Cancer, douleur, souffrance psychique

publicité
Cancer, douleur, souffrance psychique
Formation Médicale Continue
de Tourcoing
-- Compte-rendus de FMC (sélection) --
Compte-rendus de
FMC (sélection)
Cancer, douleur,
souffrance psychique
webmaster
Publié le vendredi 7 novembre 2008
Fichier PDF créé le samedi 8 novembre 2008
Formation Médicale Continue de Tourcoing
Page 1/10
Cancer, douleur, souffrance psychique
Cancer, douleur, souffrance psychique
Dr Reich Michel
Centre Oscar Lambret Lille
Introduction
La douleur est une plainte fréquente chez les patients atteints de cancer avec un impact certain
sur leur détresse psychologique
L'existence d'une détresse psychologique reste un des facteurs non négligeables de prédiction
de la difficulté du soulagement de la douleur d'origine cancéreuse
Contexte de douleur chronique avec un caractère subjectif et origine plurifactrorielle
Existence d'une comorbidité psychiatrique : dépression, troubles anxieux, fatigue psychique
Resituer la plainte douloureuse dans l'histoire du cancer du patient et aussi dans son histoire
personnelle
Les facteurs psychologiques vont moduler l'expression et la perception de la douleur
La douleur et la fatigue surtout chroniques sont eux aussi cause de détresse émotionnelle
En cancérologie, il existe des liens relationnels très fort entre douleur, fatigue et état émotionnel
La douleur
Douleur et Souffrance
La souffrance c'est être mal
•
•
•
•
ensemble des phénomènes liés à la souffrance
c'est une émotion
La douleur c'est avoir mal
en référence le plus souvent à l'aspect physique
c'est une sensation
On peut souffrir sans avoir mal
Expérience sensorielle et émotionnelle
Douleur physique
Formation Médicale Continue de Tourcoing
Page 2/10
Cancer, douleur, souffrance psychique
objectivable et réel
évaluable et vérifiable
atteinte de l'intégrité corporelle (D+physique)
atteinte de l'intégrité psychique (D+ morale)
ordre de la perception et de la sensation
Souffrance psychique
ni objective ni objectivable
sujet à interprétation et au jugement de valeur
faiblesse et non maîtrise
incapacité de se contrôler
relève de l'émotion et de la conscience
La souffrance du patient cancéreux
La souffrance psychique et la douleur physique prennent leur signification dans l'histoire du
sujet, unique et subjective en plus du contexte organique
Son appréciation dépend de la situation médico-psycho-sociale du moment
La souffrance génère des modifications de caractère, de comportement et de l'état émotionnel
sentiment de perte de sens et de but dans la vie
La souffrance globale
Répercussions de la souffrance non soulagée ou anticipée :
•
•
•
•
mauvaise adaptation face à la maladie (détresse émotionnelle)
effet de contagiosité sur la famille (fatigue, épuisement)
effet de contagiosité sur les soignants (impuissance,exaspération)
demande d'euthanasie ou de suicide médicalement assisté (désespoir)
Douleur et détresse psychologique
La présence d'une douleur physique non traitée va majorer la détresse psychologique et donc
la douleur psychique
La présence d'une détresse psychologique va majorer la perception de la douleur physique
Formation Médicale Continue de Tourcoing
Page 3/10
Cancer, douleur, souffrance psychique
Problèmes...
Les diverses composantes de la douleur en cancérologie
Composante affective-émotionnelle
•
•
•
•
tonalité désagréable, pénible voire insupportable de la douleur vécue comme une souffrance
capacité à supporter des expériences émotionnelles
émotions négatives : frustration, colère, peur
évolution vers anxiété ou dépression
Composante cognitive
•
•
•
•
•
•
ensemble des processus mentaux susceptible d'influencer la perception de la douleur
interprétations, significations, croyances et valeurs attribuées à la douleur par le patient
anticipation face aux épisodes douloureux
références à des expériences douloureuses antérieures personnelles ou observées
seuil de tolérance et capacité de contrôle
troubles de la concentration, mémoire et attention
Composante comportementale
•
•
•
•
•
attitudes adoptées face à la douleur (patient/famille)
ensemble des manifestations verbales et non verbales observables chez la personne qui
souffre : plaintes, mimiques, grimaces, gémissements, postures antalgiques, arrêts de travail,
usage d'antalgiques, consultations médicales itératives
invalidité et incapacité entraînées par la douleur
fonction des apprentissages antérieurs liés à l'environnement familial et ethnoculturel
troubles du sommeil, de l'appétit, de la libido et réduction des activités
Difficultés relationnelles autour de la ( douleur en cancérologie : ( une souffrance globale
Formation Médicale Continue de Tourcoing
Page 4/10
Cancer, douleur, souffrance psychique
Souffrance globale
L'aggravation de la douleur va augmenter les difficultés relationnelles et la désinformation et
dysinformation (sous information) entraînant la souffrance non seulement du malade mais de son
entourage familial et soignant : c'est la souffrance globale
La souffrance globale
La « constellation cancer » face à la douleur terminale
Malade en phase terminale = Douleur + Souffrance
Famille = Souffrance
Equipe soignante = Souffrance
Médecin = Distance + Souffrance
Évaluation psychologique de la douleur en cancérologie : I
Description et manifestations de la douleur
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
mode d'apparition et événements la précédant
discours adopté
manifestations comportementales
Les répercussions de la douleur
recherche de bénéfices secondaires
répercussions sur l'humeur et au niveau fonctionnel
répercussions sur l'entourage
L'adaptation à la douleur
vécu, craintes, croyances et représentations liés à la D+
stratégies mises en place, mécanismes de coping
moyens pour atténuer la douleur
attentes / médecins et traitements
Formation Médicale Continue de Tourcoing
Page 5/10
Cancer, douleur, souffrance psychique
Évaluation psychologique de la douleur en cancérologie : II
Les antécédents personnels et familiaux
•
•
•
•
•
•
•
•
médico-chirurgicaux et psychiatriques
de problèmes de douleurs, traits et troubles de la personnalité
d'événements de vie stressants antérieurs et récents (perte, deuil)
Les aspects socio-familiaux de la douleur
niveau d'études
milieu socioprofessionnel, historique des emplois
facteurs culturels, ethniques et philosophiques (stoïcisme)
soutien familial, état des relations maritales et financiers
renforcements familiaux et sociaux
Évaluation psychologique de la douleur en cancérologie : III
Utilisation de questionnaires :
•
•
•
Psychosocial Pain Inventory, McGill Comprehensive Pain questionnaire, Hospital Anxiety
Depression Scale
Identifier les facteurs qui freinent la réponse au traitement antalgique
troubles de la personnalité, abus d'antalgiques ou toxicomanie
conceptions erronées / prise en charge de la douleur
Retentissement de l'état psychologique sur la perception de la douleur
Perception douloureuse influencée par : état émotionnel et détresse psychologique présence
d'un trouble psychiatrique pensées et représentations associées à la douleur antécédents de
douleur non ou mal traités ( stress post traumatique)
Retentissement de la douleur physique sur l'état psychologique
Retentissement comportemental
troubles du sommeil, réduction activité physique et intellectuelle, baisse de l'appétit et de la
libido
Retentissement affectif émotions négatives : frustration, colère, peur épuisement, perte
d'espoir, impuissance, abandon
Retentissement cognitif troubles de concentration sédation excessive si traitement mal
supporté Variables psychologiques intervenant dans l'expérience de la douleur en cancérologie
Sens attribué à la douleur : signification, attributions, représentations, associations libres et
valeurs
Mémorisation (expériences antérieures)
Impact du diagnostic et des traitements
Somatisations et hypocondrie
Sentiment de contrôle et de maîtrise
Crainte de la mort
Humeur dépressive et/ou anxieuse
Sentiment de désespoir et d'impuissance
Formation Médicale Continue de Tourcoing
Page 6/10
Cancer, douleur, souffrance psychique
Fonctions de la douleur en cancérologie
Signal d'alarme
Situation de crise
Message de détresse
Mécanisme de déplacement
Moyen de protection
Refuge ultime : douleur anti-souffrance
Restauration narcissique
Point d'ancrage identitaire
Relation avec le monde médical : échec ou faire valoir
Les répercussions psychologiques de la douleur en cancérologie
Anxiété d'anticipation prochaines crises douloureuses évolution de la maladie dégradation
de l'état général
Représentations effrayantes de la douleur causes conséquences
Traumatismes et deuils (pertes)
Vulnérabilité psychologique
Victime associée demande de restitution réparation d'un état antérieur idéalisé
Anxiété et douleur cancéreuse
Fréquent dans le cadre de douleurs chroniques
Liée à l'ignorance tout autant qu'à la connaissance du diagnostic
Représente l'un des modulateurs les plus puissants de la plainte douloureuse
Liée aux préoccupations sur la dégradation de l'état général
Génératrice d'une anxiété d'anticipation : crainte de la douleur à venir ou du retour de la
douleur par crise
Développement d'une thématique hypocondriaque surtout si douleur non soulagée
Génératrice d'un repli sur soi et d'un refus de soins par peur des effets secondaires
Conviction inébranlable d'une atteinte organique sous jacente ou d'une évolution inéluctable de
la maladie cancéreuse
Peut favoriser des demandes répétées d'examens
Troubles de l'adaptation et douleur en oncologie
Troubles réactionnels au stress et à la douleur entraînant une souffrance plus marquée que
celle normalement attendue
Génère un retentissement sur le plan social, professionnel mais sans avoir l'intensité d'un
trouble affectif majeur ou anxieux caractérisé
Entraîne une altération de la qualité de vie et une souffrance psychique
Formation Médicale Continue de Tourcoing
Page 7/10
Cancer, douleur, souffrance psychique
Schéma corporel
Les répercussions psychiatriques de la douleur en cancérologie
Cancer + douleur chronique
Vulnérabilité accrue des patients
Complications psychiatriques accrues
Douleur chronique Dépression Suicide Douleur chronique + asthénie Dépression
Troubles psychiatriques et douleur en oncologie
Distinguer : *troubles psychiatriques en rapport avec les accès douloureux et uniquement
révélés par eux *troubles psychiatriques constants ou préexistants aux accès douloureux
Dépression et douleur cancéreuse
Dépression fréquente accompagnée de régression et parfois d'idées suicidaires
Parfois se résume à de simples aspects neurovégétatifs (troubles du sommeil mais souvent
peu discriminant)
Déni plus ou moins marqué des aspects affectifs et émotionnels
Banalisation de l'état dépressif attribué au problème douloureux
Réticence à évoquer le vécu émotionnel de tristesse
Génératrice d'un repli sur soi et d'un refus de soins par désintérêt et désinvestissement
personnel ce qui génère un isolement social
Dépression et douleur
Formation Médicale Continue de Tourcoing
Page 8/10
Cancer, douleur, souffrance psychique
Suspecter une dépression masquée chez un patient douloureux devant des symptômes
atypiques : *décalage entre l'expression de la douleur par le patient et la réalité anatomique ou
physiopathologique de cette douleur *sur le plan topographique devant l'indication de zones
incohérentes ou de territoires migrants *Une dépression peut un échappement de la douleur à un
traitement antalgique jusqu'alors efficace (dimension du désespoir)
Obstacles à l'identification de la dépression chez un douloureux cancéreux
Formes masquées de dépression : plainte somatique douleur domine
Humeur dépressive non exprimée comme émotion douloureuse car alexithymie (Incapacité à
identifier et à exprimer ses émotions et ses sentiments)
Recouvrement de symptômes somatiques et psychiques
symptômes pseudo-dépressifs générés par le cancer et la douleur : fatigue, perte de poids,
troubles de l 'appétit, troubles du sommeil
Facteurs culturels ou la dépression est déniée car non acceptable et traduction d'une marque
de faiblesse psychologique
Vulnérabilité suicidaire et douleur en cancérologie
Douleurs chroniques mal contrôlées = facteur non négligeable de passage à l'acte suicidaire
Ce risque va en augmentant si y est associé :
•
•
•
•
•
•
autres symptômes physiques handicapants, situation d'épuisement, de fatigue extrême
stade avancé de la maladie et pronostic péjoratif
dépression ou sentiment de désespoir
syndrome confusionnel avec désinhibition
ATCD personnels de TS ou familiaux de suicide ou TS
soutien social inadéquat ou déficient
Confusion mentale et douleur en oncologie
Confusion mentale induite par les antalgiques opiacés (Morphine et apparentés)
Confusion mentale induite par présence de douleurs physiques mal contrôlées
La douleur physique majore la confusion mentale et ses symptômes : troubles du sommeil,
agitation
Risque de minimisation de l'expression de la douleur chez le patient confus et donc de sous
traiter car incapacité du patient à demander des antalgiques
Toxicomanie et douleur en oncologie
Tenir compte de la personnalité du toxicomane : psychopathe, manipulateur (douleur feinte),
mauvaise adhésion au traitement et aux règles institutionnelles, comportement ou attitude aberrante
Peut influer la prise en charge de la douleur
Dépendance psychique et prise compulsive de drogues et donc possiblement d'antalgiques
Attention au syndrome de manque et à l'usage détourné des antalgiques et à l'aggravation de
la toxicomanie
Posologie des opioïdes plus importante car tolérance élevée (induction enzymatique hépatique)
Formation Médicale Continue de Tourcoing
Page 9/10
Cancer, douleur, souffrance psychique
Conclusions
Le cancer génère à la fois une souffrance physique et psychique
La prise en charge de la douleur en cancérologie nécessite une approche multidisciplinaire où
doivent s'intégrer de manière harmonieuse les champs de la médecine, de la psychiatrie et de la
psychologie
C'est à ce prix que l'on peut espérer accroître la qualité de vie des patients en abaissant leur
niveau de détresse émotionnelle, en limitant les séquelles traumatiques et en leur facilitant une
meilleure adaptation à la maladie
Formation Médicale Continue de Tourcoing
Page 10/10
Téléchargement