réaliser et il fut complexe pour Artaud de trouver du financement et des collaborateurs même si
les écrits qu’il publiait en intriguaient et intéressaient plusieurs.
Le théâtre devait maintenant passer par un système nerveux et musculaire afin de
réunir le geste et la pensée sur la scène. Il se sert de ce qu’il a vu dans le théâtre oriental ; des
corps orchestrés, poussés au maximum afin de montrer que le corps est toujours inachevé. Ce
théâtre était fondé sur l’idée de ramener l’homme vers la source de ses conflits, le théâtre avait
donc un fond psychologique
. Il tentait de provoquer une crise de l’âme et un désir de renouer
avec le catharisme en utilisant le mythe.
Dans l’idée d’un spectacle total, la place du texte devait diminuer et, en disparaissant,
l’auteur disparaissait permettant au metteur en scène de devenir créateur. Le texte, pour Artaud,
est le langage spécifique de la littérature et le théâtre, étant une autre forme d’art, se devait de
posséder son propre langage, un langage spécifique à ses nécessités et se messages. Artaud
n’excluait pas la parole mais elle représentait pour lui une réalité distincte dont il voulait
s’éloigner. La destination de la « parole » est changée. Dans cette optique, il fait une place à une
forme de poésie gutturale et sonore, où l’on s’exprime par des sons et des bruits qui, avec leurs
mélodies et intonations, transportent un message sans mot. Artaud retire au texte son pouvoir
narratif et explicatif.
Dans le texte Le théâtre et la peste
, Artaud compare le théâtre à une infection, la peste,
afin d’aborder l’idée que lorsque l’homme est au bord du gouffre sa vrai nature se dévoile. Lors
d’une peste, l’instinct primaire ressort et l’enchainement à la morale publique n’est plus.
L’homme est révélé sous « sa plus simple expression ». Artaud formule sa comparaison ainsi :
«
L'état du pestiféré qui meurt sans destruction de matière, avec en lui tous les stigmates d'un
mal absolu et presque abstrait, est identique à l'état de l'acteur que ses sentiments sondent
intégralement et bouleversent sans profit pour la réalité. Tout dans l'état physique de l'acteur
comme dans celui du pestiféré, montre que la vie a réagi au paroxysme, et pourtant, il ne s'est
rien passé.
» Cet extrait témoigne de la vie intérieure de l’acteur lors de ses jeux de tensions
Artaud ne souhaitait pas être associé à la psychologie, s’est pourquoi il s’est tourné vers la métaphasique
et le théâtre oriental.
Le théâtre et la peste, prononcé lors d’une conférence le 6 avril 1933 à la Sorbonne, au groupe d’Études
Philosophique et Scientifiques pour l’examen des tendances nouvelles.
Le théâtre et la peste, p.35