Environnement Eviter la crise alimentaire, à portée de main Nourrir l’humanité qui augmente sans cesse en respectant l’environnement devient le défi du XXIe siècle e Elena Matías Casacuberta, 1 S 3 Barcelone En 2050, la Terre sera peuplée par 9 milliards d’hommes, soit deux milliards plus qu’actuellement. Toutes ces personnes devront être nourries or selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), il y a un 13% de la population mondiale qui est sous-alimentée. La demande agricole devrait doubler alors que presque toutes les terres arables sont cultivées. Serons-nous capables de faire face à ce grand défi? LES AGROSYSTEMES Un agrosystème implique un flux de matière et un flux d’énergie puisque le produit obtenu (maïs, viande, etc.) est exporté. Il se différencie donc d’un écosystème qui se caractérise par la nonintervention de l’Homme et par un cycle de matière. 2. Élevage intensif de poulets à Floride 3. Une marée verte Culture intensive NOTIONS CLES De plus, l’utilisation d’énergie fossile (carburants) pour la synthèse des intrants, les machines (tracteurs, semoirs, charrues…), le transport, le stockage et empaquetage de la viande de volaille, des œufs, etc., accompagnée de la présence de ruminants dans l’élevage bovin, de lisiers et de fumiers solides entraîne une augmentation de la production de gaz à effet de serre (CO2, CH4, etc.). Il ne faut pas oublier l’importance de l’irrigation puisque les précipitations étant insuffisantes un besoin d’apporter de l’eau existe, par exemple, plus de 50% de l’eau consommée en France est utilisée pour irriguer une partie de ses terres agricoles dont la moitié correspond à un champ de maïs. En même temps, environ un milliard de personnes n’a pas accès à l’eau dans le monde. Cependant, il faut tenir en compte que la place du produit consommé (maïs, œufs ou viande) dans la pyramide de productivité n’est pas la même. Ceci a comme conséquence que consommer de la viande ou un produit végétal n’a pas le même impact écologique : le bilan énergétique et en matière sont plus défavorables pour le premier cas. Dans un champ de maïs, comme celui de Liechtenstein, le producteur primaire (le maïs) transforme de la matière minérale en matière organique à partir du processus de la photosynthèse. Les grains de maïs et les feuilles représentent la production primaire nette (non perdue par respiration), sera exportée puis utilisée par l’Homme pour créer des produits alimentaires (polenta, pop-corn, amidon de maïs…) ou non alimentaires (rouge à lèvres, dentifrices, peinture, colles…) 1. Culture intensive de maïs au Liechtenstein Élevage intensif Dans l’élevage intensif de poulets, la biomasse produite à partir des producteurs primaires (les céréales) est utilisée pour alimenter la volaille. Ces derniers produisent alors de la viande ou bien des œufs. Ces produits seront utilisés pour nourrir la population humaine. · écosystème : ensemble d’espèces (biocénose) présentes dans un milieu définit par ses caractéristiques physico-chimiques (biotope). · agrosystème : écosystème créé et entretenu par l’Homme. · mycorhize : association nutritionnelle souterraine entre les racines d’une plante chlorophyllienne et un champignon bénéficiant réciproquement les deux espèces. Impact sur l’environnement Ces agrosystèmes sont en déséquilibre, puisqu’il y a un flux de matière puisque les grains de maïs, les œufs ou la viande de poulet sont exportés. Ceci entraîne donc l’appauvrissement du sol, puisque les minéraux ne sont pas recyclés. Les agriculteurs se voient obligés à apporter des intrants (eau, engrais et produits phytosanitaires) de façon à maintenir la fertilité de la terre et ses rendements. Toute fois, ceci comporte ses propres conséquences sur l’environnement : une diminution de la biodiversité (insecticides pour éviter la destruction des plantes de maïs), la pollution des nappes phréatiques avec les excès d’engrais et de fertilisants ce qui favorise la prolifération des algues à l’origine des marées vertes toxiques lors de leur décomposition (dégagement ammoniac et hydrogène de sulfure) comme par exemple en Bretagne. © Pour la Science - nº413 - Avril 2012 (Fictif) Environnement LES PRATIQUES ALIMENTAIRES Les pratiques alimentaires des êtres humains peuvent être déterminées par les ressources disponibles mais aussi par les habitudes individuelles et collectives. Elles ont d’importantes conséquences sur l’environnement. Les produits hors saison Dans les pays développés, les consommateurs sont habitués à avoir une vaste gamme d’aliments disponibles quelle que soit la saison. Cependant, si on consomme une pomme entre août et octobre, elle peut avoir été produite en France, alors que si on la consomme entre février et avril, elle peut provenir du Chili. Dans ce dernier cas, la consommation d’énergie et l’émission de gaz à effet de serre est plus importante. Il faut donc favoriser les marchés locaux et éviter la consommation de fruits et légumes hors saison. La viande et les produits laitiers Actuellement, dans les pays occidentaux, la consommation en viande est en moyenne de 80 kg par an, elle est de 95 kg pour France. Or le bétail consomme des céréales qui auraient pu être utilisés pour alimenter d’autres humains, 350 millions d’hectares de cultures céréalières sont utilisées pour nourrir les animaux. De plus, les émissions de gaz à effet de serre sont très élevées pour la production d’un kg de viande de bœuf, de mouton mais surtout d’agneau de lait et de veau. Besoins Émissions Viandes Céréales (en kg) Eau (en litres) Gaz à effet de serre* Poulet 2,3 3 900 0,5 Porc 6 4 800 1,0 Agneau 6 10 000 10,5 Bœuf 15 13 500 4,5 *en kg équivalent carbone (unité qui reflète la quantité de carbone dégagée par les gaz à effet de serre) Le gaspillage Pratiques culturales Dans le pays développés, 30% de la nourriture est jetée surtout dans les poubelles des restaurants et des consommateurs. Il faut donc éviter ce gaspillage en réduisant la portion, souvent trop grande, de nourriture par assiette et faisant attention lors des courses. Le système de culture associée, consistant à cultiver plusieurs espèces végétales sur la même parcelle, permet, dans le cas du blé et du trèfle, de piéger l’azote de l’air de façon à le transformer en azote minéral qui sera utilisé par le blé. Les bandes enherbées en bordure d’un cours d’eau limitent le ruisselement d’engrais vers celui-ci et donc diminuent les risques de pollution du cours d’eau. Les produits congelés et les plats préparés Ces produits utilisent une grande quantité d’énergie lors de leur fabrication et de leur conservation (ils doivent se maintenir frais). De plus, l’utilisation de plastique pour leurs emballages nui l’environnement. Comment peux-je aider à relever ce défi ? - Manger moins de viande - Ne pas consommer des fruits et légumes hors saison - Faire attention aux produits que l’on achète (biologiques, respectueux avec l’environnement…) - Éviter le gaspillage d’eau et d’aliments LE DEFI DU DEVELOPPEMENT DURABLE De façon à faire face à la vulnérabilité des ressources, comme l’eau et les terres arables, qui permettent de fabriquer la biomasse destinée à nourrir l’Homme, de nombreuses recherches ont eu lieu. Elles permettraient d’améliorer la production végétale sans nuire l’environnement et de préserver la biodiversité Des techniques alternatives Suite à plusieurs comparaisons entre différentes techniques, il a été mis en évidence qu’une réduction du labour limiterait l’entrée d’intrants puisqu’elle permettrait le retour de plus de matière organique dans le sol. Cependant les rendements resteraient plus faibles. L’irrigation au goutte-à-goutte permet une meilleure utilisation de l’eau que la pulvérisation dans l’air puisque, dans ce dernier cas, une importante partie de l’eau s’évapore. 4. Culture associée (maïs et soja) Utilisation de la biodiversité génétique et des interactions entre organismes Les généticiens travaillent sur la mise au point de variétés plus productives et plus rustiques des différents organismes de façon à augmenter leur tolérance aux parasites et aux « stress » comme la sécheresse. Il s’agit des OGM (organismes génétiquement modifiés). Le mycorhize permet une augmentation du rendement et un meilleur des sels minéraux du sol. Ces deux faits permettent de limiter l’utilisation d’intrants, d’eau et l’appauvrissement du sol. De façon à faire face au défi et à éviter que l’humanité soit incapable de se nourrir, nous devons adapter nos pratiques alimentaires et transformer les pratiques culturales utilisées en cherchant à obtenir les meilleurs rendements possibles en respectant l’environnement, sans surexploiter le sol et les ressources disponibles, comme l’eau et les terres arables, qui sont limitées. Éviter la mort de milliers de personnes, la sous-alimentation d’autres se trouve à portée de main. © Pour la Science - nº413 - Avril 2012 (Fictif)