenne fin rapidement. Les conséquences se feront encore ressentir pendant plusieurs années. Les conséquences sur l’emploi seront très graves, comme en témoigne les récentes déclarations concernant des restructurations et des faillites. Même si l’auteur ne plaide pas pour plus de régulation, il nous semble au contraire qu’il faut intensifier celle-ci. La crise actuelle a été causée par une trop grande liberté laissée aux organismes financiers ainsi qu’aux concepteurs de produits dérivés. On peut se demander comment est-ce que des arnaques, comme celle mise en place par Bernard Madoff qui représentait plus de 50 milliards de dollars, ont pu perdurer pendant si longtemps. Il est également clair que le monde de la finance n’a pas retenu les leçons de ses erreurs passées. Même si la crise de 1929 n’a pas été causée par les mêmes facteurs que la crise actuelle, c’est bien la recherche du profit à court terme qui mène le système financier à des crises profondes. Dès lors, ne peut-on pas réfléchir à une finance plus étique qui prendrait en considérations les dangers potentiellement graves d’une gestion basée sur cette recherche effrénée de profit ? La raison est que les victimes de cette mauvaise gestion sont toujours les mêmes : les épargnants, les travailleurs… bref, ce que l’auteur appelle « Monsieur tout-le-monde ». Comble de l’ironie, ce sont ceux qui, par leur mauvaise gestion ou par leur ignorance, ont créé cette crise qui s’en sortent le mieux. En effet, ce n’est pas le travailleur licencié ou en chômage économique qui bénéficie des sommes 21 colossales versées sous forme de parachute doré, ce sont les patrons des institutions financière. La proposition de l’auteur selon laquelle : « L’argent facile […] de ces dernières années, s’il a eu de côtés néfastes et non soutenable, […], a aussi eu une dimension favorable pour l’investissement et donc pour l’économie en générale, c’està dire la collectivité, avec des création d’emplois et une incidence favorable sur les finances publiques29. » Ce point de vue nous parait discutable car même si l’investissement à pu croitre, même si l’emploi a progressé consécutivement à cette recherche de profit, maintenant c’est tout le contraire qui se passe. Nous faisons donc marche arrière et l’on peut se poser la question de savoir s’il est intéressant de faire un bond en avant pour reculer par la suite. Certains nous répondront que ce bon en arrière nous permettra de nous relancer. Nous lui répondrons à notre tour que, oui, nous allons repartir, mais cela sera inutile si nous ne tenons pas compte de nos erreurs passées, chose que le secteur financier à bien du mal comprendre. 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