MEDITATION SUR LA MALTRAITANCE
J.-Y. Hayez
Permettez moi d'abord de me tourner avec émotion vers tous les enfants et adolescents
gravement maltraités dans le monde : celles et ceux que l'on massacre dans les conflits armés,
que l’on oblige à travailler comme des esclaves, que l'on jette à la rue ou que l'on fait se
prostituer, les enfants-soldats et tant d'autres...
Et toutes celles et ceux qui sont cassés par le fléau de la misère, sans rien à leur offrir pour
satisfaire leurs besoins élémentaires, sans jouets ni école ni maman pour les cajoler, divagant
à ce carrefour pollué de Bogota où ils passent 11 heures par jour à vendre une babiole pour
gagner un quart de dollar....
Au moment où nos enfants à nous sont au cœur des technologies les plus avancées et où nous
les maintenons en vie quand il le faut et parfois au delà, au prix d'efforts incroyablement
coûteux, je ne puis m'empêcher de nous interpeller toutes et tous sur ces injustices sociales
tellement criantes, sans prétendre au simplisme des solutions.....
Et dans notre pays, quel est l'état des lieux de notre sollicitude sociale envers nos enfants ?
Avant de nous focaliser sur ceux qui sont repérés officiellement comme maltraités, examinons
nos attitudes au quotidien envers tous les enfants.....Ne pourrions-nous pas admettre que le
bilan est mitigé ?
Certes, il y a de bonnes choses dans notre investissement commun de la génération
montante...Certes, les besoins élémentaires de beaucoup sont rencontrés, comme dans tous les
pays riches, et au-delà de l’approvisionnement matériel, nous prétendons même être une
société attentive et "enfants admis"....
Enfants admis, oui, étymologiquement, le mot dit bien ce qu'il recouvre et ses limites....admis,
mais pas toujours respectés à fond dans leurs besoins spirituels, loin de là !
Combien de fois, par exemple, ne les sacrifions-nous pas allègrement sur l'autel de la
consommation ! Blabla a beau leur répéter chaque fois qu'il le peut que " la publicité, c'est
beek", quand arrive le temps de Roland-Garros ou de Wimbledon, avec ses juteux encarts
publicitaires, c'est lui, Blabla , qui passe à la trappe…et tant pis pour les plus désœuvrés des
petits enfants, ceux à qui on n'a pas pu payer un bon stage bien créatif jusque 17h...après, il y
aura toujours bien matière à se plaindre de l' augmentation de la délinquance juvénile
précocissime, parce que de petits désœuvrés auront joué à faire comme Bill Clinton avec
Monica, autre information qui, à l‘époque, s’est avérée des plus rentable à l'audimat et dont on
n'a pas pensé à ne pas bassiner leurs oreilles !
Sacrifiés, ils le sont aussi sur l'autel des rentrées d'argent à quasi tout prix ! Que d'enfants et
d'adolescents laissés trop seuls, spirituellement et matériellement, par des parents et des
proches trop absorbés ou trop fatigués....que de maisons vides, sans cette ombre tutélaire d'un
parent qui va et vient, qui donne un coup de pouce pour les devoirs, empêche les plus grosses
bêtises par sa seule présence, limite-au moins un peu- la consommation passive des
multimédias, parle, écoute et raconte, tout simplement.....
Curieux paradoxe que celui de nos enfants précieux, programmés à temps et heure, mais qui
pourtant ne doivent pas trop gêner.
J.-Y Hayez, responsable de l' Unité de pédopsychiatrie et ccordonnateur de l'équipe SOS-Enfants-Famille,
cliniques universitaires Sai
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Luc à B-120
0 Bruxelles. E ma
il : jean-yves.ha
[email protected].be