PRISE EN CHARGE DU PATIENT TRAUMATISE CRANIEN EN REANIMATION Centre Hospitalier Universitaire de Saint-Étienne Réanimation polyvalente B, Pr AUBOYER. Dr GERGELE L. Mr STEVE S. (IADE Cadre de santé) Me AMAGOUNE F. (IDE) Mr LEBRAT R. (IDE) Mr PIAZZA C. (IDE) SOMMAIRE Définition, mécanisme et classification Traumatisme crânien modéré – Surveillance clinique Traumatisme crânien sévère – Traitement médical Actions sur le métabolisme cérébral (Sédation et surveillance) Actions sur la Perfusion cérébrale (PCO2, PPC) Traumatisme crânien grave – Renforcement du traitement médical Actions sur le métabolisme cérébral (majoration de la sédation) Actions sur le volume cérébral (osmothérapie) Traitement de l’urgence Limite du traitement médical : Traitement chirurgical Actions sur le volume cérébral (Dérivation ventriculaire externe, drainage, craniectomie) Mobilisation et soins de confort au patient traumatisé crânien Prise en charge de la famille et devenir -1- DEFINITION ET MECANISMES Un traumatisme crânien (TC) est un traumatisme de l’extrémité céphalique. Les phénomènes de décélérations sont responsables de lésions axonales plus ou moins diffuses. Elles sont liées à une différence de comportement de la substance grise et de la substance blanche (différence de densité) lors de la décélération. Un autre mécanisme lésionnel est le choc direct générant une lésion focale, souvent associée à des fractures du crâne. Ces deux mécanismes sont souvent associés. Un choc direct peut générer des phénomènes d’accélérations décélérations. Les décélérations peuvent être générées par le choc d’une tête en mouvement sur un objet fixe. L’objectif n°1 de la réanimation réside dans le maintien du débit sanguin cérébral (DSC). Le TC entraîne des lésions initiales dites primaires (hémorragies méningée, intracérébrale, hématomes sous-dural, extra-dural) qui peuvent être compliquées de lésions secondaires souvent en rapport avec des perturbations systémiques (inadéquation entre les besoins métaboliques cérébraux et les apports assurés par le DSC). Ces lésions secondaire sont souvent regroupées sous l’acronyme ACSOS = Agressions Cérébrales Secondaires d’Origine Systémique. Les lésions primaires étant irréversibles, la réanimation cherchera à limiter les lésions secondaires et donc à optimiser le DSC. Ce concept d’optimisation du DSC date des années 90. En 1951, Janny et al, ont décrit la première utilisation du monitorage de la pression intracrânienne (PIC)1. Depuis, ce monitorage s’est rapidement développé. Longtemps considéré comme le seul monitorage utile, on assiste depuis les années 90 à l’apparition d’un monitorage multimodal (MM) centré davantage sur le DSC2 3 4. CLASSIFICATION Les TC sont classés en trois groupes, modéré (Glasgow 13-15), sévère (Glasgow 9-12), grave (Glasgow 3-8). En réanimation, sont pris en charge les traumatismes crâniens sévères et graves. Un TC ayant présenté une perte de connaissance initiale peut se dégrader secondairement. En fonction des données du TDM et du doppler transcrânien5 une surveillance en réanimation d’un patient ayant un score de glasgow élevé peut se justifier. Pour les TC sévère et grave la surveillance clinique sera supplée d’une surveillance instrumentale (Monitorage Multimodal). -2- TRAUMATISME CRANIEN MODERE - SURVEILLANCE CLINIQUE Le rôle de l’infirmier réside dans la détection des signes de souffrance cérébrale. « L’examen clinique reste le meilleur monitoring neurologique chez le sujet conscient » L’inspection Le premier élément de l’examen clinique est l’inspection. La motricité spontanée, l’agitation psychomotrice (symptôme difficile à caractériser mais pouvant traduire une souffrance cérébrale qu’il faut traquer avant d’utiliser des sédatifs) sont des éléments importants. Le score de Glasgow : Ce score doit être surveillé et latéralisé toutes les heures à la phase aigue. Il convient d’en interpréter la valeur. Un Glasgow à 15 témoigne d’un fonctionnement cérébral normal. Le passage de 15 à 14 signe l’entrée dans la pathologie. Lorsque le Glasgow devient inférieur à 8 on parle de coma. Au-delà de sa valeur absolue, le détail du score est riche d’enseignements. La composante motrice est la plus instructive. On surveille donc la motricité de chaque membre. Lorsque le score moteur devient inférieur ou égal à 3 (décortication, décérébration), cela signe une déconnexion cortico-sous corticale définissant le coma puisque le patient n’est plus capable d’interagir avec son environnement. Le recueil du score moteur doit être rigoureux. La stimulation nociceptive doit consister en une manœuvre de Pierre Marie Foix ou en une pression du lit unguéal avec un stylo. Les mains doivent être posées sur le ventre avant d’appliquer la stimulation douloureuse afin d’interpréter au mieux la réponse motrice. La surveillance pupillaire Elle reste valable chez le patient sous anesthésie. On distingue deux éléments que sont le diamètre et la réactivité pupillaire. Lorsque la lumière frappe la rétine, l’information est conduite jusqu’au cortex visuel par le nerf optique. Une boucle reflexe véhiculée par le nerf oculomoteur fait contracter l’iris en réponse. Cette oscillation permanente de la pupille permet d’en réguler le diamètre. L’apparition d’une anisocorie (asymétrie pupillaire), d’une mydriase ou d’une aréactivité pupillaire doit alerter l’infirmier qui doit le signaler au médecin responsable. Ses signes de gravité peuvent avoir plusieurs étiologies : Une atteinte de la boucle réflexe ; Une cause pharmacologique : la boucle réflexe est véhiculée par le système nerveux autonome. Le parasympathique est responsable de la constriction de l’iris et le sympathique de sa dilatation. Les drogues sympathomimétiques (adrénaline) ou parasympatholytique (dérivées de l’atropine) peuvent être responsables d’une mydriase ; Lorsqu’elle est bilatérale, elle peut aussi traduire un arrêt circulatoire cérébral, à l’image de celle retrouvée dans l’arrêt cardiorespiratoire. Elle s’explique par une ischémie cérébrale responsable d’un arrêt du métabolisme cérébral et donc de tous les reflexes. -3- Rôle IDE : surveillance de la glycémie Lors d’une agression, il apparait une insulino-résistance au niveau des organes, une augmentation de la production endogène du glucose, un dérèglement du métabolisme du glucose au niveau cérébral et une altération de la barrière hémato-encéphalique. Ceci provoque une hyperglycémie qui altère le métabolisme du glucose au niveau cérébral et inhibe la production d’énergie nécessaire à la survie des cellules. Chez le traumatisé crânien l’hyperglycémie sévère, l’hypoglycémie sévère ou encore la variabilité glycémique semblent avoir des effets secondaires majeurs au niveau neuronal et ainsi aggraver le pronostic du patient6. L’objectif n’est pas d’obtenir une valeur glycémique strict mais de minimiser les risques d’hypoglycémies, d’hyperglycémies sévères et de limiter les variations glycémiques. Bien qu’il n’y ait pas de seuil défini, Il semble raisonnable de stabiliser une glycémie entre 8 et 10 mmol/l7 ou en évitant les variations importantes. Il faut disposer d’un protocole de contrôle de la glycémie. L’IDE est en première ligne dans la gestion de l’insulinothérapie, il est important de le sensibiliser à l’importance de ce facteur en réanimation polyvalente et plus particulièrement chez le traumatisé crânien. Rôle IDE : surveillance de la natrémie L'hyponatrémie peut majorer une hypertension intracrânienne (HTIC). La diurèse du TC doit donc être surveillée étroitement. Elle est prélevée quotidiennement avec ionogramme urinaire des 24h permettant d’adapter au mieux les apports. La densité urinaire (DU) permet d’estimer la capacité des reins à excréter ou retenir l'eau. La DU normale se situe entre 1,010 et 1,025. Elle peut être estimée grâce à une bandelette urinaire mais la valeur est peu fiable. L’utilisation d’un densimètre permet une mesure plus fine. L’IDE, en fonction des prescriptions, compense une perte sodée anormale («cerebral salt westing syndrome» responsable d’une hyperdiurèse à DU élevée) ou à l’inverse diminue les pertes d’eau en administrant de l’ADH (MINIRIN®) en cas d’hyperdiurèse à DU basse (défaut de réabsorption de l’eau par le rein). -4- TRAUMATISME CRANIEN SEVERE – TRAITEMENT MEDICAL Le doppler transcrânien (DTC) : un soutien à l’examen clinique. Il mesure de façon non invasive la vitesse des globules rouges dans les gros troncs artériels cérébraux. Il permet d’évaluer le débit sanguin cérébral. Le scanner affine le diagnostic. Action sur le métabolisme cérébral En cas de dégradation, la nécessité de recourir à une intubation (pour des raisons neurologiques, respiratoires ou autres), nécessite le plus souvent la mise en place d’une sédation. La sédation est souvent instaurée pour une indication neurologique (traitement de l’HTIC) ce qui rend l’utilisation des échelles de sédation (Ricker, Ramsay...) et de douleurs (BPS) peu adaptée. La sédation mise en place pour traiter une HTIC, nécessite une anesthésie profonde et l’utilisation du BIS (indexe bispectral) sera alors intéressante. Le BIS est un paramètre EEG qui permet d’estimer la profondeur d’anesthésie. Le capteur, placé sur le front du patient, permet d'obtenir une trace EEG et une valeur comprise entre 0 et 100. Une sédation habituelle permettant d’assurer une amnésie pour le patient correspond à un BIS entre 40 et 60. L’infirmier pourra alors surveiller la profondeur de l’anesthésie et adapter les doses de sédatif en fonction de l’objectif visé par l’équipe médicale. Cette autonomie est conditionnée à la prescription d’un protocole clair de gestion des sédations. La mise en place d’une sédation appauvrit terriblement l’examen neurologique. La grande difficulté réside dans le fait qu’une souffrance cérébrale, lorsqu’elle s’intensifie, va évoluer vers le coma. Or, si le patient est déjà dans le coma grâce aux drogues sédatives, il est impossible de faire la part des choses entre aggravation neurologique et sédation. A coté de la surveillance pupillaire qui garde le plus souvent son intérêt, le patient sera équipé d’un MM, que l’IDE devra surveiller. Actions sur la perfusion cérébrale Objectif : maintenir une pression partielle en dioxyde de carbone (PaCO2) optimale. La PaCO2 influe sur le diamètre des artères cérébrales de petit calibre (au niveau microcirculatoire). Une diminution de la PaCO2 (hypocapnie) entraine une vasoconstriction artérielle et donc une diminution du flux sanguin arrivant au tissu cérébral. L’hypocapnie est donc néfaste car elle est source d’ischémie cérébrale. A l’inverse, une élévation de la PaCO2 va entraîner une vasodilatation et augmenter l’apport sanguin cérébral (figure 1). Il va également, par l’augmentation du volume sanguin cérébral contemporain, augmenter la Pression Intra Crânienne (PIC). -5- Figure 1 : Variations du DSC et du diamètre artériolaire cérébral en fonction de la PaCO2 La relation PaCO2/DSC est linéaire avec environ 1 à 1,5mL/100g/minute de DSC par mmHg de PaCO2 Le contrôle de la PaCO2 en continue chez le patient traumatisé crânien n’est pas réalisable. En revanche il est possible de mesurer en continue l’EtCO2 (End-tidal CO2) qui est la pression partielle maximum en CO2 en fin d’expiration. Elle est exprimée en pourcentage de CO2 ou en mmHg (normale = 5 à 6%, 35-45 mmHg). De ce fait, l’EtCO2 est monitoré en continu chez tous les patients traumatisés crâniens avec un renvoi du signal sur le scope. Le capteur doit être placé en amont du filtre humidificateur car il est très sensible à l’humidité. Dans le cas où l’on utilise un humidificateur chauffant sur le circuit respiratoire, on veillera à l’orienter pour que la condensation ne s’accumule pas au niveau du capteur. Tout changement significatif de valeur doit alerter l’infirmier et être analysé. L’IDE prélève les gazométries artérielles en prenant soin de noter la valeur d’EtCO2 mesurée lors du prélèvement afin de définir de manière pluriquotidienne le gradient alvéolo-capillaire. La prescription d’un protocole clair permettra à l’infirmier d’adapter les fréquences respiratoires afin de corriger l’ETCO2 mesurée. Objectif : maintenir une pression de perfusion cérébrale (PPC) optimale La PPC s’obtient après la soustraction de la Pression Intra Crânienne à la Pression Artérielle Moyenne. Il est nécessaire de mettre en place un capteur de pression intracrânienne au niveau du parenchyme cérébral. L’augmentation de la pression intracrânienne (PIC) liée aux lésions primaires (œdème cérébral, hématome intra parenchymateux, hématome sous ou extradural, hydrocéphalie), est un élément clé de l’apparition des lésions secondaires. Elle va entrainer une baisse de la pression de perfusion cérébrale (PPC) risquant de compromettre le DSC. Chez un adulte sain, la PIC normale est de 7 à 10 mmHg et la PAM de 70 à 80mmHg, la PPC varie donc entre 60 et 80mmHg. Depuis 2007, il est recommandé de maintenir une PPC « suffisante » pour limiter l’ischémie cérébrale8. Les objectifs sont le plus souvent compris entre 50 et 70 mmHg. Le maintien du DSC, est en parti conditionné par l’autorégulation cérébrale. Ce mécanisme lorsqu’il est conservé tend à maintenir le DSC malgré des variations physiologiques de PPC. Pour maintenir le DSC constant lors des variations de PPC le diamètre des artères cérébrales de gros calibre varie (PPC = DSC × Résistances vasculaires cérébrales). Ceci a pour effet de modifier le volume sanguin cérébral et donc la PIC. -6- Figure 2 : Autorégulation du DSC et évolution de la PIC en fonction de la PPC. De manière quotidienne voire pluriquotidienne à la phase aigue, les médecins titrent la PPC idéale qui varie d’un patient à l’autre et chez un même patient dans le temps. Le monitorage multimodal (DTC, PtiO2) définit un objectif de PPC et permet ainsi d’obtenir le DSC optimal avec la PPC la plus basse. Figure 3 : Variabilité des valeurs de PPC. L’utilisation d’un monitorage du DSC est indispensable pour déterminer la « PPC idéale » (partie gauche du plateau d’autorégulation) Pour maintenir cet objectif de PPC, l’IDE dispose d’une prescription médicale comprenant un protocole de gestion des amines, du remplissage, ou dans des cas plus rares d’antihypertenseurs. Cette autonomisation de l’IDE permet de diminuer les risques liés à une hypoperfusion cérébrale et donc de limiter les ischémies cérébrales secondaires. Cette stratégie permet également de limiter les niveaux de PPC au minimum requis et donc diminue l’apparition d’œdèmes vasogéniques et prévient les complications respiratoires9. Objectif : surveillance de l’oxygénation du tissu cérébral Il est nécessaire de mettre en place d’un capteur de mesure de la pression tissulaire en oxygène (PTiO2) C’est un capteur intracrânien qui mesure la pression tissulaire en oxygène au niveau du tissu cérébral. C’est le reflet de la diffusion de l’O2 dans le tissu cérébral. La valeur de la PtiO2 est interprétable seulement quelques heures après la pose. Une chute de la valeur de PtiO2 signe une baisse de l’oxygénation tissulaire traduisant une ischémie. La valeur normale est de 25-30 mmHg. Des conséquences neurologiques apparaissent si sa valeur est inférieure à 15 mmHg. -7- TRAUMATISME CRANIEN GRAVE – RENFORCEMENT DU TRAITEMENT MEDICAL Hypertension Intra Crânienne (HTIC) réfractaire au traitement médical Renforcement de l’action sur le métabolisme cérébral Utilisation de barbiturique (Nesdonal®) En cas d’HTIC réfractaire il est parfois nécessaire d’approfondir la narcose afin de diminuer au maximum le métabolisme cérébral en utilisant des barbituriques. Plus que la valeur du BIS, c’est celle du Ratio de Suppression (RS) qui sera alors surveillé. Le RS est une valeur mesurée par le capteur de BIS. Il correspond au pourcentage du temps passé avec un EEG plat. Dès que la valeur de RS est positive, la valeur du BIS n’est plus interprétable. Le rôle de l’IDE est d’adapter les doses de sédatifs aux objectifs de BIS/RS fixés par le médecin. Hypothermie thérapeutique En neuro-réanimation, la surveillance continue de la température centrale chez les patients atteints de lésions cérébrales est recommandée10. Il a été démontré qu’en cas de TC, le cerveau est très vulnérable aux variations de température. La température cérébrale peut différer significativement de la température centrale. Elle devrait donc être surveillée de façon continue et faire partie du MM. En l’absence de température intracrânienne, la température vésicale semble être la plus « pratique » et la plus robuste. L'hypothermie thérapeutique a donné des résultats prometteurs sur des modèles animaux11 mais son utilité en pratique clinique est encore discutée. En cas d’HTIC sévères, l'hypothermie thérapeutique permet un meilleur contrôle de la PIC en réduisant le métabolisme cérébral, mais aucun impact sur le pronostic n’a été montré chez l’homme. Les effets secondaires12 (infectieux, métaboliques) expliquent probablement les difficultés à prouver son intérêt en neuroréanimation. Plusieurs méthodes existent pour traiter l’hyperthermie et installer une hypothermie : L’administration d’antipyrétique (paracétamol) et même d’AINS par certaines équipes. L’utilisation des curares ne font pas réellement baisser la température mais sont indispensables qu’elle que soit la technique utilisée lors de l’induction de l’hypothermie pour éviter les frissons. Ces derniers sont responsables d’une augmentation brutale de la consommation en oxygène et entraînent une hypercapnie pouvant aggraver une HTIC. -8- L'administration par voie intravasculaire d'un soluté cristalloïde à 6°C participe à l’induction d’une hypothermie et doit être relayée par une technique d’entretien13. Les méthodes internes utilisent des cathéters intravasculaires dédiés. Le délai d'obtention de la température cible est plus court et le maintien plus aisé. Le risque de thrombose veineuse et le coût élevé font que cette technique est peu répandue. Les méthodes externes avec du matériel dédié ou plus « artisanales » (vessie de glace ou tunnel du froid) sont les plus répandues. Elles ont comme principal avantage leur moindre coût. De nombreux inconvénients sont à déplorer dont une vitesse de refroidissement lente et l’absence de rétrocontrôle pour les méthodes artisanales. Ce dernier point est responsable d’une labilité de la température et expose au risque d’hypothermie profonde14 (<32°) et ses complications cardiaques. En cas d’utilisation des techniques externes « artisanales », l’IDE a un rôle central. L’inertie des variations de la température doit être prise en compte dans la gestion du refroidissement et du réchauffement. Renforcement de l’action sur le volume cérébral : l’osmothérapie Dans les situations d’HTIC sévères, l’osmothérapie peut permettre de faire baisser la PIC pendant quelques heures permettant d'assurer un DSC correct en attendant un traitement étiologique (évacuation d’un hématome, mise en place d’une DVE, craniectomie). L’osmothérapie a pour mécanisme d’attirer l’eau des cellules cérébrales vers les vaisseaux sanguins et diminue la pression intracrânienne de ce fait, on augmente le DSC. Si son utilisation en aigue n’est pas vraiment discutable, son utilisation « chronique » n’a jamais montrée d’intérêt. Son utilisation s’accompagne d’une hypernatrémie proportionnelle aux doses réalisées15. Il est nécessaire de compenser l’hyperdiurèse induite par le mannitol® qui peut être responsable d’une hypovolémie et d’une instabilité hémodynamique délétère. -9- LIMITE DU TRAITEMENT MEDICAL : TRAITEMENT CHIRURGICAL L’indication chirurgicale sera déterminée par le scanner cérébral. Elle permettra d’agir sur le volume cérébral notamment à travers l’évacuation d’un hématome, la mise en place d’un cathéter de dérivation du liquide céphalorachidien (LCR) ou encore une craniectomie décompressive. Une DVE, dérivation ventriculaire externe, est un cathéter qui permet de drainer le liquide céphalorachidien directement dans les ventricules cérébraux. Elle est fréquemment utilisée chez les traumatisés crâniens en cas d’hypertension intracrânienne résistante ou d’hydrocéphalie fonctionnelle induite par un œdème majeur. Celle-ci permet par la réduction du volume cérébrale, de faire diminuée la PIC. Il est possible d’installer le même type de cathéter en lombaire. Le LCR est drainé, par le biais d’une contre pression imposée en cmH2O ou mmHg, et recueilli dans un réservoir. Ce niveau de contre pression est prescrit par les médecins. Il est élevé pour un drainage faible et bas pour un drainage important. Pour avoir une contre pression juste il est important d’installer le dispositif correctement. Le zéro de l’échelle de contre pression doit être mis au niveau du tragus de l’oreille, qui correspond au trou de Monroe quelque soit la localisation du cathéter (ventriculaire ou lombaire). Le médecin prescrit soit une contre pression fixe, soit un objectif de quantité qui est généralement d’environ 10 ml heure. L’IDE dispose d’un protocole lui permettant d’adapter la contre pression. L’aspect du LCR est important, il doit être clair comme de l’eau de roche. Le risque infectieux avec un tel matériel étant élevé, dans le cas échéant, il est possible d’effectuer des prélèvements de liquide. Ceux-ci sont effectués par l’IDE sur prescription médicale. La DVE permet également de monitorer une pression intra ventriculaire (PIV), celle-ci est le reflet de la PIC. Pour cela il suffit de monter un dispositif de mesure de pression et de le relier au scope. La tête de pression doit être au niveau également du tragus. Le soluté qui permet la purge de la ligne doit strictement être gardé clampé pour éviter toute injection involontaire de sérum et ne jamais être mis sous pression Il est impératif de clamper la dérivation lors des mobilisations ceci dans le but d’éviter les variations de pression. La craniectomie décompressive est effectuée en dernier recours dans les cas d’HTIC sévère et prolongée ne cédant pas aux traitements médicaux. Elle consiste à ôter une partie de la boite crânienne, pour décomprimer le cerveau. Il faut impérativement localiser le volet. Il ne faut pas comprimer sur cette partie du cerveau non protégée, il ne faut donc pas latéraliser le malade du coté du volet. - 10 - MOBILISATION ET SOINS DE CONFORT AU PATIENT TRAUMATISE CRANIEN Ils sont très importants chez ces patients qui présentent une altération de leur autonomie due aux sédations et/ou aux séquelles du TC. Le lit doit être équipé d’un matelas anti escarre. Le patient est installé confortablement et de manière à éviter les positions vicieuses. La tête doit être maintenue dans l’axe pour optimiser le retour veineux. À la phase aigue, lorsque la compliance cérébrale est très altérée, la position à plat stricte peut être mal tolérée. Ils doivent alors être tournés assis voire être frictionnés avec un minimum de mobilisation. Les lésions osseuses, et particulièrement rachidiennes souvent associées, nécessitent une gestion de la douleur et des précautions de mobilisations encore plus grandes. Lors des soins l’IDE veille à ce que la tête reste dans l’axe, même lorsque le malade est en décubitus latéral. Il surveille en permanence les paramètres du monitorage multimodal pendant le déroulement des soins. L’IDE peut dans le cadre d’une prescription effectuer des bolus de sédations pour approfondir l’analgésie et la narcose en cas de besoin. En cas de craniectomie décompressive il faut toujours identifier le coté du volet sur le pansement afin d’éviter toute compression extrinsèque et toute latéralisation du coté du volet. Les soins des yeux sont également importants car les cornées sont irritées et desséchées par la sédation, l’absence de mouvement des paupières et les surveillances pupillaires répétées. Les aspirations trachéales ne sont effectuées qu’en cas de nécessité, car elles entraînent des augmentations de la PIC et seront souvent précédées d’un bolus de sédations. Lors des phases de réveil, il est souhaitable d’éviter la télévision dans la chambre. Ces patients ont, dans cette phase, des difficultés à différencier la réalité et la fiction. Ce type de stimuli peut être à l’origine d’un stress supplémentaire. PRISE EN CHARGE DE LA FAMILLE ET DEVENIR L’hospitalisation d’un proche est un évènement angoissant en général et plus particulièrement en réanimation. La soudaineté de la pathologie associée à la gravité du pronostique majore l’angoisse. C’est pour cela qu’un accueil de qualité est important. L’explication par l’IDE de l’environnement de la chambre de réanimation est primordiale. La présence de l’IDE lors des entretiens médicaux est indispensable. Elle permet si nécessaire de reformuler et réexpliquer aux familles La phase aigue de la prise en charge du patient traumatisé crânien peut durer plusieurs semaines. Il est difficile pour l’équipe médicale de préciser l’évolution et les séquelles à venir. Cette incertitude majore l’inquiétude des proches. Lorsque les lésions se sont stabilisés et permettent un réveil, les sédations sont levées. La phase d’éveil qui débute peut durer plusieurs mois. Le principal objectif est de récupérer une autonomie respiratoire qui peut passer par une trachéotomie. Une fois l’objectif atteint, une mutation en service de rééducation est envisageable car les soins de rééducation restent limités en réanimation. Les séquelles définitives ne pourront être évaluées que plusieurs années après l’accident. - 11 - REFERENCES 1 Guillaume J, Janny P. [Continuous intracranial manometry; importance of the method and first results]. Rev. Neurol. (Paris). févr 1951;84(2):131-142. 2 Cold GE. Cerebral blood flow in acute head injury. The regulation of cerebral blood flow and metabolism during the acute phase of head injury cta Neurochir. 1990;49:1‑64. 3 Bouma GJ et al Cerebral circulation and metabolism after severe traumatic brain injury: the elusive role of ischemia. J. Neurosurg. nov 1991;75(5):685-693. 4 Bratton SL, et al. Guidelines for the management of severe traumatic brain injury. IX. Cerebral perfusion thresholds. J. Neurotrauma. 2007;24 Suppl 1:S59-64. 5 Bouzat P et al. Transcranial Doppler to screen on admission patients with mild to moderate traumatic brain injury. Neurosurgery. juin 2011;68(6):1603-1610. 6 Sinclair HL, Andrews PJ. Bench-to-bedside review: Hypothermia in traumatic brain injury. Crit. Care Lond. Engl. 2010;14(1):204. 7 Francony G et al. Les dangers de l’hypothermie thérapeutique. Ann. Françaises Anesthésie Réanimation. avr 2009;28(4):371‑374. 8 Bratton SL, et al. Guidelines for the management of severe traumatic brain injury. IX. Cerebral perfusion thresholds. J. Neurotrauma. 2007;24 Suppl 1:S59-64. 9 Cold GE. Cerebral blood flow in acute head injury. The regulation of cerebral blood flow and metabolism during the acute phase of head injury cta Neurochir. 1990;49:1 64. 10 Bratton SL, et al. Guidelines for the management of severe traumatic brain injury. IX. Cerebral perfusion thresholds. J. Neurotrauma. 2007;24 Suppl 1:S59-64. 11 Sinclair HL, Andrews PJ. Bench-to-bedside review: Hypothermia in traumatic brain injury. Crit. Care Lond. Engl. 2010;14(1):204. 12 Francony G et al. Les dangers de l’hypothermie thérapeutique. Ann. Françaises Anesthésie Réanimation. avr 2009;28(4):371 374. 13 Kliegel A et al. Cold infusions alone are effective for induction of therapeutic hypohermia but do not keep patients cool after cardiac arrest.Resuscitation. 2007;73(1):46-53. 14 Heard KJ et al. A randomized controlled trial comparing the Arctic Sun to standard cooling for induction of hypothermia after cardiac arrest. Resuscitation. janv 2010;81(1):9-14. 15 Ropper AH. Hyperosmolar therapy for raised intracranial pressure. N. Engl. J. Med. 23 août 2012;367(8):746 752. - 12 -