N° 63 - Mars 2002 31
Complications des Cathéters Veineux
Centraux : prévention, traitement
J. PENGLOAN - Néphrologue - Hôpital Bretonneau - CHU - TOURS
Les principales complications des
Cathéters Veineux Centraux (CVC) sont
dominées par le taux élevé d’infections et
la fréquence des dysfonctionnements.
Dans cette présentation nous discu-
terons essentiellement des infections de
CVC.
FRÉQUENCE
DE L’INFECTION CHEZ LE
DIALYSÉ CHRONIQUE
La fréquence de l’infection est de 3 à 9 %
par an ; les taux de septicémie rapportés
dans la littérature sont de l’ordre de
0,93 %/mois/patient. La mortalité est
située entre 14 et 20 %. Elle est multipliée
par 2 lorsqu’il existe un antécédent de
septicémie. (Boelaert 1993 - Hoen 1997 -
Nielsen 1998 - Powe 1999)
Le risque de bactériémie à staphylocoque
doré chez un dialysé chronique est plus
de 330 fois supérieur à celui de la popu-
lation générale au Danemark (Nielsen
1998).
FRÉQUENCE
DES INFECTIONS LIÉES
AU CVC POUR
HÉMODIALYSE
Les données de la littérature rapportent
des taux d’infection de 3,9 à 5,5 bacté-
riémies pour 1000 jours/cathéter ; le taux
d’infection des CVC est nettement
supérieur à celui observé pour une fistule
artérioveineuse : un risque relatif de 7,64
(Hoen 1997) et une augmentation de
50 % du taux d’infection (Powe 1999) ont
été rapportés pour les CVC par rapport à
la fistule artérioveineuse. Le taux de
complication est très élevé de l’ordre de
40 à 44 % (Nielsen 1998 Marr 1998).
La mortalité est 4 fois plus élevée que
chez le sujet non dialysé.
L’infection liée au cathéter chez le dialysé
chronique est 2 fois sur 3 une infection à
staphylocoque et 2 fois sur 3 conduit à
l’ablation du cathéter.
SOURCES DE L’INFECTION
LIÉE AU CVC
Les germes responsables de l’infection du
CVC proviennent essentiellement :
- de la peau : mécanisme prédominant au
moment de l’insertion du cathéter.
L’infection se propage autour du cathéter
entraînant une tunnellite, une phlébite
etc…
- de l’environnement lors des manipu-
lations des connecteurs : mécanisme pré-
dominant lors de l’utilisation du cathéter.
L’infection est initialement endoluminale
et se propage à partir des germes intro-
duits par la lumière du cathéter.
La prévention du risque infectieux a bien
été étudiée par Mermel (2000) au cours
d’une méta-analyse.
Il en ressort que certaines mesures ont un
effet réel de prévention du risque infec-
tieux :
- l’asepsie cutanée au moment de la pose :
la teinture d’iode a un effet anti-infectieux
plus important que la Chorhexidine®et
même plus important que la Bétadine®.
Cependant la teinture d’iode est incom-
patible avec les silicones, matériau fré-
quemment rencontré dans les cathéters.
- le choix du site d’insertion : l’insertion
d’un CVC dans la veine sous-clavière s’ac-
compagne d’un risque infectieux moindre
que l’insertion dans la veine jugulaire
interne ou dans la veine fémorale ; cepen-
dant la pose d’un CVC dans la veine sous-
clavière doit être évité compte tenu du
risque important de sténoses qu’elle
entraîne.
- l’héparine lors du rinçage du cathéter a un
rôle préventif certain en réduisant les dépôts
de fibrine qui servent d’ancrage et de nutri-
ments pour les bactéries.
- la tunnellisation du cathéter en éloignant
l’orifice cutané du site d’insertion veineux a
un certain effet préventif.
- l’habillage chirurgical est un des facteurs le
plus important susceptible de prévenir l’in-
fection lors de la pose du cathéter ; ainsi il a
été montré une diminution statistiquement
significative (p = 0,02) du taux d’infection
de 0,5 /1000 jours/cathéter avec un habilla-
ge restreint (gants stériles et petit champ sté-
rile), à 0,08/1000 jours/cathéter si le cathé-
ter est posé avec un habillage chirurgical
(Infect. Control. Hosp. Epidemiol. 1994).
- le risque infectieux est lié au nombre de
manipulations, à la présence de personnel
non entraîné, au ratio personnel/patient : le
risque est augmenté si le ratio per-
sonnel/patient diminue de 1/l à l/2 (Infect.
Control. Hosp. Epidemiol. 1996).
Certaines mesures parfois préconisées n’ont
pas prouvé leur capacité de prévention de
l’infection :
- l’antibioprophylaxie lors de l’insertion du
cathéter
- les antibiotiques et les antiseptiques
locaux. Seule la Bétadine®crème appliquée
sur le site d’insertion pourrait avoir un effet
préventif. La Mupirocine®, antibiotique
utilisé dans le traitement du portage nasal
du Staphylocoque doré et parfois utilisé au
niveau des orifices cutanés est incompatible
avec le polyuréthane et peut entraîner une
résistance bactérienne.
LES MÉCANISMES
DE L’INFECTION
ENDOLUMINALE
Fig.1 : Les étapes du développement de l’infection liée au cathéter