FICHE PRATIQUE ---------- Législation La Loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge R. Gourevitch II existe en France une législation encadrant les modalités des soins apportés aux malades mentaux depuis 1838, et celle-ci n’avait pas été révisée jusqu’en 1990. La Loi du 5 juillet 2011 relative aux soins psychiatriques a pour ambition de tenir compte à la fois de l’évolution des pratiques et des décisions du Conseil Constitutionnel qui avait déclaré inconstitutionnelles certaines dispositions de la Loi du 27 juin 1990 dont elle porte réforme. Elle est entrée en vigueur le 1er août 2011. Les deux principales nouveautés concernent l’instauration d’un contrôle systématique par le juge, et la possibilité de mettre en place des soins contraints hors du seul cadre de l’hospitalisation. Bien sûr les soins libres sont et demeurent la règle en psychiatrie comme dans toute démarche médicale, à l’hôpital comme en consultation. Cependant dans certains cas, la maladie altère le jugement et empêche le consentement du patient, de sorte qu’il devient nécessaire d’imposer des soins à une personne qui ne les souhaite pas. Il existe désormais trois types distincts de soins sous contrainte pour faire face à ces situations. Dans tous les cas l’état de la personne concernée doit être examiné et faire l’objet d’un ou deux certificats initiaux rédigés par des médecins, psychiatres ou non : Soins psychiatriques sur décision du représentant de l’état (SPDRE) en cas de trouble compromettant l’ordre public ou la sûreté des personnes : au vu d’un certificat médical circonstancié détaillant les troubles et concluant à la nécessité d’une telle mesure, c’est le Préfet - à Paris le Préfet de Police - qui prend un arrêté ordonnant l’admission, et en cas d’urgence le maire de la commune peut prendre un arrêté provisoire. La Fondation Pierre Deniker est une fondation de recherche reconnue d'utilité publique créée en 2007 qui a pour objet de favoriser et soutenir des programmes de recherche et de prévention dans le domaine de la santé mentale. FICHE PRATIQUE ---------- Législation Soins psychiatriques à la demande d’un tiers (SPDT) pour les patients dont les troubles mentaux rendent impossible le consentement et qui nécessitent pourtant des soins immédiats et une surveillance constante, ou une « surveillance régulière justifiant une prise en charge sous une autre forme qu’une hospitalisation complète » : l’entourage (membre de la famille, parfois tuteur ou curateur, en tout cas personne justifiant de l’existence de relations durables avec le patient antérieurement à la demande et lui donnant qualité pour agir dans l’intérêt de celui-ci) rédige une demande, laquelle, assortie de deux certificats médicaux circonstanciés (un seul en cas d’urgence) et datant de moins de 15 jours, permet de faire prononcer l’admission par le directeur de l’établissement d’accueil. Soins psychiatriques en cas de péril imminent (SPPI) lorsqu’il n’y pas de possibilité de solliciter un tiers et qu’il existe pourtant un péril imminent pour la santé du patient : le directeur peut prononcer l’admission au vu d’un seul certificat, rédigé obligatoirement par un médecin extérieur à l’établissement d’accueil. L’état mental du patient admis sous contrainte et ainsi la nécessité de maintenir ou non la mesure sont obligatoirement réévalués, certificat à l’appui, par un psychiatre de l’établissement d’accueil dans les 24 heures (avec en outre un examen physique complet qui devient expressément obligatoire) et dans les 72 heures. Au bout de 72 heures d’hospitalisation complète (durée minimale de la période initiale d’observation et de soins qui se passe obligatoirement à l’hôpital) il est maintenant possible d’imposer des soins sous une forme alternative appelée « programme de soins » et qui peut comporter hospitalisation séquentielle, soins ambulatoires voire à domicile, délivrance d’un traitement médicamenteux… Ce sont ainsi les soins et non l’hospitalisation qui sont désormais imposés : ainsi l’a voulu le législateur, qui laisse aux psychiatres la tâche de déterminer les modalités de la prise en charge qu’il faut administrer. Ces programmes de soins peuvent être modifiés à tout moment en fonction de l’évolution de l’état clinique. En cas de non-respect de leurs modalités susceptible d’entraîner une altération La Fondation Pierre Deniker est une fondation de recherche reconnue d'utilité publique créée en 2007 qui a pour objet de favoriser et soutenir des programmes de recherche et de prévention dans le domaine de la santé mentale. FICHE PRATIQUE ---------- Législation de l’état, diverses mesures peuvent être envisagées jusqu’à la réintégration en hospitalisation complète. Tout au long de la prise en charge du patient, que celle-ci prenne la forme d’une hospitalisation complète ou d’un programme de soins, des certificats médicaux sont exigés, qui doivent se prononcer sur le bien-fondé de la poursuite de la mesure en cours : entre le 5ème et le 8ème jour après l’admission, puis chaque mois. Le cas échéant, au bout d’un an d’hospitalisation complète continue, le maintien des soins est subordonné à l’avis d’un collège de professionnels. A tout moment, la mesure peut prendre fin pour motif médical si l’évolution le permet : en cas de SPDT ou de SPPI, un certificat atteste de l’évolution favorable autorisant l’abrogation ; en cas de SPDRE le certificat médical doit être suivi d’un arrêté préfectoral – et dans ce dernier cas s’il y a désaccord entre préfet et psychiatre, une procédure est prévue allant d’un deuxième avis médical jusqu’à la saisine du JLD. Il existe en outre des dispositions spécifiques pour les patients admis sur décision du représentant de l’état, séjournant ou ayant séjourné au moins un an en UMD (Unité pour Malades Difficiles), et pour ceux étant hospitalisés à la suite d’une décision d’irresponsabilité pénale ou ayant fait l’objet d’une telle mesure moins de 10 ans auparavant : dans ces cas, « l’allègement » de l’hospitalisation complète au profit d’un programme de soins doit faire l’objet d’un avis d’un collège de professionnels, tout comme la décision de mainlevée laquelle est soumise en outre à deux expertises qui doivent être concordantes. Jusqu’en 2011, la privation de liberté consécutive aux mesures d’hospitalisation sous contrainte faisait l’objet d’un contrôle administratif rigoureux mais non judiciaire. Cette autre « exception française » qui s’expliquait par un contexte historique et réglementaire particulier, a pris fin le 5 juillet 2011, puisque désormais en cas de soins sous contrainte le Juge des Libertés et de la Détention (JLD) peut être saisi par la personne concernée, son entourage, son tuteur ou curateur le cas échéant ou le Procureur de la République, mais surtout il est saisi systématiquement en cas d’hospitalisation complète continue afin de vérifier le bien-fondé de la mesure avant le 15ème jour, avant le 6ème mois puis tous les 6 mois. Cette saisine du JLD est accompagnée d’un avis conjoint rendu par deux psychiatres de l’établissement d’accueil (dont un seul participe directement aux La Fondation Pierre Deniker est une fondation de recherche reconnue d'utilité publique créée en 2007 qui a pour objet de favoriser et soutenir des programmes de recherche et de prévention dans le domaine de la santé mentale. FICHE PRATIQUE ---------- Législation soins du patient) se prononçant de manière argumentée sur la nécessité de poursuivre l’hospitalisation complète et qui s’ajoute aux autres certificats médicaux exigés par la conduite des soins. L’audition a lieu, soit au Tribunal de Grande Instance, soit dans des locaux spécialement aménagés au sein de l’établissement d’accueil, soit dans certaines conditions sous forme de visioconférence, en règle en présence du patient hospitalisé, de son avocat s’il le souhaite, éventuellement du tiers demandeur, du Procureur de la République. Si l’état médical du patient rend impossible sa présence, il doit impérativement être représenté par un avocat. Au terme de sa décision le JLD peut valider la mesure d’hospitalisation complète, ou ordonner sa mainlevée : dans ce dernier cas il peut en outre décider que cette mesure ne s’applique qu’à l’issue d’un délai de 24 heures permettant à l’équipe médicale, le cas échéant, de mettre en œuvre un programme de soins. Il existe des voies de recours, suspensifs ou non selon les situations. La loi de 2011 comporte en outre un volet relatif à l’organisation territoriale des soins psychiatriques (laquelle accorde une place aux aidants et familles des personnes faisant l’objet de soins). Et elle affiche l’ambition de renforcer les droits des personnes malades en garantissant le respect de leurs libertés individuelles (meilleure information du patient sur sa situation, sur les décisions prises, sur les voies de recours ; examen systématique des mesures de contrainte par l’autorité judiciaire et/ou par un collège de professionnels ; renforcement des missions des commissions départementales des soins psychiatriques : CDSP), qui ne doit pas faire oublier la complexification des procédures d’aménagement ou d’abrogation dans de nombreux cas. Cette nouvelle législation a suscité beaucoup de débats. Les uns font valoir sa modernité, la possibilité d’imposer des soins ambulatoires pour une longue durée, et surtout la fin de l’anomalie juridique qui faisait échapper à tout contrôle judiciaire systématique les situations de privation de liberté que représentent les hospitalisations sous contrainte. Les autres critiquent le changement radical de la dialectique entre patient et médecin ; la déresponsabilisation voire l’exclusion des familles dans de nombreuses situations ; la rigidification, la complexité voire l’infaisabilité des procédures ; et l’a priori stigmatisant concernant les malades mentaux qui sous-tendrait l’ensemble du texte. La Fondation Pierre Deniker est une fondation de recherche reconnue d'utilité publique créée en 2007 qui a pour objet de favoriser et soutenir des programmes de recherche et de prévention dans le domaine de la santé mentale. FICHE PRATIQUE ---------- Législation Il faut toutefois se souvenir que les cas dont il est question dans les lignes qui précèdent sont l’exception et non la règle : l’arbre du soin psychiatrique contraint ne doit pas cacher la forêt des soins librement consentis, lesquels restent - et de loin, les plus fréquents. La Fondation Pierre Deniker est une fondation de recherche reconnue d'utilité publique créée en 2007 qui a pour objet de favoriser et soutenir des programmes de recherche et de prévention dans le domaine de la santé mentale.