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Education au développement durable
Classe de Cinquième
Histoire
LES GRANDS DEFRICHEMENTS MEDIEVAUX
Quels liens avec les changements climatiques et démographiques ?
Pistes pour une éducation au développement durable en histoire
Eric RUAULT
Professeur d'histoire et géographie
Lycée Les Bruyères. Sotteville-lès-Rouen
A. PROBLEMATIQUE GENERALE
1. UNE QUESTION HISTORIQUE SCOLAIRE A RECONSIDERER
−
Une perception « traditionnelle » (Robert Fossier) [cf. « GD perception traditionnelle »]
Moment emblématique du « beau Moyen Age », qui couvre la période 1150-1250, les Grands
Défrichements s'inscrivent dans cette période d'embellie qui marque la « première expansion
européenne ». La multiplication des actes de défrichements et la toponymie permettent de percevoir
la domination progressive de l'homme sur le milieu, même si elle reste impossible à quantifier. Plus
précoce en milieu méditerranéen, parfois commencé avant l'An Mil, le mouvement se décompose en
deux efforts, distant l'un de l'autre de deux ou trois générations, pour s'achever à la fin du XIIIe
siècle en Allemagne. Toutefois, pour Robert Fossier, le plus important dans cet effort de conquête ne
réside pas dans son ampleur, mais dans ses effets sociaux (croissance démographique, naissance du
village, émergence de la seigneurie).
Selon Cédric Lavigne, Robert Fossier oppose deux représentations de l'espace et des paysages
médiévaux. Le système de l'agriculture « itinérante et extensive », qui marquerait le Haut Moyen
Age, serait remis en cause, à partir du XIe siècle, par un ensemble de facteurs environnementaux,
sociaux et économiques qui rendraient nécessaire, ou possible, un essor de la production, et donc
une augmentation des surfaces cultivées. Cette rupture aurait lancé la vague de grands
défrichements.
−
Un renouvellement des problématiques avec l'archéologie [cf. Powerpoint 1]
Cette perception est aujourd'hui remise en cause par les travaux de certains historiens. Rejetant le
« mythe des grands défrichements », Joëlle Burnouf propose une autre lecture, qui s'appuie sur les
apports de l'archéologie préventive et de la botanique. Si la première révèle l'existence
d'exploitations agricoles dès le premier Moyen Age, la palynologie montre que dès les années 700-
800, le Nord de la France actuelle connaît un paysage ouvert, fruit de défrichements importants.
Face à l'icone du « moine défricheur », elle s'interroge sur les caractères d'une possible
« croissance du Haut Moyen Age », et la nécessité de construire un nouveau modèle historique de
relation société-milieu forestier à l'époque médiévale.
Des études locales, comme les travaux d'Aline Durand sur les paysages médiévaux du Languedoc,
confirment, qu'en certaines régions, les essartages ont commencé dès le IXe siècle, non pour
conquérir de nouveaux espaces, mais pour recoloniser une partie du saltus et de l'ager antiques, les
terroirs neufs n'étant construits qu'au XIe siècle, à la faveur de la révolution castrale. Le XIIe siècle
connaît alors un mouvement de gestion rationnelle du paysage, avec une attention particulière
accordée à la forêt, qui « est en passe de devenir une formation jardinée ».
Les « grands défrichements » s'inscrivent ici dans une observation sur le temps long. Aux
dimensions économiques et sociales, est associée la dimension environnementale qui permet de