LES TROUBLES D’APPRENTISSAGE AU TRAVAIL:
Assise à son bureau, une employée récemment promue
aperçoit, en levant les yeux, son superviseur qui tient en
main le premier rapport rédigé dans le cadre de ses
nouvelles fonctions.
« Suzanne », dit-il d’un air vexé, « Le contenu de ton
rapport est brillant comme d’habitude, mais il est criblé de
fautes d’épellation et de grammaire. Je m’attendais à
beaucoup mieux de toi qui sais habituellement si bien
t’exprimer ».
« Bertrand, lorsque tu m’as offert ce nouveau poste, je
t’avais bien prévenu que j’aurais probablement besoin
d’aide avec l’aspect écrit du travail. »
Suzanne a toujours reçu beaucoup d’éloges pour son
travail et elle était beaucoup aimée de ses collègues qui
appréciaient travailler avec elle. Ses supérieurs
econnaissaient d’ailleurs le calibre remarquable de son
travail. Elle contrebalançait sa dysgraphie (trouble de
l’écriture) par un sens aigu des affaires et un leadership
visionnaire. Elle était un atout indispensable pour son
équipe. Quelques années de travail acharné et
enthousiaste lui avaient permis de décrocher une
promotion bien méritée. Ce changement de travail exigeait
un niveau de compétence en écriture duquel Suzanne
avait pu se dérober jusqu’à ce moment-là.
Après avoir discuté des besoins réels de Suzanne, des
mesures ont été prises pour qu’elle reçoive un logiciel de
dictée ainsi qu’un vérificateur d’orthographe et de
grammaire. Sa confiance en elle a fait un bond
spectaculaire, tout comme la qualité de la présentation de
ses rapports écrits. Pour son superviseur il ne faisait aucun
doute que les 650 $ ainsi dépensés afin d’accommoder
Suzanne étaient de l’argent bien placé.
Suzanne n’est qu’une personne parmi tant d’autres qui,
selon les estimés, constituent les cinq à dix pour cent de la
population, soit jusqu’à 1,2 million en Ontario, qui doivent
apprendre à vivre avec un trouble d’apprentissage (TA).
Parmi les personnes qui ont fait de leur vie une réussite
malgré un trouble d’apprentissage notons William Hewlett
(Hewlett-Packard), Charles Schwab et l’actrice Whoopi
Goldberg. Lorsqu’ils créent un milieu de travail intégrateur,
les employeurs se placent dans une position unique où ils
choisissent d’incorporer des initiatives de diversité à leurs
stratégies d’embauche, tout en élargissant leur bassin de
main-d’œuvre et en améliorant le rendement parce qu’ils
font appel au potentiel sous- exploité et sous-estimé d’une
section de la collectivité.
QU’ENTEND-TON PAR TROUBLES
D’APPRENTISSAGE?
L’expression « troubles d’apprentissage » se réfère à une
vaste gamme de troubles du traitement de l’information qui
peuvent avoir un impact sur la capacité d’entendre, de voir
ou de s’organiser. Parmi les troubles les mieux connus,
notons la dyslexie (trouble de la lecture), les troubles du
processus auditif et les déficiences oculo-spatiales ou
celles de la mémoire à court terme. Les employés avec TA
ont prouvé maintes et maintes fois qu’ils étaient
d’excellents travailleurs, acharnés et persévérants, qui
font appel à leur grande créativité pour résoudre les
problèmes. En fait, des sondages effectués par une
grande entreprise auprès de ses employés ont révélé que
le niveau de productivité et de rendement de la grande
majorité de ceux ayant une déficience se situait dans la
moyenne et était même supérieur à la moyenne.
Et pourtant, la nature cachée des TA, qui se manifeste de
différentes façons, continue d’en confondre plusieurs qui
se laissent encore berner par des mythes et des
perceptions erronées. Les personnes qui ont des troubles
d’apprentissage ne sont pas incompétentes, maladroites
ou paresseuses, Elles n’ont pas de déficiences
intellectuelles. Les personnes avec TA possèdent une
intelligence dans la moyenne ou supérieure à la moyenne,
mais leur rendement est entravé par des défis limités à
certains domaines en particulier.
INDICATEURS DE POSSIBILITÉ DE TROUBLES
D’APPRENTISSAGE AU TRAVAIL
•Un programmeur avec des réalisations exemplaires qui
se perd souvent en route vers le bureau.
•Un apprenti mécanicien, très adroit à résoudre les
problèmes rapidement, semble éprouver de la difficulté à
comprendre les directives écrites ou les ordres de travail
de son patron.
•Une comptable possédant un talent exceptionnel pour le
souci du détail éprouve de la difficulté à interpréter les
signes sociaux et non verbaux.
•Une réceptionniste possédant des compétences
exceptionnelles en relations humaines qui n’arrive pas à
acheminer les appels vers leur poste de destination avec
exactitude.
Il ne s’agit là que de quelques-unes des façons dont les TA
se manifestent au travail. Comme nous vivons dans une
société où nous n’avons jamais assez de temps et que
nous opérons souvent en nous basant sur des
suppositions, il arrive fréquemment que nous ne prenions
pas le temps de tenir compte des autres explications
possibles de certains comportements qui nous paraissent
inappropriés et qui ne semblent pas correspondre à ce à
quoi nous nous attendons. Si une personne a du mal à lire,
nous mettons en doute son intelligence. Nous prenons
pour acquis qu’un interlocuteur peut comprendre si la
personne qui lui parle s’exprime clairement ou si on
hausse le ton. L’employé qui a un TA peut très bien
travailler et fournir un travail de qualité à plusieurs niveaux;
il se peut toutefois que le résultat de son travail et son
comportement ne soient pas constants. Il serait avisé
deconsidérer la possibilité qu’il existe un trouble
d’apprentissage si on ne peut pas compter sur la personne
pour certains aspects du rendement au travail. De
nombreux travailleurs peuvent compenser pour leurs
difficultés lorsqu’on leur fournit l’assistance et les
stratégies appropriées.
MESURES D’ADAPTATION
Pierre, un travailleur de la construction qui a un trouble de
lecture devait, pour pouvoir être promu, réussir un test sur
l’interprétation d’un plan. Après avoir divulgué à son
instructeur qu’il avait ce problème, on lui a accordé plus de
temps et l’aide d’une personne bénévole pour lui lire les
questions d’examen, ceci sans qu’il n’en coûte rien à
l’employeur. Suite à ses résultats positifs, Pierre a obtenu
un nouveau poste avec un meilleur salaire et des chances
d’avancement.
Comme leur nom l’indique, ces « mesures d’adaptation »
sont souvent des adaptations faites au milieu de travail ou
à la description des tâches qui peuvent s’avérer rentables
et qui permettent à l’employé ayant un TA d’exécuter les
tâches essentielles d’un emploi. Le
Code des droits de la
personne de l’Ontario
exige que des mesures d’adaptation
soient en place et à la portée de tous les employés ayant
une déficience lorsqu’ils participent à un processus de
sélection, à moins que ces mesures présentent un défi fin
ancier trop difficile à surmonter pour l’employeur.
Fatima, une journaliste d’affaires qui souffre de troubles de
la mémoire auditive, devait faire un reportage couvrant des
réunions pour un article paraissant en ligne toutes les
semaines. Elle s’est vue accorder le droit de se servir
d’une enregistreuse pendant les réunions (au coût de 120
$) et plus de temps pour rédiger ses articles afin qu’elle
puisse écouter son enregistrement et prendre des notes.
Résultat, ses articles dénotent un plus grand souci du
détail.
Azam, qui a des problèmes de séquencement, a obtenu un
poste de commis dans un bureau très affairé. Pour l’aider
à surmonter les difficultés qu’il éprouve lorsqu’il faut
classer de l’information dans le bon ordre alpha-numérique,
on lui a fourni une baguette spéciale de classement
(« sort-all ») (qui coûte 25 $), ce qui a permis d’accroître
considérablement sa productivité et d’améliorer ses
habiletés organisationnelles.
Les mesures d’adaptation sont des solutions créatrices
auxquelles les employeurs ont recours pour améliorer le
rendement de leurs employés. En voici quelques-unes :
• fournir des renseignements sur bande magnétique, par
écrit ou par courriel, aux employés qui éprouvent de la
difficulté au niveau du traitement auditif.
•
fractionner les tâches selon un horaire rigoureux pour le
travailleur qui peut éprouver de la difficulté au niveau de
l’organisation de l’information, de la mémoire ou de
l’organisation en général.
• permettre aux employés facilement distraits de par la
nature de leur déficience de travailler par eux-mêmes dans
un endroit tranquille.
•offrir des programmes de mentorat où sont jumelés des
membres du personnel en place depuis un certain temps
et les nouveaux employés avec TA de façon à les guider,
les appuyer et les aider occasionnellement à accomplir