Biographie d’Alain Alain, Émile Chartier de son vrai nom, est né le 3 mars 1868 à Mortagne-au-Perche dans le département français de l’Orne. Philosophe, journaliste, professeur de philosophie, dramaturge et essayiste, Alain a vécu du XIXe au XXe siècle. Fils de vétérinaire, Emile Chartier est un enfant heureux et équilibré. Certains épisodes de sa vie sont néanmoins dramatiques. Durant cinq années, entre 1881 et 1886, il fréquente le Lycée d’Alençon. Alain se voyait bien intégrer l’Ecole Polytechnique mais il s’est finalement orienté vers des domaines différents. C’est loin des filières techniques, qu’Alain débute sa vie professionnelle. En effet, en 1903, il embrasse tout d’abord une carrière de journaliste au sein de « La Dépêche de Rouen et de Normandie ». Il est à son aise dans ce métier qui lui permet de laisser libre cours à son imagination et de s’exprimer librement. C’est sous le pseudonyme d’Alain, qu’Émile Chartier signe ses articles. Seulement, l’influence que Jules Lagneau, son professeur de philosophie, exerce depuis quelques années sur le jeune homme, n’est pas moindre. Ainsi, il finit par se détourner, partiellement, du journalisme. Avant de devenir agrégé, Alain effectue sa préparation littéraire au lycée de Michelet dans lequel Jules Lagneau enseigne. L’influence que ce professeur de philosophie exerce sur lui est probablement la plus grande de toute son existence. En 1892, il sort de l’École Normale en tant qu’agrégé. Il devient à son tour, professeur de philosophie et est affecté dans plusieurs lycées dans les villes de Paris, Lorient et Rouen. Peu de temps avant le début de la Première Guerre Mondiale, il milite en faveur du pacifisme. Ce pacifiste dans l’âme est aussi un citoyen modèle qui fait le choix de taire momentanément ses convictions dans le but d’accomplir son devoir. Quand la guerre éclate, Alain a quarante-six ans. Il y participe et ses états de service, en tant que brigadier, sont exemplaires. Pourtant, il refuse toute promotion, car même s’il remplit son devoir, il déteste toujours l’idée que l’être humain puisse ainsi traiter son semblable. La guerre est une boucherie qui le répugne. Pendant qu’il sert son pays à la guerre, un accident lui cause une sévère blessure à la jambe et il est démobilisé en 1917. Alain est un infiltré qui a vu de près la sauvagerie, la brutalité, le caractère abjecte de certains de ses semblables. C’est donc en toute connaissance de cause qu’il donne son avis dans Mars ou la guerre jugée. Paru en 1921, cet essai est l’un de ses chefs-d’œuvre. Le pacifiste a depuis longtemps refait surface et son militantisme est intact. Désappointé par les tensions qui ont précédé la Seconde Guerre Mondiale, ainsi que par le régime d’oppression qui prévaut, Alain multiplie les campagnes militantes. Lors de ces sorties dédiées au pacifisme et à la liberté d’opinion, il rencontre d’autres grands esprits notamment Jean-Paul Sartre. Il est prêt à tout pour éveiller les consciences et éviter une autre boucherie. Ainsi, en 1930, il fonde le Comité de vigilance des intellectuels antifascistes. À ses côtés, l’on retrouve Paul Rivet et Paul Vangelin. Nul ne peut parler d’Alain sans s’intéresser aux Propos. Les Propos sont la signature de cet esthète. Il s’agit d’articles dans lesquels le philosophe et le journaliste se mêlent afin d’aborder de nombreux domaines. Les Propos sont pour Alain ce que le roman est à Stendhal. Ce sont des écrits dans lesquels la société se reflète au travers de l’actualité et de la vie quotidienne. En 1906, alors qu’il est encore journaliste, c’est dans « La Dépêche de Rouen et de Normandie », qu’il utilise ce terme pour la première fois. Émile Chartier n’a pas publié exclusivement sous le pseudonyme d’ « Alain ». En effet, entre 1893 et 1914, il en a utilisé d’autres notamment Criton, Quart d’œil et Philibert. En 1930, Alain a soixante-deux ans et est très affaibli. Il reste alité et ne sort que très peu. En 1936, il est foudroyé par un AVC qui le rend paraplégique. Il s’éteint le 2 juin 1951 à Vésinet, dans les Yvelines. Émile Chartier a inspiré de nombreux esprits et l’on compte parmi ses disciples: Raymond Aron (sociologue et philosophe), Georges Canguilhem (philosophe, médecin et historien) et Simone Weil (femme politique et académicienne française). Lui-même inspiré par Descartes et Auguste Comte, Chartier prônait le cartésianisme. Il niait l’existence de l’inconscient de la philosophie freudienne. Athée, il était néanmoins respectueux du caractère universel de la religion. Le père d’Émile Chartier soignait les hommes, lui se voulait médecin de l’intellect. Il soutenait que la raison devait guider toutes nos pensées et nos actions ; et qu’il fallait tordre le cou aux préjugés. Son plus grand regret était de n’avoir pas connu Descartes.