Chers Frères et Sœurs,
La cinquantaine pascale nous remplit de joie en nous
faisant contempler le Christ vivant qui se tient présent au
milieu de nous. Elle nous permet également chaque année de
reprendre conscience que nous sommes devenus, grâce à la
résurrection du Christ, des créatures nouvelles : « Chacun de
nous est déjà ressuscité » (Préface pascale II). Nous avons
donc à nous imprégner de ces réalités surnaturelles qui nous
dépassent pour en témoigner ensuite autour de nous.
C’est dans cette perspective d’annonce du mystère pascal
que les lectures de ce dimanche orientent notre méditation.
La promesse du Saint Esprit et l’annonce que le Seigneur ne
nous abandonne pas, doivent nous conduire à oser
l’aventure, d’annoncer à temps et à contre temps la bonne
nouvelle du salut jusqu’au bout du monde.
Nous avons tout au long de notre vie chrétienne, pour
porter du fruit, d’abord et avant tout à nous enraciner dans
l’Amour de Dieu. Dans son évangile si profond, Saint Jean
nous rapporte ces belles paroles du Christ prononcées à
l’approche de sa passion et de sa mort. Il s’agit de demeurer
dans l’Amour de Dieu. Ce passage de l’évangile est d’une
densité extraordinaire. C’est en quelque sorte le testament
final du Christ. Il nous dit ce qui est essentiel, ce qu’il faut
retenir, méditer, vivre et mettre en pratique. C’est le cœur de
notre foi et les premières générations chrétiennes se sont
extasiées devant cette connaissance dans l’amour.
Nous connaissons désormais le secret de Dieu, nous
connaissons le mystère de Dieu, nous connaissons le plan de
Dieu sur le monde : c’est la découverte de l’amour qui se
communique en vérité. Cet évangile insiste sur l’essentiel
pour toute notre vie terrestre. Tout passe -tout passera-
la seule chose qui demeure c’est l’amour. Dans ce domaine
on a jamais fini de grandir, d’innover, d’inventer pour aimer et
nous laisser aimer. Ce « demeurez dans mon amour » doit
nous conduire à poser des actes concrets.
Dans la première lettre de Saint Jean, il y a comme une
déclinaison pratique de ce qui a été donné dans l’évangile.
Le disciple bien aimé du Christ qui a fait l’expérience de
l’amour inconditionnel de Dieu, nous donne quelques conseils
pour vivre cette grande spiritualité de l’amour. Il nous arrive
de faire de l’amour en général une banalité. Cet amour est
pourtant bien réel : Jésus a sincèrement donné sa vie par
amour pour nous sur la croix. A notre tour nous devons
donner notre vie par amour pour nos frères. Dans l’évangile le
Christ nous disait « Ce que je vous commande, c’est de vous
aimer les uns les autres ». Dans son épître, l’évangéliste
Saint Jean nous dit : « Mes bien-aimés, aimons-nous les uns
les autres puisque l’amour vient de Dieu ». C’est en puisant
dans le cœur de Dieu, source de l’amour, que nous pouvons
aimer à notre tour concrètement ceux qui nous sont donnés
comme frères. La fréquentation du Seigneur dans la prière et
dans les sacrements doit nous conduire à aimer ceux qui
nous entourent, ceux qu’on a pas forcément choisis,
notre famille et nos amis, nos collègues de travail et d’études,
nos voisins et ceux que nous côtoyons dans le quotidien.
L’amour de Dieu doit nous permettre d’unifier notre vie en
aimant à la fois et Dieu et notre prochain.
Dans l’évangile vécu par la première communauté
chrétienne –la toute première Eglise- il est question de ce don
de l’amour qui dépasse nos catégories humaines. Dans les
Actes des Apôtres Saint Pierre prend la défense du centurion
de l’armée romaine et des païens. Il s’adresse à ceux qui
l’entourent « En vérité, je le comprends : Dieu ne fait pas de
différence entre les hommes ; mais quelque soit leur race,
Il accueille les hommes qu’Il adore et font ce qui est juste ».
Aux yeux de Dieu notre Créateur, ce qui est essentiel c’est
d’aimer en adorant Dieu et en faisant dans notre vie terrestre
ce qui est juste. C’est sur l’amour et encore une fois l’amour
seul que nous serons jugés. L’amour est le don le plus
précieux que nous avons à faire fructifier. Alors l’Esprit Saint
s’empare de ceux qui écoutent la Parole de Dieu pour que,
enracinés dans l’Amour, ils deviennent des témoins de
l’Amour sans peur et en faisant confiance au Seigneur.
C’est précisément là, sur ce terrain, que nous sommes
attendus aujourd’hui par nos contemporains. Le rôle des
chrétiens dans notre société est de témoigner de l’Amour en
aimant.
Frères et sœurs, vous me direz peut-être que tout ça on
le sait depuis bien longtemps. C’est vrai mais bien souvent
malheureusement ce qui est primordial ne passe pas toujours
dans nos actes. En tout cas on ne le voit pas suffisamment.
Aimer à l’exemple du Christ c’est donner : « Il n’y a pas de
plus grand Amour que de donner sa vie pour ses amis ».
Comme Jésus a donné sa vie, nous sommes invités à rendre
l’amour concret en donnant ; en donnant le meilleur de
nous-mêmes, en donnant le témoignage de notre foi, en nous
donnant et pas seulement lorsqu’on ne sait pas quoi faire.
Pour apprendre à nous donner vraiment, nous pouvons
commencer par donner ce que nous avons. Donner un
sourire, donner notre gentillesse, aller vers ceux qui nous
rebutent, essayer de comprendre celui qui ne pense pas
comme nous, donner un coup de main alors qu’on a un
agenda bien rempli, donner de nos affaires ou de notre
argent. Donner sans rien attendre en retour : voilà où nous
conduit le Christ qui a donné sa vie. Aimer c’est donner !
Sainte-Thérése de l’Enfant Jésus disait au fond de son
carmel de Lisieux, malade et alors qu’elle n’avait plus rien :
« Aimer c’est tout donner et se donner soi-même ». Amen.
Père Patrick Royet
Dimanche 13 mai 2012
6e Dimanche de Pâques (B)