MAI 2007 _ PHARMACEUTIQUES
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sur les programmes de sevrage per-
sonnalisé (« stopper » ou « réduire la
cigarette »). Fin avril, une vingtaine
de pharmaciens membre de Phar-
model avait franchi le Rubicon de
« l’OTC en accès libre responsable ».
Autre opérateur à s’engager dans la
démarche, le groupe Pharma Réfé-
rence (1 498 officines indépen-
dantes), présidé par Lucien Benna-
tan, annoncait fin mars le lancement
d’une expérimentation de mise en
vente libre de médicaments dans
l’espace accueil de
la clientèle des offi-
cines. Le projet doit
se développer au
sein du réseau Via-
dys du groupe-
ment, une en-
seigne qui fédère
une centaine d’offi-
cines autour d’une somme de ser-
vices, avec un concept original de
« comptoirs séparés » ou « espaces de
confidentialité », où malades et phar-
maciens peuvent échanger en toute
discrétion. 42 officines sur la cen-
taine du réseau Viadys rallient ainsi
l’idée de l’expérimentation et accep-
tent de recevoir un meuble spéciale-
ment dédié à la vente libre. Soit une
armoire disposée dans l’espace pu-
blic et portant mention « vous pou-
vez vous servir, votre pharmacien
vous conseille ». Le patient-client
aura ainsi accès à quatre groupes de
produits de médication familiale :
« douleur et fièvre », « maux d’esto-
mac et digestion difficile », « allergie
et maux de gorge » et enfin égale-
ment un produit de sevrage taba-
gique. Tous les produits mis en vente
seront des médicaments non listés et
non remboursés. Pas question pour
autant de laisser le malade se servir et
payer sans autre explication. Car cet
achat doit aller de pair avec un
conseil personnalisé, assis sur un kit
d’accompagnement personnalisé
que le groupement a spécialement
élaboré pour la circonstance. Origi-
nalité : une « Ordo Conseil » sera ré-
digée à l’adresse du consommateur,
soit un carnet de prescription en trois
feuillets par produit vendu, l’un des-
tiné au client, l’autre à son
médecin et le troisième
conservé par l’officine.
Véto de l’Ordre. L’opéra-
tion sous enseigne Viadys
devait démarrer au mois
d’avril. Elle sera stoppée net
dans son élan par une in-
jonction de l’Ordre et de quelques
pressions des autorités sanitaires. Le
Code de la santé publique interdit
de mettre des médicaments à la libre
disposition du public, fait savoir Isa-
belle Adenot, présidente du conseil
central de la section A de l’Ordre des
pharmaciens. « Inconcevable et in-
admissible » ! Le propos sans appel
de la présidente sur le projet d’expé-
rimentation est relayé fin mars par
le président de l’Ordre national des
pharmaciens, qui considère que « sur
le fond et dans la forme, ce « coup »
disqualifie ses auteurs ». « Il est inad-
missible d’appeler les pharmaciens
en activité à s’affranchir des obliga-
tions définies par le Code de la santé
publique », écrira Jean Parrot, qui
menace de donner des suites en cas
de manquements aux règles en vi-
gueur. Chez Pharmodel, Rafael Gros-
jean indique avoir anticipé la réac-
tion de l’Ordre en mettant en place
son système. « Notre concept nous
Des
médicaments
non listés et non
remboursés
« L’automédication est un comportement
qui concerne 80 à 90 % de nos
concitoyens, qui exprime une volonté de
prendre en charge leur santé. Il faut
sécuriser ce marché et ’organiser. L’offre
est floue et incohérente, composé de
milliers de médicaments assez
hétérogènes. Notre rapport recommande
de sortir de cet affrontement un peu
stérile, sur la possibilité – ou pas – de
mettre en cause cette forme de ligne
Maginot qu’est le comptoir. Et plutôt que
d’en parler, d’expérimenter une sortie,
avec des volontaires, avec un support
juridique spécifique, de façon organisée,
contrôlée. Il ne s’agit pas que tel ou tel
prenne l’initiative sauvage de modifier la
réglementation. Il sera possible, dès lors
qu’un texte juridique fonderait cette
expérimentation, de pouvoir répondre
à deux aspirations légitimes, mais un peu
contradictoires : comment permettre au
patient de voir, de comparer les produits
et les prix. Comment par ailleurs
répondre à l’aspiration tout aussi légitime
du pharmacien : le médicament n’est pas
un produit banal, il ne peut pas être
délivré sans un minimum de réflexion et
de compétences.
Il me parait que ce
ne sont pas des
barrières dérisoires
qui arrêteront un
mouvement de
fond ! La seule chose
qui puisse l’arrêter, c’est notre capacité
à répondre aux besoins de nos clients.
Nos points forts sont le réseau et la
compétence. Jouons-les, plutôt que de
tenter un repli frileux sur des positions
qui ne sont jamais acquises ! ».
Alain Coulomb à Pharmagora, en mars 2007 :
Lucien Bennatan,
président du
groupement
Pharma-Référence.
DR
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