Maladie d’Alzheimer et syndrome apparentés F. Nourhashémi- M. Secher Gérontopôle Toulouse Démences • Démences dégénératives: – – – – M. d’Alzheimer M. à Corps de Lewy Dégénérescence lobaire fronto-temporale Démences associées à un syndrome Parkinsonien • Démences non dégénératives – Démences vasculaires • Démences mixtes Un peu d’histoire • Alois Alzheimer (1864 – 1915) – Né a Marktbreit (Bavière) – Diplomé en 1887 – Sujet de sa thèse : les glandes productrices de cérumen! – Neuropathologiste et psychiatre – Décède à Breslau des suites d’une endocardite Un peu d’histoire • Le premier cas – Frau Augusta D, 51 ans – Examen microscopique du cerveau • Découverte des plaques séniles – Publication du cas en 1906 – Kraepelin propose que le nom d’Alzheimer soit associé à la maladie en 1912 La maladie d’Alzheimer Présentation clinique variable Délai entre le début des symptômes et la consultation (Knopman, 2000) Phase pré clinique Début des $ Diagnostic Complications: dépendance troubles psycho-compo. dénutrition chutes Décès ADAS-cog 70 60 0 Sévère 50 40 30 20 10 Légère à modérée Légère Doraiswamy et al. Neurology 1997; 48: 1511-1517 Alzheimer disease: More than just memory loss (Bullock et al. 2003) 10 20 30 MMSE Démences évoluées MMS: 0-2 Très sévère MMS: 3-9 Sévère MMS: 10-15 Modérément sévère MMS: 16-20 Modéré MMS: 21-30 Léger Paquid 2002 Prévalence de la MA en fonction de l'age 40.00 Prévalence (%) 35.00 30.00 25.00 20.00 15.00 10.00 5.00 0.00 60 70 80 Age 90 100 UN DÉBUT DE LA MALADIE DIFFÉRÉ DE 5 ANS FERAIT DIMINUER LA PRÉVALENCE DE 50% Maladie d’Alzheimer: étiologies plurifactorielles Age* Vasculaires Environnement Génétique* Maladie d’Alzheimer Inflammation Hormones Nutrition * facteur de risque confirmé Autres? Antécédents familiaux* Etat des lieux sur le diagnostic • La MA est une maladie insidieuse • Sa durée totale est de 8 à 12 ans • Les 4 dernières années sont médicalisées Le diagnostic de la MA • Doit être porté selon les critères diagnostiques en vigueur : – DSM-IV – NINCDS-ADRDA – ICD 10 • Doit être mené selon les procédures recommandées dans le référentiel de l’HAS – Histoire cognitive – Evaluation neuropsychologique – Examen clinique – Examens complémentaires Le diagnostic de la MA La plainte mnésique - Le signe essentiel Trouble de la mémoire, portant sur les faits récents, d’apparition progressive (en quelques mois ou quelques années), retentissant sur la vie quotidienne Autres signes d’appel La MA n’est pas seulement une maladie de la cognition, elle se traduit également par des modifications de l’humeur et du comportement: - Repli social, apathie - Diminution de l’intérêt Le diagnostic de la MA Autres symptômes • Dysfonctionnement du langage – Après les troubles de la mémoire, l’altération du langage est le désordre cognitif le plus fréquemment allégué par le patient – Initialement, cela se limite à une simple difficulté de dénomination d’objets, qui est compensée par l’utilisation de périphrases • Troubles des praxies Evaluation cognitive rapide en consultation Mini Mental Status MINI MENTAL STATE EXAMINATION 10 mn de passation Noté sur 30 10 items d'orientation : Temporelle (5 points) Spatiale (5 points) Test des cinq mots 6 items de mémoire : Immédiate (3 points) A court terme (3 points) 5 items d'attention et concentration (calcul) 8 items de langage 1 item praxique (dessin de pentagones) Fluence verbale MUSÉE LIMONADE Test de l’horloge SAUTERELLE PASSOIRE CAMION 11 12 1 2 10 9 3 4 8 7 6 5 Test de l’horloge 12 11 1 2 10 9 3 8 4 7 6 5 Test de l’horloge 10 H 10 TACHE INTERFÉRENTE RAPPEL DIFFÉRÉ LIBRE + INDICÉ = TOTAL NORMAL = 10 Profil neuropsychologique Les signes d’atteinte corticale Reconnaissance et discrimination de visages célèbres Retentissement sur le fonctionnement quotidien • Utilisation des transports. • Gestion des finances. • Prise des médicaments. • Utilisation du téléphone. * source: PAQUID Fonctionnement idéal Niveau d'autonomie Alzheimer asymptomatique début des troubles indépendance fonctionnelle début de dépendance dépendance totale / mortalité 50 70 90 110 âge D'après Z. Khachaturian 1997 Niveau d'autonomie TRAITEMENT DES SUJETS À RISQUE TRAITEMENT PRÉCOCE DES SUJETS ATTEINTS 50 70 90 110 âge D'après Z. Khachaturian 1997 Pourquoi un diagnostic le plus précoce possible? • Répondre à la demande des sujets à risque • Permettre les décisions éclairées du sujet • Crucial avec l’apparition des traitements étio-pathogéniques (antiamyloïdes) • Prévention précoce des complications et gestion des risques liés à la maladie Histoire naturelle de la maladie Évolution cognitive Signes et symptômes psycho-comportementaux Dépendance Perte de poids Troubles de la mobilité Épuisement de l’aidant Phase terminale de la maladie Histoire naturelle de la maladie Évolution cognitive Signes et symptômes psycho-comportementaux Dépendance Perte de poids Troubles de la mobilité Épuisement de l’aidant Phase terminale de la maladie Évolution cognitive Non linéaire: paramètre individuel Evaluation de la perte CERAD: 3,4 points/an au MMSE (Clark et al. 1999) Méta-analyse de Han: 3,3 points par an (Han et al. 2000) Suivi: efficacité de la prise en charge globale, évaluation du bénéfice du traitement, recherche de facteurs aggravant Histoire naturelle de la maladie Évolution cognitive Signes et symptômes psycho-comportementaux Dépendance Perte de poids Troubles de la mobilité Épuisement de l’aidant Phase terminale de la maladie Un comportement • Ensemble des réactions observables objectivement d’un individu qui agit en réponse à une stimulation venue du milieu extérieur ou intérieur Symptômes concernés Opposition Attitude de refus des soins, de l’alimentation ….. Agitation Comportement moteur ou verbal excessif et inapproprié Agressivité Comportement verbal ou physique menaçant C. Moteurs Activités répétitives et stéréotypés, sans but apparent Désinhibition Comportement inapproprié par rapport aux normes sociales Cris Vocalisations de forte intensité et répétitives Délirantes Perceptions ou jugements erronés de la réalité non critiqués Hallucinations Perceptions sensorielles sans objet réel à percevoir Tr. sommeil Troubles de la durée, de la qualité, inversion du cycle nycthéméral Anxiété, dépression, irritabilité… Syndrome confusionnel • Trois éléments sémiologiques constants et spécifiques: Les troubles de la vigilance et de l’attention Les altérations du rythme veille-sommeil Le caractère fluctuant de l’ensemble des signes • S’associent de manière constante à des troubles du comportement • Symptômes associés: – – – – Désorganisation et fragmentation de la pensée, Troubles mnésiques, Anomalies de la perception (onirisme), Perturbations psychocomportementales (anxiété, irritabilité, agitation, agressivité, perplexité, déambulation…), – Signes physiques: pâleur, bouffées vasomotrices, tachy ou bradycardie, hypo ou hypertension … Démarche diagnostique Une évaluation structurée et personnalisée est préconisée • Degré d’urgence • Interrogatoire (patients / entourage) et examen • Recherche cause somatique • Recherche facteurs iatrogènes • Compléter l’enquête étiologique (capacités sensorielles, environnement…) Techniques de soins Exemples d’attitudes de communication – Eviter les différentes sources de distraction lors de la communication – Attirer l’attention du patient – Utiliser des phrases courtes – Eviter de transmettre plusieurs messages à la fois – Utiliser des gestes pour transmettre des messages – Répéter les messages – Préférer les questions fermées – Lui laisser du temps pour qu’il s’exprime – Eviter d’être familier – Revaloriser et réassurer le patient – Expliquer ce que l’on va faire – Utiliser un langage et un ton adaptés – Savoir reformuler Techniques de soins • Attitudes de soins – Rechercher les capacités restantes – Installer une routine adaptée à ses habitudes – Lui laisser la possibilité de faire ses choix – Simplifier le quotidien – Décliner les tâches en plusieurs étapes – Préserver l’intimité – Chercher des alternatives quand un soin peut être à l’origine d’un trouble du comportement…. Madame, Je ne sais pas ce que je fais ici mais je veux retourner chez moi. Mais Mamie, vous avez mis le feu à votre appartement, vous ne vous souvenez donc pas? Pour la dixième fois aujourd’hui, je vous demande de retourner dans votre chambre. Allez dépêchez vous Interventions non médicamenteuses Qualité de vie Langage Cognition Stim. sensorielle Efficacité? Peuvent être proposées (Individuel ou collectif par un personnel formé)3 Activité motrice Act. Occupat. 3- Expertise Collective Inserm. Octobre 2007 Interventions médicamenteuses • Non indiquées si symptômes d’origine somatique ou iatrogène • Peuvent être indiquées si: – Techniques de soins peu efficaces – Danger pour le patient – Altération de l’état fonctionnel – Menace ou souffrance entourage • Pas d’effet préventif Traitements pharmacologiques • Traitements spécifiques de la maladie d’Alzheimer • Les antidépresseurs • Les antipsychotiques • Les anxiolytiques • Les hypnotiques • Les thymorégulateurs Place de la contention physique • Exceptionnelle • Prescription médicale • Uniquement en cas d’échec des autres mesures et lorsqu’un danger élevé existe à court terme • Surveillance Limiter les risque de la contention physique de la personne âgée. ANAES 2000 Histoire naturelle de la maladie Évolution cognitive Signes et symptômes psycho-comportementaux Dépendance Perte de poids Troubles de la mobilité Épuisement de l’aidant Phase terminale de la maladie La dépendance FRS: 3,12 points par an (Feldman 1995) DAD: 1 point par mois (Feldman 2002) ADL: 1,32 points en 2 ans (Cortes 2008) IADL: 1,54 points en 2 ans (Cortes 2008) Histoire naturelle de la maladie Évolution cognitive Signes et symptômes psycho-comportementaux Dépendance Perte de poids Troubles de la mobilité Épuisement de l’aidant Phase terminale de la maladie Epidémiologie – La perte de poids, un marqueur de fragilité chez le sujet âgé et un facteur de risque de mortalité – Maladie d ’Alzheimer • les premières études ont décrits la perte de poids chez des sujets hospitalisés à un stade avancé • des travaux plus récents mettent en évidence une perte de poids dès le début de la maladie chez des sujets vivant au domicile (White et al, 1996 ; White et al, 1998 ; Barrett-Connor et al, 1996) Points clés • Perte de poids cliniquement significative: plus fréquente chez les déments par rapports aux autres (White et al, JAGS, 1996) • La perte de poids ne concerne pas seulement les stades sévères de démence (Cronin-Stubbs, BMJ, 1997) • Le risque de perte de poids augmente avec la sévérité de la MA. C ’est un facteur de risque de mortalité (White et al, JAGS, 1998) • La perte de poids peut précéder le diagnostic de démence (Barrett-Connor et al, JAGS, 1996) Infections Système immunitaire Masse musculaire et force Perte de poids Sarcopénie, dépendance, chute, fracture Risque d’irréversibilité Trophicité cutanée (adaptée de Ferry M, Année Gérontologique, 1995) Escarre Risque relatif de décès 1.6 - 15 1 - 10 -5 0 Le RR de décès est élevé lors d’une perte de poids importante et diminué lors d ’une prise modérée de poids 5 10 Pourcentage de modification du poids 15 Perte poids Une cause de perte de poids dans les stades avancés Troubles comportement alimentaire Troubles comportement alimentaire (échelle Blandford) – Comportements sélectifs – Comportements résistance – Agnosie et dyspraxie buccale – Dysphagie oropharyngienne Associés au déficit cognitif, à la confusion mentale, à l’inattention Perte de la coordination neuromusculaire au cours de la mastication et de la déglutition (Blandford et al, 1998) Causes Perte poids Autres hypothèses élévation des dépenses énergétiques ? (Poehlman et al, 2000) atrophie du cortex temporal interne ? (Grundman et al, 1996) perturbations biologiques ? (Vanhanen et al, 2001) traitements utilisés dans la MA Une cause de perte de poids dans les stades avancés Troubles comportement alimentaire Causes Grundman et al, Neurology, 1996 Relation possible entre l’atrophie du CMT et un plus faible IMC ATROPHIE DU CMT Facteurs génétiques et environnementaux Altération cognitive Dénutrition cortisol TNF Oestrogène Autres mécanismes : altération des capacités, baisse de l ’appétit, augmentation de l ’activité physique, stress POIDS ET IMC PLUS FAIBLES Causes Poehlman et al, Am J Clin Nutr, 2000 Les dépenses énergétiques • Aucune relation entre métabolisme énergétique de base et perte de poids dans la MA • Association entre niveau élevé d ’activité physique, masse musculaire appendiculaire plus importante, et apport calorique dans la MA – stratégies de prise en charge Perte de poids Efficacité des interventions ( des calories) (Carver 1995, Rivière 2001, Gil Gregorio 2003 , Lauque 2004, Young 2004, Gillette Guyonnet 2007) Éducation des aidants Activité physique Histoire naturelle de la maladie Évolution cognitive Signes et symptômes psycho-comportementaux Dépendance Perte de poids Troubles de la mobilité Épuisement de l’aidant Phase terminale de la maladie Troubles de la mobilité Troubles de la marche: plus de la moitié des patients, 3 ans après le diagnostic (Alexander 1995) s. extra pyramidal (Camicioli 2006, Wilson 2000), troubles praxiques (Zadikoff 2005), troubles frontaix (O’Keefe 1996), Myoclonie (Chen 1991), troubles executifs (Sheridan 2003), pas raccourci et variable (Webster 2006), baisse flux sanguin (Nakumara 1997), anomalies planification (Mancknoudia 2006). Chutes: X 3 (Morris 1987, Tinetti 1988) Fractures Prévenir les chutes • Passe par la sécurisation • Lutter contre la dénutrition • Faire passer le message du caractère « positif » du maintien de la fonction motrice • Utiliser la fonction: 30 minutes de marche quotidienne Histoire naturelle de la maladie Évolution cognitive Signes et symptômes psycho-comportementaux Dépendance Perte de poids Troubles de la mobilité Épuisement de l’aidant Phase terminale de la maladie Le coût pour les aidants… • Un mois fait 720 heures • Un mois de labeur: 140 heures • Un aidant principal: 286 heures – 32 % activités instrumentales: cuisine, course, accompagner chez le médecin, problèmes administratifs – 23 % activités de bases: le laver, l’habiller, le faire manger – 13 % activités sociales et de loisirs partagés avec le malade – 32 % attention apportée au comportement, surveillance stratégie de résolution des conflits. Soutien et information aidant • Soutien – Réseau, associations, groupes de paroles…. • Diminution charge de travail – Aides, accueil de jour, hébergement temporaire… • Information et aide à une meilleure connaissance des troubles – Repérage, compréhension, attitudes… Soutien et formation des professionnels • Formation – Difficulté d’adaptation du patient, troubles du comportement, bientraitance, techniques… • Soutien – Augmenter le sentiment d’efficacité – Limiter les risques de détresse et d’épuisement – D’éviter les attitudes inadaptées qui peuvent générer d’autres troubles Histoire naturelle de la maladie Évolution cognitive Signes et symptômes psycho-comportementaux Dépendance Perte de poids Troubles de la mobilité Épuisement de l’aidant Phase terminale de la maladie Conséquences éthiques de la fin de vie • Personne de confiance, présence de directives anticipées • Respect de la dignité du sujet • Attention empathique, communication verbale et non verbale • Respect de l’intimité et de la vie émotionnelle • Prise en charge de la douleur et des comorbidités • Refus « d’obstination déraisonnable »: gastrostomie, antibiothérapies Mitchell NEJM 2010 Perception pronostique • Espérance de vie surestimée: – À l’admission d’un patient souffrant d’une démence sévère on demande: « ce patient risque il de mourir dans les 6 mois ? » – Seuls 1,1% sont perçu comme en fin de vie – 75% d’entre eux sont décédés dans les 6 mois • Comparaison objective avec les cancers Juste soin : stade sévère de la MA •Le soin: acte de confiance •Démarche évolutive •Traitement: Bénéfice attendu? •Contexte: désirs du patient, sa famille •Grille de questionnement éthique •Directives anticipées? Une pratique médicale difficile -Conditions médicales complexes -Interventions sociales, environnementales, thérapeutiques complexes… -Prise en charge individuelle et familiale -Contradiction de différentes valeurs : Liberté / sécurité Autonomie / protection juridique… Traitements disponibles - (AMM) synthèse Indications de la mémantine Indications IAChE * Indication commune mémantine / IAChE STADES LÉGER 27,8% MMSE 26 RCP JO 12 mars 1998, HPR juin 2002 MODÉRÉ SÉVÈRE 17,7% MODÉRÉ 29,3% 20 15 SÉVÈRE 9,6% 10 TRÈS SÉVÈRE 15,7% 0 Les perspectives thérapeutiques et les voies de la recherche Les voies de la recherche (2) Amyloid-b Deposition [Senile Plaque] Amyloid-b Deposition [Senile Plaque] Tau Phosphorylation [Neurofibrillary Tangles] Neuronal death/Dysfunction: Dementia Tau Phosphorylation [Neurofibrillary Tangles] Proposed Chronology of Changes in AD Tauist and BAPtist Voies de la recherche (1) Le concept de « Disease Modification » 6– Sans traitement Traitement symptomatique Disease Modifying Agent Traitement Combiné 4– Fonctionnement cognitif (ADAS –Cog) 2– 0– -2 – -4 – -6 – -8 – -10 – 1 an 2 ans Points clés MA: la plus fréquente des démences maladie chronique nécessité de diagnostic précis altération initiale de la mémoire retentissement sur l’entourage Evolution de la maladie Léger Modéré sévère terminal Temps - Perte de poids -Troubles de l’équilibre et chutes -Troubles du comportement (SPCD) 3 aspects fondamentaux Maintien des capacités fonctionnelles existantes Traitements des co-morbidités Prise en charge des troubles psychologiques et comportementaux