Optimiser les objectifs lors de la prise en charge des patients atteints

La colite ulcéreuse (CU) est une
maladie inammatoire chro-
nique à périodes progressives
et rémittentes touchant le gros intes-
tin. La maladie peut se manifester à
tout âge, mais l’incidence atteint son
point culminant chez les jeunes adul-
tes. Elle entraîne habituellement des
symptômes de saignements rectaux,
de défécation impérieuse, de crampes
abdominales et de diarrhée. La mala-
die évolue selon un cycle de rechutes
et de rémissions. Cependant, pour une
minorité de patients, l’inammation
se montre évolutive de manière chro-
nique et le patient est symptoma-
tique1,2. On ne connait pas les causes
de cette maladie, et il n’existe aucun
traitement médical curatif. La colec-
tomie chirurgicale permet parfois
de contrôler la maladie sans avoir
recours à des médicaments, mais des
Résumé
Bien qu’une thérapie d’entretien pour la colite ulcéreuse permette géné-
ralement d’obtenir une rémission clinique, de nombreuses études ont
montré que les patients en rémission clinique pourraient présenter des
degrés variables d’inammation de la muqueuse. Il semble que les patients
présentant le plus haut degré d’inammation évolutive de la muqueuse,
malgré l’absence de symptômes cliniques, sont plus susceptibles de subir
une poussée symptomatique à court terme. Chez les patients atteints de
CU, le taux de calprotectine dans les selles est associé non seulement à la
présence ou l’absence d’inammation de la muqueuse, mais également
au degré de gravité clinique de la CU. Ces observations soulèvent la pos-
sibilité d’utiliser le taux de calprotectine fécale pour surveiller de manière
non effractive les patients en rémission clinique, et modier le traitement
de ceux montrant une augmentation du taux de calprotectine fécale, et ce,
avant la réapparition des symptômes.
Mots clés : colite ulcéreuse, calprotectine fécale, prédiction des poussées,
inammation de la muqueuse, surveillance non effractive
A. Hillary
Steinhart, M.D., est
membre du service de
gastroentérologie du
Mount Sinai Hospital/
University Health
Network, et est profes-
seur de médecine à
l’Université de Toronto
à Toronto (Ontario).
Optimiser les objectifs lors de la
prise en charge des patients atteints
de colite ulcéreuse :
Rôle de la calprotectine fécale pour orienter la thérapie d’entretien
Journal of Current Clinical Care Supplément pédagogique Décembre 2012 27
28 Journal of Current Clinical Care Supplément pédagogique Décembre 2012
Le patient venant de recevoir un diagnostic de coLite uLcéreuse
Points clés
Les patients
atteints de
poussée
symptomatique
après avoir été
en rémission
clinique
pendant
un temps
présentent
souvent une
plus grande
inammation
de la muqueuse,
qui précède
parfois la
poussée de
plusieurs mois.
complications chirurgicales sont pos-
sibles. On estime qu’environ 25 % des
patients ont besoin de recourir à une
opération chirurgicale dans les 10 ans
suivant le diagnostic3.
Le traitement des poussées
symptomatiques de la maladie est
généralement couronné de succès.
Les médicaments les plus souvent
utilisés sont ceux contenant du
5-aminosalicylate (5-AAS), les glu-
cocorticostéroïdes, les agents immu-
nosuppresseurs et les préparations
contenant des anticorps anti-facteur
de nécrose des tumeurs (anti-TNF).
Après le traitement d’une poussée
symptomatique et l’obtention de la
rémission clinique, on prescrit habi-
tuellement une thérapie d’entretien.
Les glucocorticostéroïdes, bien que
très efcaces pour obtenir une rémis-
sion, ne le sont pas vraiment pour
maintenir la rémission et entraînent
une toxicité importante à long terme.
Cependant, les préparations à base de
5-AAS, les analogues de la thiopurine
(azathioprine ou 6-mercaptopurine)
et les agents anti-TNF jouent tous un
rôle dans le maintien de la rémission
clinique4-7, ce qui est clairement le
meilleur moyen de maintenir la qua-
lité de vie du patient, et d’éviter une
hospitalisation et la nécessité d’avoir
recours à une opération chirurgicale.
Optimiser le traitement d’induction
pour les poussées aiguës
Bien qu’une thérapie d’entretien
permette généralement d’obtenir une
rémission clinique, avec la disparition
des symptômes et le rétablissement du
fonctionnement normal de l’intestin,
de nombreuses études ont montré
que les patients en rémission clinique
pourraient avoir des degrés variables
d’inammation de la muqueuse. Il
semble que les patients présentant le
plus haut degré d’inammation évolu-
tive de la muqueuse, malgré l’absence
de symptômes cliniques, sont plus
susceptibles de subir une poussée
symptomatique à court terme que les
patients présentant une « cicatrisa-
tion de la muqueuse » avec dispari-
tion des modications inammatoires
évolutives conrmée par coloscopie ou
sigmoïdoscopie à sonde souple8. Une
telle observation suggère qu’un traite-
ment des patients visant non seule-
ment à améliorer les symptômes, mais
également à cicatriser la muqueuse
pourrait entraîner de meilleurs résul-
tats à moyen et à long terme9.
Réduire le risque de poussées de la
maladie
Il est également connu que les patients
connaissant une poussée symptoma-
tique après avoir été en rémission
clinique pendant un temps présentent
souvent une plus grande inamma-
tion de la muqueuse, qui précède la
poussée parfois de plusieurs mois.
C’est l’occasion d’effectuer une inter-
vention précoce avant l’apparition
des symptômes, et la possibilité
d’augmenter la dose de médicaments,
de changer de médicament ou de rajou-
ter un médicament an d’éviter une
poussée symptomatique de la maladie.
Évaluation de l’état d’inammation
ou de cicatrisation de la muqueuse
Traditionnellement, il est nécessaire
d’observer directement la muqueuse
rectale ou colique par coloscopie
ou sigmoïdoscopie à sonde souple
Optimiser les Objectifs lOrs de la prise en charge des patients atteints de cOlite ulcéreuse
Journal of Current Clinical Care Supplément pédagogique Décembre 2012 29
le patient venant de recevOir un diagnOstic de cOlite ulcéreuse
an de déterminer si le traitement
d’une poussée aiguë de CU a per-
mis d’éliminer l’inammation de la
muqueuse ou d’entraîner une cicatri-
sation de la muqueuse. De façon si-
milaire, la détection d’une récurrence
d’inammation de la muqueuse chez
un patient asymptomatique sur le
plan clinique nécessite habituel-
lement d’observer directement la
muqueuse. Malheureusement, la
coloscopie ou la sigmoïdoscopie à
sonde souple sont deux examens
effractifs et inconfortables, difcile-
ment accessibles dans certaines
régions ou dans le cadre de nom-
breux régimes d’assurance-maladie.
Les patients atteints de CU qui sont
en rémission clinique ne souhaitent
généralement pas se soumettre à des
examens endoscopiques fréquents ou
répétés de leur muqueuse rectale ou
colique. C’est pourquoi les médecins
soignant les patients atteints de CU
ont eu tendance à relativement peu
utiliser l’évaluation endoscopique
lors du suivi des patients.
Par le passé, une telle approche
semblait raisonnable, mais à l’heure
actuelle, en raison de l’importance de
la cicatrisation de la muqueuse, on
s’intéresse davantage à évaluer plus
fréquemment l’état d’inammation
et de cicatrisation de la muqueuse.
Un tel intérêt a conduit à exami-
ner divers moyens d’évaluer ces
paramètres, de façon non effractive
et plus économique. Les examens
présentant un intérêt particulier
comprennent notamment des tests
de détection de marqueurs sériques
de l’inammation, notamment de
la protéine C-réactive, ainsi que
l’examen des selles à la recherche de
marqueurs de la présence de globu-
les blancs. La protéine C-réactive
est l’un des réactifs de la maladie en
phase évolutive dont la concentra-
tion augmente dans le sérum suite à
divers stimuli, comme une infection
ou une inammation. Cependant,
c’est un marqueur relativement peu
sensible de l’inammation : chez
environ 20 % des patients, la quan-
tité de protéine C-réactive sérique
n’augmente pas malgré un état
inammatoire général documenté,
probablement en raison de mécanis-
mes génétiques précis. De plus, une
augmentation de la quantité de pro-
téine C-réactive n’est pas spécique
d’une inammation intestinale : elle
peut être due à une inammation
dans une autre partie du corps.
Calprotectine fécale
La calprotectine est une protéine
contenue dans le cytosol des neu-
trophiles. Elle résiste à la dégrada-
tion par les bactéries intestinales
et est stable jusqu’à 7 jours à tem-
pérature ambiante. En présence
d’inammation intestinale, comme
lors d’une CU, les neutrophiles
passent du mucus à la lumière de
l’intestin et sont excrétés dans les
selles. Dans cette situation, une plus
grande quantité de calprotectine se
retrouve dans les selles et peut être
quantiée grâce à une technologie
facilement disponible. Il a été montré
que la calprotectine fécale permet de
distinguer les patients atteints d’une
maladie inammatoire intestinale
de ceux ayant des troubles gastro-
intestinaux fonctionnels, comme le
syndrome du côlon irritable10. Le
taux de calprotectine fécale augmente
Points clés
Étant donné
l’importance de
la cicatrisation
de la muqueuse,
il existe un
intérêt croissant
à évaluer plus
fréquemment
l’état
d’inammation
et de
cicatrisation de
la muqueuse.
Optimiser les Objectifs lOrs de la prise en charge des patients atteints de cOlite ulcéreuse
lors d’une poussée de la maladie11.
De plus, au sein d’une population
de patients atteints de CU, le taux
de calprotectine fécale est associé
non seulement au degré de gravité
clinique de la maladie, mais égale-
ment à la présence ou à l’absence
d’inammation de la muqueuse,
déterminée par coloscopie et sigmoï-
doscopie à sonde souple12. La détec-
tion des globules blancs ou produits
dérivés dans les selles présente
un certain nombre de défauts ou
d’inconvénients : bien que l’examen
des selles soit une solution non effrac-
tive, les patients n’acceptent pas
toujours de se soumettre à cet exa-
men pour des raisons esthétiques ou
pratiques liées à la collecte et au dépôt
d’échantillons auprès du laboratoire
d’analyses. Le taux de calprotectine
fécale semble également varier au
cours de la journée chez les patients
atteints de CU. Il est donc important
de toujours recueillir l’échantillon
fécal à la même heure, an d’obtenir
les résultats les plus ables, et on
recueille habituellement l’échantillon
lors des premières selles matinales.
Utilisation de la calprotectine
fécale dans le cadre de la thérapie
d’entretien de la CU
Des études ont été menées an
d’identier les patients atteints de CU
en rémission clinique qui sont les plus
susceptibles de souffrir de rechute ou
de poussée au cours d’une période
allant jusqu’à 1 an13. L’hypothèse est
qu’il est possible d’identier de tels
facteurs de risque, puis de faire appel
à des interventions efcaces lorsque
la maladie en est à ses débuts, an
d’empêcher l’apparition d’une poussée
clinique (Figure 1). Parmi les facteurs
de risque potentiels de poussée iden-
tiés, on trouve le plus jeune âge, une
période plus courte entre les pous-
sées de la maladie, des antécédents
de rechutes multiples, la présence en
histologie d’une inammation de la
muqueuse avec plasmocytose basale,
des événements stressants de la vie,
et le manque de respect du traitement
médical13-15. Cependant, étant donné
que la majorité des poussées survien-
nent en l’absence d’événement déclen-
cheur agrant ou sans qu’un facteur
de risque puisse être identié, de
meilleurs facteurs prédictifs du risque
de maladie clinique récurrente sont
nécessaires.
Comme nous l’avons discuté
ci-dessus, la présence de calprotec-
tine dans les selles a tendance à être
associée au degré d’inammation
de la muqueuse chez les patients
atteints de CU11. Cependant, le degré
d’inammation de la muqueuse n’est
pas toujours associé aux symptômes
cliniques de la CU. Par exemple, il est
largement reconnu qu’une proportion
de patients en rémission clinique, en
vertu de l’absence de symptômes de
saignements rectaux, de diarrhée, de
crampes abdominales et de déféca-
tion impérieuse, présentent des signes
d’inammation de la muqueuse lors
d’un examen endoscopique et micro-
scopique de la muqueuse rectale et
colique. Ces patients, plus susceptibles
de souffrir d’une rechute clinique de
la maladie que ceux n’ayant aucun
signe d’inammation évolutive de la
muqueuse, ont tendance à avoir un
taux élevé de calprotectine fécale,
même en l’absence de symptomes16,17.
Points clés
Cela a conduit
à examiner
divers moyens
d’évaluer ces
paramètres,
de façon non
eractive
et plus
économique.
Optimiser les Objectifs lOrs de la prise en charge des patients atteints de cOlite ulcéreuse
30 Journal of Current Clinical Care Supplément pédagogique Décembre 2012
Optimiser les Objectifs lOrs de la prise en charge des patients atteints de cOlite ulcéreuse
Figure 1 :
Traitement de la colite ulcéreuse
Trousse de
dépistage
de la calprotectine
cale
Fenêtres de résultats du test de dépistage de la calprotectine
Thérapie d'entretien pour un patient atteint de CU
Utilisation des tests prédictifs avec la calprotectine fécale
• Le test s'est déroulé
correctement
• Pas de calprotectine
détectable
• Le test s'est déroulé
correctement
Taux de calprotectine :
≤ 15 µg/g
• Le test s'est déroulé
correctement
Taux de calprotectine :
15-60 µg/g
• Le test s'est déroulé
correctement
Taux de calprotectine :
> 60 µg/g
C
CT3T2T1
TC
CT3T2T1
TC
CT3T2T1
TC
CT3T2T1
T
Colite
ulcéreuse
(CU)
CU stable
en rémission
Mesurer les
biomarqueurs
tous les
3 à 6 mois
Augmentation
des taux de
biomarqueurs
(suggérant
une rechute
imminente)
rier le
respect du
traitement
ou optimiser
le traitement
actuel
Intensier le
traitement de
la CU
Suivi rapproché
jusqu'à ce que
les taux de
biomarqueurs
diminuent
xxx x
xx
x
x
5-AAS 2 g po, tous les jours Score Mayo partiel
Calprotectine fécale
5-AAS 4 g po, tous les jours
Suppositoire
de 5-AAS
Non détectable 0
1
2
3
4
5
6
7
8
9
036912 15 18 21 24
Mois
Calprotectine fécale
(µg/g de selles)
Score Mayo partiel
(Aucune évaluation
endoscopique)
< 15
15
60
> 60
Traitement
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1 / 8 100%

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