Le projet présenté ici s’inscrit dans la complémentarité de l’approche intégrée citée ci-dessus.
Il concerne l’appariement des chromosomes homologues lors de la méiose chez les blés
synthétiques.
B - Problème de recherche
Actuellement les blés cultivés sont essentiellement le blé dur ou blé à macaroni qui est
tétraploïde (4x, 2n=28, AABB) et le blé tendre qui est hexaploïde (6x, 2n=42, AABBDD) et
destiné en priorité à la panification. Le blé diploïde ou engrain ou petit épeautre (2x, 2n=14,
AA) n’est cultivé que sur de très petites surfaces comme par exemple dans les Alpes du Sud.
La constitution génomique de ces trois espèces montrent qu’elles appartiennent à une série
polyploïde et constituent un exemple classique d’évolution par amphiploïdie (hybridation
interspécifique suivi de doublement des chromosomes). Le corollaire de ceci est que l’ordre
d’apparition des blés est le suivant : 2x puis 4x puis 6x. Les premiers blés tétraploïdes, résultat
de l’hybridation entre T. urartu (2n=14, AA) et une deuxième espèce diploïde, proche
d’Aegilops speltoides (2n=14, SS), sont apparus il y a au moins 500 000 ans. Les premiers
blés hexaploïdes ont été créés lors de la domestication, il y a environ 10 000 ans suite à
l’hybridation entre le blé tétraploïde T. dicoccum (2n = 28, AABB) et Ae. tauschii (2x,
2n=14, DD).
Les trois espèces diploïdes à l’origine des blés polyploïdes ont une méiose régulière (7
bivalents). L’hybridation au laboratoire entre T. urartu (AA) et Ae. speltoides (SS) (ou une
espèce proche de la section Sitopsis) permet après doublement du stock chromosomique de
l’hybride F1, de reproduire l’ancêtre du blé dur actuel (T. dicoccoides). Cet amphiploïde n’a
pas une méiose régulière car des appariements homéologues de type A-S ont été observés
contrairement aux blés tétraploïdes sauvages ou cultivés qui ont un comportement de diploïde
strict à la méiose : l’appariement se fait uniquement entre chromosomes homologues. On
admet que la principale raison est l’acquisition par mutation d’un système génétique
inhibiteur d’appariement homéologue. Le gène majeur de ce système, appelé Ph1 a été
récemment cloné par (Griffiths et al. 2006). Cependant, l’effet de l’évolution sur le nombre de
crossing over entre chromosomes homologues en présence de Ph1 n’a jusqu’à présent pas été
abordé alors qu’il conditionne le brassage génétique et la stabilité des nouvelles espèces
polyploïdes formées. Pour ce faire, nous avons produit un ensemble de blés synthétiques. Le
matériel est constitué de 8 blés synthétiques issus de l’hybridation entre :
- 2 blés 4X a) blé dur cv. Joyau
b) Tétra Courtot : la composante tétraploïde (AABB) extraite du blé tendre cv.
Courtot.
- 4 accessions d’Ae. tauschii
La stabilité méiotique de blés synthétiques au cours des générations S0 (issues du doublement
spontané d’hybrides blé 4X ×Ae. tauschii ABD, 2n = 21), S1 et S2, est appréhendée
par l’analyse
- des appariements chromosomiques
- la fréquence de plantes aneuploïdes
Bien que les composantes 4X (blé dur et blé 4X extrait du blé tendre 6X) et 2x aient une
méiose parfaitement régulière, nous avons montré que :
le niveau d’appariement chromosomique homologue chez les blés synthétiques est
significativement inférieur à celui des blés témoins 6X,