Lesynodepanorthodoxe.Entrenécessitéettension. StefanConstantinescu Lorsdeladernièrerencontrequis’estdérouléeàl’InstitutSaint‐SergedeParisentreles 18‐20 octobre 2012, un nombre significatif de professeurs et d’étudiants orthodoxes, catholiquesetprotestantsontparticipéaucolloqueintitulé«comprendrelesenjeuxdu prochainconciledel’Égliseorthodoxe». L’objectifdececolloqueconsistaitenlapréparationduprochainconcileendéveloppant une réflexion théologique, approfondie par les interventions académiques de divers théologiens.Ilconvientderappelerlesthèmesprincipauxquisuscitentlesbesoinsd’un synodeafindecomprendresesenjeux.Lessujetsabordés,reprenantquelques‐unsdes thèmes majeurs qui avaient déjà été traités lors de la première Conférence préconciliaire en 1976, furent les suivants: le calendrier liturgique commun, l’autocéphalie,l’autonomie,lesdiptyques,l’avenirdeladiasporaorthodoxe,lesrelations deséglisesorthodoxesaveclesautreségliseschrétiennes,lemouvementœcuménique, lacontributiondel’orthodoxieauxquestionséthiques,socialesetl’importancedujeûne. Réflexionpersonnellesurlecolloque. Pourdécrirecetévénement,lapremièreformulationquimevientàl’espritestcellede «théologieappliquée».Laditeprésencedejeuneschercheursquiapermisdemenerun travail de contextualisation, donne un souffle optimiste pour l’avenir de ce synode et finalement pour l’avenir de l’Église mais je suis d’opinion que les fruits de toutes ces discutions vont se manifester plus tard. J’ai intitulé ce rapport «entre nécessité et tension»parcequedanscettedialectiquelesconclusionsducongrèssontachevées.Il estévidentquenotresociétéestmarquéeparuneprofondecrisedefoietparuneperte du sens religieux et des repères en général. L’Église doit se confronter à toutes ces transformationsetdoitrépondrelemieuxpossibleànotrecontemporanéitérapidement changeante.Unconcilequisepréparedepuisunsièclen’arriverajamaisàêtreenphase aveclesbesoinsdecettesociété.Onvoitbeletbienquelanécessitéd’untelconcileest urgente.Lessessionsdediscussionontmontréquedanslaplupartdesdomainesdela théologie il y a des points qui doivent êtres éclairés, lors d’un concile panorthodoxe. Malgrécela,l’avenirdusynoderestedansl’incertitudeetdansunetension. Avant de répondre aux problèmes de la théologie sociale ou de la bioéthique, je considèrequel’ÉgliseOrthodoxeestobligéedemieuxs’expliquerenredéfinissantles points qui constituent son ecclésiologie. Loin d’affirmer que l’Église Orthodoxe ne possèdepasdéjàunethéologieecclésiologique,ilconvientdesignalerqueleproblème nerésidepasdanslefaitd’entameroupasunenseignementecclésiologique,maisplutôt dans celui de le diffuser au sein de l’Église et d’être davantage attentif à sa réception auprès des fidèles. Ensuite, pour mieux répondre au dialogue œcuménique, il faut que l’Église Orthodoxe développe un document officiel qui englobe la théologie ecclésiologiqueorthodoxeafinqu’elledevienneplusvisibleetplusclaire. Parmi les sujets qui ont été traités lors de ce colloque, j’ai trouvé particulièrement intéressantetimportantd’unpointdevuethéologiqueceluiduprincipeherméneutique danslesrelationsentreÉgliseschrétiennesadintraetadextra.Eneffet,cethème,qui généralement fait partie du dialogue œcuménique, est le titre de la présentation de la Professeure Barbara Hallensleben, en tant qu’observatrice de la 4ème session de discutionsdenotrecongrès. Mon objectif est de résumer cette contribution en remarquant ses points centraux. Ensuitemaréflexionvatournerleditprincipeversuneauto‐compréhensionausein(ad intra) de l’ecclésiologie orthodoxe. Il convient d’expliquer mon but. Il est évidemment reconnu que le développement ecclésiologique du 20e siècle suscité par de grands théologiens orthodoxes, a contribué au développement ecclésiologique catholique expriméàpartirduConcileVaticanII.Cettebonneinfluenceréciproquerisque,àmon avis, de ne pas donner d’aussi bons fruits si la diffusion de l’enseignement ecclésiologique orthodoxe se réduit uniquement à la dimension administrative et institutionnelledel’Église. L’ecclésiologie catholique, concernant l’Église universelle et les églises particulières/locales, a évolué dans une direction œcuménique qui permet de développerunprincipeherméneutiqueouuneméthodologiedecompréhension. Après avoir rappelé les notes constitutives de l’Église qui «sont la foi apostolique, les sacrementsetlagouvernanceparl’évêque»,selonlavisionorthodoxeetcatholique,la présentation de la Professeure Barbara Hallensleben montre le développement de la théologiecatholiquesur«lacompréhensionecclésiale»del’unitécollégialedechacun des évêques avec l’Église universelle et l’évolution de la compréhension du pluriel Églises,laconvergenceentreleséglisesparticulières/localesetleséglisessœurs. Le développement commence au Concile Vatican II, en se tournant vers une auto‐ compréhensionecclésiale.LumenGentium23décritlarelationdesévêquesdechaque Église locale, en tant que ecclesiaeparticulares,avec l’évêque de Rome. Le mouvement vers une convergence commence même si «les réalités ecclésiales des Églises particulièresetdesÉglisessœursnesontpasmisesenrelationexplicitement.»1 Des citations importantes telles que celles du Pape Jean‐Paul II dans l’encyclique Ut unumsintetcellesducardinalRatzinger,entantquePréfetdelaCongrégationpourla doctrinedelafoi,viennentjustifierl’identificationdel’Égliselocaleavecl’Églisesœur. Le fondement de cette convergence se trouve dans l’unicité de l’Église. L’expression «nosdeuxÉglises»doitêtreévitée,selonlecardinalRatzinger,afindenepasappliquer une pluralité, comme celle des églises particulières dans l’ensemble de l’Église catholique et de l’Église Orthodoxe, à l’Église une, sainte, catholique et apostolique, comme nous l’affirmons dans le Credo. L’Église du Christ est présente, donc, dans les Églises qui ont la succession apostolique et les sacrements étant donné que «la 1p.2. communionavecl’évêquedeRomen’estplusconsidéréecommecritèredelavraiefoi quiconstituel’Église».2Eneffet,lecritèred’unevéritableégliseparticulièreestdonné par la succession apostolique et l’Eucharistie valide, selon le numéro 17 de Dominus Iesus(6août2000),aussicitéparlaProfesseureHallenslebendanssonexposé. Afin que les fruits ad extra puissent se ressentir envers l’ecclésiologie orthodoxe, la ProfesseureHallenslebensignalequeletournantduConcileVaticanIIn’estpasencore pleinement réalisé ad intra: «Les réformes après le Concile ont été introduites largement sans contact avec les Eglises orthodoxes et elles sont donc restées une réforme interne de l’Eglise d’Occident. On a traité des symptômes sans arriver à la diagnose plus profonde qui est le constat que quelques de ces symptômes sont le résultatd’unealiénationséculairefaceauxEglisesd’Orient.»3 Cette affirmation mérite attention. D’abord il s’agit d’un constat au sein de l’Eglise catholique,faitsincèrementpourmontrerqueletravailderéformeadintraesttoujours encoursderéalisation.Deuxièmementcetteecclésiologieproposéeadesconséquences œcuméniques,àsavoirquelaréformedel’Églisecatholiquenepeutsefairesanscellede ses églises sœurs. Il est nécessaire de ce point de vue que les églises orthodoxes s’ouvrentàunetelleréformesiellesensontprêtes. Par cette démarche, la Professeure invite les orthodoxes à réaliser et à préciser leur propre ecclésiologie en tenant compte aussi du principe herméneutique des Églises sœurs afin d’éviter le traitement des symptômes sans arriver à la diagnose plus profonde. Dans la dernière partie de sa présentation, la Professeure Hallensleben, en tant que théologienne catholique, adresse quelques questions aux églises orthodoxes. EllesaisitunetendanceinquiétantedesefixersurlesévolutionsnégativesdesEglises sœurscatholiques.Unetellefixationnepeutpasaiderlaréformequiacommencé.En effet, selon sa vision le principe des Églises sœurs est le principe herméneutique pour l’interprétationdelathéologiepostconciliaire. Comme complément à cette question il convient de préciser qu’une telle approche aideraledéveloppementecclésiologiqueorthodoxe.L’insistancesurlesmalentenduset sur les déviations apparues au fur et au mesure du temps ne favorise pas le dialogue interchrétien.Leprincipedel’unitéecclésialedoitêtrediscutéetformuléauniveauad intrade l’ecclésiologie orthodoxe. Malheureusement, l’ennemi de l’unité panorthodoxe est «l’ethno‐phylétisme» qui a d’abord été signalé par le Professeur John H. Erickson. La racine de cet ethnocentrisme se trouve dans son lien avec le politique, d’où la tendance d’insister sur l’importance politique de Rome et aussi de Constantinople qui était présente dans l’histoire, et d’oublier l’arrière‐fond spirituel qui a contribué à l’émergencedupolitique.Ilfautappliqueràl’histoireuneautreclédelecture.Unfutur synode doit aller à la racine des réalités qui fondent l’orthodoxie. Cette dernière démarche à la différence du fondamentalisme qui sous prétexte de protéger un trésor spirituelrefusedelepartager,delerendrevisible,s’ouvreàunecompréhensionglobale 2p.4. 3p.6. et transmissible. Ce trésor doit aussi être compris et traduit dans une langue qui est accessibleaumonded’aujourd’hui.Cettetraduction,oumieux,celangagen’impliquepas àunetrahisondelafoi.Lalangueaccessibleàtousetquinesetrompepasestcellede l’amouràl’égardd’autrui.Cetteouvertureverslemonde,verslesbesoinsdel’humanité, doitêtreàlabasedufutursynode. L’enseignementecclésiologiqueneseréfèrepasàundonnédeconceptsquisontcoupés delaréalitéelle‐même.Ilsdoivents’inspirerdelaréalitéexistante.C’estpourcelaque maréflexions’adresseàladiffusiondel’ecclésiologiequiexistedéjà. Enguisedeconclusion,nousdésironssoulevercertainesquestionstellesque:quellea étélaplacedelapastoraledanscecongrèspréparatoire?End’autrestermesdequelle manière le futur synode prendra des mesures pastorales pour diffuser une certaine ecclésiologiequi aura une nouvelle portée œcuménique? Comment se manifeste concrètementlesoutiendumilieuépiscopal,essentielpourréaliseruntelprojet? Ladifficultéderépondreàcesquestionsm’amèneàconclurequ’ilyunetensionentrela nécessitéderéunirunconcileetlesmoyensquelesorthodoxessedonnentpourlefaire.