Question 1 : Quels sont les deux arguments qui concluent à l’inexistence de l’Europe politique ? Qu’en pensez-vous ? L’Europe est née d’une intégration économique. Elle se caractérise aujourd’hui par un curieux assemblage : géant économique contre nain politique. En effet, sa politique de défense et de sécurité ne sont en rien comparable aux performances russes, américaines et chinoises. L’écart existant entre les attentes que suscite la PESC et les résultats effectifs de ces politiques est qualifié par HILL : « the capabilities/ expectations gap » Le premier argument venant appuyer ce manque originel d’Europe politique a été développé par HABERMAS. Selon lui, une des raisons de ce manque est du à la prédominance des modes technocratiques et diplomatique de la prise de décision en Europe. En effet, alors que dans les arènes nationales c’est une politique délibérative qui est de vigueur, au sein de l’Union on préfère transférer le pouvoir à la décision des experts, de la technocratie bruxelloise. La Commission européenne est composée de plus de 20 000 fonctionnaires et au Conseil le consensus est toujours privilégié comme mode de décision. Le second argument concluant à l’inexistence d’une Europe politique est fondé sur la constatation du manque de compétitivité et de combat pour accéder au pouvoir. En effet, à la différence des campagnes présidentielles américaines ou françaises, la compétition politique autour de l’élection du président de la Commission européenne est faible et est le signe direct du manque de politisation de l’UE. Qu’en pensez-vous : Tout à fait pertinent, autre élément allant dans ce sens : la faiblesse du Parlement européen – l’incohérence des formations politiques au PE alors que pas de reflet de ces formations dans les institutions décisionnelles : Commission/Conseil. Pas de couleur politique donc postes clés sont peu en compétition. Question 17 : Comment J. Peterson et E. Bomberg (deux chercheurs mari et femme, figure d’exception n’est ce pas ?) relient-ils les théories politiques sur l’intégration européenne et les niveaux de décision ? P et B ont envisagé d’étudier l’intégration européenne en différents niveaux d’analyse liés chaque fois à des types de décisions propres. Ces niveaux et types de décision peuvent s’expliquer par des courants théoriques précis. Ils distinguent : 1. Le niveau super systémique - lié aux décisions historiques/constituantes (history making) – éclairé par les théories néo-fonctionnalistes ou inter-gouvernementalistes. L’intégration européenne s’est faite lors de grandes conférences intergouvernementales ou pendant des conférences du Conseil, ou encore lors d’arrêts célèbres de la Cour de Justice. Ce type de décision globale a une portée historique. 2. Le niveau systémique – lié aux décisions prises dans le cadre des politiques communes (policy setting) – éclairé par la théorie du nouvel institutionnalisme. L’idée ici est que l’intégration européenne s’est aussi faite sur base de la configuration institutionnelle propre à l’Union, de son système dans le cadre concret de l’élaboration des politiques communes. (Intérêts nationaux : Conseil / approche technocratique et neutralité : Commission). Le new institutionalism préconise que la configuration institutionnelle propre à l’Union a un impact sur les dénouements et aboutissements politiques. Expl : l’Acte Unique et le Traité de Maastricht sont deux éléments répondant à cette logique dans le sens où ils ont étendus et crées des compétences du système. « The institutions perform a symbolic guidance function » ; une fois les orientations générales définies, les politiques communes ne sortent plus de ces grands axes généraux. 3. Le niveau sub-systémique – lié à des décisions provenant de réseaux (relations nonhiérarchisés (policy shaping)) – éclairé par la théorie du Policy network. L’intégration européenne résulterait également des rapports informels et journaliers entre les acteurs opérationnels des différentes institutions européennes. On se situe ici en amont de la délibération interinstitutionnelle. Expl : préfigurer une nouvelle initiative législative ou un nouveau livre blanc. Cette tendance est soutenue par le phénomène de « cantinisation », de « caféisation » et de « relaxation » des journées de travail des fonctionnaires et de leurs amis au sein des institutions. (blague) Question 18 : En quoi l’UE n’est-elle ni une intégration impériale ni une intégration nationale ? L’UE n’est pas une intégration impériale parce que sa création et son élargissement résulte d’un processus d’adhésion volontaire de la part de ses membres à l’origine ou par la suite. Un régime de type intégration impériale (Empire romain, napoléonien ou soviétique) est caractérisé par une adhésion forcée de nouveaux territoires à coups de conquêtes et annexions. La diffusion des lois et des valeurs provient d’un siège unique et centralisateur. L’UE ne résulte pas non plus d’une intégration nationale. Elle ne répond pas ni d’une intégration régalienne ni d’une intégration stato-nationale. L’UE ne possède pas les caractéristiques de l’Etat moderne westaphalien. Elle ne possède pas de souverain qui détiendrait la compétence absolue et ne possède pas non plus le monopole de la violence légitime ni de force coercitive pour faire respecter sa loi. L’UE n’agit que dans le cadre juridique et politique des matières qui lui sont exclusivement transférés par ses membres. Les Etats membres conservent le « treaty-making power » au niveau international et ne sont contraints que dans la mesure de leur obligation de respecter les effets des compétences exclusives de l’UE Enfin, l’UE ne possède pas les caractéristiques d’une nation comme unité d’homogénéité ethnico-culturelle et linguistique qui fonde l’unité politique en vertu du principe nationaliste (corrélation entre unité politique et nationale – principe ayant notamment mené à la consécration et proclamation du II Reich en 1871 (notion de Volk // romantisme – volkswagen )). Non, l’UE détient des pouvoirs qui émanent de la volonté contractante d’Etats culturellement proches mais tout de même très différents. Il n’y a pas de peuple européen mais une citoyenneté de fait découlant de la détention d’une citoyenneté d’un des Etats membres de l’Union. Question 19 : En quoi l’intégration européenne peut-elle être qualifiée de « communauté supranationale » ? L’intégration européenne peut être qualifiée de communauté supranationale parce qu’elle s’est construite à la fois sur des caractéristiques d’organisation supranationale mais aussi à partir d’une logique d’Etats souverains, logique également qualifié d’intergouvernementalisme. L’UE a poursuivi au fil des étapes de son intégration une logique d’inter-gouvernementalisme traditionnel (les décisions majeurs étant prises par le Conseil européen et le Conseil) tempéré par l’adoption successive de caractéristiques supranationales tels que : - le vote au conseil à la majorité qualifié ; l’initiative législative de la Commission, La codécision budgétaire et législative du PE Les pouvoirs d’exécution de la Commission exercés dans le cadre du système de Comitologie Les ressources propres du budget européen Les caractères quasi fédéraux du droit européen (Applicabilité directe et primauté) Ce dernier point est à nuancé. Le terme « quasi fédéraux » est utilisé ici parce que l’exécution dépend ultimement de la volonté des Etats d’appliquer le droit, il n’existe pas de police fédérale à l’américaine pour en vérifier l’applicabilité sur les territoires nationaux. Par ailleurs, l’intégration européenne s’est aussi construite sur des tensions entre logiques fédéralistes et confédéraliste. On parle pour qualifier l’UE aussi de Fédération d’Etats. En effet, l’UE par son droit est quasi-fédéral, par son droit de retrait est proche du confédéralisme. Mais l’UE offre une citoyenneté double à ses ressortissants, ne possède ni le monopole de la violence légitime ni l’immédiate internationale (Treaty-making power), ce qui fait d’elle une Union proche d’une fédération d’Etat. En somme, l’intégration de l’UE c’est une logique de grande salade