Doctinews - N°4 - Octobre 2008 FIV. De l’infertilité à la procréation Pour les personnes déclarées stériles auparavant, avoir un bébé est désormais possible grâce aux techniques de l’assistance médicale à la procréation dont la fameuse fécondation in vitro. Une alternative particulièrement bienvenue dans des sociétés où ne pas avoir d’enfants est mal vu, et où les femmes stériles sont parfois ostracisées, voire rejetées. Avec la collaboration du Dr BENHAYOUN S. Azzeddine Pharmacien Biologiste ancien interne au c.h.u. de reims - Casablanca fondamentaux A 12-13 u Maroc, la stérilité s’érige assistée par le biologiste du spermatocomme un réel problème zoïde dans l’ovule. Cette dernière méde santé publique. Environ thode a été perfectionnée par l’IMSI 15 à 17% des couples souffrent d’in- (Intra Cytoplasmic Magnified Sperm fertilité, en l’absence de taux officiels. Injection). Peu répandue et non encore Outre l’infertilité inexpliquée, les cau- utilisée au Maroc, elle permet une vises de cette infertilité concernent les sualisation fine et une présélection des deux sexes de façon quasiment égale. spermatozoïdes avant ICSI. Ainsi chez l’homme, l’infécondité peut être la conséquence d’une ano- FIV. Quand l’éprouvette supplée malie spermatique (asthénospermie, la nature oligospermie, tératospermie, azoos- L’essentiel de la FIV consiste à réaliser permie) ou anatomique (éjaculation au laboratoire le développement de rétrograde par exemple). Du côté de la l’embryon puis à le replacer à l’intéfemme, elle peut être liée notamment rieur de l’utérus. Elle est d’usage chez à des facteurs tubaires ou ovulaires, à le couple n’ayant pas eu d’enfant après une endométriose et 2 ans de mariage. à l’âge. Les demandes pour Le taux de réussite se Le traitement de la faire une FIV se situe autour de 25% stérilité s’est netfont de plus en plus par tentative. tement amélioré et nombreuses auprès dans 70 à 80% des des structures spécas, le médecin arrive à identifier le cialisées, mais elles n’arrivent pas problème. Les traitements sont parfois toujours à êtres admises. La prise en simples et conduisent à une grossesse. charge fait appel à une équipe médiMais dans certains cas, le recours aux cale multidisciplinaire composée de nouvelles technologies de la repro- gynécologue, de biologiste, d’uroduction, regroupées sous le vocable logue et de psychologue. La FIV ne «Assistance médicale à la procréation peut s’exercer que dans le cadre de la (AMP) », devient la seule alternative. cellule familiale légale, c’est-à-dire un Trois techniques d’AMP sont prati- couple marié. Les spermatozoïdes et quées au Maroc, à côté de la matu- les ovules doivent appartenir exclusiration in vitro (MIV) réservée aux vement à ce couple, selon « la charia patientes présentant des dystrophies islamia » ovariennes, ou ovaires micro-polykis- Le déroulement de la fécondation in tiques ou PCO. Il s’agit de l’insémina- vitro passe par plusieurs étapes suction artificielle avec conjoint (IAC), cessives qui sont les suivantes : qui consiste en l’injection d’une in- Etape 1 : Stimulation des ovaires fime quantité du sperme du mari amé- Pour augmenter les chances de succès lioré dans la cavité utérine de l’épouse, dans la FIV, le médecin essaie d’obla fécondation in vitro (FIV), objet de tenir un maximum d’ovules matures. notre exposé, et la fécondation in vitro Il stimule ainsi les ovaires de manière avec micro-injection (ISCI) : injection artificielle en administrant à la femme Les étapes de l’ICSI (intracytoplasmic sperm injection) Doctinews - N°4 - Octobre 2008 des médicaments inducteurs de l’ovulation qui permettent le développement, en même temps, de plusieurs follicules ovariens et par conséquence plusieurs ovules. Dans certains cas, la patiente peut présenter une hyperstimulation. C’est une réponse ovarienne excessive qui se manifeste par des douleurs en bas du ventre avec une augmentation du volume de l’abdomen : « ascite ». Mais ce risque est rare. Etape 2 : Monitorage de la stimulation ovarienne Cette technique permet de surveiller le bon déroulement de la croissance des follicules ovariens sous l’effet des inducteurs de l’ovulation. Ce monitorage est basé sur d’une part, les contrôles échographiques des ovaires qui permettent de préciser le nombre de follicules en développement, la taille de ces follicules et leurs localisations à l’ovaire droit et gauche, et d’autre part, les dosages répétitifs de l’hormone de l’oestradiol dans le sang. En couplant les dosages hormonaux de l’oestradiol au nombre et taille des follicules observés à l’échographie, le médecin peut évaluer le degré de la maturation de ces follicules et donc de déterminer le moment optimal pour l’administration des (HCG ou les gonadotrophines chorioniques) qui ne «Ces bébés éprouvette»! La première naissance d’un enfant issu de fécondation in vitro, Louise Brown, date de 1978, et est due à l’équipe anglaise de Streptoe et Edwards. Cette naissance (le 75ème être vivant conçu de cette façon, après quelques souris, rats et lapins..) fut entourée d’incrédulité et ces chercheurs furent, à l’époque, qualifiés «d’apprentis sorciers»; une conception non naturelle et en dehors de l’organisme ne pouvait engendrer que des enfants anormaux... Le deuxième bébé éprouvette a vu le jour la même année en Inde. En France, ce n’est qu’en 1982 que naquit Amandine, bébé «éprouvette». sont que des hormones qui déclenchent l’ovulation et dont l’administration est nécessaire aussi pour achever la maturation des follicules ovariens en développement. Etape 3 : Ponction des follicules ovariens Ayant pour but de recueillir les ovules, elle est réalisée entre 34 à 36 heures après l’injection des déclencheurs de l’ovulation (Les HCG). Si l’on dépasse les 36 heures, on risque de voir qu’une ovulation spontanée se produit au niveau des ovaires avec un désavantage énorme qui est la perte des ovules matures parce que leur recueil devient difficile. La ponction des follicules se réalise par voie vaginale sous contrôle échographique endovaginal sous anesthesie générale. Mais dans de rares cas, le recueil peut être réalisé à travers la paroi abdominale sous contrôle échographique abdominal. Enfin, la ponction des follicules peut être réalisée sous anesthésie locale. Etape 4 : Recueil des spermatozoïdes Il est fait par masturbation. Le jour de la ponction des follicules, le biologiste procède à la préparation du sperme qui consiste à sélectionner les spermatozoïdes les plus fécondant. Etape 5 : Mise en culture des ovules Une fois recueillis, les ovules sont : - Soit inséminés naturellement par mise au contact avec un certains nombre de spermatozoïdes : c’est la FIV - Soit inséminés artificiellement par micro-injection d’un spermatozoïde dans le cytoplasme de l’ovule : c’est l’ICSI ( intracytoplasmic sperm injection ). Durant cette étape, deux phénomènes sont observés : Doctinews - N°4 - Octobre 2008 fondamentaux - Après 18h d’incubation à 37°C et 5% de CO2 médical, l’apparition d’un zygote (2 pronuclei) signe de la fécondation. - Clivage cellulaire qui aboutira a la formation de l’embryon, au bout de 48 h de mise en culture de l’oeuf fécondé. C’est souvent à ce stade de division cellulaire que les embryons sont transférés à l’intérieur de l’utérus. Dans certains cas, le transfert est réalisé au bout de 3 à 6 jours après avoir été mis dans des milieux de culture spéciaux. Les embryons dans ce cas là atteignent un stade embryologique beaucoup plus avancé, appelé « stade de blastocyste ». Etape 6 : Transfert des embryons Il consiste à introduire les embryons ob- 14 Zygote tenus par la fécondation in vitro à l’intérieur de l’utérus (dans la cavité utérine) en passant à travers le col utérin. Il se fait, en général, sans anesthésie. Le nombre d’embryon transféré est de l’ordre de 2 à 3 embryons. Un nombre plus important augmente le risque de grossesse multiple (grossesse gémellaire ou plus). Actuellement en Europe, la plupart des centres de FIV ont tendance à transférer un seul embryon dit « Top Embryon ». Embryon à 4 cellules Enfin on procède à la congélation des embryons restant et de bonne qualité après le premier transfert (embryons surnuméraires). Ces embryons pourront être replacés dans un autre cycle si l’on n’obtient pas de grossesse après les transferts précédents ou s’il y a un désir de nouvelle grossesse dans les deux ans qui suivent l’accouchement après un transfert réussi. « Enfin je suis enceinte! » Le taux de réussite se situe autour de 25% à 30% par tentative. Il est toutefois tributaire de plusieurs facteurs dont l’âge de la femme, l’état des gamètes du couple et des causes qui ont nécessité la FIV. Le diagnostic de grossesse est de mise au 12-13ème jour après le transfert embryonnaire. Il repose sur le test sanguin qui peut être quantifié et comparé aux résultats suivant contrairement au test urinaire. Un test de dépistage du risque accru de la trisomie 21 peut être également réalisé à partir du sérum de la mère entre la quinzième semaine d’aménorrhée (14 semaines, 0 jour) et la dix-huitième semaine (17 semaines, 6 jours). Il ne permet pas, à lui seul, d’établir le dia- Analyses médicales en AMP 1- Bilan d’infertilité masculine Spermogramme – spermocytogramme - spermoculture Test de mobilité et de survie des spermatozoïdes Recherche d’anticorps antispermatozoïdes Bilan hormonal 2- Bilan de l’infertilité féminine Test de Huhner ou test post-coïtal Bilan hormonal plasmatique 3- Bilan infectieux pour le couple Chlamydia - Hépatite B Hépatite C - Sida Syphylis gnostic de trisomie 21. Si le risque établi est élevé, un prélèvement de liquide amniotique (amniocentèse) est proposé, afin d’établir une analyse chromosomique (caryotype). Les éventuelles complications notées telles que les fausses couches spontanées, les grossesses extra-utérines et les malformations sont plus ou moins identiques à celles survenues lors de grossesses naturelles. Côté matériel, le coût d’une FIV peut s’évaluer entre 20 000 et 30 000 Dhs, selon les cas (la femme âgée demande plus de FSH recombinante pour sa stimulation et pour les azoosperme une biopsie testiculaire s’impose). Cette somme inclut par ordre d’importance les médicaments, les interventions du gynécologue, l’intervention du biologiste et les frais d’hospitalisation. Dans ce cadre, il importe de signaler que l’absence d’une prise en charge totale de ce type d’intervention médicale constitue une barrière de taille face au bon nombre de couples en quête de progéniture légitime. La problématique risque de s’aggraver davantage si l’on sait que certains facteurs incriminés dans l’infertilité comme la pollution, les infections(MST) et le mariage tardif sont en nette croissance. Les organismes de remboursement et les assurances privées sont ainsi vivement conviés à se pencher sur la question en vue de mettre en place les mesures adéquates pour une meilleure prise en charge. L’enjeu est de taille. Il y va de la santé de la population et de son bien-être. Bien plus que cela. La procréation est l’un des droits les plus fondamentaux de l’homme, source de tout développement. Vitrification. Qu’est-ce que c’est? Le principe de la vitrification, développé depuis 4 ans par un Belge, consiste à conserver les embryons par congélation rapide. Ainsi, au lieu de congeler les ovules, spermatozoïdes et embryons humains avec la méthode lente, qui requiert trop de matériels, il est possible de recourir à une méthode ultra-rapide. C’est une amélioration des techniques classiques de congélation. qui donnaient - à l’échelon mondial- très peu de résultats pour des moyens très lourds. Simple, cette nouvelle technique est peu coûteuse et reproductible. Elle offre un excellent taux de grossesse qui peut aller jusqu’à 20% supplémentaire par rapport a la congélation classique.