100 Les droits culturels dans la démocratie – Itinéraires
Identier et développer les droits culturels dans
les patrimoines, des mémoires et des paysages
Marie-Christine Lerat-Hardy
Attachée de conservation du patrimoine, Département de la Gironde, Direction de la culture et de la citoyenneté
Comment la mise en œuvre des valeurs portées par
les droits culturels dans les politiques publiques peut-
elle coproduire sur les territoires de vie des popula-
tions une connaissance décloisonnée, interdiscipli-
naire et partagée entre toutes les personnes, quels
que soient leur âge et leur état, qu’elles soient active
ou non, précaires ou non, rurales ou urbaines, « in-
tégrées » ou exclues, en somme quelles que soient
leurs singularités ou leurs altérités ?
Comment l’entrée « patrimoines et mémoires » appré-
hendée par le biais des paysages peut-elle « éclairer »
les problématiques d’un aménagement culturel, équi-
table et durable des territoires en valorisant leurs res-
sources pour pallier leurs vulnérabilités, sans verser
dans la patrimonialisation, mais en générant du « bien
vivre ensemble » et ce malgré un contexte budgétaire
très contraint pour les collectivités territoriales ?
Quelques pistes de travail et d’interconnexions
peuvent être explorées :
- croiser les disciplines et les faire dialoguer avec les
diérentes références culturelles que les personnes
et les communautés détiennent sur les patrimoines
(interdisciplines) (interpublics).
- repérer et coopérer avec les lieux de capitalisation,
de transmission et d’hybridation des savoirs sur les
patrimoines, les paysages… (interdisciplines) (interpu-
blics) (inter-acteurs) (interlieux).
- travailler en mettant en synergie des dispositifs, des
compétences, des savoir-faire, des savoirs être de
personnes morales (relevant des secteurs public et
privé) et de personnes physiques (inter-acteurs) (inte-
réconomies) (interpublics).
- constituer un espace de dialogue intergénération-
nel sur les perceptions des paysages et des identités
culturelles, des legs et fondements culturels qui y sont
rattachés (interpublics) (inter-acteurs) (intertemps).
Des mémoires « attachées » aux paysages giron-
dins qui peuvent être physiques, sensibles (visuels,
sonores, olfactifs…), liés aux savoir-faire, issus de
marquages sociaux, linguistiques, littéraires, liés aux
migrations humaines…
Mémoires et paysages physiques
En Gironde, le paysage physique est un paysage
anthropique, peut-être à la seule exception d’un
paysage perçu par un regard strictement cadré sur
l’océan… Mais ce serait sans tenir compte de l’impact
des activités humaines sur l’augmentation du niveau
des eaux, phénomène qui par l’érosion du trait de
côte notamment, a des conséquences économiques,
sociales, sur le mode de vie, sur la perte de lieux de
vie et des ressources culturelles des personnes…
Leurs droits culturels sont donc « impactés ». Un tra-
vail mémoriel devrait pouvoir être opéré au bénéfice
des personnes concernées.
Le traitement des problématiques des paysages,
prend de mieux en mieux en compte de ce qui re-
lève de l’interaction avec l’humain, dans toute la
profondeur du temps, c’est-à-dire du passé jusqu’à
aujourd’hui et « pour » demain.
Le phénomène de mitage du paysage dû à l’étalement
urbain non ou mal maîtrisé par exemple, relève particu-
lièrement des problématiques de la « consommation »
de l’espace, mais si nous l’observons au regard des
droits culturels… surgissent des questions :
- sur la mixité des mémoires entre anciens et nouveaux
habitants,
- sur la qualité de vie des personnes, en lien notam-
ment avec la temporalité des transports domicile/travail
qui impacte aussi les liens sociaux, les pratiques cultu-
relles des personnes…
Mémoires et paysages liés aux savoir-faire
Les savoir-faire liés au vin. Il serait intéressant de rap-
procher les questions des mémoires et des paysages
de la « civilisation du vin » en Gironde. Ce qui im-
plique de croiser les regards sur « l’œnoculture » par
des approches interdisciplinaires (histoire, archéo-
logie, archives, architectures vernaculaires, géogra-
phie, géologie, biochimie, ethnologie, anthropologie
sociale, sociologie, économie, mémoires des ouvriers
agricoles…) sans oublier les univers artistiques autour
du vin, ni les approches sensibles (paysages phy-
siques de la vigne, les paysages sonores et olfactifs