E
n dehors du Jap o n , la myo c a rd i o p a thie hy p e rt r o-
phique apicale est rare : elle représente, dans le reste
du monde, moins de 1 % des card i o p a thies hy p e r -
t rophiques explorées. Po u rt a n t , ses cri t è res diagnostiques se sont
é l a r gis avec le développement des techniques d’image ri e,ce qui
a conduit à distinguer les fo r mes dites “ a s i at i q u e s ” , ra r e s , r é p o n-
dant à la définition princeps, des formes “non asiatiques”, plus
fréquentes. Nous rap p o r tons ici l’observation d’une fo rm e
extrême de card i o p athie hy p e rt r ophique de type “ a s i at i q u e ” ch e z
une européenne.
OBSERVATION
Madame B., 79 ans, sans antécédent, est hospitalisée pour dys-
pnée d’effort et douleurs thoraciques. La dyspnée, qui s’aggrave
depuis quelques mois, est invalidante (classe III de la New York
H e a rt A s s o c i ati on). Les douleurs thoraciques sont évo c at ri c e s
d’un angor d’effo rt. L’ examen physique est dominé par des signes
d’insuffisance cardiaque globale à prédominance droite ; l’aus-
cultation cardiaque est normale. L’électrocardiogramme montre
une augmentation modérée des voltages de QRS,et des ondes T
négatives et amples dans les dérivations DI,AVL, DII, DIII, AVF
et de V3 à V6.
L’écho-doppler cardiaque est difficile en raison de la faible écho-
génicité de la patiente. Il suggère le diagnostic de myocardiopa-
thie hypertrophique ventriculaire gauche apicale :l’épaisseur des
parois myocardiques, normale dans la partie basale du ventricule
ga u ch e,augmente dans sa moitié apicale ( fi g u re 1). On enregi s t re
une obstruction médioventriculaire, avec un gradient maximal à
6 mmHg. Il n’y a ni obstruction sous-aortique ni Systolic Ante-
rior Motion (SAM). La fonction systolique ventriculaire gauche
est normale.
L’imagerie par résonance magnétique (IRM) cardiaque confirme
le siège de l’hypertrophie à la jonction tiers moyen-tiers apical
du ventricule gauche. À ce niveau, la cavité ventriculaire est vir-
tuelle en systole. Au niveau du tiers basal du ventricule gauche,
toutes les parois ont une épaisseur normale ; il n’y a ni bourrelet
s e ptal sous-aortique ni SAM. L’ exa men met en évidence la
s é q u e s t r ation d’un petit volume sanguin à l’ap ex , liée à son ex cl u-
sion complète en systole (figure 2).
À l’angi ographie ve n t ri c u l a i re ga u che ( fi g u re 3), l’aspect de car-
d i o m yo p a thie hy p e r t r ophique apicale est cari c a t u ra l , ave c
l’image en “as de pique” en diastole et l’exclusion complète de
la pointe en systole ; cet examen identifie,comme l’IRM, une
s é q u e s t r ation de produit de contraste à l’ap ex. Il n’y a pas de
fuite mitrale. La sonde Pigtail ventriculaire gauche ne parvient
pas à l’ap ex du fait de l’obstruction médiove n t ri c u l a i re et le re t ra i t
ne met pas en évidence d’obstruction sous-aortique. La corona-
rographie est normale.
L’évolution clinique est simple après traitement déplétif et majo-
ration du traitement bêtabl o q u a n t : les signes congestifs et les
douleurs angineuses s’amendent. À long terme,la patiente reste
cliniquement stable,sans symptôme invalidant ni récidive d’in-
suffisance cardiaque.
Myocardiopathie hypertrophique apicale
●
D. Himbert*, A. Cachier*, V. Huart**, P. Berdah*
*Département de cardiologie, hôpital Bichat, AP-HP, Paris.
* Service de radiologie, hôpital Bichat, AP-HP, Paris.
C
A S C L I N I Q U E
La Lettre du Cardiologue - n° 375 - mai 2004
23
Figure 1. Écho-doppler cardiaque par voie transthoracique, incidence
parasternale grand axe, en diastole : augmentation abrupte de l’épais-
seur des parois septale et inférieure vers la moitié apicale du ventricule
gauche, avec effacement de la cavité ventriculaire (flèche).