3.4. L`Ordre professionnel est garant du secret professionnel

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Madame, Monsieur et Cher(ère) Collègue,
La loi 2005-845 du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises a profondément
remanié le droit des entreprises en difficulté. Parmi les multiples dispositions nouvelles
qu’elle contient deux ont des conséquences directes sur les médecins et leur Ordre
professionnel.
 Les différentes procédures de prévention et de traitement des difficultés des
entreprises prévues par la loi sont désormais applicables aux professionnels
libéraux exerçant à titre individuel.
Jusque là seules les sociétés constituées par les professionnels libéraux étaient
concernées.
 Dès lors qu’un débiteur –personne physique ou morale- exerce une profession
réglementée, son Ordre professionnel intervient dans ces procédures.
La loi est applicable depuis le 1er janvier 2006 et a fait l’objet d’une circulaire du Conseil
national de l’Ordre des médecins n° 06-063 du 5 octobre 2006. Il n’est pas inutile 4 ans
plus tard d’actualiser cette circulaire à la lumière de la pratique mais aussi en raison de
modifications législatives et de précisions apportées par la jurisprudence.
Parmi les procédures de traitement des difficultés des entreprises envisagées par la loi il
faut mettre à part la conciliation qui est une procédure amiable, même si elle est placée
sous le contrôle du juge. Les autres procédures sont des procédures judiciaires appelées
« procédures collectives » avec les lourdeurs et la publicité que cela suppose et les
contraintes qu’elles font peser sur les créanciers et le débiteur.
Avant de les présenter succinctement, il faut rappeler la définition de la cessation des
paiements qui permet de distinguer les différentes procédures. La cessation de paiement
se définit comme l’impossibilité pour un débiteur de faire face à son passif exigible avec
son actif disponible.
1. La procédure de conciliation
Quelle est l’hypothèse envisagée ?
Le médecin exerçant en nom personnel (ou le gérant d’une société d’exercice) éprouve
une difficulté juridique, économique ou financière avérée ou prévisible. L’entreprise n’est
pas encore en cessation de paiement ou l’est depuis moins de 45 jours.
Le débiteur (médecin exerçant en nom personnel ou gérant) saisit le tribunal de grande
instance d’une demande d’ouverture de procédure de conciliation. Si le président du
tribunal accède à sa demande le conciliateur sera chargé de trouver un accord amiable
avec les créanciers. On peut, en particulier, souligner que désormais le Trésor public et
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les organismes sociaux pourront accorder, dans le cadre de cette procédure mais aussi
dans le cadre des procédures collectives, des remises de dettes.
Il peut être intéressant que vous fassiez connaitre à vos confrères en difficulté l’existence
de cette procédure et leur conseiller de prendre contact avec un mandataire judiciaire.
Rôle de l’Ordre
La décision d’ouverture de la procédure est notifiée à l’Ordre professionnel et au
ministère public. Ce sont les deux seules autorités à recevoir notification de cette décision
qui n’a pas de caractère public afin de ne pas émousser la confiance des créanciers.
A ce stade, l’Ordre des médecins n’a pas à intervenir. On peut simplement suggérer aux
conseils départementaux de faire connaître à l’ensemble des médecins l’existence de
cette procédure préventive.
L’Ordre professionnel sera ensuite appelé au tribunal lorsqu’il statuera sur l’homologation
de l’accord conclu avec les créanciers, dans l’hypothèse bien entendu où un tel accord a
été trouvé.
2. Les procédures collectives
Elles sont au nombre de trois :
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La procédure de sauvegarde
Quelle est l’hypothèse envisagée ?
Le débiteur a des difficultés qu’il n’est pas en mesure de surmonter et qui sont de nature
à le conduire à la cessation des paiements. Il saisit le président du tribunal de grande
instance d’une demande d’ouverture de procédure de sauvegarde. S’il est fait droit à sa
requête, cette démarche comprend des obligations pour le débiteur, même s’il reste
maître de son entreprise, mais également pour les créanciers dont les dettes antérieures
au jugement sont gelées.
2-2
Le redressement judiciaire
Quelle est l’hypothèse envisagée ?
L’entreprise est en état de cessation de paiement mais l’adoption d’un plan de
redressement ou de cession partielle ou totale est susceptible de remédier à la situation
du débiteur. Cette fois, la demande d’ouverture ne relève pas que du débiteur, elle peut
également être déclenchée à la demande des créanciers.
2-3
La liquidation judiciaire
Quelle est l’hypothèse envisagée ?
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Cette procédure s’adresse aux débiteurs en cessation de paiement dont le redressement
apparaît manifestement impossible. Elle est destinée à mettre fin à l’activité de
l’entreprise ou à réaliser le patrimoine du débiteur par une cession globale ou séparée de
ses droits et de ses biens.
Il convient de savoir qu’aujourd’hui plus des 2/3 des procédures engagées sont
constituées par des liquidations judiciaires directes. De plus, un nombre important de
redressements judiciaires se transforment en liquidation judiciaire en cours de procédure.
Lorsqu’il s’agit d’une personne morale, le jugement entraîne dissolution de plein droit de
la société qui devra donc être radiée du Tableau de l’Ordre des médecins
A la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif, le droit de poursuite des
créanciers impayés est définitivement éteint sauf circonstances exceptionnelles.
3. Les points communs aux 3 procédures collectives
3.1. L’Ordre professionnel est convoqué au jugement d’ouverture de la
procédure
C’est à ce stade que les interrogations de l’Ordre sont les plus fortes. En effet, il est
appelé à une procédure concernant un confrère dont il ne connaît pas nécessairement les
difficultés financières et il se rend au tribunal sans savoir ce que le juge attend de lui.
 Sur le premier point
Rien n’interdit au Conseil de l’Ordre d’inviter, avant l’audience, le confrère concerné à un
entretien confraternel où celui-ci lui exposera, s’il le souhaite, ses difficultés et ses
attentes.
 Sur le second point
Le président du tribunal pourra consulter le conseiller ordinal sur la viabilité de l’entreprise
concernée, compte tenu des connaissances générales qu’il peut avoir sur les besoins de
soins, l’offre de soins dans la zone et la spécialité d’exercice du débiteur et de la
connaissance particulière qu’il peut avoir des difficultés qu’éprouve le praticien.
Le législateur n’a pas entendu faire de l’Ordre professionnel l’avocat du débiteur- celui-ci
en étant déjà pourvu-mais plutôt un sapiteur. Les difficultés dramatiques que nous
connaissons tous au travers des Commissions d’Entraide montrent, par ailleurs, qu’il n’est
pas nécessairement de l’intérêt du professionnel de s’enfoncer dans la spirale de
l’endettement dont lui-même et sa famille pourraient avoir les plus grandes difficultés à se
relever. A ce propos et aussi paradoxal que cela puisse paraître à première vue, la
possibilité de mettre un professionnel en nom personnel en liquidation judiciaire
correspond à une demande des organisations professionnelles de professions libérales.
Quel est l’ordre territorialement compétent ?
C’est le conseil départemental où le débiteur (médecin ou société d’exercice) est inscrit
au jour de la saisine du Tribunal de Grande Instance. Il restera compétent même si le
débiteur transfère son dossier, en cours de procédure, dans un autre conseil
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départemental. Il est important que l’ancien conseil tienne informé le nouveau conseil de
la procédure. Il reste également même si le médecin est radié du tableau à sa demande.
On doit aussi noter que le débiteur est tenu d’informer le mandataire judiciaire des
instances où il est partie, y compris les instances ordinales.
3.2. Le déroulement des audiences
Les séances de jugement n’ont jamais lieu en public mais les jugements rendus font
l’objet de mesures de publicité particulières : inscription au registre du commerce et des
sociétés, dans un journal d’annonces légales …
L’Ordre professionnel est convoqué mais n’est pas tenu de se rendre à la convocation. Il
lui appartient cependant, dans ce cas, de le faire savoir au greffe du tribunal.
Il est inutile voire déconseillé que le Conseil départemental soit représenté ou même
assisté par un avocat. En effet, en convoquant l’Ordre professionnel, le tribunal entend
disposer de l’éclairage d’un professionnel susceptible de donner un avis éclairé.
3.3. L’Ordre professionnel est nommé contrôleur
 L’Ordre professionnel ne peut se dérober à cette nomination qu’il exercera
gratuitement :
 A défaut de déclaration au greffe par le Conseil départemental du nom de son
représentant, c’est le président du Conseil départemental qui devra assumer cette
charge ;
 Le contrôleur dispose de toutes les informations sur le déroulement de la
procédure ; il assiste le mandataire dans ses fonctions (défense des intérêts
collectifs des créanciers) et le juge dans sa mission de surveillance du bon
déroulement de la procédure.
 Tenu à la confidentialité, sa responsabilité civile ne peut être engagée qu’en cas
de faute lourde et sera couverte par l’assurance en responsabilité civile de
l’Ordre. Il y a lieu, ici, de souligner que la jurisprudence n’apporte aucun exemple
de mise en cause de la responsabilité d’un contrôleur.
 Le rôle de contrôleur existait déjà bien avant 2006 et les créanciers pouvaient
demander à exercer cette fonction. Les spécialistes des entreprises en difficulté le
considèrent de modeste.
3.4. L’Ordre professionnel est garant du secret professionnel
A côté de ce rôle de contrôleur, l’Ordre professionnel doit être présent à l’inventaire des
biens qui est dressé. La loi rappelle qu’en aucun cas l’inventaire ne peut porter atteinte au
secret professionnel.
Docteur Walter VORHAUER
Secrétaire Général
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