Sept clés pour comprendre la troisième réforme de l'imposition des entreprises (RIE III) 1. Pourquoi réformer? Les cantons ont attiré des entreprises prospères et pourvoyeuses d'emplois grâce aux statuts fiscaux particuliers dont bénéficient en Suisse certains types de sociétés, dont les activités commerciales se déroulent pour l'essentiel à l'étranger. Les sociétés dites auxiliaires et les holdings, actives à l’international, peuvent actuellement bénéficier d’une imposition privilégiée pour les bénéfices réalisés à l’étranger par rapport à ceux qui le sont en Suisse. Ces statuts fiscaux ne correspondent plus aux standards fiscaux internationaux. La Suisse s'est engagée à les supprimer, ce que permet la RIE III adoptée par les Chambres fédérales en juin 2016. La nouvelle loi fédérale introduit en outre une série d’outils fiscaux, agréés au plan international, qui suppléent les statuts disparus afin de maintenir la compétitivité de la Suisse à l'égard des entreprises concernées et de préserver l'emploi. 2. Quels sont les enjeux pour Genève? D'après une étude du CREA, Genève recensait 1100 sociétés bénéficiant d’un statut fiscal privilégié en 2011. Si leurs impôts augmentaient brutalement pour se situer au niveau de celui que paient les sociétés « ordinaires », nombre d’entre elles risqueraient de quitter le canton. 60'000 emplois et 1,1 milliard d'impôts cantonaux et communaux sont en jeu à Genève. 3. Qu'est-ce qui change en matière de taux d'imposition ? A Genève, les entreprises ordinaires voient leur bénéfice imposé au taux de 24%, alors qu'un taux de l'ordre de 11,6% est appliqué aux sociétés au bénéfice d’un statut fiscal privilégié. La solution retenue pour parer à la disparition des statuts consiste à mettre toutes les entreprises sur un pied d'égalité, avec un taux intermédiaire qui minimise le risque de voir partir des sociétés au bénéfice d’un statut. Le projet du Conseil d'Etat préconise un taux d'imposition unique du bénéfice des sociétés de 13,49%, ce qui signifie une baisse d'impôts pour les sociétés ordinaires et une augmentation pour les sociétés bénéficiant d’un statut. Durant une phase transitoire de cinq ans, un prélèvement supplémentaire de 0,3% sera destiné à des mesures concrètes en faveur de l'innovation, de la formation professionnelle, de la mobilité douce et de la culture émergente. 4. Les prestations de l'Etat vont-elles se réduire? Le projet du Conseil d'Etat comporte un dispositif visant à éviter que le manque à gagner prévu durant une première phase de la réforme ne se traduise par une réduction des prestations publiques. Il prévoit de suspendre durant cinq ans le mécanisme de frein au déficit avec une tolérance d'un déficit annuel équivalent au montant de ce manque à gagner, soit 350 millions. Ce projet prévoit aussi des mesures d'accompagnement concrètes et permanentes en faveur de la formation professionnelle, de l'emploi des seniors, des crèches et des transports publics, par le biais d'une légère augmentation de la cotisation patronale sur la masse salariale. Les entreprises, qui bénéficieront dans leur majorité de baisses d'impôts, seront incitées à investir et verront leur capacité concurrentielle renforcée. Elles pourront ainsi engendrer de nouvelles recettes fiscales. 5. Qu’en est-il des communes? Le projet du Conseil d'Etat veille à préserver le bon fonctionnement des communes, qui subiront comme l'Etat une baisse initiale de leurs recettes fiscales. Les communes recevront une part du versement compensatoire de la Confédération et une partie des montants perçus grâce aux mesures d'accompagnement décidées au niveau cantonal. La répartition globale s'effectuera de manière proportionnelle au manque à gagner prévu, soit 80% pour le canton et 20% pour les communes. Enfin, la taxe professionnelle communale, une spécificité genevoise, sera maintenue. 6. Que s'est-il passé avant cette troisième réforme ? La première réforme de l'imposition des entreprises, adoptée par les Chambres fédérales en 1997, a réduit la fiscalité des sociétés. La deuxième réforme de l'imposition des entreprises (RIE II), acceptée en votation populaire en février 2008, a réduit la taxation des dividendes et celle du capital de l'entreprise. La RIE III vise à préserver la compétitivité du système fiscal suisse en l'adaptant à l'évolution des normes internationales. 7. Pourquoi une votation fédérale avant le débat cantonal ? Le Parlement fédéral a adopté le 17 juin 2016 la loi sur la troisième réforme de l'imposition des entreprises. Combattue par référendum, cette loi sera soumise au peuple suisse le 12 février 2017.Les cantons disposent d'une marge de manœuvre importante pour évoluer dans le cadre fédéral. Le gouvernement genevois a présenté son projet de mise en en œuvre le 16 novembre 2016. Il souhaite que l'électorat cantonal puisse s'exprimer à l'issue des travaux parlementaires menés par le Grand Conseil au premier semestre 2017. Cette votation cantonale pourrait avoir lieu au second semestre 2017.