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que les généralisations biologiques sont historiquement construites; elles doivent être comprises
comme des eets dune «histoire évolutive contingente». Cest alors le statut de la biologie
évolutionnaire, en tant que modèle théorique, qui se trouve du coup interrogé. Cest nalement à
une analyse du concept de loi, tel quil peut être investi dans le champ de la biologie, et conjointe-
ment une réexion sur la valeur unicatrice de la théorie de lévolution que se livre Jean Gayon, et
ce sont ces objets que les commentaires de Jean-Sébastien Bolduc et Christian Sachse placent au
centre de leur discussion.
Lorientation de la réexion dIsabelle Olivieri est toute autre. La biologie évolutionnaire a
longtemps été considérée comme relevant exclusivement de la recherche fondamentale: il sagit
en eet soit de comprendre le processus de la sélection naturelle, permettant de prédire lévolution
future dune espèce, soit de reconstruire son évolution passée. Or les études dévolution expérimen-
tale ont pu mettre en évidence lexistence dune évolution rapide, et même très rapide des espèces,
ce qui implique la possibilité pour lhomme dintervenir, volontairement ou involontairement,
sur cette évolution pour la modier. Du coup, la biologie évolutionnaire ne revêt pas un caractère
seulement théorique ou explicatif, mais peut répondre à des visées pratiques. Létude dIsabelle
Olivieri envisage non pas la théorie évolutionnaire elle-même, mais les applications quelle rend
possibles, et les conséquences éthiques quelles peuvent comporter. Son analyse distingue deux
types dapplication. Dune part, celles qui concernent la gestion évolutionniste despèces et de
populations végétales ou animales non-humaines: sont ainsi interrogées dans leurs dimensions
éthiques la gestion évolutionniste des populations de ravageurs et celle des espèces menacées
comme des espèces utiles à lhomme, la gestion évolutionniste des résistances aux insecticides,
lutilisation des OGM. Dautre part, Isabelle Olivieri fait porter son attention sur les applications
de la biologie évolutionnaire au champ des sciences sociales et sur la médecine évolutionniste. Elle
considère successivement plusieurs applications de la biologie évolutionnaire à lexplication des
comportements sociaux, sujettes à des débats nourris, tels que la ressemblance parents-enfants,
la généralité du fait religieux, la xénophobie, etc. Il ne sagit pas pour Isabelle Olivieri de prendre
position sur la légitimité des argumentations déployées, mais de montrer comment certaines
recherches dans le champ des sciences sociales, en psychologie notamment, prennent appui sur
la biologie évolutionnaire pour développer des arguments dont des préoccupations idéologiques,
économiques ou politiques peuvent ne pas être absentes. Le dialogue engagé avec Marc Kirsch et
Olivier Morin insiste justement sur les dicultés soulevées par ces emprunts, aussi bien sur le plan
épistémologique que du point de vue éthique, notamment à propos de la notion de race lorsquelle
est appliquée à lhomme.
ierry M
Professeur à lUniversité de Franche-Comté