Ad Astra 2 (2) 2003
www.ad-astra.ro
Ad Astra
Young Romanian Scientists’ Journal
La coopération scientifique en histoire
Zoe Petre
La recherche scientifique roumaine dans le domaine des sciences sociales et historiques ne devrait pas
rencontrer des obstacles théoriques majeurs à son intégration dans le(s) cadre(s) d’ensemble de la recherche
européenne. Car, s’il est vrai que l’idéologie officielle des 50 années de domination communiste prétendait
instaurer une unanimité exclusive du “marxisme-leninisme”, la réalité était beaucoup plus complexe, et des
pans entiers de la recherche historique et même sociale échappaient à l’emprise des méthodologies
imposées par le régime communiste. Sans doute, cette affirmation générale doit être nuancée selon chaque
domaine, et il y avait beaucoup plus d’ingérences idéologiques dans le champ de l’histoire contemporaine
ou de l’histoire nationale que dans les recherches concernant l’Antiquité ou l’histoire de l’Afrique.
Cependant, il faut reconnaître que, du moins dans quelques domaines, et pendant les quelques moments de
répit, tel celui de la fin des années 60, les contacts et le dialogue des chercheurs roumains avec leurs
collègues des universités occidentales avaient été très rapidement repris, permettant une certaine
synchronisation du débat scientifique, et que donc il n’y a pas eu de grande rupture théorique, sauf pour
quelques disciplines telle l’économie ou l’anthropologie. De surcroît, les 12 années qui ont suivi la chute de
Ceausescu ont permis des échanges et des collaborations intensifiées qui ont comblé bien de lacunes.
Si, néanmoins, des décalages persistent, c’est parce que les moyens d’information et les conditions
générales de la recherche sont encore très inégaux: les bibliothèques sont beaucoup plus pauvres, l’accès
aux archives est encore difficile, les moyens matériaux mis à la disposition de la recherche, ainsi que des
chercheurs à titre personnel, sont encore très réduits. Si dans les pays de l’UE la recherche doit bénéficier
d’allocations au niveau de 4% du PIB, en Roumanie on ne dépasse pas encore le niveau de 0,5-0,7%, ce qui
frappe, évidemment, les sciences de la nature d’abord, qui sont en général les plus coûteuses, mais qui ne
fait pas de quartier non plus pour les sciences de l’homme, dont le progrès est bloqué à plusieurs égards.
L’aspect probablement le plus grave de ce blocage se traduit dans l’incapacité des instituts et des
universités roumaines d’assurer les conditions nécessaires à l’insertion des jeunes chercheurs formés dans
les grandes universités européennes à leur retour dans leur pays d’origine, ce qui provoque une fuite des
cerveaux, dramatique dans le domaine des sciences dures, mais assez importante aussi dans les divers
domaines des sciences de l’homme.
Un autre aspect qui risque de retarder l’intégration de la recherche est celui d’une capacité très
inégale des chercheurs roumains à s’adapter aux conditions européennes de compétitivité scientifique et
aux modes de financement des programmes. Confrontés brusquement à un milieu qui, sans être aussi
agonistique que celui des universités américaines, est radicalement différent des usages propres au
dirigisme dispensateur égalitaire de pauvres subsides, la communauté académique roumaine tend
maintenant plutôt à une hiérarchie de l’habileté à trouver des financements qu’à une vraie hiérarchie de la
qualité des recherches.
En troisième lieu, l’explosion du champ éditorial a facilité une prolifération chaotique des
publications qui fait que des oeuvres essentielles, mais lourdes et sans un marché important, telles les
publications de documents, manquent de perspectives, tandis qu’une pléthore de livres sans grand mérite
prolifère et assure souvent à leurs auteurs un statut immérité dans la carrière universitaire ou scientifique.
La distance entre le “marché” scientifique exclusivement interne et le marché européen tend ainsi, au lieu