Session 6 - 4
la publicité télévisée sur les préférences et choix alimentaires des enfants et a fortiori le
développement de l’obésité1.
Cependant, ces conclusions font l’objet de nombreuses controverses, en raison notamment de
biais méthodologiques inhérents à ces études. Si plusieurs travaux empiriques identifient une
corrélation entre d’une part, une forte exposition télévisuelle et d’autre part, des choix
alimentaires et une prévalence de l’obésité, peu permettent de valider une relation de causalité
(Young, 2003 ; Friestad et Wright, 2005 ; Livingstone, 2005 ; Ambler, 2008). En outre,
diverses variables sociales, complexes à mesurer, entrent en jeu, souvent de manière
conjointe, telles que les parents, les habitudes alimentaires ou la pression des pairs (Masserot,
2007 ; Ayadi, 2009).
Dans ce cas, quel poids exerce le marketing des produits alimentaires par rapport à ces autres
facteurs ? Si la publicité télévisée semble avoir un effet direct modeste sur les arbitrages
alimentaires des enfants, qu’en est-il de ses effets indirects, médiatisés par d’autres variables
telles que les conditions de vie, les habitudes alimentaires, l’environnement social des enfants
(Livingstone, 2005) ? L’élaboration de politiques efficaces de lutte contre l’obésité nécessite
sans nul doute d’identifier en amont les mécanismes et les interrelations entre ces nombreux
déterminants, à ce jour encore peu connus (Livingstone, 2006, 2009).
En ce qui concerne à proprement parler les spots télévisés, l’impact publicitaire sur le
comportement alimentaire ne dépend pas seulement du nombre de messages diffusés et du
type de produits alimentaires promus (sains/non sains). Il s’agit également de s’interroger sur
la façon dont les publicitaires s’adressent aux enfants, de repérer les leviers de persuasion les
plus utilisés et les plus efficaces (Reece, Rifon et Rodriguez, 1999 ; Roberts et Pettigrew,
2007 ; Nairn et Fine, 2008). Desrochers et Holt (2007) montrent en effet que par rapport à
1977, les enfants en 2004 ont passé moins de temps devant les écrans publicitaires et ont vu
moins d’annonces pour des produits alimentaires. Dans les deux cas, les aliments promus
étaient en majorité riches en sucre ou gras. Pourtant, le taux d’obésité était bien plus faible en
1977. Une première explication repose sur le fait que les enfants actuels sont par ailleurs
influencés par de nouvelles formes de communication, telles qu’Internet, le placement de
produits, etc. (Moore, 2004 ; Schor, 2004). Les auteurs suggèrent également que les
publicitaires disposent en 2004 d’une meilleure connaissance de la cible enfantine et
emploient des leviers de persuasion mieux adaptés.
Comme le montrent les recherches sur le processus de persuasion publicitaire présentées
précédemment, les éléments d’exécution constituent des leviers privilégiés. Pecheux et al.
(2006) soulignent en effet, que dans une annonce presse, le produit et ses caractéristiques
nutritionnelles peuvent être occultés par une exécution riche. Dans le cas d’une annonce
pauvre en éléments d’exécution, l’enfant tient compte des connaissances dont il dispose sur le
produit (sain ou non) pour évaluer l’annonce et la marque.
Par conséquent, une meilleure compréhension des leviers d’exécution publicitaires et de la
façon dont ils influencent les enfants constitue une étape essentielle pour construire une
politique de protection et d’éducation pertinente.
Dans une analyse de contenus d’annonces publicitaires, Roberts et Pettigrew (2007) mettent
d’ailleurs en évidence l’utilisation de leviers fallacieux, tels que l’emploi abusif du caractère
1 Hastings et al. (2003) en Grande-Bretagne ; rapport Institute of Medicine (2006) aux Etats-Unis