Juin 2002
La testostérone
Première partie: physiopathologie
et méthodes de dosage
Albert Burger
Généralités
La testostérone, androgène testiculaire majeur, est
synthétisée dans les cellules de Leydig qui dépen-
dent directement de la stimulation par l’hormone
lutéotrope (LH). Elle participe probablement à la
spermatogenèse, assure le développement mus-
culaire, stimule l’activité sexuelle, diminue les lipides
et inhibe la sécrétion de LH par rétrocontrôle négatif.
Elle possède d’autres effets via sa métabolisation en:
• œstradiol
• dihydrotestostérone
L’œstradiol partage avec la testostérone le contrôle
du rétrocontrôle négatif de LH. Par ce biais, les
organes périphériques (tissu adipeux, foie, etc.) peu-
vent donc influencer la fonction de l’axe gonadique.
Pour mémoire, la spermatogenèse est sous le
contrôle de l’hormone folliculo-stimulante (FSH),
et les cellules de Sertoli qui entourent les canaux
séminifères modulent la sécrétion de FSH via la
sécrétion d’inhibine(1).
La dihydrotestostérone, qui assure la différenciation
des organes génitaux externes, la croissance de la
prostate et la pilosité sexuelle, a deux particularités:
c’est un androgène pur, car elle ne peut pas être
aromatisée en œstrogènes, et sa localisation est
essentiellement intracellulaire. Les taux circulants sont
donc très peu indicatifs de son action cellulaire.
Ces trois hormones agissent avant tout au niveau
nucléaire, où elles possèdent des récepteurs spéci-
fiques caractérisés par leur action lente et prolongée.
La majeure partie de la testostérone circule liée à
une protéine spécifique de transport, la "sex hor-
mone-binding globulin" (SHBG) et à l’albumine. La
SHBG est quantitativement plus importante que
l’albumine et est synthétisée au niveau hépatique.
C’est la testostérone libre qui peut pénétrer dans
les tissus, mais celle-ci ne représente que 2% de la
testostérone totale. Cette fraction peut toutefois
varier en fonction des taux de SHBG, qui sont par
exemple diminués en cas d’obésité, d’hyperpro-
lactinémie et d’hypothyroïdie, et augmentés chez
la personne âgée, en cas de cirrhose et en cas
d’hyperthyroïdie. Une augmentation de la SHBG
diminue le pourcentage de testostérone libre.
Chez la femme préménopausée, les ovaires et les
surrénales participent à la production de testosté-
rone, directement ou indirectement via la conversion
périphérique de l’androstènedione en testostérone.
Dosages
Testostérone totale
Chez l’homme, ce dosage est très fiable, mais il a 2
limitations majeures:
•Son taux est influencé par le taux de SHBG. Si celle-
ci augmente, le pourcentage de testostérone libre
chute. Pour compenser cette perte en hormones
disponibles, les taux de testostérone augmentent,
mais l’imprégnation des tissus périphériques en
testostérone reste la même. En d’autres termes,
l’hormone libre est fonction des taux de testostérone
et de SHBG, l’albumine ne jouant qu’un rôle mineur.
•Les limites des valeurs normales sont très larges,
partiellement en raison de l’existence de variations
nycthémérales des taux de testostérone (valeurs
maximales le matin). Un sujet peut donc présenter
une diminution de moitié, voire plus, de la produc-
tion (et donc du taux sanguin) de testostérone,
tout en conservant une valeur dans les limites de
la norme; cependant, pour ce patient, cette diffé-
rence pourra être cliniquement significative.
Chez la femme et l'enfant, les taux de testostérone
totale sont très bas.
Testostérone libre
•Sa concentration est calculée à partir de la testo-
stérone totale et de la SHBG (et de l’albumine en
cas de forte dysalbuminémie) et permet donc
d’obtenir le résultat des trois analyses. Cette
méthode donne des résultats superposables à la
méthode de référence (par dialyse), qui ne se
pratique que dans les laboratoires de recherche.
En routine, la testostérone libre calculée est la
méthode préférée des spécialistes(2).
• La méthode la plus fréquemment utilisée est le
dosage de testostérone libre par RIA. C’est un
dosage facile et rapide, mais il ne mesure pas
directement la testostérone libre. Il fournit des
valeurs nettement plus basses que la méthode
de référence et même si, dans la plupart des cas,
les résultats sont proportionnellement en accord
avec la méthode de référence, des différences
non expliquées persistent. Pour cette raison, ce
dosage est actuellement critiqué(3).