EDITO Prix de vente au N° : • Papier : 15 € TTC • Version électronique : 4,95 € TTC (Rubrique Espace abonnement sur www.santelog.com) Tarif d’abonnement : • Papier : 1 an - 6 numéros : 59 € TTC • Version électronique : 1 an - 7 numéros 29 € TTC Trimestriel Date de publication : 25 janvier 2011 Daté Décembre/Janvier/Février 2011 Editeur : AlliedhealtH SAS Directeur scientifique : Dr Richard Matis, Praticien Hospitalier service de Gynécologie-obstétrique Groupe hospitalier de l’Institut Catholique de Lille (Saint-Vincent), Trésorier général de Gynécologie Sans Frontières. Comité scientifique : Dr Dominiek Lecoutere Pédiatre Néonatalogiste, Groupe hospitalier de l’Institut Catholique de Lille (Saint-Vincent) Danielle Rapoport Psychologue clinicienne, psychanaliste, ancienne psychologue titulaire de l’Assistance Publique des Hôpitaux de Paris et fondatrice de l’Association «Bien-traitance» Dr Jean Voisin Directeur du CAMSP d’Avignon Jean-Tristan Richard Psychologue-psychanalyste, Directeur adjoint du CAMSP-IPP (Paris) Pascale Hassler Sage-Femme libérale Amélie Gahete Fondatrice et Directrice de crèche, consultante et formatrice de formation psychanalytique Pierre Pérochon Diététicien-nutritionniste, membre de l’AFDN (Association Française des Diététiciens-Nutritionnistes), du CEDE (Club Européen des Diététiciens de l’Enfance), de la SFA (Société Française d’Alcoologie), du réseau «Diabète-Nutrition 37», du CLAN (Comité Liaison Alimentation Nutrition) du CHRU de Tours, du Conseil de Pôle Alcoologie et de la CSIRMT (Commission des Soins Infirmiers, de Rééducation et Médico-Techniques) du CHLS. Avec la participation de l’Association Française pour le Dépistage et la Prévention des Handicaps de l’Enfant (AFDPHE) Les revues santé log adhérent au Conseiller des rédactions Vincent Chagué Coordination éditoriale newsletters Mounira Nassef Actualités Pascale Bernanose Dossier scientifique Association Vaincre l’Autisme Exercice Laurette Cibille, Infirmière D.E. et Patrick Cibille, Infirmier puériculteur D.E. Livres Jean-Tristan Richard Conseil éditorial, PAO Groupe Composer 26, rue Marie-Magné - BP 33167 31027 Toulouse cedex 3 05 62 21 46 10 Publicité Revues : Sabrina Lepesqueur Régie publicitaire Odyssey 01 55 33 51 50 - [email protected] En 1989 le film de Barry Levinson « Rain Man » remarquablement interprété par Dustin Hoffman, modifia la perception de l’autisme dans l’inconscient collectif. Cette maladie méconnue et mal connue était considérée comme un handicap mental proche de la schizophrénie, touchant l’enfant jeune. Le sujet autiste était décrit comme une enfant enfermé dans un monde occulte sans contact avec l’extérieur, et sans possibilité de communication interpersonnelle. Bien sûr un enfant sans langage ne pouvait que devenir intellectuellement déficient. Or en 1989, grâce à ce film on découvre que certains autistes comme Raymond Babbitt incarné par Dustin Hoffman dans « Rain Man », pouvaient être de véritables surdoués. Autiste oui, mais intellectuellement supérieur. Ce film a été pour moi l’occasion de me poser des questions, ou plutôt de changer mon regard sur l’autisme que j’ignorais jusqu’alors assidument étant médecin mais n’étant pas psychiatre. L’intérêt pour ces personnages quelque fois surdoués est apparu dans le grand public et aussi parmi les professionnels de santé. La sensibilisation vis-à-vis de l’autisme, passée par les médias, a permis ces dernières années de conduire à l’amélioration des connaissances. Compte tenu de notre ignorance on ne pouvait que l’améliorer. Comme souvent en médecine l’acquisition de nouvelles connaissances s’accompagne d’une amélioration de la qualité de la prise en charge et en particulier du dépistage et du diagnostic. Ainsi comme on l’a vu pour le dépistage du cancer du col, la prévalence augmente brutalement du fait, non pas d’une épidémie, mais d’une meilleure pertinence dans le diagnostic, qui permet de ne pas passer à coté de diagnostics méconnus ou mal connus. Ainsi durant les 5 années passées, la prévalence de l’autisme a augmenté de 57 %. La fréquence jadis sous évaluée à 1 pour mille est passée à environ 1 pour 110 enfants, par une meilleure connaissance de la maladie avec un dépistage et un diagnostic plus pertinent. Le sexe ratio reste inchangé avec 4 fois plus de garçons que de filles. L’autisme considéré longtemps comme une maladie psychiatrique est actuellement classé comme handicap cognitif sévère, dans la version 10 de la Classification Internationale des Maladies de l’OMS (CIM 10). C’est un Trouble Envahissant du Développement (TED) qui affecte les fonctions cognitives dès l’enfance. L’autisme maintenant mieux étudié associe des troubles de la communication, des relations avec l’autre, et du comportement que l’on résume sous l’expression : Trouble du Spectre Autistique. Parmi ces troubles du spectre autistique on décrit bien entendu l’autisme mais aussi d’autres syndromes comme le syndrome d’Asperger qui est un autisme dit de haut niveau avec un quotient intellectuel supérieur à la normale. Au-delà de l’amélioration diagnostique, des progrès thérapeutiques sont apparus et il est reconnu qu’une prise en charge précoce permet d’atténuer considérablement les conséquences néfastes de l’autisme. Demain les autistes de plus en plus nombreux, grâce aux progrès de la prise en charge seront probablement moins considérés comme des malades lourds avec un développement proche de la normale. Nous abordons ce trouble dans le dossier de ce numéro de Santé log Petite Enfance et poursuivrons sur ce thème en abordant également l’usage de la psychanalyse, dans notre prochain numéro. Bonne lecture, Richard Matis Désormais, votre revue est également accessible sous format électronique sur www.santelog.com Sous un format pdf identique à la revue papier, feuilletable, téléchargeable, imprimable, accessible gratuitement à partir de vos codes d’accès au site par vos collègues ou vos équipes, plus écologique ! Cette nouvelle version électronique répond à la fois aux demandes des abonnés, au mode de consultation plus fréquent par Internet, à un mode d’édition plus « écologique », à un accès plus large et moins coûteux à l’information professionnelle santé. 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Pratique clinique en nutrition pré et post-natale, le cas des prématurés L’allergie aux laits Exercice N°11 - Trimestriel Décembre/Janvier/ Février 2011 VOTRE FORMATION PAR L’ÉCHANGE DES BONNES PRATIQUES .................................................................................................................................................... Soin de l’escarre chez le Petit Enfant Livres ............................................................................................................................................................ 23 31 33 Vaincre l’autisme ACTUALITÉS SAVOIR EXERCICE Bioéthique et droit d’accès aux origines Q Pratique clinique en nutrition pré et post-natale, prévention des allergies Q Prise en charge de l’escarre chez le Petit Enfant Q Photo couverture : ©Huntstock fotolia.com 2 encarts Santé log sont asilés dans l’ensemble des exemplaires. santé log – Petite Enfance n° 11 – Décembre/Janvier/Février 2011 5 ACTUALITÉS Otites chez l’enfant : antibiotiques, peu de bénéfices mais beaucoup d’effets indésirables Le recours aux antibiotiques pour traiter les infections aiguës nouvellement diagnostiquées de l’oreille chez les enfants n’est que légèrement plus efficace que l’absence de traitement, mais en revanche présente un risque certain d’effets secondaires, selon une nouvelle étude publiée dans le Journal of American Medical Association (JAMA). Des résultats qui permettent d’affiner les directives de traitement. moyen d’infections aiguës des oreilles, 80 s’en « sortiraient » sans prendre d’antibiotiques. Les chercheurs californiens rappellent d’abord que l’examen attentif de la membrane du tympan par un médecin est essentiel pour un diagnostic précis des infections aiguës des oreilles. Par ailleurs, ils confirment n’avoir identifié aucune preuve d’un bénéfice supplémentaire des antibiotiques princeps par rapport aux génériques. Sur les enfants traités par antibiotiques, 30 % développent une éruption cutanée et 50 % une diarrhée, selon cette étude. « Nos résultats renforcent les connaissances actuelles que le meilleur traitement des otites n’est pas obligatoirement un traitement par antibiotiques », L’utilisation de nouveaux antibiotiques de marque n’apporte aucun bénéfice supplémentaire, par rapport aux génériques, concluent également les chercheurs : pour traiter les infections non compliquées de l’oreille chez des enfants en bonne santé, les antibiotiques génériques, tels que l’amoxicilline sont recommandés. déclare l’auteur principal Tumaini R. Coker, pédiatre au Mattel Children’s Hospital (UCLA) et chercheur à la RAND Corporation, un organisme de recherche sans but lucratif. “Prescrire des antibiotiques au début de l’infection peut aider à guérir les infections de l’oreille un peu plus rapidement, mais augmente également les risques d’effets secondaires liés aux antibiotiques comme l’éruption cutanée ou la diarrhée », ajoute le Dr Coker. Les chercheurs ont travaillé sur la base des recherches précédemment publiées sur le diagnostic et le traitement des infections aiguës de l’oreille chez les enfants, à la demande de l’Académie américaine de pédiatrie dans le cadre de sa mise à jour des guides pratiques de traitement. L’étude suggère qu’une des principales limites des efforts visant à améliorer le traitement des otites est qu’il n’existe pas de critère définitif pour faire le diagnostic. L’utilisation d’un otoscope pour examiner les signes d’infection est un élément clé mais évolutif du diagnostic et reste nécessaire pour préciser le diagnostic, à chaque stade de l’infection. Résultats : moins d’antibiotiques pour moins d’effets indésirables : cette analyse de la littérature conclut que prescrire des antibiotiques pour les otites ne présente qu’un léger avantage. Sur les 100 enfants à risque 6 Décembre/Janvier/Février 2011 – Petite Enfance n° 11 – santé log Pourtant, des antibiotiques plus chers sont souvent prescrits alors que des économies considérables pourraient ici être réalisées. Aux Etats-Unis, les otites chez les enfants représentent une dépense de santé estimée à 350 $ par épisode de la maladie soit une dépense globale annuelle de 2,8 milliards de dollars. • • P. B. SOURCE : NIH/Eurekalert « Antibiotic treatment for ear infections in kids provides only modest benefits, study finds », visuel CDC DOSSIER A lire sur le web Vaincre l’autisme Lorsqu’on évoque l’autisme, viennent immédiatement des mots et des situations qui font peur. Bien que de plus en plus médiatisé, l’autisme reste une maladie méconnue et avant tout mal connue. En se référant à la classification internationale des maladies de l’OMS (CIM 10), l’autisme est un trouble envahissant du développement (TED) qui affecte les fonctions cérébrales. Il n’est donc plus considéré comme une affection psychologique ni comme une maladie psychiatrique, comme cela a été longtemps le cas. On le reconnaît aujourd’hui comme un handicap cognitif sévère. La prévalence des troubles autistiques est d’environ 1 pour 110 enfants, touchant 4 fois plus de garçons que de filles. La prévalence de l’autisme a augmenté de 57% ces 5 dernières années, à tel point que les Centers for Disease Control and Prevention américains (CDC) ont qualifié l’autisme de crise nationale de santé publique. sommaire QU’EST-CE QUE L’AUTISME ? ............................................. 10 AUTISME, LA PISTE GÉNÉTIQUE SE CONFIRME ................ 12 L’AUTISME DANS TOUTE SA COMPLEXITÉ, L’IMPACT DE L’ENVIRONNEMENT ....................................... 16 QUELLE DÉMARCHE DIAGNOSTIQUE ? .............................. 18 Chaque article du dossier est désormais précédé d’une URL réduite (ex : santelog.com/id1101) pour vous permettre, une fois « loggué » sur notre site d’accéder plus facilement à nos contenus. Auteurs et remerciements : Dossier coordonné par Pascale Bernanose et Amélie Churlet (Vaincre l’Autisme, validé par Jean-Tristan-Richard et le Dr Richard Matis. Rédaction et remerciements : M’Hammed Sajidi - Président de l’Association Vaincre l’Autisme Richard Delorme, Psychiatre, praticien hospitalier, Responsable du Centre expert autisme de haut niveau à l’Hôpital Robert Debré, Paris, Membre du Comité scientifique de Vaincre l’Autisme Thomas Bourgeron, Professeur de biologie à l’université Denis Diderot, dirige le laboratoire de génétique humaine et fonctions cognitives de l’institut Pasteur ; Membre du Comité scientifique de Vaincre l’Autisme Marion Leboyer, Professeur de psychiatrie, Responsable du pôle santé mentale de l’hôpital Chennevier-Mondor, Membre du Comité scientifique de Vaincre l’Autisme Elisabeth Fernell, Neuropédiatre, Professor ass. Institut de Karolinska, Stockholm Travail clinique – Habilitation Centre for Young Children with Autism, Stockholm, Membre du Comité scientifique de Vaincre l’Autisme Christopher Gillberg Professeur, Enfance et Adolescence Psychiatrie, Université de Göteborg Göteborg, Suède, Glasgow et Londres, Royaume Uni Pr Robert Hendren, membre du Comité scientifique de Vaincre l’Autisme, Professeur de Psychiatrie et de Sciences du Comportement, Directeur du MIND Institute, Chef de la division psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent de l’Université de Californie à Davis et Président de l’Académie Américaine de Psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent (2007-2009). Ludovic Lefebvre, Psychologue de l’Enfant et de l’Adolescent, Intervenant de Vaincre l’Autisme au Maroc Nous remercions la Haute Autorité de Santé de nous avoir autorisés à reproduire ce texte issu de l’Etat des connaissances Autisme et autres troubles envahissants du développement (TED) - État des connaissances hors mécanismes physiopathologiques, psychopathologiques et recherche fondamentale Janvier 2010. Cet article est également consultable sur le site www.has-sante.fr rubrique Toutes nos publications. AUTISME : A QUOI ÇA SERT D’APPRENDRE ? ................... 20 santé log – Petite Enfance n° 11 – Décembre/Janvier/Février 2011 9 DOSSIER A lire sur le web www.santelog.com/id1113 Qu’est-ce que l’autisme ? © Fotolia.com - Fırat L’autisme est un trouble sévère et précoce du développement de l’enfant. Il se manifeste avant l’âge de 3 ans par l’isolement, la perturbation des interactions sociales, les troubles du langage, de la communication non verbale et les activités stéréotypées avec restriction des intérêts. Trois éléments cumulatifs caractérisent ainsi l’autisme : un trouble de la communication, une perturbation des relations sociales et des troubles du comportement. On utilise actuellement plus l’expression Troubles du Spectre Autistique (TSA) pour parler d’autisme. Parmi les autres TSA figurent le Syndrome d’Asperger (autisme dit de haut niveau avec un quotient intellectuel supérieur à la moyenne), le Syndrome de l’X fragile, le Syndrome de LandauKleffner, le Syndrome de Rett, le trouble désintégratif de l’enfance et les troubles envahissants du développement non spécifiés (TED-NOS). Selon de récentes recherches, de nombreuses personnes avec un comportement autistique présentent des troubles liés mais distincts. 10 Décembre/Janvier/Février 2011 – Petite Enfance n° 11 – santé log Un taux de prévalence de plus en plus important L’autisme affecte au moins 67 millions de personnes et est, de tous les troubles graves du développement, celui qui connaît la plus rapide expansion dans le monde. On le sait peu mais cette année, plus d’enfants recevront un diagnostic d’autisme que de diabète, de cancer et de SIDA additionnés. Une étude récente publiée en 2009 par le British Journal of Psychiatry et menée au Royaume Uni par Simon Baron Cohen, Professeur de psychopathologie développementale et Directeur du « Autism Research Center » à l’université de Cambridge, montre qu’1 enfant sur 66 est atteint de TSA. Ce taux déjà alarmant est amené à augmenter dans les années à venir, du fait de l’élargissement du spectre et de l’amélioration des outils de dépistage et de diagnostic. D’où vient l’autisme ? Contrairement à la thèse longtemps soutenue, les TSA ne sont pas d’origine psychologique. Les causes de l’autisme sont multifactorielles, encore peu claires aujourd’hui Il est néanmoins certain que des facteurs d’origine génétique favorisent le développement des syndromes autistiques. Plusieurs gènes peuvent entrer en cause. Ils diffèrent d’une personne à l’autre, ce qui explique le caractère hétérogène des TSA. Les dernières avancées en génétique ont permis d’identifier de nouveaux gènes impliqués par délétion ou duplication. Au-delà de l’aspect héréditaire, la mutation des gènes d’un individu peut apparaître comme cause de l’autisme. D’autres causes ont été envisagées mais n’ont pas encore été confirmées : biologiques, environnementales... Pistes qui nécessitent des recherches approfondies. Certaines études responsabilisent vaccins et intolérances alimentaires ? A ce jour, aucune preuve scientifique ne démontre un lien de cause à effet entre la vaccination et l’autisme. Les taux de troubles gastro-intestinaux précoces, avant le diagnostic d’autisme, ne sont pas plus élevés chez les enfants avec TSA que dans la population générale. Par ailleurs, il n’existe aucune différence entre les profils urinaires des enfants atteints d’autisme justifiant les régimes sans caséine ni gluten. Dans tous ces domaines, la recherche continue. L’autisme, une fatalité ? Les troubles autistiques sont envahissants et durables mais ne sont pas une fatalité dans la mesure où une prise en charge, la plus précoce possible, permet d’en atténuer les effets et d’obtenir le développement de l’enfant. Les manifestations de l’autisme peuvent varier d’une personne à l’autre et chez une même personne dans le temps. D’où l’utilité et l’importance d’une prise en charge personnalisée et adaptée au fur et à mesure de l’évolution de l’enfant et de la personne. L’autisme ne se guérit pas. Pour beaucoup d’enfants atteints, les symptômes s’améliorent avec le traitement et l’âge. En grandissant, certains finissent par mener une vie normale ou quasi-normale. Les thérapies et les interventions comportementales peuvent cibler des symptômes spécifiques et apporter des améliorations considérables. Il y a vingt ans, la plupart des personnes autistes étaient placées en institution psychiatrique. Il existe désormais des solutions plus adaptées et plus dignes. • • M’Hammed SAJIDI Président de Vaincre l’Autisme www.vaincrelautisme.org santé log – Petite Enfance n° 11 – Décembre/Janvier/Février 2011 11 DOSSIER A lire sur le web www.santelog.com/id1114 Autisme, la piste génétique se confirme Par Richard Delorme, Psychiatre, praticien hospitalier, Responsable du Centre expert autisme de haut niveau à l’Hôpital Robert Debré, Paris, Membre du Comité scientifique de Vaincre l’Autisme - Thomas Bourgeron, Professeur de biologie à l’université Denis Diderot, dirige le laboratoire de génétique humaine et fonctions cognitives de l’institut Pasteur ; Membre du Comité scientifique de Vaincre l’Autisme - Marion Leboyer, Professeur de psychiatrie, Responsable du pôle santé mentale de l’hôpital Chennevier-Mondor, Membre du Comité scientifique de Vaincre l’Autisme Plusieurs études récentes identifient des mutations génétiques en cause dans l’autisme. Les gènes impliqués jouent un rôle dans le fonctionnement des synapses. En accordant sa part à l’inné, cette découverte lève un pan du voile qui entoure ce syndrome très complexe. Depuis cette époque, la définition du syndrome s’est élargie. On parle désormais de « troubles du spectre autistique » (TSA) qui affectent 1 enfant sur 200. A côté de l’autisme de Kanner, caractérisé par 3 critères (troubles des interactions sociales ; troubles de la communication verbale ; gestes répétitifs et stéréotypés), les TSA incluent d’autres formes, par exemple le syndrome d’Asperger* ou encore le syndrome de Rett*. Cet élargissement du spectre a permis de montrer, grâce aux découvertes qui se sont succédées depuis 2003, que des facteurs génétiques sont en cause dans certaines formes d’autisme. Nous avons identifié des mécanismes biologiques à l’origine du syndrome. Si tous les gènes impliqués sont loin d’avoir été découverts, nous comprenons déjà mieux le rôle de certains d’entre eux. Tout commence en 2003. Cette année-là, nous identifions pour la première fois des mutations altérant deux gènes du chromosome X chez des frères dont l’un atteint d’autisme et l’autre du syndrome d’Asperger. Ces gènes codent chacun Mini-glossaire Début 2008, notre équipe a décrit une souris génétiquement modifiée présentant un comportement de type autistique. En mutant un seul gène impliqué dans l’autisme chez l’homme, nous sommes parvenus à reproduire chez la souris certains troubles du comportement similaires à ceux du syndrome humain. Depuis que le syndrome a été décrit en 1943 par le psychiatre Léo Kanner, l’autisme a suscité un débat quant à ses causes, débat que l’on pourrait résumer ainsi : naît-on autiste ou le devient-on ? 12 Décembre/Janvier/Février 2011 – Petite Enfance n° 11 – santé log • Le syndrome d’Asperger est une forme spécifique d’autisme pour lequel le langage n’est pas atteint et où le sujet a souvent un QI élevé. • Le syndrome de Rett atteint uniquement les filles et se caractérise pat un retard mental et des mouvements répétitifs et stéréotypés. • Les synapses sont des jonctions entre les neurones, essentielles à la perception sensorielle, la coordination des mouvements, l’apprentissage et la mémoire. • Les exons sont les parties transcrites des gènes qui codent les protéines. respectivement une protéine, la neuroligine 3 et la neuroligine 4, qui sont impliquées dans le fonctionnement des synapses. Cette découverte nous lance sur la piste de la « voie synaptique ». De quoi s’agit-il ? Le rôle des synapses : Les synapses permettent la transmission d’information à partir d’un neurone dit pré-synaptique par la libération d’un neurotransmetteur qui vient se fixer sur les récepteurs d’un neurone post-synaptique. Les neuroligines sont des protéines exprimées à la surface d’un neurone post synaptique qui se lient à des protéines exprimées à la surface d’un neurone pré synaptique, les neurexines. Cet assemblage joue un rôle clé dans la formation et le fonctionnement des synapses. Par ailleurs, la synapse favorise ou tempère la diffusion de l’influx nerveux d’un neurone à l’autre. Et un bon fonctionnement du système nerveux dépend de l’équilibre entre les synapses excitatrices et inhibitrices. Or les neuroligines jouent un rôle déterminant pour établir cet équilibre. Plusieurs mutations de gènes codant des neuroligines ont depuis été identifiées chez d’autres patients. Ces altérations sont cependant toujours différentes d’une famille à l’autre et n’ont été retrouvées que chez très peu de patients. Elles ne permettent donc pas de comprendre l’ensemble des atteintes génétiques associées au syndrome. Mais ces premiers résultats ont ouvert la voie. D’autres gènes de vulnérabilité à l’autisme jouant un rôle dans la voie synaptique ont été découverts depuis. Ainsi, en 2007, nous avons identifié Shank3. Ce gêne, localisé sur le chromosome 22 code une protéine dite d’ « échafaudage » nécessaire au bon assemblage des protéines qui interviennent dans le contact synaptique entre les neurones. Dans un groupe de 227 enfants atteints de trouble du spectre autistique, nous avons identifié des altérations différentes de Shank3 chez cinq enfants.Ces résultats ont été répliqués récemment par des équipes canadiennes et américaines. Ils confortent la « voie synaptique » dans la vulnérabilité à l’autisme et témoignent du rôle majeur du gène Shank3 dans le développement du langage et de la communication sociale. Toujours en 2007, le consortium Autism Genome Project qui réunit une cinquantaine d’équipes aux Etats-Unis et en Europe a identifié un quatrième gène associé à l’autisme, en étudiant 1 168 familles dont au moins deux enfants étaient atteints. Une suppression d’une copie de ce gène a été trouvée chez deux soeurs. Ce gène joue lui aussi un rôle dans la voie synaptique, car il code la Neurexine1, une protéine qui se lie avec les neuroligines sur la face pré synaptique des neurones. De la mère aux gènes : chronique d’une erreur prolongée • 1911 : Le psychiatre suisse Eugène Bleuler utilise pour la première fois le terme « autisme » dans son traité sur les démences précoces. Il le considère comme le symptôme principal de la schizophrénie. • 1943 : Le psychiatre américain Léo Kanner montre que les 11 enfants qu’il suit depuis 1938 sont affectés du même syndrome qu’il nomme « autisme infantile précoce ». Kanner le définit comme une incapacité à établir des relations normales avec les gens et les situations dès le début de la vie. • 1944 : Le psychiatre autrichien Hans Asperger décrit des personnes avec autisme sans trouble du langage et présentant un niveau intellectuel normal ou plus élevé que la moyenne. Depuis 1981, on parle de syndrome d’Asperger. • 1950-1960 : Marqué par son expérience des camps de concentration, le psychanalyste Bruno Bettelheim ose un parallèle entre l’attitude repliée des prisonniers dans les camps et celui des enfants autistes. Il accuse les mères « réfrigérateurs » d’être les tortionnaires inconscientes de leurs enfants. • 1960-1970 : Dans le sillage de Bettelheim, beaucoup de psychanalystes et de psychiatres préconisent le recours à la méthode psychanalytique pour aider les enfants autistes. • 1970-1980 : Utilisant l’électroencéphalographie pour explorer le cerveau, Peter Tanguiz et Edouard Ormitz à l’Université de Californie, Gilbert Lelord à l’université de Tours émettent l’hypothèse que l’autisme serait dû à un trouble précoce de la perception sensorielle. Aux Etats-Unis, Léo Kanner récuse la théorie de Bettelheim. • 1986 : Les deux systèmes de classification des troubles mentaux internationaux, le DSM IV et la CIM-10, définissent l’autisme comme un trouble envahissant du développement. La Classification française des troubles mentaux des enfants et des adolescents continue de le considérer comme une psychose. • 2001 : Un rapport d’experts réalisé aux Etats-Unis par le National Research Council conclut que les programmes d’éducation individualisés constituent le meilleur moyen d’aider les autistes à progresser. Ces programmes éducatifs mis en oeuvre dans les pays anglo-saxons restent marginaux en France, où l’on continue à privilégier les traitements psychothérapeutiques. • 2003 : Identification d’une mutation dans deux gènes du chromosome X utiles pour la transmission synaptique - les neuroligines NLGN3 et NLGN4- chez des enfants avec autisme. Cette découverte confirme l’origine neurobiologique de l’autisme et permet l’identification de nouveaux gènes de vulnérabilité. • 2004 : Le Conseil de l’Europe condamne la France pour le non-respect de la Charte Sociale Européenne dans la prise en charge des personnes atteintes d’autisme. • 2008 : Premiers modèles animaux porteurs de mutations associées à l’autisme. santé log – Petite Enfance n° 11 – Décembre/Janvier/Février 2011 13 SAVOIR Q Pratique clinique en nutrition pré et post-natale, le cas des prématurés Lors d’un symposium organisé en décembre 2010 par l’Institut Nestlé Nutrition à l’Académie Européenne des Sociétés de pédiatrie (European Academy of Paediatric Societies - EAPS) à Copenhague (Danemark), d’éminents experts sont intervenus sur les évolutions possibles en pratique clinique en nutrition pré et post-natale pour améliorer la croissance et la protection du nouveau-né, en particulier en cas de prématurité. L’amélioration de la santé à long terme des nouveau-nés prématurés est essentielle car ce sont chaque année, 500 000 nourrissons qui naissent avant terme en Europe, un nombre en constante augmentation étant donnée le développement des innovations et meilleures pratiques en néonatalogie(1, 2). La nécessité d’un changement en pratique clinique en nutrition : Lors de ce symposium, le Professeur Hans van Goudoever du Département de pédiatrie du VU University Medical Centre et de l’hôpital Emma Children (Amsterdam), a ainsi expliqué la nécessité d’un changement dans la pratique clinique pour traiter les déficits nutritionnels précoces chez les enfants nés avant terme pour soutenir le développement du corps et des organes, en particulier le cerveau. La nouvelle pratique clinique présentée pourrait permettre de réduire chez ces enfants, la fréquence des problèmes de santé à long terme comme un QI moins élevé, des retards dans le développement neurologique mais aussi les troubles cardio-vasculaires, et bien d’autres pathologies. Selon le Pr van Goudoever, les prématurés ont des difficultés à se développer dans un contexte de mauvais état nutritionnel et la pratique clinique actuelle est trop lente à introduire la nutrition entérale, probablement en raison des inquiétudes des médecins sur l’intolérance possible du nourrisson au traitement. De l’importance d’un apport adéquat en protéines et acides aminés : Le fœtus in utero (avec les éléments nutritifs fournis par le biais du cordon ombilical) est alimenté en continu avec de grandes quantités d’acides aminés et de glucose et connaîtra une croissance rapide du cerveau. Commentant sur l’importance d’un apport adéquat en protéines et acides aminés pour la prévention des troubles de la croissance en début de vie, le Pr van Goudoever explique : « Notre objectif doit être d’imiter la croissance intra-utérine et d’obtenir un résultat fonctionnel comparable à l’équilibre nutritionnel des nourrissons nés à terme. » Lutter contre les déficits nutritionnels est bénéfique au développement neurologique : Des recherches montrant que la lutte contre les déficits nutritionnels précoces chez les bébés de poids insuffisant à la naissance (Low Birth Weight Infants -LBWI) peut avoir un impact positif sur leur développement neurologique. La recherche a montré qu’après ajustement des variables, un apport énergétique de 10 kcal / kg par jour au cours de la première semaine de vie a été associé à une augmentation de 4,6 point dans l’indice de développement mental (Mental Development In - MDI) à l’âge de 18 mois. Une augmentation de 1 gr de protéines /kg et par jour a été associée à une augmentation de 8,2 points dans l’indice de développement mental(3). Les nouvelles lignes directrices « ESPGHAN » pour la nutrition entérale (Enteral Nutrient Supply for Preterm Infants) chez les enfants de poids insuffisant à la naissance(4) comportent notamment un apport beaucoup plus élevé en protéines (3,5-4,5 g/kg/jour) que précédemment. Des études suggèrent ce changement, apportant la preuve que l’intestin utilise une quantité considérable de protéines (50 % en moyenne), une quantité qui n’est pas forcément naturellement disponible(5). Seuls 20 % des acides aminés spécifiques atteignent la circulation systémique(6). Selon le Pr van Goudoever, ces résultats justifient un apport plus élevé en acides aminés de 4 à 4,5 g / kg / jour avec des formules spécifiques aux prématurés et une non diminution par nutrition parentérale des acides aminés avant de pouvoir apporter au moins 75 ml / kg / jour de lait maternel par voie entérale. • • santé log – Petite Enfance n° 11 – Décembre/Janvier/Février 2011 23 EXERCICE Soin de l’escarre chez le Petit Enfant La peau de l’enfant est fragile, préservons-la ! Car avant de débuter une approche synthétique des plaies, de la cicatrisation et de leur prise en charge chez le jeune Enfant, il est indispensable de faire quelques rappels concernant la peau et ses spécificités chez le Petit Enfant. Particularités anatomophysiologique de la peau de l’Enfant La peau de l’enfant prématuré présente des caractéristiques particulières : la couche cornée faiblement kératinisée et fine doit assurer l’imperméabilité cutanée mais l’immaturité la rend particulièrement perméable ; La peau absorbe ainsi un certain nombre de produits qui viendraient à être appliqués tels les médicaments(1). La peau très fragile au niveau de l’épiderme entraîne quelquefois une abrasion de l’épiderme lors du retrait de certains adhésifs ou pansements adhésifs qui à proscrire, chez les enfants très prématurés. Chez l’enfant prématuré, la peau est infiltrée et œdématiée. Laurette et Patrick Cibille De 2 ans à la puberté, on observe des « expressions hypertrophiques » de la cicatrice, des phénomènes inflammatoires fréquemment amplifiés et, en général, une hypertrophie physiologique. Les escarres en pédiatrie Les escarres de l’Enfant sont moins fréquentes que chez l’adulte, néanmoins leur prévalence peut être encore considérablement diminuée par des mesures de prévention simples et bien codifiées. L’évaluation des facteurs de risque est une étape fondamentale de la prévention. De nombreuses échelles d’évaluation existent, l’échelle de Braden Q étant la plus utilisée. La prévention nécessite également une éducation des acteurs de soins, un positionnement adapté de l’enfant, des changements de position et une utilisation de supports adaptés au risque d’escarre. Spécificités de la peau de l’enfant • Grandes capacités de synthèse et de régénération tissulaire, • Facteurs de croissance en quantité, • Peu de problèmes de vascularisation, • Peu de problèmes infectieux. Car l’escarre constitue une des atteintes de la peau touchant absolument tous les âges de la vie. Nous en rappellerons tout d’abord une définition, la classification des stades d’évolution, les facteurs favorisants de types intrinsèques et extrinsèques, les localisations les plus courantes chez l’enfant, les traitements s’y rapportant. Définition de l’Escarre (rappel) : Une escarre est une nécrose tissulaire due à une ischémie par compression artériolaire prolongée entre deux plans durs à caractère évolutif. Classification Les âges de la cicatrisation, en pédiatrie Cicatrisation fœtale • Rapidité et meilleure qualité, • Absence de fibrose, • Faiblesse de la phase inflammatoire - sousdéveloppement du système immunitaire fœtal, • Fibronectine en plus grande quantité, • Acide hyaluronique, • Organisation cohérente et rapide du collagène. De 0 à 6 mois, certains facteurs de la période fœtale persistent, mais on observe particulièrement peu de cicatrices inflammatoires et des délais d’évolution de la plaie et de cicatrisation très courts. santé log – Petite Enfance n° 11 – Décembre/Janvier/Février 2011 31 LIVRES Jean-Tristan Richard Psychologue-psychanalyste/Vincennes Directeur adjoint CAMSP IPP/Paris Les destins du développement L chez l’enfant c Le Pr B. Golse est un pédo-psychiatre et psychanalyste d’enfants, chef de serL vvice à l’hôpital Necker-Enfants Malades à Paris, bien connu. Il est l’auteur de multiples articles et ouvrages et participe régulièrement à moults congrés et m colloques. Ce dernier livre regroupe nombre de ces articles ou interventions. c On ajoutera que son sens de la présentation savamment “vulgarisée” articulant O tthéorie et clinique et son sens de l’humour font de lui un praticien sensible plein de charme. On retrouvera donc ici cette approche toute en nuances pour d concilier l’inné et l’acquis, l’attachement et le pulsionnel, le génétique et le relac ttionnel. Notre auteur montre facilement combien ces polarités ne prédéterminent pas chacune à un destin déjà tout tracé, ni ne s’associent pour en permettre la prédiction. Au contraire, les facteurs endogènes et les facteurs exogènes laissent à chaque être humain en devenir un espace de liberté. Ainsi, B. Golse fustige t-il au passage toutes les dérives pseudo-scientifiques, pseudo-épistémologiques, pseudo-sociales et pseudo-éthiques qui oublient cela. L’ouvrage se compose de trois axes majeurs. Le premier se rapporte à la problématique générale des premières relations du bébé avec son environnement, que ce soit en institution ou dans le cadre familial. Le deuxième aborde le remaniement des expériences infantiles et leurs éventuels débouchés psychopathologiques (violence, dépression, hyperactivité, etc.). Le troisième, enfin, propose quelques réflexions sur les prises en charge thérapeutiques. L’ensemble constitue un véritable traité de psychiatrie psychanalytique des toutes premières années et se conclut par une interrogation sur le propre devenir de la pédo-psychiatrie à l’heure du DSM IV, du PMSI, des lobbyings des neuro-cognitivistes et des industries pharmaceutiques, le tout sur fond d’évaluations, de restrictions budgétaires et de performances. Une sorte de somme engagée, renouant avec le S. Freud défendant l’idée que notre histoire est toujours une histoire après-coup et reconstruite, qui se ré-écrit incessamment, au fil des évolutions plus ou moins favorables des rencontres permises par l’existence et du contexte social et culturel. • • Pr GOLSE B. - Ed. Erès, 2010, 286 p., 25 euros Périodes sensibles dans le développement psychomoteur de l’enfant de 0 à 3 ans On le sait, le développement psychomoteur du jeune enfant est un indicateur précieux de sa croissance harmonieuse. Qu’il s’agisse d’un bébé né à terme ou d’un prématuré, le retard ou le trouble de ce développement de la sphère motrice, laquelle mobilise aussi bien les données neurologiques que relationnelles, vaut comme un “clignotant” de l’ensemble de la construction psychique de l’enfant. Cet ouvrage co-écrit par un médecin de rééducation fonctionnelle et un pédo-psychiatre se propose de le démontrer. Il expose d’abord les étapes normales de cette construction, quasiment mois après mois, en faisant référence aux neurophysiologistes comme aux psychiatres et psychanalystes, avant de présenter les avatars de la psychopathologie. Ainsi se nourrit-il autant d’illustrations cliniques que de liens avec les thèses de M. Klein ou A. Grenier, D.W. Winnicott ou A. Bullinger. Il ne s’agit pas seulement des potentialités ou difficultés de l’enfant, mais aussi de ses relations avec ses parents. Au final, il s’avère que l’acquisition de la tenue de la tête, de la station assise et de la marche constituent autant d’étapes sensibles impliquant l’ensemble de la personnalité de l’enfant en devenir et contribuant à la constitution non seulement de son image du corps mais aussi de son identité et de sa manière de vivre. Bref, nous tenons là un ouvrage nécessaire à tous les praticiens de la petite enfance soucieux d’harmoniser la dimension organique avec la dimension affective. Peut-être conduira t-il un jour à ce que la psychomotricité soit reconnue et remboursée par la Sécurité Sociale ! • • VASSEUR R. et DELION P. - Ed. Erès, coll. 1001 BB, 2010, 204 p., 12 euros santé log – Petite Enfance n° 11 – Décembre/Janvier/Février 2011 33