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Le BEA en vue de la restauration,
de la réparation pu de la mise
en valeur d'un bien immobilier
L'articlell de la loi n°2010-853 du 23 juillet 2010 relative aux réseaux consulaires,
au commerce, à l'artisanat et aux services a inséré dans le code général de la
propriété des personnes publiques un nouvel article L. 2341-1 permettant à l'État
et aux chambres consulaires de conclure un bail emphytéotique administratif en vue
de la restauration, de la réparation ou de la mise en valeur d'un bien immobilier
leur appartenant.
Si ce nouveau bail emphytéotique administratif étend les possibilités d'octroi
de droits réels aux occupants du domaine public, ses modalités de passation risquent
d'en limiter l'attrait.
Auteurs
Philippe S. Hansen, avocat a la Cour, SCP UGGC
& Associes,
Nicolas Ferré, juriste, SCP UGGC & Associés
Référence
Loi n°2010 853 du 23 juillet 2010 relative aux
réseaux consulaires, au commerce, à
l'artisanat et aux services
Mots clés
BEA Objet Nature Conditions du
recours Régime Ouvrage immobilier
Travaux Commande publique Droit
d'occupation Droit immobilier
Requalification Procédure de passation
Mise en concurrence
L
a loi n°88-13 du 5 janvier 1988(1) a permis aux collectivités
territoriales de conclure un bail emphytéotique, dit admi-
nistratif, (BEA) sur un bien immobilier leur appartenant,
en vue de l'accomplissement d'une mission de service public
ou de la réalisation d'une opération d'intérêt général relevant
de leur compétence.
Si l'application du bail emphytéotique au domaine des collec-
tivités territoriales pouvait paraître novatrice, il ne s'agissait en
réalité que d'un retour à l'espnt initial du bail emphytéotique,
qui avait été créé à l'époque de la Rome antique121 pour la mise
en culture des dépendances des terres des municipes et du
domaine impérial, permettant ainsi d'assurer l'approvisionne-
ment alimentaire13'. Ce n'est que plus tard, dans la seconde moi-
tié du V siècle, que l'emphytéose fut utilisée entre particuliers,
ce qui devint l'usage courant à l'époque féodale.
Malgré cette légitimité historique, on aurait pu croire que le
BEA était voué à la disparition, tant le régime des autorisations
d'occupation temporaires constitutives de droits réels, créé par
la loi n° 94-631 du 25 juillet 1994(4) et étendu au domaine public
des collectivités territoriales par l'ordonnance n° 2006-640 du
21 avril 2006 relative à la partie législative du code général de la
propriété des personnes publiques (CG3P), offre les avantages
du BEA (conférer un droit réel à l'occupant), sans en présenter
les inconvénients (champ d'application restreint, etc ).
Pourtant, il n'en est rien. Bien au contraire, le législateur n'a eu
de cesse de multiplier les possibilités de recours au BEA, aussi
Art. L. 2341-1-1 du CG3P
« Un bien immobilier appartenant à l'État ou à un établissement public mentionné au
onzième alinéa de l'article L 710-1 du code de commerce, au premier alinéa de
l'article 5-1 du code de l'artisanat ou à larticle L 510-1 du code rural et de la pêche
maritime peut faire l'objet d'un bail emphytéotique prévu à l'article L. 451-1 du
même code en vue de sa restauration de sa réparation ou de sa mise en valeur Ce
bail est dénomme bail emphytéotique administratif »
(1) Art. 3 de la loi n°88 13 du Sjanvier 1988 d'amélioration de la
décentralisation
(2) Des auteurs relèvent même que certains contrats conclus dans la Grèce
antique possédaient déjà les caractéristiques tlu bail emphytéotique En ce
sens Etude de l'emphytéose en Droit Romain et en Droit Français,
L Lapasset, Thèse pour le Doctorat, 1900, p 46 et s
(I) Sur rps Qupsftons Le droit civil explique suivant I ordre dps article** du
code civil, De l'échange et du louage, M Troplong, Tome premier, 1852, p 116
et s.
(4) Lot n°94-631 du 25juillet 1994 complétant le code du domaine de l'État et
relative à la constitution de droits réels sur le domaine public
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bien sur le domaine des collectivités territoriales'5* que sur le
domaine de l'État et de ses établissements publics16'
Ainsi, loin de disparaître, le BEA semble encore en plein essor
L'article 11 de la loi n°2010-853 du 23 juillet 2010 relative aux
réseaux consulaires, au commerce, à l'artisanat et aux ser-
vices s'mscnt dans cette lignée, en permettant à l'État et aux
chambres consulaires de conclure un bail emphytéotique admi-
nistratif en vue de la restauration, de la réparation ou de la mise
en valeur d'un bien immobilier leur appartenant
L'objet de ce nouveau BEA est donc en grande partie de
faire participer des investisseurs privés à la réhabilitation du
domaine En cela, il s'mscnt dans un environnement juridique
déjà marqué par l'existence d'autres types de contrats, tels
les marchés publics de travaux ou, peut-être plus encore, les
concessions créées par l'ordonnance n°2009-864 du 15 juillet
2009 relative aux contrats de concession de travaux publics
Cependant, ce nouveau régime présente, notamment en raison
de l'objet en vue duquel un tel bail peut être consenti, quelques
particularités par rapport aux baux emphytéotiques existant
jusqu'alors (I) Par ailleurs, en raison précisément de son objet,
on peut s'interroger sur sa réelle nature et sur la question de
savoir s'il n'entre pas, par essence, dans le champ de la com-
mande publique (II)
I. Le régime du BEA de l'article L 2341-1
duCGSP ' r'"
Comme les autres BEA, celui prévu par le nouvel article
L 2341-1 du CG3P a un objet précisément délimité, mais qui
recouvre des types de travaux qui peuvent être d'une faible
ampleur (A), de sorte que l'on peut s'interroger sur l'étendue et
l'objet des droits réels conférés au preneur (B)
A) L'objet du BEA de l'article L 2341-1 du code général de
la propriété des personnes publiques
L'article 11 de la loi du 23 juillet 2010 prévoit qu'un bien immo-
bilier appartenant à l'État ou à une chambre consulaire peut
faire l'objet d'un BEA en vue de sa restauration, de sa répara-
tion ou de sa mise en valeur La loi fixe ainsi trois conditions
alternatives justifiant le recours à ce contrat
Contrairement à une opinion répandue, le bail emphytéotique
de droit commun (du code rural et de la pêche mantime) n'im-
phque pas obligatoirement une mise en valeur du fonds171 H ne
s'agit là que d'une simple faculté, que les parties transforment
généralement en obligation contractuelle
Pourtant, le législateur semble avoir énge cette obligation de
mise en valeur du fonds en condition de la conclusion d'un
bail emphytéotique administratif Ainsi, si l'article 3 de la loi
du 5 janvier 1988 codifiée dans le code général des collectivités
territoriales n'impose pas formellement d'obligation de mise en
valeur, son objet l'accomplissement d'une mission de service
public ou la réalisation d'une opération d'intérêt général et
la philosophie même du dispositif supposent, en réalité, la réa-
lisation de travaux par le preneur L'arrêt SA Sofap-Mangnan
Immobilier181 en est une illustration, puisqu'il admet la possibi-
lité d'un bail emphytéotique administratif pour « la réalisation
d'un ouvrage mis à la disposition de la collectivité elle-même »
De même, s'agissant des autres BEA mentionnés à l'article
L 1311-2 du code général des collectivités territonales, ainsi
que de celui de l'article 7 de la loi du 17 février 2009 précité,
la mise en valeur constitue explicitement une condition de la
conclusion même du contrat (bail emphytéotique administra-
tif en vue de la réalisation d'enceintes sportives, de logements
sociaux etc )
Le BEA créé par l'article 11 de la loi du 23 juillet 2010 s'mscnt
pleinement dans cette optique En effet, ce BEA ne peut être
conclu que dans trois hypothèses soit pour la restauration d'un
bien immobilier, soit en vue de sa réparation, soit en vue de sa
mise en valeur Certes les travaux en cause peuvent être rela-
tivement limités dans leur nature ce qui ne préjuge pas de
leur coût, qui peut être important et ainsi justifier le recours à
un contrat constitutif de droits réels, mais il reste que leur
réalisation est quasi impérative1"
En revanche, le nouveau dispositif se distingue de la conven-
tion d'occupation du domaine public constitutive de droits réels
issue de la loi du 25 juillet 1994 en tant qu'il permet la réalisa-
tion de travaux ne nécessitant pas la construction d'ouvrages
nouveaux, alors que les autorisations d'occupation temporaires
constitutives de droits réels semblent réservées aux seuls pro-
jets impliquant la construction d'ouvrages immobiliers
Reste alors à déterminer ce que recouvre la notion de «restau-
ration, réparation et mise en valeur», qui n'a pas été précisée
durant l'examen du texte ïï appartiendra au juge de vénfier si
les conditions de recours au contrat sont remplies Cela étant,
compte tenu du caractère assez vague de ces notions, le recours
à ce nouveau BEA sera probablement admis de façons très
large
B) L'objet du droit réel consenti au preneur
L'intérêt pnncipal du BEA est de conférer un droit réel au pre-
neur, ce qui implique que ce dernier bénéficie d'un droit d'oc-
cupation (droit de superficie) sur la dépendance domaniale,
mais aussi et surtout d'un droit de propnété sur les ouvrages
immobiliers qu'il réalise
Dans le cas particulier du BEA créé par la loi du 23 juillet 2010,
on peut s'interroger sur l'objet du droit réel consenti au preneur
En effet, ainsi que nous l'avons rappelé, les travaux susceptibles
d'être réalisés dans le cadre de ce contrat peuvent être limités
dans leur nature des travaux de restauration ou de réparation
pouvant n'entraîner aucune construction nouvelle et on peut
donc s'interroger sur le point de savoir si de tels travaux peu-
vent, en eux-mêmes, constituer le support d'un droit réel ou, à
défaut, si le droit de propnété conféré au preneur peut s'étendre
(5) En vue par exemple de la réalisation de projets immobiliers lies aux
besoins de ta justice, de la police ou de la gendarmerie nationales, des
établissements publics de santé des services départementaux d incendie et de
secours de la réalisation d édifices du culte ou encore de la réalisation
d enceintes sportives
(6) H s'aqit ici de faciliter la construction de logements sociaux cf Art 7 de
la loi n°2ÔQ9 179 du 17février 2009 pour I accélération des programmes de
construction et d investissement publics et prives
(7) Cf par exemple (Cass 3' nv 11 juin 1986 bull civ IIIn°93)
(8) CE sect 25 février 1994 SA Sofap-Mangnan Immobilier req n'144641
et145406
(9) Sauf à considérer que la mise en valeur ne nécessiterait aucuns travaux,
mais on ne voit guère alors I intérêt de recourir a un contrat constitutif de
droits réels
(10) Cf en ce sens I article L 2122 6 al I du code général de la propnété des
personnes publiques, qui dispose que «le titulaire d'une autorisation
d occupation temporaire du domaine public de I Etat a [ ] un droit réel sur
les ouvrages constructions et installations de caractère immobilier au il
réalise [ ]»
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aux ouvrages, objets des travaux, déjà construits et relevant du
domaine public
En ce qui concerne le bail emphytéotique de droit commun,
nen ne semble s'opposer a ce que le preneur à bail dispose d'un
droit de propriété sur les biens déjà construits'11' À l'inverse, la
possibilité pour le preneur d'un BEA d'être propnétaire des
ouvrages existants à la date de la conclusion du contrat paraît
exclue car une telle possibilité se heurterait au principe
d'maliénabilite du domaine public, de sorte que le droit de
propriété sur les ouvrages ne peut porter que sur les construc-
tions qui seront édifiées par lui pendant la durée du bail
Cette interprétation semble confirmée par les dispositions
applicables aux autorisations d'occupation du domaine public
constitutives de droits réels et, plus particulièrement, par l'ar-
ticle L 2122-6 du code général de la propnété des personnes
publiques, qui précise que le titulaire de l'autorisation a un
droit réel sur « sur les ouvrages, constructions et installations
de caractère immobilier qu'il réalise »
Pour autant, l'absence de droit de propnété sur les construc-
tions existantes paraît sans incidence sur les capacités de
garantie bancaire du preneur du bail En effet, la possibilité
d'hypothèque du droit réel porte, en réalité, sur le titre lui-même
et non sur les ouvrages Ce serait alors ici le titre qui posséderait
une valeur vénale propre, en tant qu'il confère un droit d'occu-
pation sur la dépendance domaniale ainsi que, le cas échéant,
sur les constructions réalisées par le titulaire1121
II. Les modalités de passation du bail
emphytéotique administratif de l'article
L 2341-1 du CG3P
Les dispositions de l'article 11 de la loi du 23 juillet 2010 ne pré-
voient aucune modalité particulière de passation de ce nouveau
contrat Pour autant, on aurait tort de penser que la conclusion
d'un tel contrat serait exonérée de toute procédure préalable de
mise en concurrence
En effet il apparaît aujourd'hui nécessaire de faire précéder
la passation des conventions d'occupation du domaine public
dont les baux emphytéotiques administratifs d'une pro-
cédure de publicité et de mise en concurrence des occupants
potentiels du domaine (A)
Mais, plus encore, le BEA créé par la loi du 23 juillet 2010
encourt, par son objet même, un sérieux risque de requalrnca-
tion en contrat relevant de la commande publique (B)
A) La mise en concurrence des titres d'occupation
du domaine public
Si, à ce jour, aucun texte n'encadre la passation des autorisa-
tions d'occupation du domaine public, pour les soumettre à une
procédure préalable de publicité ou de mise en concurrence, la
jurisprudence s'onente vers une soumission large de la passa-
tion de ces contrats à une telle procédure
C'est ainsi que le tribunal administratif de Nîmes a, le 24 janvier
2008, pour la première fois, jugé qu'«une convention d'occupa
ton du domaine public n'est pas exclue du champ d'applica-
tion des règles fondamentales posées par le traite de l'Union
européenne qui soumettent l'ensemble des contrats conclus
par les pouvoirs adjudicateurs aux obligations minimales de
publicité et de transparence propres à assurer l'égalité d'accès
à ces contrats» et que, par conséquent, «une telle convention
ne peut être conclue sans formalité préalable de publicité et de
mise en concurrence »(13)
C'est le même raisonnement qu'a récemment suivi le tribu-
nal administratif de Versailles, concernant les baux emphy-
téotiques administratifs prévus par l'article L 1311-2 du code
général des collectivités territoriales Dans ses conclusions sur
ce jugement1"1, le rapporteur public relevait en effet, que «le
droit de l'Union est essentiellement un droit économique qui,
visant à assurer le libre jeu de la concurrence au sein du marché
intérieur, impose aux personnes publiques lorsqu'elles inter-
viennent sur ce marché le respect de principes destinés à pré-
server ce libre jeu Le fondement de ces pnncipes réside dans
l'article 18 (ex-art 12 TCE) du traité sur le fonctionnement de
l'Union européenne (TFUE, entré en vigueur le I" décembre
2009) qui interdit 'toute discrimination exercée en raison de la
nationalité ' », et que « cet article suffit, à notre sens, à condam-
ner toute intervention publique dans l'économie qui prendrait
la forme d'une commande passée à une entreprise ou d'un droit
économique conféré a une entreprise et qui ne serait pas pré-
cédée d'un mmrmum de publicité»
L'idée sous-jacente sur laquelle paraissent s'appuyer ces juris-
prudences bien que celles-ci n'y fassent pas référence directe
semble être que l'attribution d'une ressource, susceptible
d'intéresser plusieurs opérateurs économiques, par une per-
sonne publique doit faire l'objet d'une procédure préalable de
publicité et de mise en concurrence
Cette idée, qui trouve son origine dans le concept des ressources
essentielles issu du droit de la concurrence, est aujourd'hui de
plus en plus prégnante ïï suffit, pour s'en convaincre, de se réfé-
rer aux dispositions de l'article 12 de la directive n"2006/123/
CE relative aux services dans le marché intérieur, qui prévoit
que «lorsque le nombre d'autonsations disponibles pour une
activité donnée est limité en raison de la rareté des ressources
naturelles ou des capacités techniques utilisables, les États
membres appliquent une procédure de sélection entre les can-
didats potentiels qui prévoit toutes les garanties d'impartialité
et de transparence, notamment la publicité adéquate de l'ou-
verture de la procédure, de son déroulement et de sa clôture »
Certes, ce texte ne vise pas directement les autorisations d'occu-
pation du domaine public, mais il permet, par analogie, de consi-
dérer que la mise à disposition d'un bien nécessaire à l'exercice
11I) La doctrine rappelle ainsi que «le bailleur reste propriétaire sauf
stipulation contraire des constructions existantes » (JunsCtasseur Bail a
Loyer fasc 630 bail a loyer n°105) ce gui a contrario lui donne la possibilité
d en confier Lonlractuellement la propriété au preneur
(12) En ce sens s agissant des conventions d occupaùon constitutives de droit
réel les auteurs du code général de la propriété des personnes publiques
soulignaient que «I occupant na[ ] aucun droit sur le fvnils lui même ilria
qu un droit superficiel et c est ce droit confère par le titre qui a une valeur
économique
pendant
la
durée
du
titre
et qui
constitue
une
garantie
a
offrir
»
(Chr Maugue et G Bachelier Genèse et présentation du Code général de la
propriété de-; personnes publiques AJDA2006 p 1073)
(13) TA Nimes 24 janvier 2008 Ste des trains touristiques G Eisenreich req
n°0620809 AJDA200S p 2172, note] D Dreyfus Sur cette question voir
aussi Ch Vautra Schwartz «La publicité et la mise en concurrence dans la
délivrance des titres d occupation domaniale » AJDA 2009 p 568 On notera
que ce jugement vient d être annule par la cour administrative d appel de
Marseille, en tant que la cour considère que la décision de la personne
publique de soumettre la passation d'une convention d occupation constitue
un acte préparatoire (CAA, Marseille 6 septembre 2010 SARL Société des
trains touristiques G Eisenreich req 08MA01997) Ce faisant maigre
I annulation on peut considérer que le principe pose par le jugement du TA de
Nîmes n est pas remis en cause
(14) J Sorm concl sur TA Versailles, 5 janvier 2010 précité. AJDA 2010,
p!196
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d'une activité et qui constitue une ressource rare doit faire I ob-
jet d'une procédure de mise en concurrence préalable C est
d'ailleurs le raisonnement sous-tendant I avis du 21 octobre
2004 de I Autorité de la concurrence relatif a I occupation du
domaine public pour la distribution de journaux gratuits051, qui
avait déjà suggère la mise en œuvre de procédures de mise en
concurrence avant I attribution de certaines autorisations d oc-
cupation domaniales
Ces bases bien que non textuelles justifient a elles seules une
mise en concurrence du nouveau bail emphytéotique crée par
I article L 2341-1 du CG3P
Mais une procédure ad hoc de passation d un tel contrat pour
rait ne pas suffire En effet par son objet, ce BEA paraît suscep
tible d entrer dans le champ de la commande publique et par
suite d être soumis aux procédures de passation applicables a
ce type de contrats
B) La requalification du bail emphytéotique
ïï est a peine besoin de rappeler que le juge administratif n-
site pas a requalifier les conventions d occupation lorsqu elles
présentent par ailleurs les caractéristiques d un contrat entrant
dans le champ du droit de la commande publique
Or on peut se demander si ce nouveau BEA en tant qu il a pour
objet la restauration réparation ou la mise en valeur d un bien
immobilier appartenant a I Etat ou a une chambre consulaire
n'est pas susceptible d être requalme soit en marche public ou
en concession de travaux publics soit en délégation de service
public
S agissant du nsque de requalification en marche public et
en concession de travaux publics on rappellera que ces deux
contrats ont en commun de porter sur des travaux repondant a
un besoin d un pouvoir adjudicateur Or on sait que sous I in-
fluence de la Cour de justice de I Union européenne le Conseil
d Etat tend a apprécier de façon objective la notion de besoin
sans qu il ne soit nécessaire d identifier une réelle commande
de la personne publique Ainsi dans son arrêt d Assemblée
Jean-Claude Decaux'161, le Conseil d Etat considère en ce qui
concerne les contrats de mobilier urbain qu il y a bien une
«réponse a un besoin» de la commune puisque les éléments
du mobilier urbain concourent a I information et a la protection
des usagers Cette appréciation objective a été confirmée
récemment encore par I arrêt Commune de Saint-Germain
en-Laye'17 dans lequel le Conseil d Etat relevé qu'un contrat
de fortage avait compte tenu des obligations a la charge du
preneur «pour objet de repondre par les travaux demandes au
titulaire a un besoin de la commune en matière de depollution
et d aménagement des parcelles en cause »
On notera que le Tribunal administratif de Pans a justement
requaline en concession de travaux publics un BEA portant sur
la réhabilitation d un ouvrage public la piscine Molitor'181
Ainsi des lors que les travaux portent sur la restauration la
réparation ou la mise en valeur d un bien immobilier opéra
tion qui constitue la condition même du recours au BEA il est
difficile de considérer qu ils ne répondraient pas objectivement
(15) Conseil de la concurrence avis 04 A 19 du 21 octobre 2004 relatif à
I occupation du domaine public pour la distribution de journaux gratuits
RJEP/CJEG 2005 p 144 note P D
(16) CEAss 4 novembre 2005 Société Jean Claude Decaux req n°247299
(17) CE3]iun2009 Commune de Saint Germain en Laye req n°311798
(18) TAPansord 3 février 2009 Société Ken Club n°0900393 Contrats et
marchés puhl comm n°99 note G Fckert
a un besoin de la personne publique d autant que I on imagine
mal que le propriétaire du domaine se désintéresse des condi-
tions de réalisation de ces travaux très particuliers
Ce qui permet de différencier le marche public de travaux de
la concession de travaux publics est le mode de rémunération
de leur titulaire dans un marche public I operateur écono-
mique perçoit une contrepartie financière du pouvoir adjudi-
cateur alors que dans la concession de travaux I operateur se
rémunère via I exploitation de I ouvrage Pour autant la fron-
tière entre ces deux situations est plus tenue qu il n y paraît
puisque le caractère onéreux d un marche public peut résider
dans I abandon d une recette'19' Dans ses conclusions sur I arrêt
Commune de Saint-Germain-en Laye B Dacosta a précisé la
frontière entre ces deux contrats II constate que qu «on pour-
rait il est vrai se demander si le contrat [de fortage] ne s ap-
parenterait pas davantage a une concession de travaux [qu a
un marche public] c est-a dire pour reprendre les termes de
la loi du 3 janvier 1991 a un contrat pour lequel la rémunéra-
tion de I entrepreneur consiste en tout ou partie dans le droit
d exploiter I ouvrage » Pour autant il exclut cette qualification
des lors « cette qualification [de concession de travaux] ne peut
être retenue que lorsque la rémunération provient de I exploi-
tation de I ouvrage objet de la concession Or ici I objet c est la
réalisation de travaux de depollution et d aménagement tandis
que la rémunération provient d une autre activité la vente de
granulats » *•*
Dans le cas du BEA de l'article L 2341 I du code général de la
propriété des personnes publiques il est probable que le pré
neur tirera sa rémunération de revenus directement issus de
I exploitation de I ouvrage objet des travaux réalises par lui Par
suite la qualification de concession de travaux publics nsque de
souvent s imposer emportant par voie de conséquence la sou-
mission de la passation du BEA aux procédures de publicité et
de mise en concurrence prévues par I ordonnance n°2009 864
du 15 juillet 2009 relative aux contrats de concession de travaux
publics et par le décret n°2010 406 du 26 avril 2010 relatif aux
contrats de concession de travaux publics et portant diverses
dispositions en matière de commande publique
S agissant du nsque de requalmcation en convention de délé-
gation de service public il pourrait être envisagée si deux en
teres étaient reunis a savoir la dévolution d un service public
et I ongine de la rémunération du titulaire du contrat qui doit
être tirée substantiellement des résultats de I exploitation de
I ouvrage Or il est possible mais pas indispensable que le
bail ou une convention qui y serait attachée organise les condi
tions d exploitation de I ouvrage et de contrôle de la personne
publique d une manière telle que le juge y identifierait la devo
lution d un service public même si les critères d appréciation
sur cette question sont loin d être stabilises'20'
C est donc a une appréciation circonstanciée que devra se livrer
I Etat ou les chambres consulaires avant de conclure un BEA
issu de la loi du 23 juillet 2010 afin de déterminer si celui-ci
constitue un marche public une concession de travaux publics
une convention de délégation de service public ou s il s agit d un
contrat ayant simplement pour objet la mise a disposition du
domaine ce qui paraît toutefois peu probable
(19) CEAss 4 novembre 2005 Société Jean Claude Decaux précité
(20) Sur ce point voir le contentieux sur la qualification de la convention
d occupation du stade Jean Boum CE 13 janvier 2010 Association Paris
Jean Boum req n°329576 et CAA Pans 12 mars 2010 Association Paris
Jean Boum, req n°09PA01920 09PA02632 et 09PA03008
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