Sud sciences et technologie n°10

Y. KOUSSOUBÉ
Laboratoire d'hydrogéologie, UFR en
Sciences de la Vie et de la Terre,
Université de Ouagadougou BP 7021
Ouagadougou
Burkina Faso
youssouf. [email protected]
s. NAKOLENDOUSSÉ
Laboratoire d'hydrogéologie, UFR en
Sciences de la Vie et de la Terre,
Université de Ouagadougou BP 7021
Ouagadougou
Burkina Faso
P. BAZIÉ
Laboratoire d'hydrogéologie, UFR en
Sciences de la Vie et de la Terre,
Université de Ouagadougou BP 7021
Ouagadougou
Burkina Faso
A. N. SAVADOGO
Laboratoire d'hydrogéologie, UFR en
Sciences de la Vie et de la Terre,
Université de Ouagadougou BP 7021
Ouagadougou
Burkina Faso
Typologie des courbes
de sondages électriques
verticaux
pour la recon-
naissance des formations
superficielles et leur inci-
dence en hydrogéologie
de socle cristallin
du Burkina Faso
Résumé
Au Burkina Faso, les reconnaissances des
formations superficielles du sol ont été
faites
à l'aide de la méthode électrique
des résistivités (dispositif Schlumberger).
Le recalage des données de sondages
géophysiques avec les observations et
reconnaissance de terrain, confronté
à
l'analyse des coupes de forages hydrau-
liques, a permis de distinguer sept
(7)
allures principales de courbes de son-
dages électriques verticaux. Des applica-
tions hydrogéologiques de cette classifi-
cation ont été dégagées selon le contexte
géologique.
Mots-clefs
: Géophysique, méthodes
électriques (Schlumberger), Sondages
électriques verticaux, Hydrogéologie,
Socle cristallin.
DIFFERENT TYPES OF VERTICAL
ELECTRICAL SOUNDINGS FOR
UPPER SOILS RECOGNITION AND
THElR PART
IN HYDROGEOLOGY
OF CRYSTALLINE BASEMENT
OF
BURKINA FASO
In Burkina Faso, electrical resistivity
method
(Schlumberger'configuration) has
been used for upper soils recognition.
Field datas and fields measurements of
electrical sounding have permitted to dis-
tinguish seven principal types of curves.
In hydrogeology of crystalline basement,
the better curves providing an important
yield of bore holes has been indicated.
Key Words
: Geophysics, Electrical
methods (Schlumberger), Electrical
soun-
ding, Hydrogeology, Crystalline base-
ment.
SUD SCIENCES & TECHNOLOGIES
NO10 - juin 2003

INTRODUCTION ET
PROBLÉMATIQUE
Le Burkina Faso appartient au
bouclier Baoulé-Mossi constitué
de roches cristallines et cristallo-
phylliennes mises en place et
déformées au cours des oro-
genèses libérienne et éburnéenne.
Ces formations ont été aplanies
et stabilisées depuis 600 Millions
d’années (Hottin et Ouédraogo,
1975) et ont été affectées par une
altération intense sous climats
humides et puis sous climats
contrastés humides et secs.
Ainsi, une couche épaisse d’alté-
ration, très souvent latéritique
recouvre les formations géolo-
giques saines. Les structures géo-
logiques d’importance minière et
hydrogéologique correspondent
aux zones de fracturation intense
qu’il faut rechercher (Degallier
1963). Dans ce contexte géolo-
gique et morphologique, nous
avons entrepris de faire une syn-
thèse de la contribution des son-
dages géophysiques dans la
connaissance des formations
superficielles.
En effet, les formations superfi-
cielles et pédologiques renfer-
ment une part importante des res-
sources naturelles (eaux,
mines..
.). Au Burkina Faso, dans
les années 1950, les premières
campagnes géophysiques ont été
menées par
%a Compagnie
Ginérale
de Géophysique ; par la
suite. ce sont les intitutions natio-
nales (Direction de l’hydraulique
et de l’équipement rural, Bureau
des mines et de
ia geologie du
Burkina. Office national des
puits
et forages, Université de
Ouagadougou, services privés)
qui ont assuré la prospection géo-
physique. Le domaine d’utilisa-
tion intense de la géophysique
actuellement au Burkina Faso est
la recherche des nappes d’eau
souterraine
; mais cette discipline
est aussi utilisée dans l’étude
d’avant-projet de barrages (Ziga,
Yakouta) et pour mettre en évi-
dence des gisements miniers.
De nos jours au Burkina
Faso,
l’utilisation de méthodes géophy-
siques plus élaborées (électrique
multiélectrodes 2D et 3D, élec-
tromagnétisme, sismique,
TDEM..) côtoie celle de la
méthode ancienne des résisti-
vités. Cependant, en raison de ses
faibles coûts et de sa mise en
oeuvre facilement maîtrisable par
les techniciens de terrain, la
méthode électrique des résisti-
vités est de loin la plus couram-
ment utilisée
; de plus, ses
domaines d’application sont
variés. C’est pourquoi, pour aider
à la prise de décision rapide par
les ingénieurs, une synthèse
a été
faite de nombreux travaux en
géophysique appliquée
à l’hy-
drogéologie.
Ces travaux réalisés depuis une
vingtaine d’années, comprennent
plus de deux milles
(2 000) son-
dages électriques verticaux de
type Schlumberger repartis
à tra-
vers les zones cristallines et cris-
tallophylliennes du Burkina
Faso. Ces zones investiguées
couvrent 82
% du territoire.
Cette synthèse fait ressortir des
caractères communs qui singula-
risent la structure d’ensemble des
formations superficielles recou-
vrant le socle sain. Des proposi-
Sgende :
Formations sediiiieiiiaires Teiliaireï du Bassin Voltaeii (grès. argiles, calcaires, doloniies) ;
Formations cristnllinr\ Birirnienncs i PrciiirozOiyue infkiçur) : schisies, quamites, grès,
ingloiiiCrats. rochcï vcm\ : 3) Graiiii
qiies (gr;iii»<lioiiies et ionrilites) : 4) t4:rinni~wiis antébirimiennes :
mites syiitecioi:iqws (gneiss, ini:miiitts) , 5) Faille identifiée sur le ierraiig.
i t:irdi -tectciiiques (graiiiies alcalin\), Granites et granodiofites post-tecte
Hidi (NaYiri.
R:i+foond, M
go. SaiiienC) . C : Tinghandin : D : Tikaré : E : Cnmpenient
utier de
Pâ.
N’BQ - juin 2003

I
1 l#a Bidi (Samené)
I I
tions de chances de succès d’ou-
vrages de captage en hydraulique
villageoise sont faites.
MÉTHODOLOGIE
La méthode électrique des résis-
tivités consiste
à injecter du cou-
rant continu dans le sol
à l’aide
d’électrodes A et
B et à en mesu-
re
la différence de potentiel en
deux points
MN compris entre A
et B. On distingue les profils de
traîné d’une part et les sondages
électriques verticaux d’autre
part. Les profils de traîné permet-
tent l’investigation latérale et les
sondages verticaux permettent
de mieux appréhender la succes-
sion des couches de terrains
(Degallier 1963, Meyer 1991).
Pour les présents travaux, le traîné
électrique s’effectue avec un dis-
positif Schlumberger avec les
caractéristiques géométriques sui-
vantes
: AB = 180 m, MN = 20 m
et 10 m de pas de mesure qui per-
mettent, la plus part du temps, de
détecter les principales fractures.
Par expérience, cette technique
géophysique d’investigation laté-
rale est utilisée conjointement
pour optimiser la recherche des
anomalies conductrices avec le
profil électromagnétique bipôle
MaxMin (Apex) d’exécution très
rapide sur le terrain. Le dispositif
de mesure comprenant une distan-
ce de séparation entre l’émetteur
et le récepteur de 100 m et des fré-
quences d’émission variées de
110,
220, 440, 880, 1760, 3520,
7040 et 14080 hertz, est souvent
utilisé. L‘expérience montre que
la
fréquence 3520 hertz est celle qui
est la mieux adaptée au contexte
de socle cristallin du Burkina
Faso
et indique des anomalies conduc-
trices comparables
à celles
données par la méthode électrique
des résistivités (Nakolendoussé
199 1, Koussoubé 1996)
;
Les sondages électriques verti-
caux (dispositif Schlumberger)
effectués au droit des anomalies
de résistivités électriques per-
mettent d’ appréhender la succes-
sion des horizons de terrains
reposant sur le substratum sain.
Le recalage des interprétations
des sondages géophysiques s’est
fait avec les données réelles des
coupes géologiques de forages
d’eau et leur productivité, des
coupes pédologiques, des états
de surface du sol (indices végé-
taux et animaux, sols, affleure-
ments de roches..
.).
TYPOLOGIE DES COURBES
DE SONDAGES
ÉLEC-
TRIQUES VERTICAUX
Les sondages électriques de type
Schlumberger réalisés en milieu
de socle cristallin soudano-sahé-
lien et sahélien du Burkina
Faso
ainsi que les observations in-situ
ont permis de dégager sept (7)
familles de courbes correspon-
dant aux différentes successions
de couches de terrain.
Courbes de sondages
électriques avec “un seul
fond de bateau“
Ces courbes caractérisent les
régions
à cuirasse latéritique (ou
à carapace latéritique) superfi-
cielle qui sont très largement
répandues dans le pays, sur
les
versants de reliefs et dans les
bas-fonds sablo-gravillonnaires.
L‘interprétation de ce type de
courbe montre une structure
à
trois couches de terrain électri-
quement distincts
:
- Le recouvrement superficiel
avec des résistivités vraies de
700
à 3 O00 0hm.m. Son épais-
seur est généralement faible et
varie par exemple, dans la zone
granitique de Bidi, entre 0,s m et
3 m. Mais ailleurs, elle peut
atteindre
10 m.
- Le complexe conducteur est
représenté sur la courbe de son-
dage par
le “fond de bateau”. Cet
horizon correspond
à l’altération
argileuse dont l’épaisseur (20
à
SUD SCIENCES & TECHNOLOGIES
NO10 - juin 2003

A812 lml
Bidi (Silmirnossi)
1000
-
c
7 ‘00
10
1
1 1WO
A012 (ml
plus de 50 m) est fonction de
l’importance de la fracturation
et de la nature du socle. Dans
les zones granitiques, les résisti-
vités de ce complexe varient
entre
50 et 200 0hm.m. Mais ces
résistivités sont
de l’ordre de 10
0hm.m sur socle volcano-sédi-
mentaire ou volcanique altéré.
Une si faible valeur de résisti-
vité indique la présence d’ar-
giles humides fluentes qui pour-
raient constituer un vrai handi-
cap lors de
la foration.
10 1w IWO
A012 (m)
twoo
,000
,
x ,Cu
B
e
10
1
1 10
A012 !ml
- Le socle résistant correspond à
la partie remontante à 4.5” de la
courbe du sondage. 11 correspond
au socle sain ou
à la roche peu
fissurée. Les résistivités sont
généralement élevées en milieu
granitique
(2 500 à 7 600 0hm.m)
mais plus basses en zones schis-
teuses ou volcano-sédimentaires
(800 - 1 O00 0hm.m). La figure 2
illustre bien une telle succession
de terrains en contexte granitique
dans la région de Bidi (province
du Yatenga).
Courbes de sondages
électriques en “cloche
dans le fond de bateau”
C’est une variante du type de
courbe de sondage électrique
précédent se traduisant par une
remontée en cloche dans le fond
de bateau
(fig.3). Cette modifi-
cation de la courbe est souvent
liée
à la présence d’un horizon
d’argiles sèches ou d’argiles
gravillonnaires. Ce type de
courbe de sondage électrique est
rencontré dans les bas-fonds
actuels ou anciens (exemple de
la région de Bidi, province du
Yatenga). Ce cas de figure tra-
duit la présence d’aquifères
alluviaux dont la pérennité est
liée
à l’importance de l’alimen-
tation par les eaux de la rivière.
Courbes de sondages
électriques en “cloche
puis en fond de bateau“
Quatre (4) terrains peuvent être
distingués.
La couche de terrain
superficiel est représentée par
un recouvrement arable sableux
de champs de cultures de
la
région de Bidi (figure 4a, sur
granitoïdes), avec des résisti-
vités variant entre
90 et 200
0hm.m et des épaisseurs faibles
(0,s m). Les autres terrains
sous-jacents sont les mêmes que
ceux définis plus haut.
Un autre cas de figure présen-
tant une allure similaire est
celui
où la cuirasse ferrugineuse
épaisse est démantelée (rema-
niement par une termitière,
exploitation en carrière). C’est
ce qui
a été mis en évidence au
campement routier de
Pâ
(Savadogo 1984)’ figure 4b.
SUD SCIENCES & TECHNOLOGIES
NoIo - juin 2003

I-imRf Yarnsindé 1
Courbes de sondages
électriques
à une ”seule
branche” montante
Ce type de courbe indique des
formations superficielles présen-
tant deux terrains. Un premier
terrain formé de sables argileux
dont la résistivité s’échelonne
entre
50 à 120 0hm.m ; les épais-
seurs vont de
0,30 à 15 m mais
peuvent atteindre
40 m. Le
second terrain correspond
au
I
ABR Im)
I
ABE (m)
I
socle sain subaffleurant des gra-
nites jeunes
(fg. 5). De tels son-
dages
sur granitoïdes peuvent
être productifs si l’alimentation
est bonne comme dans le cas de
granites grossiers tectonisés
(région de Tenkodogo)
ou de
zones de bas-fonds.
Courbes de sondages
électriques
à ”remontée
traîna n
t e”
Dans ce cas, les deux branches de
la courbe sont dissymétriques. La
diminution de la pente montante
est liée
à l’existence d’un terrain
très important en hydrogéologie et
en génie civil
à savoir les arènes
grenues (horizon graveleux) et le
socle fissuré, entre l’horizon
conducteur et le socle sain
(Savadogo 1984, CIEH 1987). Ce
type de sondage est lié
à l’influen-
ce d’une mégafracture, Savadogo
(1984), Biémi (1992). L‘inflexion
de
la branche montante peut être
assez prononcée et donner une
courbe de sondage avec
un “esca-
lier sur la branche montante”.
Cette allure est bien illustrée par
les figures
6 (BidVNayiri), 8
(Tinghandin) et 9 (Yamsindé). La
productivité de ces courbes de
sondage est chaque fois bonne
(>
2 m3/h) et dépend de l’épaisseur de
la frange fissurée.
Une étude récente de la producti-
vité des forages
a gros débits
montre que les débits
cies forages
sont en liaison étroite avec 1’6
paisseur de l’altération alurnino-
ferrugineuse et argileuse
(Direction générale de
l’hydi-xi-
lique 1991).
Courbes de sondages
électriques avec ”une pre-
mière branche
à escalier
descendant”
Ce type de courbe de sondage
électrique se singularise des
autres par un palier (“intermé-
diaire en descente”) entre le pre-
mier complexe résistant et le
complexe conducteur. Elles indi-
quent bien par le palier, le toit de
la nappe des cuirasses latéri-
tiques noyées variant entre
10 et
20 mètres de profondeur en
période très sèche (mois d’avril),
figure
8 (Tinghandin).
SUD SCIENCES & TECHNOLOGIES
NoIo - juin 2003