Examen

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Université Paris Dauphine
DEMI2E 2e année
Algèbre linéaire 3
Examen du vendredi 27 janvier 2012
Le sujet comporte 2 pages. L’épreuve dure 2 heures. Les documents, calculatrices et
téléphones portables sont interdits.
Exercice 1.
Pour x = (x1 , x2 , x3 ) ∈ R3 , on pose
q(x) = x21 + 2x22 + 2x23 + 4x1 x2 + 4x1 x3 + 2x2 x3 .
1. Montrer que q est une forme quadratique sur R3 .
2. Déterminer son rang et sa signature par la méthode de Gauss.
3. Déterminer la matrice M de la forme q dans la base canonique de R3 . Déterminer les
valeurs propres de la matrice M et retrouver ainsi le rang et la signature de la forme q.
Exercice 2.
Soit A = (Aij )1≤i,j≤n une matrice de Mn (R).
1. Montrer que pour j = 1, · · · , n
sX
X
√
|Aij | ≤ n
A2ij .
1≤i≤n
1≤i≤n
Si A est orthogonale, en déduire que
X
1≤i, j≤n
√
|Aij | ≤ n n.
n
2. Déterminer un vecteur e ∈ R tel que
X X
Aij =< Ae, e >
1≤i≤n 1≤j≤n
où < ·, · > est le produit scalaire canonique de Rn .
Si A est orthogonale, en déduire que
X
Aij ≤ n.
1≤i, j≤n
.../...
2
Exercice 3.
On note Mn (R) l’ensemble des matrices A = (Aij ) à n lignes et n colonnes, dont les
cœfficients Aij sont réels. Mn (R) muni de l’addition et de la multiplication par un réel
« cœfficient par cœfficient », c’est-à-dire
(Aij ) + (Bij ) = (Aij + Bij )
λ(Aij ) = (λAij )
est un espace vectoriel sur R.
On note Mn+ (R) le sous-ensemble de Mn (R) formé des matrices symétriques, c’est-à-dire
telles que t A = A et Mn− (R) le sous-ensemble de Mn (R) formé des matrices antisymétriques,
c’est-à-dire telles que t A = −A.
Pour A = (Aij ) ∈ Mn (R), on note tr(A) = A11 + · · · + Ann .
1. Montrer que Mn+ (R) et Mn− (R) sont des sous-espaces vectoriels de Mn (R).
2. Déterminer une base « canonique » de Mn (R) et en déduire la dimension N de Mn (R)
en fonction de n.
Même question pour déterminer la dimension N + (resp. N − ) de Mn+ (R) (resp. Mn− (R)).
3. Montrer que Mn (R) est somme directe de Mn+ (R) et Mn− (R).
4. Pour A ∈ Mn (R), calculer tr(t AA) en fonction des cœfficients de A.
En déduire que l’application q1 : A → tr(t AA) est une forme quadratique définie positive
sur Mn (R), et déterminer sa signature et son rang en fonction de N.
5. Montrer que l’application q2 : A → (tr(A))2 est une forme quadratique sur Mn (R), et
déterminer sa signature et son rang.
6. Montrer que l’application q3+ : A → tr(A2 ) est une forme quadratique sur le sousespace Mn+ (R), et déterminer sa signature et son rang en fonction de N + .
Montrer que l’application q3− : A → tr(A2 ) est une forme quadratique sur le sous-espace
Mn− (R), et déterminer sa signature et son rang en fonction de N − .
7. Montrer que l’application q3 : A → tr(A2 ) est une forme quadratique sur l’espace
Mn (R) et déterminer la forme bilinéaire symétrique f3 qui lui est associée. Déterminer la
signature et le rang de la forme q3 .
8. Montrer que pour toute forme linéaire f sur Mn (R), il existe une unique matrice
F ∈ Mn (R) telle que f (A) = tr(F A) pour tout A ∈ Mn (R).
Indication : on pourra considérer l’application F3 de Mn (R) dans son dual (Mn (R))∗
définie par F3 (A) = f3 (A, ·), c’est-à-dire pour tout B ∈ Mn (R)
(F3 (A))(B) = f3 (A, B).
3
Corrigé
Exercice 1.
1. Pour x, y ∈ R3 , on pose
f (x, y) = x1 y1 + 2x2 y2 + 2x3 y3 + 2(x1 y2 + x2 y1 ) + 2(x1 y3 + x3 y1 ) + x2 y3 + x3 y2 .
Pour y fixé, l’application f (·, y) de R3 dans R est une forme linéaire puisque elle est un
polynôme homogène de degré 1, et de même pour x fixé, l’application f (x, ·) de R3 dans
R est une forme linéaire. Par conséquent l’application f de R3 × R3 dans R est une forme
bilinéaire.
Comme q(x) = f (x, x), on en déduit que q est une forme quadratique sur R3 .
2. On applique la méthode de Gauss :
x21 + 2x22 + 2x23 + 4x1 x2 + 4x1 x3 + 2x2 x3 = x21 + 2(2x2 + 2x3 )x1 + 2x22 + 2x2 x3 + 2x23
= (x1 +2x2 +2x3 )2 −(2x2 +2x3 )2 +2x22 +2x2 x3 +2x23 = (x1 +2x2 +2x3 )2 −2x22 −6x2 x3 −2x23
9
3
5
3
= (x1 + 2x2 + 2x3 )2 − 2(x2 + x3 )2 + x23 − 2x23 = (x1 + 2x2 + 2x3 )2 − 2(x2 + x3 )2 + x23
2
2
2
2
√
√
√
5
3 2 2
= (x1 + 2x2 + 2x3 )2 − ( 2x2 +
x3 ) + ( √ x3 )2 .
2
2
Ainsi
sign(q) = (2, 1)
et
rang(q) = 3.
3. La matrice de la forme q dans la base canonique de R3 est


1 2 2
M =  2 2 1 .
2 1 2
Son polynôme caractéristique est
1−λ
2
2
2−λ
1
det(M−λI) = 2
2
1
2−λ
= (1−λ)(4−4λ+λ2 )+4+4−4(2−λ)−(1−λ)−4(2−λ)
= −5 + λ + 5λ2 + λ3 = (λ − 5)(−λ2 + 1) = (λ − 5)(1 − λ)(1 + λ).
La matrice M admet donc dans R3 deux valeurs propres > 0, à savoir 1 et 5, et une valeur
propre < 0, à savoir −1. Sa signature est donc (2,1), et son rang 3.
Exercice 2.
1. Pour tout j fixé, on a par l’inégalité de Cauchy-Schwarz
sX
sX
sX
X
X
√
2
2
Aij
1 = n
A2ij .
|Aij | =
|Aij |1 ≤
1≤i≤n
1≤i≤n
1≤i≤n
1≤i≤n
1≤i≤n
4
Si A est orthogonale, ses vecteurs colonnes sont unitaires pour la norme euclidienne
associée au produit scalaire, donc
X
A2ij = 1
1≤i≤n
et par suite
X
1≤i≤n
|Aij | ≤
√
n.
En sommant par rapport à j, on en déduit
X
√
|Aij | ≤ n n.
1≤i,j≤n
n
2. Pour le vecteur e de R de composantes ei = 1 pour i = 1, · · · , n, le vecteur Ae de
R a pour composantes (Ae)i données pour i = 1, · · · , n par
X
(Ae)i = Ai1 + · · · + Ain =
Aij
n
1≤j≤n
et comme
< Ae, e >= (Ae)1 e1 + · · · + (Ae)n en =
on en déduit que
X X
X
(Ae)i
1≤i≤n
Aij =< Ae, e > .
1≤i≤n 1≤j≤n
De cette égalité on déduit par l’inégalité de Cauchy-Schwarz
X
Aij | = | < Ae, e > | ≤ kAek kek
|
1≤i, j≤n
où k · k est la norme euclidienne associée au produit scalaire, donc
et pour une matrice A orthogonale
soit
kek2 =< e, e >= n
kAek2 =< Ae, Ae >=<t AAe, e >=< In e, e >=< e, e >= n,
On en déduit donc que
kek = kAek =
|
X
1≤i,j≤n
√
n.
Aij | ≤ n.
Exercice 3.
1. D’une part la matrice nulle 0 = (0) appartient à Mn+ (R). D’autre part pour A, B ∈
Mn+ (R) et λ, µ ∈ R, on a
t
(λA + µB) =t (λA) +t (µB) = λt A + µt B = λA + µB
donc λA + µB ∈ Mn+ (R).
5
Ainsi Mn+ (R) est un sous-espace vectoriel de Mn (R).
On procède de même pour Mn− (R).
2. Les matrices E kl pour 1 ≤ k, l ≤ n définies par les cœfficients (E kl )ij = 1 si (k, l) =
(i, j) et (E kl )ij = 0 si (k, l) 6= (i, j), sont linéairement indépendantes et engendrent Mn (R)
puisque pour chaque matrice A de Mn (R) on peut écrire
X
Akl E kl .
A=
1≤k, l≤n
Ainsi la famille {E kl , 1 ≤ k, l ≤ n} forme une base de Mn (R) et
N = dim Mn (R) = n2
puisque le nombre de couples (k, l) pour 1 ≤ k, l ≤ n est égal à n2 .
Les matrices E +kl pour 1 ≤ k ≤ l ≤ n définies par les cœfficients (E +kl )ij = (E +kl )ji = 1
si (k, l) = (i, j) et (E +kl )ij = (E +kl )ji = 0 si (k, l) 6= (i, j), sont linéairement indépendantes
et engendrent Mn+ (R) puisque pour chaque matrice A de Mn+ (R) on peut écrire
X
Akl E +kl .
A=
1≤k≤l≤n
Ainsi la famille {E +kl , 1 ≤ k ≤ l ≤ n} forme une base de Mn+ (R) et
N + = dim Mn+ (R) =
n(n + 1)
2
n(n + 1)
·
2
Les matrices E −kl pour 1 ≤ k < l ≤ n définies par les cœfficients (E −kl )ij = −(E −kl )ji =
1 si (k, l) = (i, j) avec i 6= j, et (E −kl )ij = (E −kl )ji = 0 si (k, l) 6= (i, j) ou i = j,
sont linéairement indépendantes et engendrent Mn− (R) puisque pour chaque matrice A de
Mn− (R) on peut écrire
X
A=
Akl E −kl .
puisque le nombre de couples (k, l) pour 1 ≤ k ≤ l ≤ n est égal à
1≤k<l≤n
Ainsi la famille {E
−kl
, 1 ≤ k < l ≤ n} forme une base de Mn− (R) et
N − dim Mn (R) =
n(n − 1)
2
n(n − 1)
·
2
+
−
+
−
3. D’une part Mn (R) ∩ Mn (R) = {0} car si A ∈ Mn (R) ∩ Mn (R) alors Aij = Aji et
Aij = −Aji , donc Aij = 0 pour tous i, j.
D’autre part Mn (R) = Mn− (R) + Mn+ (R) car si A ∈ Mn (R) on peut écrire A = A+ + A−
avec
Aij − Aji
Aij + Aji
et
A−
A+
ij =
ij =
2
2
+
+
−
−
donc avec A ∈ Mn (R) et A ∈ Mn (R).
puisque le nombre de couples (k, l) pour 1 ≤ k < l ≤ n est égal à
6
4. Comme
(t AA)ij =
X
(t A)ik Akj =
tr(t AA) =
Aki Akj
1≤k≤n
1≤k≤n
on a
X
X X
AkiAki =
X
A2ki .
1≤i, k≤n
1≤i≤n 1≤k≤n
L’application f1 : Mn (R) × Mn (R) → R définie par
X
f1 (A, B) =
Aki Bki
1≤i,k≤n
est une forme bilinéaire symétrique sur Mn (R) et l’application q1 : Mn (R) → R définie par
q1 (A) = tr(t AA) = f (A, A)
est donc la forme quadratique associée à f1 .
De plus comme tr(t AA) est la somme des carrés de tous les cœfficients de A, on en déduit
que tr(t AA) ≥ 0 pour tout A et que tr(t AA) > 0 si et seulement si A est non nulle.
Ainsi cette forme quadratique est définie positive sur Mn (R). Par conséquent
sign(q1 ) = (N, 0)
et
rang(q1 ) = N.
5. L’application f2 : Mn (R) × Mn (R) → R définie par
f2 (A, B) = tr(A) tr(B)
est une forme bilinéaire symétrique sur Mn (R) telle que f2 (A, A) = q2 (A) pour A ∈ Mn (R),
donc q2 est une forme quadratique sur Mn (R).
De plus l’application tr est une forme linéaire non nulle sur Mn (R), donc son carré,
c’est-à-dire q2 , est une forme quadratique de signature (1, 0) et rang 1.
6. Si A ∈ Mn+ (R) on a tr(A2 ) = tr(t AA). D’après la question 4, l’application q3+ : A →
tr(A2 ) est donc une forme quadratique définie positive sur Mn+ (R), et par suite
sign(q3+ ) = (N + , 0)
et
rang(q3+ ) = N + .
Si A ∈ Mn− (R) on a tr(A2 ) = −tr(t AA). D’après la question 4, l’application q3− : A →
tr(A2 ) est donc une forme quadratique définie négative sur Mn− (R), et par suite
sign(q3− ) = (0, N − )
et
rang(q3− ) = N − .
7. L’application f3 : Mn (R) × Mn (R) → R définie par
f3 (A, B) = tr(AB)
est une forme bilinéaire symétrique sur Mn (R) telle que f3 (A, A) = q3 (A) pour A ∈ Mn (R),
donc q3 est une forme quadratique sur Mn (R).
D’après la question 6 il existe une base E + (resp. E − ) de Mn+ (R) (resp. Mn− (R)) dans
laquelle la matrice de q3+ (resp. q3− ) est une matrice de taille (N + , N + ) (resp. (N − , N − ))
diagonale, avec N + (resp. N − ) cœfficients > 0 (resp. < 0) sur la diagonale.
On observe de plus que si A ∈ Mn+ (R) et B ∈ Mn− (R), alors
f3 (A, B) = tr(AB) = tr(t (AB)) = tr(t B t A) = −tr(BA) = −tr(AB) = −f3 (B, A) = −f3 (A, B)
7
et donc f3 (A, B) = f3 (B, A) = 0.
Par conséquent, comme Mn+ (R) et Mn+ (R) sont en somme directe dans Mn (R), l’union
des bases E + et E − forme une base de Mn (R) dans laquelle la matrice de q3 est diagonale,
avec N + cœfficients > 0 puis N − cœfficients < 0 sur la diagonale. Par conséquent la
signature de la forme quadratique q3 est
sign(q3 ) = (N + , N − ).
Comme la somme de ces deux nombres est égal à N qui est la dimension de Mn (R), on
en déduit que
rang(q3 ) = N.
8. On considère alors l’application F3 : Mn (R) → (Mn (R))∗ définie par F3 (A) = f3 (A, ·),
c’est-à-dire pour tout B ∈ Mn (R)
(F3 (A))(B) = f3 (A, B) = tr(AB).
Cette application F3 linéaire de Mn (R) dans son dual (Mn (R))∗ est injective. En effet, si
A ∈ Mn (R) est telle que F3 (A) = 0, c’est-à-dire si pour tout B ∈ Mn (R) on a tr(AB) = 0,
alors prenant pour B la matrice E kl de la base « canonique » définie dans la question 2,
avec 1 ≤ k, l ≤ n, on obtient Akl = 0, puis A = 0.
Comme de plus
dim ((Mn (R))∗ ) = dim (Mn (R)) = dim(Im(F3 )) + dim(Ker(F3 )) = dim(Im(F3 ))
on en déduit que l’application F3 est surjective, donc bijective de Mn (R) sur (Mn (R))∗ .
Ainsi pour toute forme linéaire f sur Mn (R), il existe une unique matrice F telle que
f = F3 (F ), c’est-à-dire
f (A) = tr(F A)
pour tout
A ∈ Mn (R).
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