Texte 5 De la Colère MONTAIGNE 1535 Argumenter, convaincre

Texte 5
De la Colère MONTAIGNE 1535
Argumenter, convaincre, persuader
Montaigne appartient à lHumanisme (cf. recherche), résultat de la Renaissance, recentre lHomme au
milieu des préoccupations, comme Thomas More, Erasme, Melanchton, Zwingh, Luther ou encore Calvin.
[Œuvre produit dune réflexion alimentée par une culture, un savoir]
Montaigne se plonge dans ses Essais en 1572 et dénonce lethnocentrisme (en 3 temps), dont on peut
citer « Des Cannibales » ou « De la présomption ».
Lecture analytique
1 Le thème
Le thème de ce texte nous est donné explicitement par le titre thématique « De la colère » et
également implicitement par la forme de son récit : un discours à propos de la colère (cf. Lucière « De ») et où
on note lemploi du mot « colère » à 9 reprises et du champs lexical de la « colère » tel que « courroucé » l.7
ainsi que le phénomène physiologique, physique « s’étant échauffé ».
2 La composition
Dans un 1er temps, des lignes 1 à 5, on note une théorie de la vengeance, écrit au présent de
lindicatif, qui sous-entend une vérité générale : la colère atteint tout le monde négativement. Lemploi du
verbe « ébranler » montre la perturbation de l’équilibre, la « colère » altère donc les capacités intellectuelles :
les capacités à juger.
« Il nest passion qui ébranle tant la sincérité que la colère. »
Cette phrase est en réalité la thèse de Montaigne ; lextrait commence avec la formulation des effets néfastes
de la colère. Cette idée est concrétisée par la phrase suivante « Aucun ne ferait doute [] les étant en
colère ». Après avoir énoncé son savoir sur la colère, Montaigne a recours à un exemple de 2 situations : le 1er
dans le domaine de la « justice » et son « criminel » avec une relation de soumission, de dépendance, avec une
violence potentielle, le 2nd dans le domaine de l’éducation, où les relations entre «re », « pédants » et
« enfants » sont en relation de soumission, mais vis-à-vis de l’âge.
Ici Montaigne exprime lidée que la « juge courroucé » adopte un comportement moralement inacceptable
traduite par « Aucun ne ferait doute de punir de mort ? », soit une opinion générale.
Dans le 2nd exemple, l’étonnement est traduit par la question « Pourquoi ? », puis dans la
dernière phrase « Ce nest plus correction, cest vengeance », il y a une dénonciation de lerreur par la
« vengeance », mais en conservant çà lesprit que la « correction » est concevable.
Dans un second temps, on trouve une énonciation de lobservation des pratiques dans les relations adultes-
enfants, qui est présenté au présent constatif et apparait comme une conception commune « La châtiment
tient lieu de médecine au enfants. », phrase qui assimile le châtiment à un médicament, à un remède, donc à
quelque chose de sain. On peut donc voir que le châtiment est aussi assimilé à une correction de lEnfant, la
fessée.
Restant dans le domaine de la médicine, on note la présence dune question rhétorique « Souffririons-nous un
médecin qui fût courroucé contre son patient ? ». La réponse fait donc appel à lopinion commune, à son bon
sens et est donc évidente : NON. Cette forme de la rhétorique est donc un moyen dargumenter sa thèse de la
nocivité de la colère.
Dans un 3ème temps, on trouve la formulation dun conseil, avec le verbe ou « devoir » qui
souligne limportance du conseil,/ conseil qui précise le comportement à adopter quand nous sommes en
colère. Limportance de ce conseil est maintenant augmentée au statut dimpératif « ne devrions-nous
jamais » ; Montaigne établit le contact, la communication avec le lecteur, il sinclut dans les concernées (nous =
je +vous) et donc montre sa modestie : il est comme le commun des mortels. [Sa tactique est donc la
psychologie humaine, avec didactique]. Son conseil est donc de sabstenir dagir, de sévir, de punir, de « mettre
la main sur nos serviteurs » et ce sous lemprise de la colère, sous son empire « tandis que la colère nous
dure ». Les destinataires sont donc les aristocrates. Le conseil énoncé avec le conditionnel du verbe « devoir »
et le mode impératif du verbe « remettre » dans « Remettons la partie », soit une expression imagée, où la
« partie » peut traduire le jeu, le rapport entre deux. Le conseil est donc de retarder, ajourner, de prendre le
temps, de trouver un délai pour repousser lacte de punition au moment où la raison sera revenue, la colère
ayant disparue. Ainsi, le calme sera de nouveau dans lesprit « Quand nous serons racoisés et refroidis ».
Montaigne a observé « le pouls nous bat [] nous sentons de l’émotion », donc les effets physiologiques de
l’émotion, à mettre en relation avec le verbe « refroidis ». Il appuie donc son conseil par une conception
médicale, scientifique.
Montaigne fait alors un constat : cest la puissance de la colère « passion » sur la raison. L’écriture de
Montaigne comporte un procédé daccumulation de 3 segments de phrases ainsi quun procédé dinsistance :
la reprise avec une formule présentative « cest ».
« Cest la passion qui commande alors, cest la passion qui parle, ce nest pas nous. » On note aussi la mise en
opposition de la passions « cest X2 » et nous « ce nest pas ».
Le vocabulaire employé comporte une notion de pouvoir, de domination. Et enfin, on note le pronom « nous »
désignant un individu doué dintelligence.
Dans un 4ème temps, on note l’énonciation de leffet des fautes, au présent de lindicatif « Au travers
delle, les fautes nous apparaissent plus grandes ». Leffet cité est donc que les fautes apparaissent plus
grandes quelles ne le sont en réalité: le degré de gravité est donc augmenté, on subit une aggravation de
notre appréhension, de notre jugement; on va laccroître de manière abusive. On trouve ici une reformulation
implicite de la thèse de Montaigne: on parle des effets néfastes de la Colère parce quelle déforme le jugement
et lappréhension. Propos auxquels sajoute lemploi de la comparaison « comme les corps au travers dun
brouillard »; qui est aussi un exemple commun, tout le monde la déjà vécu: cest un phénomène optique.
Notre vision est ainsi troublée, flouée. Montaigne mets donc à contribution lexpérience du lecteur.
Dans un 5ème temps, Montaigne évoque 2 cas: « celui qui a faim use de viande, mais celui qui veut
user de châtiments nen doit avoir ni faim ni soif. » . Parmi eux, un seul intéresse Montaigne, le second. Le
premier est dordre biologique; le second est dordre moral: celui qui veut châtier doit le faire
exceptionnellement, et non le considérer comme un besoin. On retrouve donc ici, la formulation dun conseil
par le verbe « devoir » et lemploi du présent. Conseil selon lequel, si il y a nécessité de punir, il faut éviter de le
faire en étant sujet à la Colère. Ainsi autant le 1er cas est dordre logique et évident, autant le 2nd est
inconcevable que lexercice de la Colère par les châtiments soit un besoin, comme la faim est un besoin.
Dans un 6ème temps, on note lemploi de 3 exemples empruntés à lAntiquité gréco-romaine, dont les
personnages sont Platon, Architas Tarentinus, et Charitus, ces deux derniers étant des guerriers, alors que
Platon, lui est un philosophe. Ces trois personnages ont en commun de détenir du pouvoir et donc davoir le
droit de punir, en conséquence de leur détention dautorité. A mise en jeu de ces 3 exemples à visée/ à finalité
argumentative, est dappuyer les arguments et de démontrer leur pertinence. Les exemples apparaissent
comme des anecdotes. Tout dabord, la sagesse dArchitas, car il se modère de son courroux, Platon de même
puisquil se courrouce indirectement, Charitus, lui aussi. Ce sont ainsi des exemples de sagesse. Ces exemples
sont donc très vite exploités.
Dans un 7ème temps, Montaigne se montre didactique. Il indique que la Colère, philosophiquement
parlant, est une « passion ».
« Cest une passion qui se plait en soi et qui se flatte. ». Lorsque lon est en Colère, on ressent de la
complaisance, on se complait dans notre Colère. Elle délivre, flatte. Montaigne quant à lui, mets en œuvre, les
mécanismes psychologiques en état de colère. Il hypothèse que la Colère provoque de la complaisance, du
plaisir, de la jouissance malsaines. On note lemploi de 2 subordonnées relatives: cest une construction binaire
( pratique courante de Montaigne ). La modalité déclarative et/ou assertive de cette phrase, délivre
laffirmation dun fait.
Dans un 8ème temps, Montaigne fait référence à lAntiquité , il renvoie le lecteur à son expérience de la
Colère, il fait référence au lecteur.
Le terme « ébranlés » renvoie à « emportés », et ce pour une raison futile. Il sagit donc dun exemple qui nous
démontre que la Colère prend le dessus de la raison, la toute puissance de la passion quest la Colère. Bien
quon nous ait fait entendre et voir notre bêtise, nous persévérons dans celle-ci.
Dans un 9ème temps, Montaigne mets en scène un exemple emprunté à lAntiquité Gréco-romaine:
Pison.
Exemple qui illustre et démontre la théorie de Montaigne: la puissance de cette passion. Il sert de preuve. A cet
égard, « son ardeur qui était encore en son effort, se redoubla » et « avec la subtilité que sa passion lui fournit
soudain ». Montaigne souligne les mécanismes psychiques par le groupe binaire « par honte et dépit », refuse
de connaître son erreur, lamour propre de Pison est affecté dautant plus quil est le chef et est suppo
détenir la sagesse. Pison est dépité de voir le second soldat présumé mort en vie.
Montaigne montre donc ici que la colère a de lourdes conséquences, ici la mort: Pison les condamne tout trois.
La pensée se trouve corrompue par la Colère, elle devient malsaine. Cet exemple est très développé, il
comporte 15 lignes.
Dans un 10ème temps, à nouveau, Montaigne formule un conseil, qui sadresse à ceux qui chez lui,
détiennent le pouvoir en son logis. Conseil quil ouvre à ses lecteurs.
Dans un 11ème temps, Montaigne dispense 2 conseils, complétés par une citation latine de Claudius
« La démence, dans son exaltation se tourne contre elle-me ». Il nemprunte plus dexemple à lAntiquité,
mais à sa vie personnelle. Il les adresse aux membres de son logis et indirectement à son lecteur par lemploi
du vous (l52). Ces conseils sont formulés au subjonctif présent. Il leur conseille de contrôler, apaiser et
contenir leur Colère, et de ne pas l’épandre; car le non-ménagement empêche les effets. Ensuite, la Colère
devenue habituelle, sen trouve donc banalisée, elle na plus deffets et provoque le mépris. Enfin, il renvoie le
lecteur à ses actes. « Secondement », Montaigne indique que la Colère doit être exercée au bon moment pour
trouver toute son efficacité, toute sa vertu. Cependant ici, il ne montre pas du doigt la Colère. Le bon moment
est défini par avant et après. La citation latine est une citation de conclusion: elle transcrit lessentiel: la
Colère a des conséquences. En un sens, la Colère annule elle-même les effets. Cela peut nous faire penser à
lArroseur Arrosé.
SYNTHESE
Ici, Montaigne sintéresse à un trouble commun: la Colère. Il a donc une démarche didactique. Il
soutient la thèse selon laquelle la Colère est nocive, ainsi selon lui, il faut se forcer de l’éviter ou alors
lappliquer aussi intelligemment que possible. La Colère, amplifiant et exagérant la vérité des faits, fausse notre
jugement, notre appréhension. Pour donner force à ses arguments, Montaigne emprunte à sa culture,
autrement dit à lAntiquité, des exemples, mais aussi à son expérience personnelle, et à celle se son lecteur,
quil implique dans son développement. On constate/conçoit ainsi, lefficacité théorique de son Essais
Lapplication de ces théories est-elle réellement à la portée de lIndividu ?
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