Il a fallu attendre 1956 pour que deux chercheurs américains la découvrent dans le rayonnement
émis par un réacteur nucléaire. Mais les scientifiques pensaient encore que le neutrino avait une
masse nulle. Depuis, on a la preuve scientifique qu'il en existe plusieurs sortes. Les chercheurs
préfèrent d'ailleurs utiliser le terme de « saveurs ». La masse exacte du neutrino, elle, n'a toujours
par été trouvée.
Pourquoi construit-on des pièges à neutrinos?
La réponse tient en deux mots : expérimenter et comprendre. Une multitude de particules se
baladent dans l'espace, mais la quantité et le comportement des neutrinos en feraient un élément
fondamental de notre Univers. Comprendre leur rôle permet d'avancer sur de nombreux mystères
en physique des particules, en astrophysique ou en cosmologie. Grâce à ces pièges à neutrinos,
parfois gigantesques, les chercheurs testent les hypothèses avancées par les physiciens. C'est ainsi
que l'oscillation du neutrino en trois saveurs différentes (électronique, muonique et tauique) a été
confirmée.
Albert Einstein a-t-il fait une grosse boulette?
Si l'expérimentation de Gran Sasso est confirmée, Albert Einstein a clairement une pierre dans son
jardin. Mais personne n'a brûlé l'intégralité de l'œuvre de Newton quand Einstein a démontré ses
limites, argumentent nombre de scientifiques. Si nous sommes en face de «la première observation
contredisant la relativité restreinte d'Einstein», reconnaît Etienne Klein, du CEA, ce pourrait n'être
le fait que de cette seule particule». Peut-être ne se comporte-t-elle ainsi que dans cette
configuration ou développe-t-elle un comportement quantique spécifique suivant ses saveurs,
supposent d'autres sceptiques.
Sur le sujet, la communauté scientifique manque d'expérimentation. En 1987, une supernova
observable de la Terre avait permis de comparer la vitesse de la lumière et celle des neutrinos
générés par l'explosion. Résultat du sprint : à peine trois heures d'écart pour un voyage de
168.000 ans ! Pas de quoi chambouler la relativité d'Einstein.
Pour Alain Blondel, chef du département des neutrinos à l'université de Genève, il n'est donc pas
question de jeter le travail du génial Nobel à la poubelle: «Quand on découvre quelque chose, on
améliore la théorie, on ajoute une couche, comme avec des poupées russes», résume-t-il.
Peut-on remonter le temps, à cheval sur un neutrino?
En théorie, s'il va plus vite que la lumière, oui. A chaque fois qu'on regarde le ciel, les étoiles qu'on
observe ne révèlent pas leur état actuel mais leur réalité passée puisque la lumière voyage
approximativement à 300.000 km/s. Des extraterrestres qui nous regarderaient à quelques
centaines de milliers d'années-lumière de la Terre auraient plus de chance de voir des dinosaures
que le dernier concert de Lady Gaga. Avec des particules allant plus vite que la lumière, cette
variable serait faussée... Mais sans apporter de réponse à la question de causalité: si je tombe de
mon neutrino en écrasant mon grand-père, existerais-je dans le futur d'où je viens? Et si non,
comment pourrais-je écraser mon grand-père?
Faut-il jeter les manuels de physique au feu?