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Lors q u e les c h o s es to u r nen t m a l – Com m u n iqu e r e t agi r a p rès un i n c ide n t
Publication |sécurité des patientssuisse N° 1 |Janv i e r 200 9
une maîtrise constructive de l’événement. Chacun a
alors la certitude que des enseignements seront tirés
de l’incident.
Cette gestion transparente des incidents devrait être
lumineuse et s’avérer par conséquent nécessaire.
Cependant il n’est pas facile de transmettre ou d’ex-
périmenter cette capacité à communiquer ouverte-
ment et à gérer de manière constructive les erreurs.
L’une des raisons majeures est de nature culturelle.
Au sein de notre société, la perception de soi et la
perception de l’autre qui nous ont été transmises
sont telles que les erreurs sont souvent pudiquement
occultées, et intégrées dans la culpabilité. A cela
viennent s’ajouter des motifs juridiques. Les presta-
taires sont parfois conviés à ne pas s’excuser et, si
possible, à ne pas révéler qu’un événement indési-
rable s’est produit, l’expression de regrets et l’expli-
cation du problème étant soi-disant susceptibles
d’aggraver la situation ainsi que celle des assureurs
responsabilité civile dans le cas d’un procès. Pour le
patient, il s’agit d’arguments grotesques auxquels
on peut opposer les points de vue suivants:
1. Le simple impératif humain et moral que les
auteurs formulent de la manière suivante: Nous
abordons ces problèmes sous l’angle du patient
en nous demandant: «Qu’est-ce que je souhai-
terais si j’avais subi un préjudice dans le cadre de
mon traitement?» Alors que dans certaines cir-
constances, les hôpitaux et le personnel médical
et soignant peuvent avoir des intérêts opposés,
concernant en particulier les craintes légitimes
en matière de responsabilité légale, le cadre de
notre réflexion se résume quant à lui à la ques-
tion suivante: «Qu’y a-t-il lieu de faire?». Ceci
revient à dire qu’en raison de considérations
humaines, il faut agir et communiquer comme
les patients et leur famille le souhaitent.
2. Il existe des indices très clairs montrant qu’une
politique de communication transparente n’ag-
grave pas la situation des hôpitaux sur le plan de
la responsabilité civile. Les patients qui, dans cet-
te situation, sont traités sur le mode décrit dans
le présent document intentent moins souvent
des procès que ceux à qui, par précaution, des
informations ont été tues et des excuses ont été
refusées. Et si une action en dommages-intérêts
est malgré tout intentée, elle se déroule de tou-
te évidence avec une moins grande agressivité.
Les mesures propices à l’établissement d’une
relation de confiance réduisent la tendance aux
contentieux, alors qu’une politique de commu-
nication réservée, marquée par la dissimulation
ou l’inhibition pousse à la méfiance et favorise
l’escalade. Une communication offensive cohé-
rente n’aggravera donc pas la situation juridique
mais à l’inverse la désamorcera.
3. Aux Etats-Unis précisément, les conséquences
médicolégales des événements indésirables ont
pris des dimensions énormes. En réaction, un
mouvement opposé s’est créé, qui démontre
qu’en dépit des obstacles juridiques, il existe
d’autres solutions. Le présent document en est
une preuve parmi d’autres. Il existe des groupes
entiers d’hôpitaux (par exemple de nombreux
établissements dédiés aux Veterans Affairs) qui
sont passés d’une politique défensive à une poli-
tique offensive et qui s’en sortent beaucoup
mieux que par le passé. En collaboration avec
d’importants partenaires, Hillary Clinton a lancé
un mouvement (www.sorryworks.net) s’intitu-
lant «Sorry Works!», une appellation qui parle
d’elle-même, mouvement qui s’engage sur la
scène politique pour qu’une communication
empathique et transparente vienne remplacer
une politique de communication inhibée par des
motifs juridiques.
4. Selon nous, le droit doit être subordonné aux
besoins de l’homme et non l’inverse. Les regrets
et les excuses ne sont en conséquence jamais
assimilables à un aveu justiciable. Les experts en
droit de la médecine et les avocats des patients
le confirment eux aussi.