Première S - Cours 3 DE L’ŒIL AU CERVEAU – QUELQUES ASPECTS DE LA VISION I. Le cristallin, une lentille vivante : 1°) Les parties de l’œil en relation avec la formation d’une image : Voir la dissection de l’œil de thon. Schéma représentant les différentes parties de l’œil Il est indispensable de revoir le cours d’optique fait en physique 2°) Organisation structurale du cristallin : Voir la suite du TP sur l’œil de thon Iris Cristallin Face antérieure Humeur aqueuse Cornée Epithélium Ligament Muscle ciliaire Sutures Face postérieure Cellules en ruban du cortex et du noyau Capsule antérieure Capsule postérieure Cristallin observé au microscope x400 Le cristallin est enfermé dans une capsule mince et transparente et maintenu par les ligaments suspenseurs. Il est organisé en couches de cellules fibreuses. Ces cellules n'ont pas de noyau, et très peu d'organites (contrairement aux autres cellules animales). Elles renferment des protéines : les cristallines qui sont transparentes et ont une activité enzymatique permettant de produire de l'énergie à partir des sucres. L'absence d'organites explique leur transparence. Les substances passent par simple diffusion d’une cellule à l’autre. Le cristallin n'est ni vascularisé, ni innervé. Les cellules du cristallin sont pour la plupart créées pendant la vie embryonnaire et presqu'aucune ne se forme après l'âge de 20 ans (elles n’ont pas de noyau et ne peuvent donc pas se diviser) 3°) Propriété d’accommodation du cristallin : Le cristallin est souple et déformable. Grace aux ligaments et muscles qui le maintiennent en place, il peut changer de courbure et ainsi réaliser l'accommodation, c'est à dire la vision nette des objets plus ou moins proche. 4°) Défauts de vision en relation avec l’atération du cristallin : Si un défaut de courbure présent dès la naissance est à l’origine de problème de vision comme la myopie et l’astigmatisme (voir cours d’optique), un vieillissement du cristallin provoque d’autres manifestations : La structure du cristallin n'étant pas renouvelée. Au fil du temps, cet organe se détériore et peut provoquer des défauts de vision. - La presbytie : Les cellules du cristallin sont moins souples avec l'âge, elles se déforment moins et donc la capacité d'accommodation du cristallin diminue (l’image nette se forme en arrière de la rétine) Il faut donc porter des lunettes pour voir des images nettes de près. - La cataracte : C'est une opacification du cristallin du à la précipitation irréversible des protéines du cytoplasme. Il est possible de se faire opérer de la cataracte (on remplace le cristallin défaillant par un implant artificiel) Cependant c'est la première cause de cécité dans le monde. Les rayons lumineux traversent donc les milieux transparents de l’œil et convergent pour former une image nette au niveau de la rétine. De quoi est formée cette membrane sensible à la lumière ? II. La rétine, une membrane photosensible : 1°) Organisation structurale de la rétine : Voir dessin d’observation ; La rétine est formée de trois couches de cellules nerveuses. En partant de l’humeur vitrée, on a d’abord les neurones ganglionnaires, puis les neurones bipolaires, et enfin les cellules photoréceptrices. Les cellules photosensibles sont en contact avec la choroïde. Il existe deux types de cellules photo réceptrices différentes anatomiquement. Les bâtonnets et les cônes. 2°) Répartition, rôle et composition des photorécepteurs Les bâtonnets sont des photorécepteurs extrêmement sensibles à la lumière. Ils sont très nombreux au niveau de la rétine périphérique, ils permettent de voir dans des conditions d'éclairage faible et assurent ainsi la vision crépusculaire en nuances de gris. Les cônes sont concentrés dans l'axe de l'œil (fovéa = environ 1,5 mm de diamètre) Il en existe trois types différents sensibles à la lumière rouge, verte, et bleue. Les informations recueillies par les trois types de cônes permettent de percevoir les couleurs par synthèse additive. Les cônes assurent donc la vision diurne (vision de jour) en couleurs. La mesure du champ visuel permet de comprendre la répartition des cônes. C’est la zone totale dans laquelle la perception visuelle est possible pour une couleur donnée quand la personne regarde devant elle. Les photorécepteurs sont capables de convertir la stimulation lumineuse en un message nerveux de nature électrique. Ce message sera traité par les cellules bipolaires et ganglionnaires puis transmis au cerveau. Au niveau de la rétine périphérique, l'information est "compressée" en raison de la convergence des cellules (beaucoup de photorécepteurs connectés à un petit nombre de cellules ganglionnaires). Dans la zone centrale, chaque photorécepteur est connecté à une cellule ganglionnaire : l'acuité est alors maximale. Dans la zone centrale, chaque photorécepteur est connecté à une cellule ganglionnaire : l'acuité est alors maximale. Les photorécepteurs contiennent dans leur segment externe, des structures riches en pigment rétinien. Les pigments visuels contenus dans les cônes sont constitués d'une protéine, l'opsine. Il y a 3 sortes de cônes contenant chacune une opsine sensible à une longueur d’onde donnée : Les opsines L sensibles à la couleur rouge. Les opsines M sensibles à la couleur verte. Les opsines S sensibles à la couleur bleue. Le pigment visuel contenu dans les bâtonnets est constitué d'une protéine, la rhodopsine. Si une de ces molécules n’est pas sensible à sa couleur (protéines dysfonctionnelles ou non-sens) l’individu souffre de défauts de vision des couleurs. C’est le daltonisme. C’est une déficience génétique. Dans le cas le plus courant, les individus ne peuvent pas synthétiser une opsine L fonctionnelle et sont donc dichromates. Les rouges leur paraissent sombres et ils distinguent mal le vert, le jaune et l’orange. La déficience des photorécepteurs peut avoir d’autres origines : - liée à l'âge, comme dans la dégénérescence maculaire (DMLA) due à une défaillance des cônes et qui entraîne une perte de la vision centrale ; - alimentaire, comme dans l'héméralopie, qui est une défaillance en vitamine A qui entraîne une perte de la vision nocturne. 3°) Relations de parenté entre les molécules des pigments rétiniens : La synthèse des pigments rétiniens est gouvernée par des gènes portés par les chromosomes n°7 et X. L’observation des séquences de ces protéines (ou des gènes correspondants) montre un pourcentage de similitude que le seul hasard ne peut expliquer. On parle alors de famille multigénique. Les gènes qui codent pour ces molécules dérivent d'un « gène ancestral » commun. Les molécules et les gènes montrant des similitudes sont qualifiées d’homologues. En effet, un gène peut-être accidentellement copié et se retrouver présent dans le génome en deux exemplaires : c'est la duplication. Certaines copies peuvent également subir un déplacement sur un autre chromosome : c'est une transposition. Par la suite, des mutations ponctuelles se produisent et rendent différents ces duplicata initialement identiques. Plus la duplication d'un gène est ancienne et plus les deux gènes qui en résultent sont différents. Ces gènes peuvent permettre la production de protéines remplissant des fonctions différentes. 4°) Utilisation les opsines pour établir des relations de parenté entre les primates: L’étude des séquences des opsines chez différents primates comparés à l’Homme indique que : - Certaines opsines sont absentes chez certaines espèces. - La même molécule (opsine bleue) montre des différences entre les espèces mais avec des degrés de similitudes différents. Ainsi, tous les primates sont apparentés car leur gène qui code pour l’opsine sensible au bleu présente de grandes similitudes. Le degré de similitude et la présence de toutes les opsines permettent d’affiner cette parenté. On peut donc conclure qu’il s’est produit, au sein du groupe des primates, un phénomène d’enrichissement du génome, à la base de la vision trichromatique qui caractérise l’Homme et les primates proches. L’étude comparée des pigments rétiniens montre donc que la vision est bien un produit de l’évolution des espèces. III. De la rétine au cerveau : 1°) Le message nerveux visuel: Les cellules photosensibles contiennent des pigments (rhodopsine et opsines) capables de transformer un signal lumineux en signal électrique (=il se forme dans la cellule une dépolarisation) Ce signal électrique provoque la naissance d’un message nerveux dans les cellules bipolaires qui sera ensuite transmis aux cellules ganglionnaires dont le prolongement permet au message de sortir de l’œil par le nerf optique. Le message nerveux est constitué d’un ensemble de potentiels d’action (=variations brusques de la tension dont l’amplitude est toujours la même) C’est la fréquence des PA qui constitue un message (voir doc livre page 313) 2°) Régions du cerveau impliquées dans la vision : Le cerveau comporte deux hémisphères cérébraux. On distingue 4 grands lobes à la surface de chaque hémisphère, les lobes frontal, pariétal, temporal et occipital. Chaque hémisphère comporte une mince couche de matière grise externe, appelée cortex cérébral. Du fait des nombreux replis ou circonvolutions cérébrales, le cortex représente 40% de la masse de l’encéphale (cerveau, cervelet et bulbe rachidien). Il est constitué par l’assemblage de plusieurs dizaines de milliers de cellules nerveuses ou neurones. L’Imagerie par Résonance Magnétique nucléaire (IRM) est une technique inoffensive qui permet d’observer des coupes virtuelles de l’organisme avec une résolution qui peut atteindre quelques micromètres. L’IRMf (=fonctionnelle) permet de visualiser les zones dont l’activité est importante. On observe que l’arrivée du message nerveux visuel provoque l’activation d’une partie du lobe occipital appelée cortex visuel primaire. D’autres zones corticales proches entrent ensuite en activité ce qui laisse penser que la fonction visuelle mobilise des zones corticales associées comme le lobe pariétal 3°) Voies visuelles entre l’œil et le cerveau : L’exploration du champ visuel permet l’étude des voies visuelles qui vont de la rétine au cortex visuel occipital. Il est en effet possible de mettre en relation des déficits du champ visuel avec l’étude des conséquences de lésions des voies visuelles observées chez certains individus. Les voies visuelles sont constituées des nerfs optiques qui se rejoignent au niveau d’un chiasma. La continuation des nerfs optiques après le chiasma s'appelle le tractus optique. Dans chaque hémisphère, il transfère l'information visuelle jusqu’au cortex visuel en passant par différents différentes zones relais appelées noyaux. Au niveau du chiasma optique les fibres nerveuses issues de la rétine nasale se projettent dans l’hémisphère cérébral opposé tandis que celles issues de la rétine temporale se projettent dans l’hémisphère cérébral situé du même côté. Le résultat est que le cortex visuel de l’hémisphère droit ne reçoit que les informations provenant du champ visuel gauche et inversement pour l’autre cortex. 4°) Traitement cérébral de l’information visuelle : a- Organisation du cortex visuel : Le cortex visuel primaire (ci-contre en jaune et orange) est structuré en zones correspondant chacune à un secteur de champs visuel (une zone particulière est spécialement dédiée à la fovéa) Cf. livre p.312 Chaque zone est elle-même structurée en bandes parallèles recevant les informations provenant alternativement de l’œil droit et de l’œil gauche (voir doc1 page330) Le message nerveux visuel y est traité puis transmis à des aires corticales visuelles secondaires (ci-contre en couleurs) Enfin, des messages sont transmis dans des aires associées (au moins 5) qui permettront une construction mentale de l’image. On parle de centres intégrateurs. Des communications entre ces différentes aires permettent une perception unifiée d’un objet. La collaboration entre les différentes aires correspond à une collaboration entre les cellules nerveuses et une circulation du message. Chaque caractéristique (couleur, forme, mouvement) est traitée dans des aires différentes. Les déficits pathologiques du traitement cérébral de l’information visuelle sont à l’origine d’agnosies. De très nombreuses informations sensorielles parviennent aux centres intégrateurs cérébraux qui bloquent les informations redondantes, c’est la variation sensorielle qui est reconnue et interprétée comme importante ; lors de ce traitement des informations, il peut y avoir des interprétations erronées de certains stimuli (comme lors des illusions d’optiques). b- Perturbation de la perception par des substances chimiques : Les connections entre les cellules nerveuses (neurones) se font grâce aux synapses. Les synapses sont caractérisées par un espace de quelques dizaine de nanomètres, la fente synaptique, que le message nerveux ne peut pas franchir sous forme électrique. L’arrivée d’un message nerveux électrique dans un neurone pré-synaptique déclenche la migration de vésicules synaptiques vers l’extrémité du neurone. Ces vésicules contiennent des neurotransmetteurs qui sont libérés dans la fente synaptique. Les neurotransmetteurs se lient à des récepteurs spécifiques situés sur la membrane du neurone postsynaptique, ce qui engendre un message nerveux de nature électrique. La sérotonine est un neurotransmetteur impliqué dans la transmission des messages nerveux visuels. Certaines substances comme le LSD présentent une structure tridimensionnelle en partie semblable à celle du neurotransmetteur. De ce fait, ils peuvent se fixer sur les récepteurs à la place du neurotransmetteur naturel et empêcher la bonne transmission du message nerveux. Le LSD perturbent alors le fonctionnement des aires cérébrales associées à la vision et provoquent des hallucinations qui peuvent dériver vers des perturbations cérébrales graves et définitives. c- La plasticité cérébrale. Exemple, chez des sourds ou des aveugles de naissances, les aires sensorielles originellement destinées à la réception des sons ou des images sont affectées à la perception respectivement des images ou du toucher L’apprentissage, l’entraînement engendre également une réorganisation des différentes aires de projection dans l’aire somatosensorielle. Chez les violonistes, par exemple, le pouce et l’auriculaire de la main qui tient le violon, montrent une aire de projection plus importante au dépend des aires de projection des doigts adjacents, par rapport à un non-violoniste. Le remodelage des circuits neuronaux au cours de la vie prouvent à quel point le cerveau est plastique. La stimulation environnementale est à l’origine de l’établissement de ces nouveaux réseaux de neurones, du phénotype comportemental propre à chacun. L’expérience personnelle et sa mise en mémoire façonnent donc le cerveau qui reste souple, plastique dans une certaine mesure, tout au long de l’existence. Ainsi, une partie du système nerveux est figée (comportements réflexes, caractère…), une autre est modelable (apprentissage, compensation de la perte d’un organe) sur des périodes de temps plus ou moins longues selon la fonction considérée. L’établissement du phénotype comportemental d’un individu est donc issu de l’expression de son génotype dans un environnement donné.La mise en place du phénotype fonctionnel du système cérébral impliqué dans la vision repose sur des structures cérébrales innées, issues de l’évolution et sur la plasticité cérébrale au cours de l’histoire personnelle. De même la mémoire nécessaire par exemple à la reconnaissance d’un visage ou d’un mot repose sur la plasticité du cerveau. L’apprentissage repose sur la plasticité cérébrale. Il nécessite la sollicitation répétée des mêmes circuits neuroniques. - Les connaissances acquises biaisent le traitement des informations et leur intégration est alors imparfaite. Ces dérégulations naturelles peuvent être également entrainées par des substances ou des comportements lors de l’activation du système de la récompense, circuit nerveux du plaisir. - Même si les structures cérébrales dépendent du génotype, leur mise en place et leur fonctionnement dépendent également de l’environnement et de l’histoire personnelle de l’individu ; apprentissage et mémoire reposent sur cette plasticité cérébrale.