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N°327 du 10 au 16 avril 2014
L’épanchement péricardique est défini comme une accu-
mulation anormale de liquide dans le sac péricardique.
Il n’y a pas de prédisposition de sexe mais il s’agit bien
souvent de chiens de races de grand format et d’âge moyen
de 9,6 ans (écart de 1,2 à 15,2 ans)1. Dans notre cas le chien
est de grande taille (bulldog anglais) et son âge correspond
aux données de la littérature.
La symptomatologie peut différer d’un individu à l’autre
et comprend entre autres : léthargie (75 %), ascite (69 %),
dyspnée (55 %), anorexie (53 %), syncope (24 %), toux (20 %)1.
Ces données sont en accord avec les signes cliniques obser-
vés dans notre cas puisque le chien présentait les trois signes
cliniques les plus rencontrés : léthargie, ascite et dyspnée.
Les examens complémentaires à notre disposition en pre-
mière intention sont l’échocardiographie et la cytologie.
L’échocardiographie est un examen non invasif essentiel
afin de confirmer la présence d’un épanchement et son impor-
tance (présence d’une tamponnade), d’évaluer l’existence de
masses cardiaques ou de déterminer la présence d’une insuf-
fisance cardiaque concomitante. L’une des limites est la
difficulté à localiser parfaitement la masse et à déterminer
sa nature. L’échocardiographie n’apporte qu’une orienta-
tion sur la cause de l’épanchement sans valeur prédictive.
En effet, il existe des cas où la masse observée à l’échocar-
diographie s’avère ne pas être un hémangiosarcome, bien que
celui-ci soit la tumeur la plus fréquente. Il ne faut donc pas
condamner systématiquement l’animal sur ce simple examen.
La cytologie suite à une ponction de l’épanchement est
aussi possible. Elle permet de caractériser la nature de
l’épanchement. Cependant, la cytologie possède une mau-
vaise sensibilité et spécificité. Il y a de nombreux faux
positifs concernant les mésothéliomes.
Les causes de l’épanchement chez le chien sont néopla-
siques à 57 % (33 % hémangiosarcome, 12 % chémodec-
tome, 12 % autres : mésothéliome, métastases…), idio-
pathiques à 19 %, d’origine cardiaque à 14 %, traumatiques
à 5 % et infectieuses à 2,5 %. Les chiens de race de grand
format sont plus sujets aux épanchements idiopathiques.
Les pronostics sans traitement sont très différents selon
les causes d’épanchement péricardique :
Après traitement chirurgical, les pronostics sont meilleurs :
Il est donc nécessaire d’obtenir un diagnostic de certi-
tude de l’épanchement afin de ne pas condamner à tort
un animal.
Deux méthodes de traitements sont possibles :
médical ou chirurgical
Le traitement des épanchements péricardiques doit
être médical avant d’être chirurgical : la ponction de
la plus grande quantité possible de liquide permet de
supprimer la tamponnade, elle répond au besoin urgent
de redonner une amplitude normale aux mouvements
du myocarde.
Les indications chirurgicales concernent les chémodec-
tomes, les mésothéliomes (survie moyenne de 129 jours
après traitement médical contre 661 jours après péricar-
dectomie)1et les récidives d’épanchements idiopathiques.
Dans ce dernier cas, une nouvelle ponction est peu indi-
quée en raison du risque d’évolution vers une fibrose du
péricarde qui altère le pronostic postopératoire. La gestion
chirurgicale permet alors d’obtenir une survie de 72 % à
18 mois2. Dans notre cas, la chirurgie a été immédiatement
envisagée puisqu’elle nous permettait à la fois un bilan
lésionnel de qualité et un traitement chirurgical à faible
morbidité. L’échocardiographie ne permettait pas de tran-
cher sur la nature de la masse.
Le traitement chirurgical peut se faire par thoracoscopie
ou par thoracotomie. La scopie est la méthode que nous
avons employée car elle est mini-invasive, moins dou-
loureuse en postopératoire, et permet une très bonne visua-
lisation du péricarde. La vidéo chirurgie est bien adap-
tée à la réalisation d’une fenêtre péricardique permettant
le drainage thoracique du liquide d’épanchement. Dans ce
cas, la résection n’a pas besoin, comme en chirurgie
conventionnelle, d’être subtotale, l’ablation d’une fenêtre
de 5 cm suffisant3. La limite de la scopie par rapport à la
thoracotomie réside dans le fait qu’il n’est pas possible
de visionner directement le cœur.
L’analyse histologique permet d’obtenir un diagnostic
de certitude sur la nature de l’épanchement. Étant donné
les différences de pronostic entre un hémangiosarcome
et une péricardite, elle présente un vrai intérêt. Une étude
de 2013 montre un résultat similaire : deux des 31 masses
cardiaques observées à l’échocardiographie ne présentent
pas de cellules néoplasiques1. Pour ces cas, une péricar-
dite idiopathique est identifiée, expliquant l’épanchement.
Dans une autre étude, quatre des masses atriales droite
observées sont des mésothéliomes4.
Ce cas clinique est donc une illustration de mise en évi-
dence d’une masse cardiaque à l’échocardiographie et
à la scopie qui ne semble pas être de nature tumorale à
l’histologie. Seule la péricardite en regard de la masse
permet d’expliquer l’épanchement observé, d’origine
idiopathique. n
Chien
CAS CLINIQUE
Cause Pronostic
Idiopathique Excellent : 790 à 1068 jours de survie
Néoplasique Mauvais : 29 à 56 jours de survie
Cause Pronostic
Idiopathique Excellent : 72 % de survie à 18 mois
Néoplasique Chémodectome : 661 jours de survie
Mésothéliome : 400 jours de survie
Hémangiosarcome : 90 jours de survie
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