À la recherche dPune étiologie génétique chez les hommes infertiles

À la recherche dune étiologie génétique
chez les hommes infertiles
Genetic diagnosis of male infertility
Rachel Levy
1
Nathalie Sermondade
1
Emna Hafhouf
1
Céline Dupont
1
Brigitte Benzacken
1
Isabelle Aknin-Seifer
2
1
Laboratoire dhistologie-
embryologie-cytogénétique-Cecos,
CHU Jean-Verdier,
avenue du 14-juillet,
93143 Bondy cedex,
France
2
Laboratoire dhistologie-
embryologie-cytogénétique,
CHU de Saint-Étienne,
42700 Saint-Étienne,
France
Résumé. La spermatogenèse humaine est un processus complexe faisant intervenir plus de
4 000 gènes. Linfertilité masculine concerne 2 à 10 % des hommes. Lévaluation de linfertilité
masculine répond à deux objectifs : permettre un traitement étiologique, si possible, et identi-
fier les patients candidats à une Assistance Médicale à la Procréation (AMP). Parmi ceux-ci, il
est important de cibler les patients devant bénéficier dun bilan génétique. En effet, linjection
intracytoplasmique dun spermatozoïde ou ICSI permet à des patients présentant un trouble
sévère de la spermatogenèse une prise en charge en AMP avec leurs propres gamètes. Cepen-
dant, lorsquune cause génétique a été mise en évidence, il peut exister un risque accru pour le
conceptus. Le résultat bilan génétique associant un caryotype, la recherche dune micro-
délétion du chromosome Y et létude du gène CFTR (cystic fibrosis transmembrane conduc-
tance regulator) pourraient expliquer près de 25 % des troubles sévères de la spermatogenèse
relevant dune ICSI (concentration de spermatozoïdes < 1 million/mL). En cas de détection
dune anomalie, le recours à un conseil génétique est préconisé.
Mots clés : génétique, spermatogenèse, infertilité, ICSI
Abstract. Spermatogenesis is a complex process, with more than 4,000 genes involved. Male
infertility is one of the commonest disorders, afflicting 2 to 10% of male patients. Infertile
men should be evaluated with two objectives: to exclude treatable conditions and to identify
those who are candidates for assisted reproductive technologies (ART), and among them,
those who should be offered genetic screening. In fact, intracytoplasmic sperm injection or
ICSI is a highly efficient treatment of male factor infertility. However, when used to treat
patients with a genetic cause for their infertility, there may be an increased risk for the off
spring. Chromosome aberrations, Y chromosome microdeletions and CFTR (Cystic Fibrosis
Transmembrane conductance Regulator) mutations may explain up to 25% of azoospermia
and severe oligozoospermia. Therefore, men with very low sperm counts (<1 ×10 million/mL)
considering ICSI should always be informed of the possibility of genetic testing. If an abnorma-
lity is identified, patients should be referred to specialist genetic counselling.
Key words: genetics, spermatogenesis, infertility, ICSI
Introduction
Définitions et épidémiologie
Linfertilité est définie comme
lincapacité à concevoir un enfant
après 12 mois de rapports sexuels non
protégés. LOrganisation Mondiale de
la Santé estime à 80 millions le nombre
de personnes souffrant dinfertilité dans
le monde. Un couple sur six consulte et
un sur dix bénéficiera dun traitement.
Lincapacité définitive à concevoir
définit la notion de stérilité.
Dans 20 à 50 % des cas, on
trouve un facteur masculin. Environ
10 % des hommes infertiles auraient
une numération spermatique inrieure
à 1 million de spermatozoïdes/mL.
Les étiologies sont multiples et sou-
vent plurifactorielles. À lissue dun
bilan complet, peuvent parfois être
identifiées des causes physiques,
toxiques, infectieuses, immunolo-
giques, anatomiques, endocriniennes,
sexuelles, cytogénétiques ou géni-
ques. Cependant, une étiologie nest
retrouvée que dans environ 35 à
doi: 10.1684/mte.2010.0272
mt Médecine de la Reproduction, Gynécologie Endocrinologie 2010 ; 12 (1) : 4-11
médecine thérapeutique
Médecine
de la Reproduction
Gynécologie
Endocrinolo
g
ie
Tirés à part : R. Levy
mt Médecine de la Reproduction, Gynécologie Endocrinologie, vol. 12, n° 1, janvier-février-mars 2010
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60 % des cas [1]. De plus, le bilan génétique proposé en
routine est loin de pouvoir identifier les quelques
4 000 gènes impliqués dans la spermatogenèse humaine.
Bilan dinfertilité masculine
Il associe un interrogatoire adapté (antécédents fami-
liaux et personnels, mode de vie et environnement) et un
examen clinique complet orienté (poids, taille, pilosité,
position et volume des testicules, appareil génital). Selon
les éléments dorientation, des examens complémentaires
peuvent être requis : spermogramme, biochimie sémi-
nale, échographie scrotale et prostatique, bilan hormonal
(FSH, LH, testostérone, inhibine B, etc.), ainsi quun bilan
génétique associant, selon le cas, caryotype constitution-
nel, recherche de microdélétion du chromosome Y et
détection des principales mutations du gène CFTR (cystic
fibrosis transmembrane conductance regulator).
Ce bilan génétique présente plusieurs intérêts. On
souligne tout dabord un intérêt diagnostique pour le
patient, puisquil peut permettre didentifier et dexpliquer
au couple la cause la plus probable de linfertilité, et dans
certains cas déviter examens et/ou traitements inutiles.
De plus, il présente un intérêt pronostique en permettant
une prise en charge adaptée, notamment lorsque le pro-
nostic de lAssistance médicale à la procréation (AMP) est
lié à lanomalie génétique identifiée. Par ailleurs, en cas
didentification dune anomalie potentiellement transmis-
sible via lAMP, un conseil génétique pourra être délivré,
éventuellement associé à un diagnostic prénatal (DPN) ou
à un diagnostic préimplantatoire (DPI). Enfin, il existe un
intérêt fondamental dans la connaissance des gènes
impliqués dans la spermatogenèse.
On estime que les causes génétiques représenteraient
ainsi 30 % des cas dinfertilité masculine, voire jusquà
60 % dans les cas de subfertilité masculine. Ainsi, 17 %
des couples adressés en ICSI pour infertilité dorigine mas-
culine présenteraient un facteur dinfertilité dorigine
génétique [2], et une anomalie génétique serait mise en
évidence dans 24 % des cas dOATS sévère ou dazoo-
spermie [3]. Enfin, la recherche de létiologie de lazoo-
spermie de 100 patients au terme dun bilan complet a
retrouvé une anomalie génétique chez 29 % dentre
eux, une maladie ou un facteur externe dans 22 % des
cas, un antécédent de cryptorchidie dans 27 % des cas
et aucune étiologie dans les 22 % restants [4]. Ainsi, à
lissue de ce bilan, une anomalie chromosomique est
détectée dans 1,9 à 12 % des cas, une microdélétion du
bras long du chromosome Y dans 8,2 % des cas et une
mutation du gène CFTR dans 2 % des cas [5].
Les facteurs génétiques de linfertilité masculine peu-
vent être chromosomiques ou géniques, autosomiques ou
gonosomiques, à effet pléiotropique ou limité à la lignée
germinale. Ces anomalies surviennent presque toujours
de novo et, du fait de linfertilité, ne sont en général pas
transmises à la descendance. Néanmoins, certains cas
peuvent apparaître familiaux ou sintégrer dans une mala-
die héréditaire dont une des caractéristiques cliniques est
le retentissement sur le fonctionnement normal de la
lignée germinale mâle.
Anomalies chromosomiques
La fréquence des anomalies chromosomiques est aug-
mentée dans la population masculine infertile, et cela de
façon inversement proportionnelle à la numération en sper-
matozoïdes. De nombreuses publications rapportant de
larges séries estiment lincidence globale dun facteur chro-
mosomique dans la population masculine infertile entre 2
et 8 %, avec une valeur moyenne de 4 à 5 % contre 0,6 %
dans la population gérale [6]. Sur lensemble de la popu-
lation infertile masculine, 5,8 % auraient une anomalie
chromosomique explicative : 80 % concernant les gono-
somes et 20 % les autosomes [6]. Globalement, lincidence
des anomalies chromosomiques des gonosomes et des
autosomes serait, respectivement, 15 fois et six fois plus
importante dans la population infertile que dans la popula-
tion générale [7].
Une anomalie chromosomique est retrouvée chez
13,1 % des hommes présentant une azoospermie, soit
21 fois plus que dans la population générale [8]. Dans
93 % des cas, il sagit danomalies des chromosomes
sexuels, en particulier du syndrome de Klinefelter, homo-
gène 47,XXY dans 67 % des cas ou en mosaïque 46,XY/
47,XXY dans 10 % des cas. Chez les hommes présentant
une oligozoospermie, une anomalie chromosomique est
identifiée dans 4,3 % des cas, soit sept fois plus souvent
que dans la population générale [8]. Ces anomalies
concernent les gonosomes dans 33 % des cas, mais
surtout les autosomes dans 67 % des cas, avec notam-
ment 35 % de translocations robertsoniennes et 16 % de
translocations réciproques.
Au total, 4,6 % des hommes qui bénéficient dun
caryotype préalable à lICSI présentent une anomalie
chromosomique contre 1 % des hommes dont le couple
est pris en charge en FIV, et ce, quels que soient les para-
mètres spermatiques.
Tous les types de remaniements chromosomiques ont
été décrits dans les infertilités, que ce soient les transloca-
tions chromosomiques robertsoniennes, les translocations
chromosomiques réciproques ou plus rarement les inver-
sions et les insertions chromosomiques.
Les mécanismes possibles dinfertilité dans les anoma-
lies chromosomiques équilibrées sont nombreux. Lors de
lappariement des chromosomes homologues sous forme
de bivalents (stade pachytène), les chromosomes trans-
loqués forment des trivalents ou des quadrivalents d
un asynapsis. Une association avec la vésicule sexuelle
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est également possible, et linactivation des gonosomes
peut alors sétendre aux autosomes concernés. Il en
résulte alors un blocage de la méiose avec une évolution
possible vers lapoptose.
Causes génétiques autosomiques :
anomalies de structure
Elles sont responsables dazoospermies, doligozoo-
spermies, mais aussi de fausses couches spontanées très
précoces. Ces anomalies touchent principalement les
chromosomes 9, 15, 22, mais peuvent aussi toucher les
chromosomes 4, 10, 16, voire tout chromosome de
façon plus ou moins exceptionnelle. On en distingue
plusieurs types.
Translocations robertsoniennes
Les translocations robertsoniennes sont les anomalies
chromosomiques de structure les plus fréquentes, présen-
tes chez une naissance pour 1 000, et peuvent affecter la
fertilité. Elles surviennent lorsque deux chromosomes
acrocentriques (13, 14, 15, 21 ou 22) subissent une cas-
sure et fusionnent en perdant leurs bras courts mais en
conservant le plus souvent deux centromères. Elles sont
souvent responsables davortement par anomalies des
premières divisions de lembryon.
Les translocations robertsoniennes (13;14) et (14;21)
sont les plus fréquentes. Elles surviennent de novo dans
50 % des cas ou bien sont transmises soit par le père, soit
par la mère. Le phénotype est le plus souvent normal.
La translocation peut toucher la fertilité ou lévolution
dune grossesse soit par atteinte de la spermatogenèse,
soit par production de gamètes porteurs dun déséquilibre
lié à la perte ou au gain de matériel chromosomique par
rapport à la translocation portée par le parent qui la trans-
mise. Le risque de déséquilibre varie entre 0 et 15 %.
Les translocations robertsoniennes sont neuf fois plus
fréquentes dans la population des hommes infertiles que
dans la population générale [9].
Les anomalies de la spermatogenèse sont habituelles
dans ces cas, mais non constantes. De plus, elles peuvent
être très variables selon le degré de perturbation du pro-
cessus méiotique. Une variabilité phénotypique peut
également sobserver au sein dune même famille.
Translocations réciproques
Les translocations réciproques se retrouvent à la fré-
quence de 0,9 naissance pour 1 000. Elles consistent en
un échange mutuel de segments chromosomiques entre
deux chromosomes non homologues. Tous les chromo
somes peuvent être impliqués, et en général le phénotype
reste normal.
En cas de fausses couches répétées, lincidence des
translocations est plus élevée que dans la population
générale. De plus, la présence de translocations affecte le
déroulementnormaldelaméioseetdelaspermatogenèse.
De ce fait, on constate que la fréquence des translocations
réciproques est sept fois plus élevée dans la population des
hommes infertiles que dans la population normale [9]. Il a
été démontré que les sujets porteurs dune translocation
réciproque produisaient plus de gamètes porteurs de la
translocation déséquilibrée (23 à 81 %) que de gamètes
porteurs de la translocation équilibrée [9]. Il est donc
important de proposer une étude méiotique afin dévaluer
le comportement de chaque translocation et de proposer
ainsi un conseil génétique adapté.
Autres anomalies de structure
Les inversions péricentriques et les inversions para-
centriques sont les polymorphismes chromosomiques les
plus fréquents chez lhomme. Elles peuvent parfois
saccompagner dinfertilité, notamment lorsquelles tou-
chent le chromosome 9 [10].
Les mécanismes exacts par lesquels les anomalies
chromosomiques induisent une infertilité ne sont toujours
pas éclaircis [11]. Les spermatozoïdes de ces patients pré-
sentent un pourcentage danomalies cytogénétiques sta-
tistiquement plus élevé que celui attendu du fait de leur
translocation chromosomique [12]. La présence de chro-
matine anormalement distribuée interfère probablement
avec la division méiotique et ainsi réduirait la production
de spermatozoïdes. Des variations de la fréquence de
recombinaison des chromosomes et/ou des régions impli-
quées (ou proches des régions impliquées) dans ces ano-
malies caryotypiques ont aussi été décrites et pourraient
également altérer la spermatogenèse [10]. Enfin, il est
intéressant de constater que les spermatozoïdes dhom-
mes infertiles à caryotype constitutionnel normal présen-
tent également des anomalies cytogénétiques beaucoup
plus fréquentes que celles observées chez des volontaires
à spermogramme normal [13], touchant par exemple les
chromosomes 1, 12 (disomies) et les gonosomes [14].
Causes génétiques gonosomiques
Elles impliquent toutes, à des degrés divers, le chro-
mosome Y, lanomalie la plus fréquente étant le syndrome
de Klinefelter 47,XXY [11].
Syndrome de Klinefelter
Cest lanomalie chromosomique de nombre la plus
fréquente concernant les chromosomes sexuels chez
lhomme, puisquelle touche un homme sur 660 dans la
population générale, soit 0,1 à 0,2 % des naissances mas-
culines [15]. La prévalence du syndrome de Klinefelter
parmi la population des hommes infertiles est très élevée :
jusquà 5 % dans les oligozoospermies sévères et 10 %
dans les azoospermies [9, 16]. Le caryotype de ces indi-
vidus est une dysgonosomie : homogène 47,XXY dans
90 % des cas ou en mosaïque dans 10 % des cas
(46,XY/47,XXY ou 48,XXXY, ou toute anomalie cytogéné-
tique par surreprésentation du chromosome X alors quun
chromosome Y est présent).
mt Médecine de la Reproduction, Gynécologie Endocrinologie, vol. 12, n° 1, janvier-février-mars 2010
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Les syndromes de Klinefelter proviennent dune non-
disjonction méiotique dans 97 % des cas soit dorigine
paternelle (53 %), soit dorigine maternelle (44 % dont
34 % lors de la première division et 10 % lors de la
seconde division). Dans les 3 % restants, il sagit dune
erreur de division mitotique.
Le diagnostic est souvent fait tardivement, voire
jamais. On estime que seuls 25 % des syndromes de Kli-
nefelter seraient de fait diagnostiqués [15].
Cliniquement, il sagit dune forme dhypogonadisme
primaire, avec une hypotrophie testiculaire. À la puberté,
les testicules sont encore infantiles, il peut y avoir une
gynécomastie, une obésité, une diminution de la pilosité
pubienne et/ou faciale. La taille adulte est généralement
supérieure à 184 cm. Il ny a pas de déficience intellec-
tuelle, mais il peut y avoir des difficultés dapprentissage
(en particulier de la lecture), une diminution des capacités
de mémoire, un comportement de timidité anormale, une
plus grande sensibilité. Biologiquement, la LH et la FSH
sont très élevées, la testostéronémie est normale ou dimi-
nuée, lestradiol légèrement augmenté. Au niveau testicu-
laire, se produisent une hyalinisation et une fibrose des
tubes séminifères conduisant à une atrophie testiculaire
avec azoospermie.
Dans 90 % des cas de syndromes de Klinefelter homo-
gènes, il existe une azoospermie ou une oligozoospermie
très sévère. Les sujets présentant un syndrome de
Klinefelter en mosaïque 47,XXY/46,XY peuvent produire
des spermatozoïdes en quantité variable. Le traitement
par injections de testostérone à partir de la puberté aug-
mente la pilosité, la masse musculaire, la densité osseuse
et améliore le comportement des adolescents, mais ne
restaure pas la spermatogenèse.
Depuis le développement de lICSI, de nombreux
patients présentant un syndrome de Klinefelter ont pu
concevoir des enfants avec des spermatozoïdes éjaculés
ou testiculaires. LICSI est ainsi possible dans 30 à 50 %
des cas, et plus dune centaine denfants sont nés dans le
monde [17-20], dont la grande majorité présente un
caryotype normal. Cependant, le risque de concevoir un
enfant porteur daneuploïdie est significativement plus
élevé, notamment un enfant 47,XXY ou 47,XXX [9, 17],
car le nombre de spermatozoïdes porteurs daneuploïdie
est augmenté. Ces spermatozoïdes sont probablement le
résultat de la méiose de quelques spermatocytes 47,XXY
ou bien danomalies de la méiose survenant dans des
cellules germinales normales 46,XY au sein dun environ-
nement testiculaire perturbé [16].
Autres aneuploïdies des chromosomes sexuels
Syndrome XYY
Le caryotype 47,XYY est la seconde aneuploïdie des
chromosomes sexuels : sa fréquence est quatre fois plus
élevée dans la population des hommes infertiles que
dans la population générale [16]. Il touche un à quatre
hommes sur 1 000.
La plupart des hommes « double Y » sont fertiles, et on
ignore encore pourquoi certains sont infertiles. Clinique-
ment, on peut parfois observer des malformations urogé-
nitales. Biologiquement, la testostéronémie est normale,
de même que les dosages de LH et de FSH (ou légèrement
augmentés). Aucune augmentation du risque daneuploï-
die pour la descendance na été observée.
Syndrome dinversion sexuelle 46,XX
Cette anomalie du caryotype sobserve principale-
ment chez les hommes azoospermiques avec une
fréquence de 0,9 % (environ un individu sur 20 000).
Le phénotype est généralement proche de celui du syn-
drome de Klinefelter, mais avec une taille normale. Il peut
cependant varier dune complète masculinisation à des
hommes avec gynécomastie, un micropénis, un hypo-
spadias ou une ambiguïté génitale (10-15 % des cas).
Dans la plupart des cas (90 %), le gène SRY (sex
determining region y chromosome) est transloqué sur le
chromosome X, mais ces hommes XX, SRY
+
présentent
systématiquement une infertilité liée à une azoospermie
et à une atrophie testiculaire avec hyalinisation des
tubes séminifères.
Dans de rares cas, il sagit dhommes XX, SRY
sans
ambiguïté sexuelle : on suppose alors une mutation dun
gène impliqué dans la détermination sexuelle auto-
somique. Ont été suspectés : SOX9 qui permet une déter-
mination testiculaire en se substituant à SRY en son
absence [9] ; le gène Zen Xp21 au locus DSS, gène
répresseur de la détermination testiculaire ; ou encore
PRKX localisé dans la région chromosomique Xp22.3.
Parfois, des mosaïques 46,XX/47,XXX ont été observées
avec une masculinisation complète, azoospermie et
absence de la région AZF [21]. Les taux de FSH et de
LH sont élevés, reflétant latteinte gonadique primitive.
Lestradiol sérique peut être élevé, et la testostéronémie
basse comparativement aux hommes adultes normaux
[21]. La plupart des cas sont sporadiques, néanmoins il
existe quelques cas familiaux décrits [22].
Anomalies de structure impliquant les chromosomes sexuels
Translocations Y-autosome ou X-Y
La fréquence des translocations entre le chromosome
Y et un autosome est estimée à un pour 2 000 hommes
[23]. Une légère prépondérance de ces translocations a
été observée dans la population des hommes oligozoo-
spermiques (0,2 %) et, de façon moindre, dans la popula-
tion des hommes candidats à lICSI (0,09 %) [8]. Les
translocations équilibrées impliquant le chromosome Y
et un autosome ou le chromosome X [23] constituent un
groupe clinique hétérogène, puisquelles sont observées
chez des hommes fertiles comme chez des hommes
stériles. Ces translocations apparaissent de novo. Plu-
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sieurs mécanismes physiopathologiques de linfertilité
peuvent être mis en jeu. Si la cassure chromosomique se
produit dans la partie distale du bras long du chromosome
Y (région hétérochromatinienne), les hommes restent
fertiles ; en revanche, si la cassure se produit dans
leuchromatine, notamment dans la région Yq11 au
niveau du locus AZF, les hommes deviendraient alors
infertiles du fait de la perte ou de laltération de gènes
de la spermatogenèse [24].
Chromosomes Y dicentriques
Ce sont des anomalies cytogénétiques parmi les plus
fréquentes du chromosome Y [25]. Les chromosomes
dicentriques appartiennent aux isochromosomes Y : lun
des bras est dupliqué et lautre est absent. Ils possèdent
deux copies du centromère, séparées par un fragment de
la région proximale adjacente au point de cassure.
Ces chromosomes dicentriques étant instables, les indivi-
dus porteurs présentent le plus souvent une mosaïque
avec une lignée cellulaire 45,X [25, 26].
Des phénotypes variés dinfertilité ont été décrits avec
des chromosomes Yp ou Yq dicentriques. La prédiction
des conséquences phénotypiques est souvent difficile du
fait de la diversité des séquences génomiques concernées
par les duplications et les délétions, des degrés variables
de mosaïcisme parfois indécelables et des difficultés
techniques didentification et danalyse précises de la
structure du chromosome Y remanié. Les manifestations
cliniques sont diverses, allant dun phénotype féminin tur-
nérien (présence de deux bras longs et absence de SRY) à
un phénotype masculin quasi normal avec azoospermie,
en passant par une ambiguïté sexuelle ou une réversion
sexuelle [25, 27].
À travers une revue de la littérature et sur une étude de
78 cas de chromosomes Y dicentriques, il na pas été pos-
sible détablir une corrélation entre phénotype et géno-
type [25]. Ces sujets sont en effet porteurs de délétions
variables du bras long du chromosome Y. Quand la
zone AZF est perdue, une infertilité avec azoospermie
est observée [24], mais il existe également des cas sans
délétion en AZF, lazoospermie pouvant alors être liée à
la perte dautres gènes clés de la spermatogenèse ou à un
dysfonctionnement de lalignement des chromosomes
lors de la méiose [28].
Chromosomes Y en anneau
Du fait de deux points de cassure, lun sur le bras
court, lautre sur le bras long, ce chromosome anormal
se referme sur lui-même en structure circulaire, ring Y, r
(Y). Les hommes stériles porteurs de cette anomalie
caryotypique ont un phénotype normal, car ils présen-
tent le plus souvent une mosaïque avec une lignée
cellulaire 46,XY [29]. Quatre-vingt-dix pour cent des
cas ont une cassure du chromosome Y proximale à la
région AZF, 10 % des cas une cassure distale à AZF.
Au minimum, il y a toujours perte des extrémités termi-
nales des bras court et long, mais la perte peut être plus
importante [27].
Au total, la découverte dune anomalie chromoso-
mique va parfois apparaître comme la ou lune des causes
de linfertilité. La plupart des anomalies de nombre des
gonosomes surviennent de novo, avec un risque de trans-
mission à la descendance faible ou inconnu. En cas
danomalie de structure, une enquête familiale doit être
réalisée. Dans tous les cas, la prise en charge de ces
patients en AMP doit être réalisée après concertation mul-
tidisciplinaire et conseil génétique. Un DPN sera proposé
dans certains cas, voire un DPI sil est approprié et tech-
niquement réalisable.
Cependant, même si le caryotype constitutionnel
savère normal, une étude gamétique peut révéler un
pourcentage de spermatozoïdes anormaux élevé. Or,
limpact du taux daneuploïdie et de disomie sur le pou-
voir fécondant du sperme, la morphologie embryonnaire
et limplantation a été récemment mis en évidence [30].
Par ailleurs, si près de la moitié des patients OATS pré-
sente une augmentation des taux de disomie dau moins
un chromosome, lautre moitié nen présente pas [31]. En
effet, certains facteurs de risque sont associés à une aug-
mentation des taux de disomie : il sagit du tabac, dune
FSH élevée, dune concentration en spermatozoïdes
inférieure à 1 million/mL et dun pourcentage datypies
supérieur à 95 %.
Microdélétions du chromosome Y
Après les anomalies du caryotype, une microdélétion
du chromosome Y est détectée chez près de 10 % des
patients porteurs dun déficit sévère de la spermatogenèse
[32].
La recherche de microdélétions du chromosome Y,
préconisée par la plupart des sociétés savantes nationales
(SFGH) et internationales (ESHRE, EAA), est indiquée en
cas dinfertilité masculine non obstructive, à FSH élevée
ou non [33]. Elle savère positive dans 10 à 15 % des
azoospermies et 5 à 10 % des oligozoospermies sévères
(moins de 1 million de spermatozoïdes/mL). Seront iden-
tifiées des délétions en AZFa, en AZFb et en AZFc [24].
Outre un intérêt étiologique évident, elle présente un
triple intérêt pronostique :
en effet, la localisation, mais plus encore létendue
de la délétion, permettraient de mieux estimer les chan-
ces de trouver des spermatozoïdes testiculaires et déviter
une biopsie testiculaire inutile : environ 50 % lors de
délétion en AZFc, quasi nulles si délétion très restreinte
en AZFb, nulles en cas de délétion en AZFa ;
la détection des microdélétions pourrait également
avoir un intérêt pronostique dans le résultat de lAMP
elle-même. Les taux de fécondation ainsi que la qualité
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