[2004], à la disparition des paysans en France, la seconde conduirait à une diminution drastique
des ouvriers dans les usines des pays développés (ils ne sont plus que 10% aux USA contre 30
ou 40% dans les années 50), avec le déplacement de la création de valeur vers les deux bouts
de la chaîne de production, c’est-à-dire vers la conception et la commercialisation (en quelque
sorte, une généralisation des modalités de la production de la paire de chaussure Nike des
années 1990).
La géographie jouerait un rôle déterminant. Pour un secteur ou sur un territoire, les
effets d’agglomération
(effet de cluster) seraient très puissants avec l’installation des
meilleurs talents et des firmes dynamiques. Le courant très hétérogène, de la nouvelle
géographie économique
met l’accent sur de nouvelles opportunités et de nouveaux
désavantages du déplacement des lieux de fabrication vers des nouvelles régions. La
recherche, la formation, les infrastructures productives, créées notamment par les services
d’intermédiation, (comme la banque, le transport les communications, la distribution),
renforceraient l’accès à l’information sur les produits et les procédés. Des effets d’apprentissage
par le faire (learning by doing) et par l’usage (learning by using) sont susceptibles de créer une
dynamique cumulative. Par exemple, sur la côte est de la Chine, les industries électriques et
électroniques ont émergé dans les années 1990, soutenues par les investisseurs étrangers qui
réalisaient plus de la moitié de la valeur ajoutée du secteur en 2001. Les pièces et composants
incorporés sont essentiellement importés des pays voisins, comme ce fut, dans une moindre
mesure, le cas en Thaïlande, en Indonésie ou en Malaisie quand les entreprises japonaises
commencèrent à y implanter des usines. Mais, les régions côtières de la Chine sont venues
concurrencer les NPI de la « première génération » avec les délocalisations d’activité des
dragons vers des tigres et bébé tigres. Les firmes de Hongkong et de Taiwan ont fait de
l’économie continentale leur plate-forme d’exportation des produits de haute technologie vers
l’Amérique (38%) l’Asie-Océanie (36%) vers l’Eurafrique (26%.).
D’un côté, la CNUCED 2002, constate que le niveau technologique des exportations des
PED s’élève, sous le seul effet du contenu en importation. En d’autres termes, ces pays
sont devenus d’importants exportateurs de produits manufacturés, parce qu’ils importent des
composants à plus forte valeur ajoutée (même les pays figurant en 1980, dans la catégorie à
faible revenu, exportent plus de 80% de produits manufacturés contre 20% en 1980). Dès
1994, Paul Krugman soulignait que la croissance élevée des pays du Sud Est asiatique n'était
imputable qu’à une croissance extensive, « grâce à leur transpiration et non grâce à leur
inspiration », en d’autres termes, grâce au faible niveau des salaires rapporté à la qualification.
Mais, de l’autre côté, dans le cadre de la nouvelle géographie économique, le même Paul
Krugman reconnaît que la segmentation internationale des processus productifs favorise
des effets d’apprentissage. Comme pour les fabricants de composants électroniques en
Ecosse, ou les entreprises de haute technologie dans la Silicon Valley, une partie des régions
chinoises a pu tirer parti de ces processus cumulatifs. La Chine est devenue une puissance
industrielle de premier plan, premier producteur mondial pour des produits aussi divers que
l’acier, le charbon, le ciment, les textiles et vêtements, les chaussures, les jouets, les
télévisions, les ordinateurs portables, aspirant une quantité impressionnante d‘énergie et de
matières premières (zinc, cuivre, caoutchouc, coton..). Son poids dans la production mondiale
de biens et services, a doublé depuis 1991, (13% de la production mondiale en parité de
pouvoir d’achat, en 2003, contre 15,7% pour l’UE et 21% pour les Etats-Unis). Sa croissance a
atteint un record depuis une quinzaine d’années (+9% entre 1990 et 2003, +9,7% en 2004 et
+ 17% pour les exportations). Le revenu par tête s’est élevé rapidement, alors qu’il ne
représentait que 4% de celui des pays riches en 1980, il en représentait 17% en 2000.
Les pays qui se trouvent dans un environnement régional moins porteur évoluent
différemment. La Chine, l’Inde ou la Turquie qui disposent de vastes marchés intérieurs,
étaient initialement similaires du point de vue de la structure de leurs échanges, dans les
années 1990, mais ces pays ont connu des évolutions divergentes. La Turquie, plus liée à l’UE,
Ces effets d’agglomération ont déjà été abordés par les théoriciens de l’économie du développement dès les années 1930, effets
de seuil pour Rosenstein Rodan, effets cumulatifs pour Myrdal, Perroux, Hirschman.
La géographie économique, regroupe un ensemble d’approches assez hétérogènes mais qui acceptent un certain nombre
d’hypothèses de base communes (Martin et Sunley, 2000, Krugman, Beaumont, Combes, Derycke et Jayet, 2000) :La concurrence
imparfaite, de nature oligopolistique, les interactions entre producteurs, entre producteurs et consommateurs, entre entrepreneurs et
travailleurs au sein d’un marché local sont à la base du renforcement du processus d’agglomération et/ou de la spécialisation.