10/13 Spécial réforme psychiatrique 1 an après, un bilan de terrain 16 octobre 2012 1 Le Grand Yaka et les vrais fo-kon(s) à propos des soins ambulatoires sans consentement 10/13 16 octobre 2012 Yves HEMERY Psychiatre CH des Pays de Morlaix 2 Le Grand Yaka et les vrais fo-kon(s) La question du consentement aux soins reste une notion clinique : • la maladie mentale fait exception en médecine, par sa singulière, mais non exclusive (démences, AVC, troubles neurologiques), aptitude à l’anosognosie. • l’intensité des symptômes justifie occasionnellement une hospitalisation contrainte, parfois en urgence, afin de protéger le sujet, ou son environnement. • l’hospitalisation est-elle une fin en soi, ou une mise en œuvre d’un principe de précaution ? Le Grand Yaka et les vrais fo-kon(s) o Un des objectifs du soin est d’aider le patient à reconnaître la nature pathologique de ses troubles. o La force du déni n’est pas prédictive de la gravité de la maladie. o Dans les pathologies psychotiques, l’intensité des phénomènes délirants et des hallucinations reste le critère le plus fiable. Le Grand Yaka et les vrais fo-kon(s) o Les données d’environnement et la qualité de l’insertion sociale constituent le repère le plus important et le mieux documenté. o Les notions de personnalité antisociale, d’abus de substances, d’antécédents judiciaires de violence, majorent le risque de rechute et de passage à l’acte transgressif pendant les 20 semaines qui suivent la fin de l’hospitalisation temps plein. Le Grand Yaka et les vrais fo-kon(s) o Des soins sans consentement pour qui ? o Une population se désigne, celle des patients qui ne se reconnait pas malade, et qui peut porter atteinte à son intégrité, comme à celle de tiers. • Patients « agis » par des hallucinations hostiles • Patients gravement suicidaires • Patients violents et/ou « antisociaux » • Patients peu compliants ou peu observants Le Grand Yaka et les vrais fo-kon(s) o Le patient peut-il bénéficier de soins de meilleure qualité hors de l’hôpital, ou à la suite d’un court séjour ? • Oui, s’il s’agit de répondre à un épisode de crise passagère, ou d’un état de détresse ponctuel. • Non, si le patient souffre d’une pathologie sévère, premier épisode ou rechute. •Tout autre point de vue ne relève pas de l’approche clinique ! Le Grand Yaka et les vrais fo-kon(s) o Des soins ambulatoires pour qui ? o Une population de patients se désigne d’elle-même - ceux qui bénéficient d’un logement - ceux qui sont soutenus par leurs proches et/ou leur famille - ceux qui ont acquis un niveau suffisant d’insight. Le Grand Yaka et les vrais fo-kon(s) o Que proposent les modèles de SASC ? o Aux observateurs, proches ou lointains : • L’illusion d’une prise en charge a-traumatique, dès lors que l’hôpital est considéré comme délétère. • La croyance en une psychiatrie « magicienne », agissant par la force du verbe et de la persuasion. • L’espoir d’une continuité des soins, quoiqu’en pense le patient. • La réalité d’un contrôle social effectif (décret projeté en janvier 2012, puis abandonné) Le Grand Yaka et les vrais fo-kon(s) o Que proposent les modèles de SASC ? o Aux praticiens et aux équipes soignantes : • L’illusion de la mobilité agissante, hors des murs. • La possibilité d’un rapport de force « favorable », car déséquilibré, vis-à-vis du patient. • La mission d’une surveillance des capacités transgressives. • La crainte de nouvelles entorses au secret professionnel. Le Grand Yaka et les vrais fo-kon(s) o Que proposent les modèles de SASC ? o Aux patients eux-mêmes ? • Le confort relatif d’un retour au domicile. • L’inconfort d’une surveillance obligatoire. • Le paradoxe d’un consentement supposé à une réelle contrainte, du fait de l’information reçue sur les modalités de soins, et de l’avis recueilli. • L’inquiétude d’un contrôle constant, propre à alimenter quelques délires… Le Grand Yaka et les vrais fo-kon(s) o Sortie d’essai versus SASC ? oLa loi du 27.06.1990 instituait une forme dégradée de SASC, sous la forme de la sortie d’essai (ancien art. L 3211-11 du csp), destinée à « favoriser la réinsertion du patient ». • La sortie d’essai n’avait pas de limite dans le temps • Elle maintenait le lien juridique du patient avec le régime de l’hospitalisation • Elle n’était soumise à aucun contrôle externe, en dehors des recours du patient devant la CDHP, ou le JLD Le Grand Yaka et les vrais fo-kon(s) o Les SASC répondent à un désir de « modernité » o Revendication inflexible des associations de familles, comme alternative à l’hospitalisation… • Alternative à la culpabilité de l’admission sous contrainte ? • Idéalisation des capacités « soignantes » des familles ? cf « les familles ne sont plus un problème, mais une solution »… • Les ressources psychiques des familles sontelles inépuisables ? Le Grand Yaka et les vrais fo-kon(s) o Qu’en est-il de l’indication clinique ? o Le préalable éthique … La contrainte, à domicile, sous quelle modalité ? Avec quelles limites ? o La question des choix théoriques, ou thérapeutiques • Le consentement aux soins est-il un préalable à la sortie de l’hôpital, au risque d’étirer les durées de séjour ? • La prise en charge des patients psychotiques (et anosognosiques) ne relève-t-elle pas du soin sans consentement en toute circonstance ? Le Grand Yaka et les vrais fo-kon(s) o Les solutions de la loi du 5 juillet 2011 : o Les SASC comme une modalité particulière de prise en charge en dehors de l’hospitalisation à temps plein… • Le programme de soins… • L’absence de contrôle du JLD… • Les contrôles « internes » et externes… Le Grand Yaka et les vrais fo-kon(s) o Le programme de soins o art. L 3211-2-1 et R 3211-1du csp • une des innovations de la loi du 5 juillet 2011 • en réalité, un durcissement des conditions des anciennes sorties d’essai, qui sont supprimées • le législateur comme « prescripteur » : « le PDS définit les types de soins, les lieux de leur réalisation et leur périodicité ». Le Grand Yaka et les vrais fo-kon(s) o Le PDS o Quelques paradoxes : • Le patient autorisé à sortir seul de l’établissement sans accompagnement soignant doit bénéficier d’un PDS, des soins sans soins…? • Le PDS ne peut s’accompagner d’aucune mesure de contrainte (QPC n°2012-235 du 20 avril 2012), le PDS réalise un soin sans consentement sans contrainte …? • NB : ordonnance du 18.09.2012 du TGI de Perpignan Le Grand Yaka et les vrais fo-kon(s) o Le PDS : o Le contrôle du juge : • Le JLD, garant des libertés individuelles, n’intervient que dans le cadre de l’hospitalisation complète • Le PDS, même s’il ne peut s’exercer sous la contrainte, indique des obligations de nature à réduire la liberté d’aller et venir du patient • Il n’a de possibilité de contester sa prise en charge que par un recours direct devant le JLD. Le Grand Yaka et les vrais fo-kon(s) o Le PDS : o Contrôle externe par la CDSP (art. L3222-5 du csp) • en cas de réclamation du patient (2°) • si « les soins se prolongent au-delà d’un an »(3°,b) • la CDSP « peut proposer » au JLD « d’ordonner la levée de la mesure de soins psychiatriques… »(7°) Le Grand Yaka et les vrais fo-kon(s) o Le PDS : o contrôle interne : le collège de soignants (art.L3211-9) • convoqué lorsque les soins durent plus d’un an en application de l’art. L3212-7 • avis obligatoire, à défaut, la mesure de soins est levée • information du patient, et recueil de son avis • « évaluation approfondie de l’état mental de la personne »… • avis rendu à la majorité des présents Le Grand Yaka et les vrais fo-kon(s) o Le PDS : • l’absence de contrôle réellement consistant de son déroulement et de ses modalités rend cette disposition discutable • d’autant qu’elle est fréquemment utilisée pour « éviter » l’audience du juge au 15ème jour ! • et que le préfet exerce toute son autorité • ces pratiques fragilisent encore un peu plus le texte de la loi du 5 juillet 2012 … En vous remerciant de votre attention, et en vous incitant à certaines précautions dans l’élaboration de propositions d’amélioration de la loi, puisque…