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La finance est distincte de l’économie, nous devons le rappeler ici. Elle relève de
cultures, de concepts, de savoirs, de techniques, de pratiques, d’enseignements et
de recherches distincts de ceux de l’économie. La finance de marché et l’économie
de marché ne sauraient être assimilées. Les marchés financiers ne sont pas les
marchés économiques. La crise financière n’est pas la crise économique. Les élites,
les régulations, les produits, les systèmes,… financiers ne sont pas les élites, les
régulations, les produits, les systèmes économiques. Ces rappels insistants à une
clarification de nos représentations ont un objectif : mieux comprendre leurs liens
historiques en comprenant mieux leurs logiques distinctes. En effet, à travers toute
l’histoire des hommes, le cours des choses financières a influencé le cours des
choses économiques, plus ou moins, et l’ont mis en branle ou bien mis en crise,…
Aujourd’hui, le cours global que la finance a pris depuis 50 ans influence beaucoup le
cours de l’économie et, aujourd’hui, le met clairement en crise. Il met en crise
l’économie, mais aussi le social et « l’environnemental ». Bref, il met en crise tout
développement, toute modernité désirable et durable.
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Nous allons brièvement, donc à grands traits, indiquer les logiques et les
mécanismes caractéristiques de ce cours global de la finance, cours dicté par la
seule finance de marché1.
1/ Quand l’industrie financière de marché, en exerçant son rôle spéculatif ou
d’investissement, pèse trop sur les actes économiques - qu’ils soient d’usage ou
d’échange - elle les normalise excessivement : ces actes excèdent une forme
industrielle et se métamorphosent alors en « agenda »,… étymologiquement, en-
choses-devant-être-faites, et ce, quel que soit l’état des marchés économiques. Ces
actes-agenda, dont on verra plus loin (cf point 5) de quelle représentation imaginaire
probable ils sont le fruit recherché, sont vectorisés par des agents en proie à une
démarche idolâtre, c’est-à-dire privés peu ou prou de signaux réflexifs (cette réalité
est confirmée ces dernières années par le remplacement massif des hommes par
des robots dans cette vectorisation). Ils absorbent toute la performativité de
l’activité financière.
1 En effet, la « puissance d’agir » de la finance de marché est de portée mondiale et incomparable
dans sa capacité à provoquer une crise totale du système et ses conséquences sur les « sociétés
réelles » et leurs populations. Pourquoi ? Parce qu’elle émet des produits dits dérivés qui sont le
principal instrument de connexion des banques entre elles, d’une taille d’environ 700 000 milliards de
dollars, soit 12 fois le PIB mondial (source : Finance Watch) ! Or, ce montant excède, et de très loin,
leurs propres besoins de couverture de risque de change, indiquant, par là-même, sa logique
spéculative et non d’investissement.