souverain l’exerçant sans limites ou presque, et personnelle. Elle permet au roi
franc de convoquer l’armée (on parle d’hériban), d’exiger tributs et impôts, de
promulguer certains actes de nature législative (même s’ils sont peu nombreux
àl’époque). Le bannum lui permet également de faire citer en justice ses sujets
dans le cadre de la procédure publique. La citation est alors appelée bannitio.Le
ban royal peut être appréhendé comme un ordre prescrivant un acte précis,
comme un pouvoir de contrainte. Y déroger, c’est méconnaître la volonté du
roi. On dit de celui qui ignore un ordre du roi qu’il est forban, c’est-à-dire en
dehors du ban. N’importe qui peut alors légitimement le tuer dans la mesure où
il est devenu comme « le loup dans la contrée ».
39. Le roi est ensuite responsable de la paix et de l’ordre dans le regnum.D’où
la seconde prérogative qui est le mundium, sorte d’autorité verbale (de
«mund », la bouche). On parle aussi de mainbour. Par le mundium, le roi
assure de manière générale la paix aux sujets et aux établissements sis dans le
royaume. Puisque telle est sa volonté, la paix royale revêt le caractère de pres-
cription. C’est à ce titre que le roi perçoit une partie de la composition pécu-
niaire ou de l’amende versée à la victime, ou à la famille de celle-ci, par l’auteur
d’une injure ou d’une agression. C’est le Friede Geld, le prix de la paix. Le roi
peut user de sa mainbour pour placer certaines personnes et certains lieux sous
une protection particulière. Il en est ainsi pour ses proches, ses leudes, les
grands francs ou gallo-romains. Les clercs et les établissements ecclésiastiques
bénéficient également de cette protection spéciale. Bien entendu, le montant
de la composition pécuniaire évolue proportionnellement au rang de la
victime et au niveau de protection dont elle bénéficie de la part du roi.
§2. Une administration peu développée
40. Les souverains francs gouvernent entourés de leurs proches et de leurs
fidèles. À cette fin, ils ont conservé l’institution romaine du palais ou palatium.
Évidemment, à l’époque mérovingienne, cet organe central de gouvernement
n’est plus aussi structuré que sous l’empire romain. Le palais réunit de ce fait
une foule fluctuante de courtisans, aristocrates, Francs et Gallo-romains, laïcs
et ecclésiastiques, et de domestiques, parmi lesquels le roi choisit ses conseillers
et les auxiliaires de son gouvernement. Toutes ces personnes sont ses convives,
ceux qu’il nourrit et qu’il entretient. Le gouvernement royal n’a pas véritable-
ment de siège fixe, même si certains lieux retiennent la préférence des souve-
rains (Paris, Orléans, Soissons par exemple), et le palais est donc itinérant, il se
déplace avec le roi de domaine en domaine. On peut noter toutefois un début
de spécialisation des tâches gouvernementales. Celles-ci sont confiées à des
officiers palatins, fidèles d’entre les fidèles, qui cumulent la direction d’un
service domestique et d’un secteur de l’administration. Certains sont des
personnages considérables. Tel est le cas du maire du palais, ou major domus.
Chargé de l’entretien du roi, il contrôle de ce fait l’ensemble de la domesticité
et coiffe tous les aspects du gouvernement. Le comte palatin exerce, lui, des
fonctions judiciaires, notamment en instruisant les affaires portées devant le
CHAPITRE 1–LES MÉROVINGIENS :UNE ROYAUTÉ GERMANIQUE 47