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MORGAN ET LA THEORIE
CHROMOSOMIQUE DE L'HEREDITE
Publiés en 1866 dans un article des Comptes rendus de la Société d'histoire naturelle de Brno,
les travaux de Mendel passent à peu près inaperçus, n'étant cités qu'une douzaine de fois entre
leur publication et leur redécouverte en 1900. Cette redécouverte est due à Hugo de Vries
(Amsterdam), Carl Correns (Berlin), et Erich Tschermack (Vienne), qui retrouvent de façon
indépendante des résultats similaires à ceux de Mendel.
Le fait que ces travaux soient restés si longtemps sans impact s'explique sans doute en partie
par plusieurs lacunes qu'ils laissent transparaître pour les contemporains. Tout d'abord, les
travaux de Mendel ne permettent pas d'expliquer la réapparition d'un caractère qui existait non
pas chez les parents ou grands-parents, mais chez un ancêtre qui peut être beaucoup plus éloigné.
D'autre part, ces travaux ne concernent que les caractères à versions alternatives tranchées, et
laissent complètement de côté les caractères à variations continues.
Par ailleurs, la découverte des chromosomes et des mécanismes de leur transmission va conduire
à postuler que ceux-ci sont le support des unités d'information héréditaires - les "facteurs"
mendéliens - que l'on appellera gènes.
Thèmes traités et activités pédagogiques (durée: 2 semaines):
La redécouverte des lois de Mendel
La théorie chromosomique de l'hérédité
Morgan: des résultats de monohybridisme différents de ceux de Mendel: l'hérédité liée aux
chromosomes sexuels
Morgan: des résultats de dihybridisme non conforme à la seconde loi de Mendel: la liaison entre
gènes et le brassage intra-chromosomique
Les premières cartes génétiques et la définition provisoire du gène
1 La redécouverte des lois de Mendel
1.1 LES "PANGÈNES" DE HUGO DE VRIES
En 1889, Hugo de VRIES est professeur de Botanique à Amsterdam. Il a à son actif
plusieurs contributions importantes: l'une d'elles concerne une théorie de l'hérédité
impliquant des particules élémentaires qu'il baptise "pangènes". Il se propose d'en
étudier la transmission en réalisant des hybridations chez les végétaux entre 1890 et
1899.
Il publie en 1900, dans les Comptes rendus de l'Académie des Sciences de Paris, une
note "Sur la loi de disjonction des hybrides".
Ayant réalisé un grand nombre de croisements chez des végétaux, il obtient, comme
Mendel, à partir de lignées parentales pures (D = caractère dominant, r = caractère
récessif), les résultats suivants:
P
D
r
F1
Dr (100%)
F2
D (25%)
Dr (50%)
r (25%)
"Dans l'hybride, le caractère simple différentiel des parents est donc visible ou
dominant, tandis que le caractère antagoniste est récessif. Ces caractères
antagonistes restent ordinairement combinés pendant toute la vie végétative, [...] mais
chaque grain de pollen et chaque ovule ne reçoit que l'un des deux.
[...] on peut représenter le nombre et la nature des hybrides par la formule
représentative suivante, dans laquelle les nombres D et r sont égaux:
(D + r) (D + r) = De2 + 2Dr + re2
soit, dans le cas ci-dessus: (0,5 + 0,5) (0,5 + 0,5) = (0,25 + 0, 5 + 0,25):
0,5 D
0,5 r
0,5 D
0,25 D
0,25 Dr
0,5 r
0,25 Dr
0,25 r
[...] Les individus D auront le caractère dominant pur, l'ayant hérité du père et de la
mère. De la même façon, les individus r auront le caractère récessif pur, tandis que
Dr seront les hybrides. Ceux-ci porteront le caractère dominant apparent et le
caractère récessif latent.
[...] L'ensemble de ces expériences met donc en évidence la loi de disjonction des
hybrides et vient confirmer les principes que j'ai énoncés sur les caractères
spécifiques considérés comme des unités distinctes."
1.2 LES LOIS DE MENDEL S'APPLIQUENT AUX ANIMAUX
Les travaux du français Cuenot sur la souris: Lucien CUENOT, professeur de
zoologie à Nancy, reprend les lois de Mendel dont il est longtemps le seul en France à
proclamer la valeur et montre l'application de ces lois à l'ensemble des espèces
animales. En 1903-1906, il prouve que des caractères de coloration de la souris
correspondent à divers états d'un même gène; ces états nés par mutation sont des
alternatives multiples.
Il est possible de tester la nature des souris grises de F2 en réalisant des croisements-
tests: ceux-ci consistent à croiser un individu dont on n'est pas sûr de la nature (souris
grise hybride ou de lignée pure) avec un individu dont on est sûr de la nature
génétique (souris blanche de lignée pure). Les résultats obtenus sont différents selon
l'alternative envisagée.
Dans les deux cas ci-dessus expliquez les résultats obtenus en dressant
l'échiquier si nécessaire.
1.3 LES "LOIS DE MENDEL" DEFINIES PAR L'ALLEMAND
CORRENS
Carl CORRENS rend hommage à MENDEL en utilisant l'expression "lois de
MENDEL":
o Première loi de Mendel ou loi de pureté des gamètes: au moment de la
formation des gamètes, il y a ségrégation (= séparation) des unités distinctes
qui portent les caractères différentiels, qui se réassocient au moment de la
fécondation.
o Seconde loi de Mendel ou loi de ségrégation indépendante des caractères:
les deux unités d'un même couple de caractères ségrègent indépendamment de
celles des autres couples.
2 La théorie chromosomique de l'hérédité
A la fin du XIXe siècle, les progrès réalisés en microscopie permettent de préciser les
connaissances dans le domaine de la reproduction sexuée:
En 1875, HERTWIG observe la fécondation chez l'oursin (pénétration du
spermatozoïde dans l'ovule et fusion des noyaux mâle et femelle),
Vers 1880 des "bâtonnets" que l'on nommera chromosomes sont identifiés dans le
noyau,
En 1883 Van BENEDEN observe quatre chromosomes dans l'oeuf d'un Ascaris et
seulement deux chromosomes dans les gamètes mâles et femelles.
2.1 LES ETUDES CYTOLOGIQUES DE SUTTON: LES
CHROMOSOMES
Au début du XXe siècle des cytologistes découvrent la méiose dans les cellules de la
lignée germinale des insectes, c'est-à-dire les cellules qui conduisent à la formation
des gamètes (par opposition aux cellules somatiques, c'est-à-dire toutes les autres).
Dans un article publié en 1902 dans le laboratoire de zoologie de la Columbia
University et intitulé "On the morphology of the chromosome group in Brachystola
magna" Walter S. SUTTON rapporte ses études cytologiques sur les chromosomes de
sauterelle qui l'amènent à conclure que, lors de la gamétogénèse:
o les chromosomes ont une individualité,
o qu'ils apparaissent sous forme de paires, avec un membre de chaque paire
constitué par chaque parent,
o que les chromosomes appariés se séparent l'un de l'autre pendant la méiose.
Il conclut ainsi: "je peux finalement attirer l'attention sur la probabilité que
l'association des chromosomes paternels et maternels dans les paires et leur
séparation pendant la réduction chromatique [...] peut constituer la base physique des
lois de l'hérédité mendélienne."
Ils met en effet en évidence les chromosomes spiralisés, qu'il nomme "spirèmes":
ceux-ci se groupent par paires au début de la méiose, qu'il appelle "bivalents". Chaque
bivalent est formé par l'association d'un chromosome d'origine paternelle et d'un
chromosome d'origine maternelle.
L'observation du déroulement de la méiose lui permet de constater que le chromosome
paternel et le chromosome maternel de chaque bivalent se séparent au hasard à chaque
pôle de la cellule de manière à ce que les gamètes héritent chacun d'une combinaison
de chromosomes paternels et maternels et celle-ci n'est pas la même selon le gamète
considéré.
Cette déduction logique de la part de SUTTON ne peut être vérifiée à l'époque, car il
avoue ne pas pouvoir reconnaître le chromosome paternel du chromosome maternel.
Faites le lien entre les observations de SUTTON et les lois de MENDEL.
Précisez pourquoi les propositions de SUTTON ne constituaient, à l'époque, qu'une
théorie.
En partant des échiquiers de croisement F1xF1 obtenus par MENDEL dans le
monohybridisme et le dihybridisme, déterminez les combinaisons chromosomiques qui
résultent de la méiose et de la fécondation dans le tableau ci-dessous:
Nombre diploïde
de chromosomes
Nombre haploïde
de chromosomes
Combinaisons
gamétiques
différentes
Combinaisons
zygotiques (oeuf)
différentes
2
4
6
n
2.2 LA FORMULATION DE LA THEORIE
CHROMOSOMIQUE
En 1902, William BATESON appelle "allèles" les différentes versions d'une unité
responsable d'un caractère: un individu qui possède les deux mêmes versions d'un
gène est homozygote, s'il a deux versions alléliques différentes, il est hétérozygote. Il
utilise en 1905 le mot "génétique" pour désigner la science qui étudie l'hérédité, c'est-
à-dire la transmission des caractères et leurs variations.
Dans un article publié en 1903, "The chromosoms in heredity", SUTTON écrit:
"Les phénomènes de la division cellulaire des cellules germinales et de l'hérédité ont
les mêmes caractéristiques essentielles, pureté des unités (chromosomes, caractères)
et transmission indépendante de ces derniers avec comme corollaire que chacune des
deux unités antagonistes est contenue dans exactement la moitié des gamètes
produits."
Avec les travaux de MORGAN, qui seront vus ci-dessous, la théorie chromosomique
sera reformulée de la manière suivante: les gènes (mot utilisé pour la première fois par
William JOHANNSEN en 1909) sont portés par les chromosomes et occupent sur
ceux-ci des emplacements fixes. Les chromosomes sont donc responsables du
stockage et de la transmission du patrimoine génétique.
En utilisant des couleurs différentes pour chaque couple de chromosomes,
mais concordantes pour les chromosomes d'origine paternelle (couleur sombre) et
pour les chromosomes d'origine maternelle (couleur claire), montrez, dans un schéma
appliqué au dihybridisme, le parallélisme entre "facteurs mendéliens" et chromosomes
durant la méiose.
3 Morgan: des résultats de monohybridisme différents de ceux de
Mendel
En 1908, Thomas H. MORGAN est embryologiste à la Columbia University de New-
York et étudie le développement d'une petite mouche des fruits, la Drosophile
(Drosophila melanogaster) ou mouche du vinaigre.
C'est un matériel de choix dans la mesure ou sa petite taille facilite l'élevage dans des
flacons de verre. Chaque accouplement produit des centaines d'individus et les
générations se succèdent tous les 15 jours. De plus des mutations apparaissent
spontanément, dont on peut augmenter la fréquence par traitement aux rayons X. Leur
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