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Histoire du Japon médiéval
Jeudi 27/02/03
Introduction
La dynastie mongole
Les Mongols s’intéressent au Japon
Silence du Japon
Révolution en Corée
1ère Invasion
2ème Invasion
Conséquences au Japon
 Plan idéologique
 Plan économique
 Plan politique
Histoire du Japon médiéval
Jeudi 27/02/03
Les invasions mongoles
XIIIème siècle
Introduction
On revient à une époque plus événementielle : une des rares fois où le Japon
a eu à faire face à une invasion. C’est également un des rares conflits entre
l’invasion de Corée et la fin du XIXème siècle. Il s’agit des Genkô, les invasions
mongoles.
La dynastie mongole
La dynastie Gen (Yuan en mongol) est une dynastie de Chine. Son initiateur
est Gengis Khan (≈ 1167 – 1227), Temujin en mongol. On en garde
généralement un souvenir un peu horrifié. Cette réputation n’est pourtant pas
l’image qu’on a de lui en Chine, où l’on retrouve plutôt le portrait d’un
exceptionnel meneur d’hommes et d’un exceptionnel chef d’état. Dès l’époque de
Gengis Khan commencent les incursions dans le domaine coréen de Kôryô. Les
descendants de Gengis Khan vont continuer son œuvre et accroître la domination
de l’empire mongol : Perse, Irak, Russie (ravagée)… Ils arrivent en Pologne où
lors des affrontements l’armée chrétienne est ravagée en 1241…
A l’Est, après la conquête des royaumes sino-barbares de la Chine du nord, le
domaine des Song du Sud va être le domaine des petits-fils de Gengis Khan,
notamment de Kubilai Khan (1215 – 1294), malgré une très forte résistance des
Song. Les Mongols tentent d’encercler le domaine par le Sud. Kubilai Khan en
1260 devient le Grand Empereur des Mongols. Il transfert à Gambalik (Pékin) la
capitale mongole qui se trouvait à Karaboum. Il poursuit la politique de ses
prédécesseurs pour isoler encore plus les Song. Il installe, à la tête des partis,
des personnages pro-mongols, organise des mariages de prince(sse)s avec des
Mongols, et parvient à dominer les Song.
Les Mongols voulaient reprendre l’empire universel de la Chine, mais
conquéraient de manière beaucoup plus agressive que les Chinois. Les Chinois
avaient cherché à s’étendre mais ne contrôlaient pas tellement les steppes et les
terres éloignées, tandis que les Mongols, plus nomades, ne s’arrêtent nulle part.
Ils n’emploient pourtant pas systématiquement la violence. Ils attendent la
soumission des peuples. S’ils peuvent l’obtenir par la diplomatie, ils sont
contents : cela leur permet d’économiser leur armée. Ils préfèrent donc l’action
diplomatique.
Une fois les peuples soumis, les Mongols leur garantissaient la sécurité. Alors
qu’à l’époque des Song les bagarres étaient fréquentes (notamment sur les
routes), sous la domination mongole les zones sont pacifiées. Cela ayant permis
l’unification et la pacification de la route de la soie, de nombreux occidentaux ont
pu s’y rendre en sécurité, et rapporter de nombreux témoignages.
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Les Mongols s’intéressent au Japon
A l’époque où Kubilai Khan devient chef, les Mongols avaient sécurisé de
nombreuses routes terrestres. Kubilai Khan décide de faire la même chose sur
les routes maritimes. Il s’intéresse aux états insulaires, et donc au Japon. En
1266, il ordonne au roi coréen de Kôryô d’escorter un envoyé des Mongols au
Japon. Mais le roi empêche le départ de la mission. Kubilai Khan est irrité et
ordonne la même chose l’année suivante. Cette fois-ci, l’ambassade arrive sur
Kyûshû en 1268 avec une lettre qui montre quelle idéologie guide les Mongols.
Ils parlent de « mandat céleste ». En Chine, de nombreuses dynasties se sont
succédées et ont souvent mal fini. Le souverain en Chine est le « fils du ciel »,
Tenshi. L’idée de « mandat céleste » fut élaborée pour que les nouvelles
dynasties soient acceptées : le peuple reçoit une dynastie du ciel qui tient tant
qu’elle est juste. Elle est donc la dynastie légitime : si elle a renversé la
précédente, c’est que la précédente n’était plus juste, mais que la nouvelle l’est.
Les relations que les Mongols veulent entretenir avec le Japon ressemblent à
celles que voulait entretenir la Chine avec les voisins. Cependant, la dernière
phrase de la lettre adressée au Japon indique que les Mongols n’excluent pas une
intervention militaire. Ils demandent l’envoi d’une ambassade.
Silence du Japon
A cette époque, le gouvernement de Kamakura était dans une période de
stabilité politique. Les institutions avaient des aspects collégiaux. Le Tokusô (chef
de maison Hôjô) gouvernait le shôgunat avec à la tête des Miuchibito (vassaux
proches des Hôjô). Le régent Hôjô est Tokimune (1251 – 1284). La ligne
diplomatique est dure et intransigeante.
Lorsque la lettre arrive au Japon, le shôgunat délibère, conseillé par des
moines zen de la Chine des Song du Sud. Ils décident de ne pas répondre. De
plus, un problème se pose : la lettre est adressée au roi du Japon, qui n’existe
pas. Pour les Mongols, il était impossible qu’il y ait un empereur au Japon. Le
shôgunat transmet la lettre à l’empereur de Kyôto, Oosaga : L’empereur n’est
pas totalement écarté de tout rôle politique. Il décide d’ignorer la lettre lui-aussi.
Sachant ce qu’il se passait en Chine et en Corée, ils ont conscience qu’une
réaction négative est probable. Ils avertissent les gouverneurs militaires nommés
par le gouvernement de Kamakura dans les provinces de se mettre en état
d’alerte.
Au milieu de l’année 1268, Kubilai Khan fait construire une flotte et mobiliser
une armée (environ 10 000 hommes). Les raisons invoquées sont la rébellion des
Song du Sud et du Japon. Kubilai Khan continue parallèlement l’approche
diplomatique. Il envoie un second émissaire qui revient sans avoir eu d’entrevue,
avec deux captifs japonais qu’il présente à la Cour de Pékin. Kubilai Khan les
comble de cadeaux, leur explique qu’il veut entretenir des relations pacifiques et
les renvoie avec une nouvelle ambassade. Il tient le roi de Kôryô pour
responsable de la lettre envoyée. L’ambassade ne va pas cependant pas aller
plus loin que la précédente.
Kubilai Khan envoie un nouveau document en 1270 (ce qui prouve que les
Mongols n’attaquaient pas immédiatement). Le shôgunat reste muet.
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Révolution en Corée
En 1269, une révolution éclate en Corée. Le roi pro-Mongols est détrôné et un
mouvement anti-Mongol se développe. C’est la guerre civile en Corée. En 1270,
Kubilai Khan décide d’intervenir pour mater la rébellion. En 1271, les forces
combinées des Mongols et des Coréens pro-Mongols écrasent les rebelles. Parmi
ces rebelles, certains avaient demandé un soutien au Japon qui avait préféré
rester en dehors. Après avoir nettoyé les rebelles, les Mongols disposent d’une
force armée importante située près du Japon.
Le gouvernement shôgunal avait pris connaissance de la menace, et avait
ordonné le retour des Gokenin (hommes-liges) de Kamakura à Kyûshû pour se
préparer à une invasion.
Après la soumission de la Corée, les ambassades (plusieurs tentatives jusque
1273) prennent un ton beaucoup plus menaçant.
En 1273, la situation évolue dans le Sud de la Chine. La situation des Song du
Sud est de plus en plus intenable. Après la liquidation de la rébellion de Corée,
Kubilai Khan décide d’en finir avec l’empire des Song du Sud. Il ordonne un
mouvement pour détruire définitivement la dynastie des Song et ordonne à la
dynastie rétablie de Kôryô de réunir une flotte et des hommes prêts pour 1274.
Il décide d’agir sur deux fronts : Envahir le Japon et en finir avec les Song du
Sud.
1ère Invasion
L’expédition pour le Japon part en 1974 : Bun’ei no eki : « la guerre de l’ère
Bun’ei ». Elle aurait dû avoir lieu dans une période calme pour la navigation,
mais elle part finalement avec trois mois de retard, à la fin de l’année. C’est une
expédition de moyenne importance : environ 15 000 soldats Chinois sous
domination mongole, 8 000 soldats coréens de Kôryô, 67 000 marins et suivants.
La flotte apparaît, attaque l’île Tsushima. Les Mongols débarquent, battent le
gouvernement militaire local. Ils repartent vers les côtes de Kyûshû. Quatre
semaines plus tard, ils s’établissent dans la baie de Hakata (actuellement
Fukuoka). Les Mongols restent assez inactifs dans ce pays inconnus, dont ils
n’ont pas l’habitude du relief, du climat, etc.
La nouvelle du débarquement à Kyûshû est connue, les gouverneurs
mobilisent les troupes et se rendent à Kyûshû. Les Chinois parleront d’une armée
de 100 000 hommes. C’est un chiffre exagéré : En 1275, 120 guerriers seront
récompensés par le gouvernement de Kamakura. L’armée japonaise devait être
constituée de 4 000 à 6 000 hommes. Les Japonais étaient bien inférieurs en
nombre.
Un guerrier japonais, Takezaki Suenaga (1246 – ?) laisse un document, môko
shûrai ekotoba : il tient une sorte de journal dans lequel il écrit ses faits en
illustrant. Après les combats, il s’est dépêché d’aller à Kamakura pour se faire
récompenser, il avait donc prévu la tenue de ce document où il se décrit en
situation. Il détaille l’armement mongol, les équipements. Il raconte que lorsque
la nouvelle est arrivée, il a reçu l’ordre de se mettre en campagne, a réuni ses
suivants (5 cavaliers… Lui est un petit gokenin de Kyûshû), s’est rendu à la plage
de oki no hama, le point de rassemblement en face des troupes mongoles. Le
commandant décide de lancer une attaque pour remettre les Mongols à la mer.
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Takezaki trouve qu’il y a déjà beaucoup de monde et pour se distinguer décide
de partir se trouver un meilleur coin plus en valeur (ce qui donne une idée de
l’organisation de l’armée japonaise, où chacun fait ce qu’il veut). Il se rend à
Akosaka (?) et se joint à l’attaque lancée par le commandant du secteur. Il
attaque les Mongols pendant qu’ils battent en retraire (!). Il se lance avec ses
cinq hommes. L’un est tué, trois et lui-même sont blessés, leurs chevaux sont
tués. Ils sont sauvés par l’intervention d’une centaine de cavaliers. Il n’y a pas
vraiment de stratégie pour les Japonais, mais plutôt une suite de combats
individuels. Après la guerre, le shôguna se plaindra que certains guerriers
présents aient refusé de combattre.
Les différences entre les Japonais et les Mongols dans les tactiques et
l’armement sont nombreuses. Les armes japonaises portent trois fois moins loin
que celles des Mongols qui en plus utilisent des flèches empoisonnées et ont
apporté une invention chinoise, la poudre, qui n’est pas d’une efficacité
redoutable mais effraie les chevaux.
Les Japonais abandonnent Hakata à l’ennemi, mais les Mongols décident de
rentrer : l’un des généraux est blessé et ils connaissent d’importants problèmes
de ravitaillement. La flotte appareille pour rentrer mais essuie une terrible
tempête. Le retour est pénible, ils mettent deux fois plus de temps qu’à l’aller et
perdent environ 13 500 hommes. Pour les Japonais, même si l’armée n’y est pas
pour grand-chose, la tempête est un signe de la colère des Dieux : ils parlent de
« vents divins », Shinpû/Kamikaze.
En Occident, assez tôt, on a écho de cette expédition par le vénitien Marco
Polo, marchand venu jusqu’en Chine commercer avec la route de la soie, avec
ses oncles. Il écrit en français un livre dans lequel il décrit l’empire mongol. Il
appelle le Japon Cipango/Sypangu. Il décrit un pays merveilleux, aux habitants
couverts d’or, etc. Sa description va faire rêver beaucoup d’Occidentaux qui vont
chercher cette île fabuleuse vers l’Est. Christophe Colomb va penser avoir peutêtre trouvé Cipango en arrivant en Amérique, et y cherchera de l’or.
2ème Invasion
Ce premier échec va pousser Kubilai Khan à modérer ses ardeurs et lancer une
nouvelle ambassade diplomatique à Honshû. Cette fois-ci la réaction du shôguna
est brutale : il fait exécuter toute l’ambassade à Kamakura. Kubilai Khan attend
un peu pour en tirer vengeance. Il décide de liquider les Song du Sud. En 1276,
la capitale tombe. En 1279, c’est la fin des Song. Les Mongols disposent d’une
nouvelle force armée (les contingents des Song du Sud étant tombés à leurs
mains).
En 1279, il ordonne à la population de l’embouchure du fleuve de construire
600 navires et envoie en même temps un ultimatum au Japon en lui promettant
le même sort qu’au domaine des Song. Les envoyés sont à nouveau exécutés.
Kubilai Khan fonde un ministère pour la conquête du Japon et ordonne à Kôryô
de construire 200 navires supplémentaires. Ils vont faire partir la flotte de Corée,
mais aussi de Chine. Kubilai Khan dispose d’une armée puissante : un corps
expéditionnaire de 900 vaisseaux et 40 000 hommes coréens et mongols depuis
la Corée et de 1000 00 soldats et 3 500 navires depuis la Chine.
Le Japon construit le long de la plage de Hakata (car Kyûshû est une île
montagneuse, peu de possibilités de débarquement à part Hakata) un mur sur
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20km et le shôguna renforce son contrôle sur Kyûshû. Les généraux nommés à
Kyûshû sont tous des membres Hôjô. Les guerriers sont mobilisés, même les
higokenin (non-hommes-liges).
En 1281, Kubilai Khan donne l’ordre d’attaquer. Les choses commencent mal.
Les deux flottes sont éloignées, perdent du temps. Les flottes qui viennent de
Corée arrivent en premier mais se heurtent à une défense décidée. L’armée
d’invasion n’arrive pas à prendre pied et reste sur les bateaux (ce qui n’est pas à
leur avantage car les Mongols ne sont pas des marins). Les Japonais n’hésitent
pas à attaquer la flotte avec des petits navires. La flotte de Corée subit de
nombreuses pertes. Lorsque les deux flottes sont enfin réunies, elles lancent
l’attaque générale. Au moment où elles se préparent à lancer l’assaut final, une
tempête surgit à nouveau, typhon, etc. Les pertes sont terribles. Les généraux
abandonnent et rentrent. Au moins 69% à 90% de l’armée est au fond de la baie
de Shiga.
Kubilai Khan décide de lancer une nouvelle expédition plus imposante, mais sa
mort met fin aux préparatifs. Son successeur décide d’en rester là et d’arrêter les
frais.
Au Japon, la perception d’une menace reste présente pendant plusieurs
décennies, il y aura plusieurs alertes, et la soumission des îles Ryû-Kyû.
Conséquences au Japon
Plan idéologique
Ces événements ont une importance forte pour le Japon. Les vents sont
ressentis comme un signe que le pays est divin (shinkoku) et protégé par les
Dieux. Cet argument sera réaffirmé jusqu’au XXème siècle pour justifier la
domination sur l’Asie. Les Japonais vont tirer le sentiment d’être un archipel
exceptionnel, mais en fait les Mongols vont connaître d’autres déboires similaires
dus à des tempêtes ailleurs. Les « vents divins » se manifesteront en fait à peu
près partout où les Mongols lanceront une expédition maritime (les Mongols ne
sont pas des marins et n’ont pas conscience des difficultés maritimes) et ne
seront pas propres au Japon.
Plan économique
L’état de guerre entre les Mongols et le Japon ne signifie pas une rupture des
relations entre le Japon et le continent. Les relations vont se porter très bien
malgré l’alerte de guerre. La prospérité commencée pendant les Song du Sud et
accrue pendant la domination Mongole va aussi profiter au Japon. Il n’y aura pas
d’isolement du Japon sur le plan économique
Plan politique
Sur le plan politique, les résultats sont paradoxaux pour le régime de
Kamakura. Il y a une situation de crise, une révolution de palais à l’intérieur du
shôguna.
-
Mais il y a surtout des effets très positifs : Le Japon a résisté aux
troubles mongols, a été béni des Dieux, a accru le contrôle sur le
territoire, notamment à l’ouest du pays. C’est un renforcement du
prestige, un appesantissement du pouvoir. Il y a montée de
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l’autocratie du régime shôgunal, et déclin de la Cour dans le domaine
politique.
-
Le revers de la médaille, c’est qu’après la deuxième expédition, le
shôguna a des difficultés à récompenser tout le monde : il n’y a rien à
redistribuer, puisqu’il ne s’agit pas de conquête de nouvelles terres.
Beaucoup de guerriers ayant combattu vont se voir reconnus gokenin.
S’ensuit une inflation de gokenin qui vont être de plus en plus difficiles
à contrôler et à satisfaire par les contrôleurs militaires. On assiste à
un pourrissement du régime à la fin du XIIIème siècle. Les guerriers
sont mécontents et se conduisent de plus en plus mal. Ils rançonnent
les paysans, etc. Les akuto (« brigands ») se multiplient (individus
violents qui refusent le gouvernement pacifié). C’est une des raisons
pour lesquelles le shôguna a tenté d’accroître le pouvoir à l’Ouest.
Après les guerres mongoles, l’instabilité est de plus en plus grande dans les
conditions guerrières. Ce sera une des causes de leur chute beaucoup plus
tard.
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