maladie d`alzheimer

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MALADIE D'ALZHEIMER
Déclin progressif inexorable des fonctions cognitives, associé au nombre excessif de plaques séniles
dans le cortex cérébral et dans la substance grise sous-corticale qui contiennent d'ailleurs des dépôts
amyloïdes et neurofibrillaires, composés de la protéine tau.
Epidémiologie
Les formes à début précoce ne représentent que 2-7 % des cas, et sont généralement dues à une
mutation génétique héréditaire. La forme commune affecte les personnes > 60 ans et son incidence
augmente avec l'âge.
Quatre millions d'Américains souffrent de la maladie d'Alzheimer, avec un coût annuel d'environ
90 milliards de dollars, comprenant le tt médical et l'assistance à domicile, les services sociaux, la
perte de productivité, et la mort prématurée. La maladie est environ 2 fois plus fréquente chez les
femmes que chez les hommes (peutêtre parce que les femmes vivent plus longtemps, mais le sexe
féminin peut être un facteur de risque). Elle constitue > 65 % des démences des personnes âgées. La
démence vasculaire et la maladie d'Alzheimer coexistent dans environ 15 % des cas.
Etiologie
La cause de la maladie d'Alzheimer est inconnue. La maladie est familiale dans environ 15 à 20 %
des cas. Les autres cas, dits sporadiques, présentent certains déterminants génétiques. Au moins 4
gènes distincts, localisés sur les chromosome 1, 14, 19, et 21, prédisposent à l'apparition et à
l'évolution de la pathologie. Le chromosome 21 code pour le précurseur protéique de l'amyloïde, qui
s'accumule dans l'encéphale des patients souffrant de la maladie d'Alzheimer (comme c'est le cas
dans d'autres pathologies). Le chromosome 19 code pour les allèles 1 à 4 de l'apolipoprotéine (apo) E
(1 à 4). La présence de l'allèle 4 augmente le risque de maladie d'Alzheimer chez les sujets blancs ;
les allèles  2 et 4 augmentent le risque chez les sujets noirs. La trisomie 21 cause la maladie
d'Alzheimer précocement chez les personnes atteintes du syndrome de Down. Ces données
confortent l'observation épidémiologique selon laquelle la maladie aurait un trait génétique
autosomique dominant, dans la plupart des cas à début précoce et ainsi que dans certaines formes
plus tardives, mais avec une pénétrance variable. Les facteurs environnementaux sont l'objet de
recherches actives. Des hypothèses non confirmées évoquent des taux hormonaux faibles et
l'exposition aux métaux.
Pathogénie
Les neurones diminuent dans le cortex cérébral, dans l'hippocampe, et dans les structures souscorticales (comprenant une perte cellulaire sélective dans le noyau basal de Meynert), dans le locus
caeruleus, et dans le nucléus du raphé dorsal. Comme cela est mis en évidence dans la tomographie
à émission de positrons, la consommation de glucose et la perfusion cérébrale dans certaines zones
de l'encéphale sont réduites (cortex du lobe pariétal et temporal dans les phases initiales de la
maladie, cortex préfrontal dans les phases tardives de la maladie) ; on ignore si cette diminution
précède ou suit la mort cellulaire. Le système microvasculaire peut par ailleurs être touché, comme il a
été observé dans l'angiopathie congophilique.
Les plaques neuritiques ou séniles (composées de neurites, d'astrocytes, et de cellules gliales
disposées autour du nucléus amyloïde) et les dégénérescences neurofibrillaires (composées de
filaments hélicoïdaux accouplés) jouent un rôle dans la pathogénie de la maladie d'Alzheimer. Les
plaques séniles et la dégénérescence neurofibrillaire sont présentes dans le vieillissement normal,
mais elles sont beaucoup plus prévalentes chez les personnes atteintes de maladie d'Alzheimer.
Des protéines spécifiques pathologiques sont présentent dans la maladie d'Alzheimer. On pense que
la protéine -amyloïde contribue à la pathogénie de la maladie. La recherche actuelle tente de
déterminer si le dépôt amyloïde est une cause toxique du déclin cognitif ou s'il constitue une réaction
biologique ou un phénomène secondaire. Les apoprotéines E, produites dans l'encéphale et dans le
foie, influent sur un certain nombre de processus cérébraux, comme les dépôts amyloïdes, l'intégrité
du cytosquelette, et l'efficacité de la réparation neuronale. Le rôle de l'apolipoprotéine E dans la
maladie d'Alzheimer devient plus certain. La protéine présente 3 formes alléliques dénommées 2, 3,
et 4, avec pour conséquence 6 génotypes : 2/2, 2/3, 2/4, 3/3, 3/4, et 4/4. Le risque de
maladie d'Alzheimer est franchement augmenté chez les personnes ayant 2 allèles 4, qui ont
davantage de risque de développer la maladie entre 60 et 75 ans. L'incidence peut être diminuée chez
ceux qui présentent l'allèle 2. Comme environ 40 % des personnes qui atteignent l'âge de 85 ans
développent certaines formes patentes de démence, indépendamment de la nature des apo E, ce test
génétique n'est pas très utile pour prédire si une personne développera au cours de sa vie la maladie
d'Alzheimer. Le test est disponible sur le marché. Son utilité comme test diagnostique supplémentaire
(plutôt que comme test prédictif) pour la maladie d'Alzheimer est l'objet d'études.
De nombreuses protéines sont anormalement augmentées dans l'encéphale, et apparaissent dans le
LCR. Il n'est pas certain qu'elles soient des agents causaux ou des marqueurs de la maladie. La
protéine tau (d'origine neurofibrillaire) présente une haute spécificité mais une basse sensibilité pour
identifier une démence comme la maladie d'Alzheimer ; un type différent de protéine tau s'accumule
également chez les patients souffrant de paralysie supranucléaire évolutive (v. Ch. 179). La choline
acétyltransférase est réduite de façon marquée, avec par suite une réduction de la disponibilité de
l'acétylcholine. La somatostatine, le facteur de libération de la corticotrophine, et d'autres
neurotransmetteurs sont également réduits de manière significative.
Symptomatologie
La maladie d'Alzheimer peut être divisée en divers stades cliniques. Néanmoins, les patients
présentent une grande variabilité, et l'évolution de la maladie n'est pas aussi régulière qu'indiqué dans
la description suivante. La maladie évolue graduellement, bien que parfois les symptômes semblent
rester en plateau pendant un certaine période.
La phase initiale est caractérisée par une perte de la mémoire récente, une incapacité à apprendre et
retenir de nouvelles informations, des problèmes de langage (en particulier pour retrouver les mots),
des changements d'humeur, et des troubles de la personnalité. Les patients peuvent présenter une
difficulté évolutive à effectuer leurs activités quotidiennes (p. ex. gérer leur chéquier ou retrouver leur
chemin aux alentours ou se souvenir où ils ont placé leurs affaires). La pensée abstraite et leur propre
jugement sont réduits. Les patients peuvent réagir à la perte du contrôle et de la mémoire par de
l'irritabilité, de l'hostilité, et de l'agitation. Certains patients présentent une aphasie isolée ou des
difficultés visio-spatiales. Bien que le stade initial ne compromette pas la sociabilité, les parents se
rendent compte des comportements inhabituels (p. ex. le patient se perd sur le chemin du
supermarché ou oublie le nom d'un hôte récent), associés à l'apparition d'une labilité émotionnelle.
Au stade intermédiaire, les patients deviennent incapables d'apprendre et de se rappeler les nouvelles
informations. La mémoire à long terme est altérée mais non totalement perdue. Les patients peuvent
nécessiter une assistance pour se laver, pour manger, pour s'habiller ou pour les soins corporels. La
désorganisation du comportement peut être caractérisée par le vagabondage, l'agitation, l'hostilité,
l'absence de coopération ou l'agression physique. A ce stade, les patients perdent tout sens du temps
et de l'espace, parce que les références environnementales et sociales sont gérées de manière
inefficace. Les patients se perdent souvent au point de ne plus retrouver leur propre chambre ou la
salle de bain. Bien que la capacité de marcher soit conservée, ils risquent de chuter ou d'être victimes
d'accidents en rapport avec leur état confusionnel.
Dans les stades sévères, les patients sont dans l'incapacité de marcher ou d'effectuer n'importe quel
type d'activité quotidienne, et généralement sont complètement incontinents. La mémoire à court
terme et à long terme est totalement perdue. Les patients peuvent être incapables d'avaler et de
manger, et risquent la malnutrition, la pneumonie (en particulier par inhalation) et des escarres de
décubitus. L'hospitalisation dans des structures de soins de long séjour deviennent nécessaires du fait
qu'ils sont totalement dépendants des autres pour les soins. A la fin, les patients deviennent mutiques.
Puisque de tels patients ne sont pas en mesure d'expliquer les symptômes au médecin et du fait que
les personnes âgées n'ont souvent pas de réactions fébriles ou de réponse leucocytaire à l'infection,
le médecin devra se baser sur son expérience et sur son intuition lorsque le patient semble malade.
Les troubles moteurs ou d'autres troubles neurologiques focaux se manifestent tardivement dans la
maladie, bien que l'incidence des crises comitiales soit quelque peu augmentée à tous les stades. Le
stade final de la maladie d'Alzheimer est le coma et la mort, en général consécutive aux infections.
Complications
Les troubles comportementaux comprennent l'hostilité, l'agitation, le vagabondage et le négativisme.
Les complications psychiatriques comprennent la dépression, l'anxiété et les réactions paranoïaques.
Les psychoses vraies (paranoïa, illusions, et hallucinations) sont présentes chez environ 10 % des
patients souffrant de la maladie d'Alzheimer. En outre, près de 80 % des parents ou des personnes
qui assistent le patient souffrent d'une dépression au cours de la maladie. Les problèmes
métaboliques (p. ex. la déshydratation, les infections, l'intoxication médicamenteuse) peuvent
aggraver le déficit cognitif et rendre difficile la prise en charge du patient. D'autres complications
comprennent les chutes, l'incontinence, et l'état confusionnel en fin de journée (coucher du soleil). Les
médicaments couramment utilisés pour le tt de la maladie d'Alzheimer (en particulier les antipsychotiques pour les troubles du comportement) peuvent provoquer des troubles parkinsoniens et
une hypotension orthostatique. Les médicaments tricycliques ayant des effets indésirables de type
anti-cholinergique peuvent être la cause de constipation, de rétention urinaire, de glaucome et de
crises comitiales. Les antihistaminiques en vente libre [n.d.t. : aux USA] peuvent conduire à une
aggravation de l'état confusionnel. Ces complications peuvent accélérer l'évolution vers
l'institutionnalisation précoce du patient et devront être évitées ou traitées rapidement car beaucoup
d'entre elles peuvent être contrôlées ou traitées.
Diagnostic
Le diagnostic est en général basé sur l'histoire de la maladie, sur l'examen clinique, sur les tests de
laboratoire, et sur l'élimination d'autres causes de démence. Une évaluation codifiée de l'état mental
doit être effectuée ; le mini-mental status de Folstein (v. FIG. 165-1) est le test le plus couramment
utilisé. L'échelle de Barthel peut être utilisée pour évaluer l'activité quotidienne. Pour environ 85 % des
patients souffrant de la maladie d'Alzheimer, un diagnostic correct peut être porté sur la base d'une
anamnèse complète et sur les résultats d'un examen neurologique standard. La biopsie du tissu
cérébral est rarement effectuée ou utile.
Les caractéristiques essentielles de la démence sont représentées par la perte de la mémoire à court
et à long terme, de la pensée abstraite et du jugement ; d'autres troubles des fonctions corticales
supérieures ; et des changements de la personnalité. L'évolution des troubles cognitifs confirme le
diagnostic, et les patients souffrant de maladie d'Alzheimer ne s'améliorent pas. Les critères suivants
aident à établir un diagnostic probable de la maladie d'Alzheimer : démence établie par l'examen
clinique et précisée par un test validé de l'état mental ; déficit en 2 fonctions cognitives ou plus ;
aggravation évolutive de la mémoire et d'autres fonctions cognitives ; aucune perturbation de la
vigilance ; début entre 40 et 90 ans, plus souvent après 65 ans ; et pas de troubles systémiques ou
cérébraux qui puissent expliquer le déficit évolutif de la mémoire et de la cognitivité. Des instruments
d'évaluation, tels que l'Hachinski ischemic score, peuvent être utilisés pour différencier la démence
vasculaire (v. plus loin) de la maladie d'Alzheimer.
L'évaluation initiale devra comprendre une NFS, la mesure des électrolytes, les tests du SMA12/60
(Sequential Multiples Analyzer), les tests de la fonction thyroïdienne, le taux des folates et de la vitamine B12, le VDRL, et une
analyse des urines ; l'ECG et la rx thorax peuvent être utiles chez certains patients. Si l'anamnèse indique la
présence d'une masse, si des signes neurologiques focaux existent ou si la démence est de courte
durée, la TDM ou l'IRM devront être effectuées pour éliminer la présence de tumeurs, d'infarctus,
d'hématomes sous-duraux, et d'une hydrocéphalie à pression normale. La tomographie à émission de
positrons est avant tout une technique de recherche ; cependant, la simple tomographie à émission de
photons fournit des informations similaires concernant la perfusion cérébrale et, dans certains cas,
peut contribuer au diagnostic différentiel. La ponction lombaire est rarement nécessaire, mais elle
devra être envisagée si on suspecte une infection chronique ou une neurosyphilis comme étant la
cause du trouble cognitif.
La dépression, le problème psychiatrique le plus fréquent du sujet âgé, peut simuler une maladie
d'Alzheimer débutante, et coexiste dans environ 20 % des cas ; par conséquent, la dépression devra
être envisagée chez les patients qui présentent une atteinte cognitive.
Pronostic et traitement
Le déclin cognitif est inévitable, mais le taux de progression n'est pas prévisible. La survie varie de 2 à
20 ans, avec une moyenne de 7 ans.
Les principes généraux du tt sont les mêmes que ceux des autres formes de démence (v. Traitement
sous DEMENCE, plus haut).
Certains médicaments qui augmentent la neurotransmission cholinergique, comme le donépézil,
peuvent améliorer, au moins provisoirement, la mémoire pendant les premières phases de la maladie
d'Alzheimer. Néanmoins, ils ne modifient pas la constante aggravation de la pathologie sous-jacente.
La tacrine [n.d.t. : médicament à prescription restreinte en France] provoque davantage d'effets
secondaires. Un tt d'épreuve par le donépézil [n.d.t. : médicament à prescription restreinte en France]
en débutant avec 5 mg/j le soir et en augmentant après 4-6 semaines à 10 mg pourra être envisagé ;
ce tt devra être poursuivi plusieurs mois pour assurer son efficacité [n.d.t. : la mise en route du tt en
France est obligatoirement hospitalière]. Les effets des antioxydants (p. ex. la vitamine E), du tt
oestrogénique, et des AINS sont à l'étude.
Beaucoup de médicaments ont des effets négatifs sur le SNC, augmentant l'état confusionnel et la
torpeur. Les sédatifs, tels que les benzodiazépines, devront être évités autant que possible. Il faudra
éviter également les médicaments anti-cholinergiques, comme certains antidépresseurs tricycliques,
les antihistaminiques, les anti-psychotiques et la benztropine [n.d.t. : substance non commercialisée
en France].
Un extrait de Ginkgo biloba dénommé EGb peut ralentir ou faire légèrement régresser la perte de
mémoire et d'autres symptômes, chez les patients souffrant de la maladie d'Alzheimer ou d'une
démence vasculaire. L'extrait peut agir comme piégeur de radicaux libres. Les complications semblent
mineures, mais des études ultérieures sont nécessaires.
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