
Au fil des treize ans de réforme par “thérapie de choc”, l’économie de la Roumanie a
alterné récession et stagnation; les gouvernements d’après 1989 (au moins jusqu’en 2000)
n’ont réussi qu’à faire descendre le standard des réalisations vers les niveaux réalisés dans
les années 70, quand le PNB/habitant a effectivement augmenté de 1.098 dollars en 1974 à
1750 dollars/an en 1978 (il faut quand même préciser que les principaux désavantages de
l’économie roumaine proviennent des erreurs stratégiques commises avant 1989, par le
régime communiste). Notre économie de marché actuelle, dont certains hommes politiques
ont prétendu que sa transition avait presque atteint son but, ne fonctionne pas parce que
par thérapies de choc inadaptées à des situations particulières et des réformes d’un jour à
l’autre, on n’avait pas restructuré ce qu’il fallait et quand il le fallait; on n’a pas non plus créé
toutes les institutions dont l’industrie et l’agriculture avaient besoin pour qu’elles
fonctionnent comme sur tout marché capitaliste. Par contre, il est vrai aussi que les
difficultés actuelles, avec lesquelles l’économie roumaine est toujours confrontée, ne
dérivent pas de la transition, mais seulement la transition - avec tous les mécanismes
structurels que celle-ci implique - peut mener à leur solution.
Le dernier rapport de la Commission Européenne du novembre 2003 n’a toujours pas
confirmé le statut d’économie fonctionnelle pour la Roumanie mais, indiscutablement, il en a
été le plus favorable depuis toujours. Par rapport aux recommandations actuelles du F.M.I.
et de l’O.C.D.E., on précisait que “la reconstruction de l’Europe occidentale d’après la
deuxième guerre mondiale a toujours été basée sur les forces du marché, mais les mesures
prises n’ont pas été appliquées d’un seul coup; cela s’est passé lentement pendant 40 ans
environ. Ce processus occidental de réforme a été fondé sur un système comprenant des
réglementations et des mesures de contrôle, qui a maintenu l’inflation et les salaires à des
petits niveaux et, surtout, a permis le contrôle sur le taux de change, le taux d’intérêt et les
prix des produits de base, en coexistence avec la propriété publique” - spécifiaient les
auteurs de “L’agenda de la reconstruction économique et sociale des pays de l’Europe
Centrale et de l’Est”. Après 1991, des dizaines d’auteurs occidentaux mentionnaient
qu’après la guerre, si les pays de l’Europe de l’Ouest avaient appliqué les programmes de
reconstruction essayés après 1989 dans l’Europe de l’Est, aucun des miracles
économiques des démocraties occidentales n’aurait existé. Peut-être que le potentiel des
pays ex-socialistes a-t-il été sous-estimé; il n’y avait peut-être pas de meilleure solution. Les
pays du centre et de l’est de l’Europe ont appliqué des stratégies différenciées (la Pologne,
par exemple, a abordé entre 1990-1992 une large thérapie de choc, la Hongrie est passée
aux réformes depuis les années 80, etc.), mais, pour la plupart de ces économies, on a
obtenu les résultats escomptés. Contrairement à cette catégorie de pays, le démarrage de
la transition en Roumanie a été bien plus difficile, à cause de sa situation particulière
d’avant 1989 : une ultra centralisation, une totale inefficacité économique - technologie
vieillie, industrie pas du tout compétitive.
La performance réduite de l’économie roumaine n’est pas forcément la conséquence de la
passivité des gouvernements par rapport aux réformes, mais plutôt des échecs de
matérialiser leurs intentions initiales. De toute façon, parmi les éléments qui ont beaucoup
contribué à ralentir la réforme on peut énumérer :
- la confusion concernant la forme de propriété des facteurs de production. On a
beaucoup prolongé le moment de la grande privatisation et, généralement, on l’a
commencée au moment où les diverses propriétés de l’Etat ne valaient plus rien (sous
l’effet destructeur de la corruption). Une fois exprimée l’option pour l’économie de
marché et éliminée la planification centralisée et le contrôle d’Etat sur les entreprises,
qui produisaient et détenaient les moyens de production, le gouvernement de l’époque
aurait eu l’obligation minimale de créer un substitut qui garde et veille sur le réseau
public pour empêcher la disparition des liaisons vitales existantes entre producteurs,
fournisseurs et acheteurs. Non seulement on ne l’a pas fait, mais on a même pris des