comment, en pratique et selon les circonstances, l’amour doit être vécu… C’est pourquoi Il marque
vigoureusement l’opposition entre : » On vous a dit… » et » Moi je vous dis… « . (p 53-105)
3c Mourir à soi-même
Le fond des choses, c’est qu’en Dieu la mort est au cœur de la vie. Dieu est Amour. Or aimer, c’est mourir à soi-
même, non seulement en préférant les autres à soi, mais (quand on est Dieu et qu’on aime en plénitude, qu’on
réalise éternellement la perfection de l’amour), en renonçant à exister pour soi et par soi afin d’exister uniquement
par les autres et pour les autres. Dieu est Trinité : le Père n’est que mouvement vers le Fils et l’Esprit ; le Fils n’est
que mouvement vers le Père et l’Esprit ; l’Esprit n’est que mouvement vers le Père et le Fils. Ce « ne que » sur
lequel j’insiste, car c’est ce « ne que » qui exprime le mystère de Dieu, veut dire que le fond de Dieu est la mort
identique à la vie. Sortir de soi, c’est bien mourir à soi. Vivre, c’est aimer, mais aimer, c’est mourir, car c’est n’être
que par les autres et pour les autres… Aimer l’autre, c’est vouloir qu’il soit, et non pas vouloir lui passer devant
pour qu’il soit moins : telle est la puissance de l’amour. (p 53-105)
3d Le pardon
Le pardon n’est pas l’indulgence mais une re-création. C’est la re-création de la liberté de celui qui a laissé dépérir
sa liberté par le péché. Il faut plus de puissance à Dieu pour pardonner que pour créer. Car recréer, c’est plus que
créer. La puissance de re-création est au cœur de la puissance créatrice, comme une sur-puissance. En créant des
libertés, Dieu s’engage dans un redoublement d’amour à leur restituer ce pouvoir qu’il leur donne de se créer elle-
mêmes… C’est donc en mourant que le Christ participe à la Puissance suprême, re-créatrice, pardonnante de
Dieu… Le sang versé est le signe d’un amour qui va jusqu’au bout. Jusqu’au bout, c’est-à-dire au par-don ou don
parfait. (p 53-105)
3e Notre immortalité
Parce que dire à quelqu’un : « Je t’aime », c’est équivalemment lui dire : « Tu ne mourras pas ». Dans le « Je
t’aime » authentique (et certes il faut souligner « authentique », car nous savons assez que « je t’aime » est bien
souvent prononcé à la légère, au niveau des fibres les plus superficielles de l’être), est inscrit d’une écriture
énigmatique un « Tu ne mourras pas » qui résiste mystérieusement au désespoir de la perte et à l’évidence
sensible de la mort.
Notre corps, dit le Père de Lubac, n’est pas destiné, par l’effet de la résurrection qui nous est promise, à un
recommencement sans fin de son existence terrestre et charnelle, plus ou moins sublimée seulement par des
propriétés miraculeuses ; notre corps est promis, non à une quelconque réanimation, mais à une totale
métamorphose, qui doit faire de lui, comme dit saint Paul, un « corps spirituel ». Or ce qui est vrai de notre corps
individuel n’est pas moins vrai de ce vaste corps collectif que l’humanité construit à travers les générations. Sa
forme actuelle (sa « figure » actuelle) est provisoire… L’Univers est promis, lui aussi, dans l’Esprit Saint, à la
grande Métamorphose (le Père Teilhard écrivait « Métamorphose » avec une majuscule, tant le mot avait pour lui
d’importance). (p 53-105)
3f La vraie présence
Ce que les chrétiens appellent « ciel », ce n’est pas un lieu éternel, supra-terrestre, un domaine métaphysique. Ce
n’est pas Dieu seul. Le ciel est le contact de l’être de l’homme avec l’être de Dieu, la rencontre intime de Dieu et de
l’homme… Le départ du Christ est un nouveau mode de présence, non plus extérieure et localisée, mais intérieure
et universelle. La vraie présence, sur le mode de l’absence. Si Jésus n’était pas « monté » au ciel, il serait encore