
Qualité de vie sexuelle chez les personnes vivant avec le VIH 191
Tableau 4 Prévalence des troubles sexuels selon les études (Lallemand et al., 2002 ; Lert et al., 2004 ; Troussier et Tourette-
Turgis, 2006).
Lallemand (%) Lert (%) Notre série (%)
Activité sexuelle maintenue — 60 57—
Trouble sexuel actuel 71 35- 44 75
Trouble sexuel avant le diagnostic 18 — 9
Trouble sexuel avant la trithérapie 32 — —
comme l’a montré l’enquête VESPA (Schiltz et al.,
2006).
Les premières études publiées sur la sexualité et la
séropositivité montrent que la séropositivité affecte la vie
sexuelle des personnes séropositives, avec des difficultés
d’annoncer le statut sérologique au partenaire. Quatre-
vingt-quatre patients de notre étude (70 %) ont annoncé leur
séropositivité à leurs partenaires.
Dans notre étude, 64 % des hommes affirment ne pas avoir
une activité sexuelle satisfaisante et 80 % rapportent des
troubles sexuels notamment le dysfonctionnement érectile.
Une étude conduite en France (Lallemand et al., 2002)
auprès de 156 patients de sexe masculin sous traitement
antirétroviral, montre que 71 % rapportent des troubles
sexuels (perte de libido, troubles de l’érection, difficul-
tés lors de l’orgasme) sachant que 18 % d’entre eux avaient
déjà ce problème avant de connaître leur séropositivité et
32,4 % avant la prise d’un traitement antirétroviral. Ce qui
concorde avec nos résultats (Tableau 4).
Dans l’enquête Vespa (Lert et al., 2004) conduite en
France, 35 à 44 % des personnes séropositives sous traite-
ment déclarent avoir des troubles de la sexualité. Soixante
pour cent déclarent avoir des relations sexuelles avec un
partenaire ou une partenaire stable, parmi lesquelles 32 à
45 % disent avoir eu des ruptures de prévention.
Dans la littérature, il y a très peu de données concernant
la sexualité des femmes vivant avec le VIH (Luzi et Guaraldi,
2009). Les femmes consultent principalement autour du
désir d’enfant, peu de consultations concernent la sexualité
et le désir (Rochet, 2006).
Une étude anglaise (Keegan et al., 2005) auprès de
21 femmes séropositives démontre l’impact négatif de la
séropositivité sur la qualité de leur vie sexuelle (baisse de
libido, réduction du plaisir sexuel, difficultés à trouver des
partenaires, ainsi qu’en matière de prévention (difficultés
à négocier l’usage du préservatif, peur du rejet si elles
informent leurs partenaires de leur statut sérologique).
D’autres études ont trouvé que 63,4 % des femmes vivant
avec le VIH déclarent que leurs pratiques sexuelles ont
changé, 74,6 % affirment que leur vie intime est globalement
moins satisfaisante et la moitié des femmes séropositives
ont une vie sexuelle peu ou pas active.
Dans notre étude, 70,5 % des patientes affirment ne
pas avoir une activité sexuelle satisfaisante et 69 % rap-
portent des troubles sexuels, notamment baisse de la
libido, anorgasmie et dyspareunie. Les résultats de notre
étude sont relativement élevés par rapport aux études
menées dans les pays occidentaux, cette légère augmenta-
tion est probablement liée à des considérations religieuses
et sociales qui interdisent toute relation sexuelle hors du
mariage.
Les troubles sexuels peuvent être engendrés par l’impact
psychologique du caractère sexuellement transmissible du
VIH (culpabilité, peur de contaminer), par la baisse du taux
de certaines hormones, par une dépression, ou par les trai-
tements. De possibles carences en vitamines et minéraux
peuvent aggraver la situation (Guaraldi, 2007). Les troubles
sont plus importants chez les personnes traitées quel que
soit la combinaison (Lallemand, 2002). Les troubles érec-
tiles sont plus fréquents chez les hommes traités par les
inhibiteurs de protéase (Moreno-Perez, 2010). L’impact des
traitements antirétroviraux dans ces dysfonctions serait plu-
tôt lié aux effets indésirables globaux et au stress que peut
représenter la prise de médicaments (Lallemand, 2002).
D’autres études ont montré que les changements corpo-
rels sont les déterminants majeurs des dysfonctionnements
sexuels chez les PVVIH (Luzi et Guaraldi, 2009).
Dans notre étude, 73 % des patients hommes ont une
addiction actuelle au tabac, et 16,3 % à l’alcool ce qui peut
expliquer le taux élevés des troubles sexuels car les fumeurs
ont quatre fois plus de risques de devenir «impuissants »que
les non-fumeurs. En plus l’alcool provoque une carence en
vitamines B et une chute du taux de testostérone qui est
nécessaires à la sexualité (Kaplan et al., 1985).
Les messages de prévention mettent l’accent sur les
risques d’infection (ou de surinfection) associés à l’activité
sexuelle et recommandent l’utilisation systématique de pré-
servatifs. Parmi les femmes séropositives, 42 % déclarent
des rapports non protégés avec le partenaire stable et 29 %
des rapports non protégés avec des partenaires occasion-
nels. Parmi les hommes ayant des rapports sexuels avec des
hommes, 40 % déclarent des rapports non protégés avec le
partenaire stable et 23 % des rapports non protégés avec des
partenaires occasionnels (Lert et al., 2004).
Une étude conduite en Californie auprès de 145 couples
hétérosexuels sérodiscordants montre que 45 % de ces
couples déclarent avoir eu des relations sexuelles vaginales
ou anales non protégées au cours des derniers six mois
(Buchacz et al., 2001). Dans notre étude 59 % des inclus
seulement utilisent systématiquement le préservatif lors des
rapports sexuels : le recours systématique au préservatif est
souvent vécu comme une limitation frustrante de la spon-
tanéité et de la fantaisie dans les rapports sexuels, ce qui
constitue un grand problème en terme de prévention.
Conclusion
Cette étude témoigne de l’importance des troubles sexuels
chez les PVVIH. Dans le cadre de la prise en charge globale de
ces patients, les cliniciens doivent explorer/interroger leurs
patients quant à leur vie affective et sexuelle. L’existence