Sport et cancer
Monsieur Jean-Marc DESCOTES
Membre du binôme sport et cancer avec le docteur Thierry BOUILLET
Le projet « sport et cancer » est avant tout destiné aux personnes qui ont traversé l'épreuve de la
maladie. Outre les dimensions sociale, professionnelle et environnementale, le cancer et ses traitements
affectent les capacités physiques et corporelles des personnes. Avec notre démarche, nous souhaitons aider
les patients à retrouver les conditions de vie qu'ils ont perdues au cours de cette épreuve.
L'expérience que nous avons acquise, Thierry BOUILLET et moi-même, nous a prouvé que les
résultats ne pouvaient être obtenus que par le biais d'une alliance entre les soignants, les sportifs et les
soignés. Nous savons que les personnes atteintes d'un cancer débutent une activité physique et sportive
(APS) en raison de la maladie. Ces personnes souhaitent survivre, éviter les rechutes, diminuer la douleur
ressentie. Afin que ces personnes persévèrent dans la pratique d'une APS, il est nécessaire que cette activité
ne soit pas uniquement liée au traitement. Il s'agit de donner du sens à la pratique sportive. Ce n'est qu'à
cette condition que les personnes pourront l'adopter et l'intégrer dans leur vie quotidienne.
Selon le type de cancer, la période de rémission peut durer trois, cinq ou dix ans. Cette période peut
conduire à une rémission complète. Elle peut également aboutir à un processus de récidive, c'est-à-dire au
développement de nouvelles cellules cancéreuses, et donc à la mise en place d'une nouvelle période de
traitement. L’APS joue un rôle dans la rémission de la maladie et dans la construction d'un projet de
prévention tertiaire, puisqu'elle permet de diminuer le risque de récidive de 20 % à 50 % selon le type de
cancer.
Outre cette caractéristique, l’APS permet d'agir sur la fatigue ressentie par les patients, sur les
symptômes dépressifs et sur l'altération des capacités physiques. Pour être bénéfique, l’APS doit néanmoins
se conformer à certains critères en termes de durée, d'intensité et de fréquence.
Nous attendons des fédérations sportives qu'elles prennent en considération l'intérêt qu'ont les patients
à s'inscrire dans ce type de démarche. Les différents types de cancers induisent des problématiques
distinctes. Par exemple, les effets secondaires qui résultent des traitements peuvent apparaître de manière
précoce ou tardive. Certains effets disparaissent entre trois et six mois après l'arrêt des traitements. D'autres,
en revanche, n'apparaissent qu'après l'arrêt des traitements. Un éducateur sportif doit donc tenir compte de
ces problématiques pour permettre aux personnes de s'installer durablement dans la pratique d'une
discipline. Par ailleurs, la maladie génère des répercussions psychologiques importantes. Les patients
peuvent se montrer irritables, angoissés, anxieux, en colère ou abattus. Enfin, une personne qui se trouve en
phase de rémission doit se reconstruire vis-à-vis de son environnement familial, professionnel et sociétal. A
cet égard, le sport peut jouer un rôle tout à fait significatif.
Les fédérations doivent s'interroger sur le projet qu'elles souhaitent mettre en place. S'agit-il d'un projet
de pure convivialité, ou d'une démarche paramédicale ? La construction d'un projet adéquat nécessite de
poser un certain nombre de questions aux éducateurs sportifs. Ces derniers pourront en effet adopter une
posture de soignant, d'animateur, d'éducateur ou d'assistant social. Ils pourront choisir de concentrer leurs
efforts sur la rééducation motrice ou sur la prévention tertiaire. Par ailleurs, ils auront peut-être à définir le
champ de leur travail. Celui-ci pourra porter sur l'amélioration de la mobilité articulaire, ou sur la réduction
des douleurs causées par d'éventuelles adhérences.
A la CAMI, structure que nous avons créée et que vous commencez à connaitre, l'enseignement du
karaté repose sur des prises en charge spécifiques. Pour les patients atteints d'un cancer, il n'est pas question
de réaliser des performances sportives ou de réussir en compétition. En revanche, les arts martiaux exigent
la précision du geste. Nous nous sommes donc appuyés sur cette caractéristique pour donner du sens à la
pratique de la discipline. Concrètement, nous nous efforçons d'enseigner aux patients la manière de réaliser
des mouvements efficaces, qui ne comportent aucun risque pour leur sécurité. Aucun des mouvements
appartenant à la discipline n'a été retiré. En revanche, nous apprenons aux personnes à réaliser les gestes en
tenant compte des contraintes qui sont les leurs.