Fiche à détacher et à archiver
N°18
La Lettre du Neurologue - n° 2 - vol. IV - avril 2000
Fiche
technique
Diagnostic d’une polyneuropathie
P. Bouche, service des explorations fonctionnelles, hôpital de la Salpêtrière, Paris.
I
Sous la responsabilité de leurs auteurs
Diagnostic d’une polyneuropathie
S’agit-il d’une polyneuropathie
Par définition, une polyneuropathie implique l’atteinte diffuse du système nerveux périphérique. On l’oppose ainsi aux mononeuropathies : attein-
te d’un seul tronc nerveux, d’un plexus ou d’une racine ; ou aux mononeuropathies multiples (multinévrites) : atteinte simultanée ou successive de
plusieurs troncs nerveux. On distingue également deux types de polyneuropathies : les polyneuropathies distales, symétriques (anciennement
polynévrites) et les polyradiculoneuropathies distales-proximales (polyradiculonévrites).
Modes d’installation et modalités évolutives
L’installation des troubles (sensitifs et/ou moteurs) peut se faire en quelques heures ou sur de nombreuses années. On distingue ainsi les formes
aiguës : installation en heures et jusqu’à quatre semaines ; les formes subaiguës : installation en semaines, mois ou années ; et les formes
chroniques : installation en années, parfois depuis l’enfance. Les modalités évolutives sont aussi importantes, qu’il s’agisse d’une évolution par à-
coups, à rechutes, ou encore que l’évolution se fasse sur un mode rapide ou très lent.
Les circonstances d’installation
La polyneuropathie peut s’installer dans un contexte particulier : chimiothérapie utilisant des médicaments neurotoxiques, maladie connue pour
ses complications nerveuses périphériques (diabète), carence nutritionnelle sévère, alcoolisme, dialyse, etc.
Les modalités d’atteinte du système nerveux périphérique
La polyneuropathie peut être motrice ou sensitive pure, intéresser plutôt les petites fibres que les grosses, débuter aux membres supérieurs ou
encore être associée à une atteinte du système nerveux autonome, tous éléments qui peuvent orienter vers une étiologie particulière.
Nature du processus physiopathologique sous-jacent
Il existe trois grands types de lésions du système nerveux périphérique selon la nature du processus physiopathologique sous-jacent :
lésion principale ou initiale de l’axone = axonopathie ;
lésion principale ou initiale de la gaine de myéline ou de la cellule de Schwann = myélinopathie ;
lésion principale ou initiale du corps cellulaire = neuronopathie, qui peut être motrice ou sensitive (ganglionopathie).
Place des explorations dans le diagnostic d’une polyneuropathie
L’examen électromyographique permet de classer la polyneuropathie selon la nature du processus causal (polyneuropathie axonale,
myélinique ou neuronopathie). Au sein de ces catégories, il permet aussi d’apporter des éléments diagnostiques essentiels : présence de blocs de
conduction, de dispersion temporelle, démyélinisation “longueur-dépendante’’, sévérité de l’axonopathie, etc.
C’est donc l’examen clé de la démarche diagnostique d’une polyneuropathie.
Les examens biologiques et l’imagerie seront fonction des approches diagnostiques (y compris l’étude du LCR).
La biopsie neuromusculaire ne doit être demandée que dans des cas très spécifiques et dans des laboratoires parfaitement entraînés.
Polyneuropathie (PN)
Examen électromyographique
Axonale Démyélinisante
Aiguë Subaiguë Chronique Aiguë Subaiguë Chronique
–syndrome de
Guillain-Barré axonal
(Campylobacter jejuni)
rares formes de vascularite
– porphyrie
causes :
métaboliques
toxiques
maladies de système
amylose
recherche cause
génétique :
CMT2 ou CMTX syndrome de
Guillain-Barré
PRN subaiguë
idiopathique ou
secondaire :
– plasmocytome
– POEMS
démyélinisation
homogène
démyélinisation
distale
longueur-
dépendante
démyélinisation
hétérogène
avec blocs de
conduction
CMT1 PN IgM avec
anti-MAG PRN chronique
Diagnostic
d’une
polyneuropa-
thie en
fonction
du mode
d’installation
et de
la nature
du processus
physio-
pathologique
sous-jacent
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Fiche à détacher et à archiver
La Lettre du Neurologue - n° 2 - vol. IV - avril 2000
II
Diagnostic d’une polyneuropathie
A. FORMES AIGUËS - Installation en quelques jours.
Au maximum : 4 semaines.
I. Formes axonales
Absence de bloc de conduction, de ralentissement de la conduction
nerveuse (ondes F et latences distales motrices normales), potentiels
sensitifs souvent très altérés ou absents. La fibrillation électrique est indi-
cative de l'intensité du processus de dénervation.
–forme axonale du syndrome de Guillain-Barré : (Campylobacter
jejuni); parfois nerfs moteurs inexcitables ; LCR : hyperprotéinora-
chie modérée ou absente.
porphyrie aiguë intermittente : dosage des porphyrines urinaires.
formes aiguës d'intoxication : sels de thallium, arsenic, lithium,
triorthocrésylphosphate.
–rares cas de polyneuropathies diabétiques (inauguration d’un traite-
ment, amaigrissement rapide), de polyneuropathies urémiques (dia-
lyse mal conduite), de polyneuropathies alcoolo-carentielles.
formes polyneuropathiques des vascularites nécrosantes : recherche
de signes d'atteinte systémique. Biopsie nerveuse indispensable.
II. Formes démyélinisantes
Présence de ralentissements de la conduction nerveuse (ondes F,
latences distales motrices allongées), dispersion de la réponse évo-
quée musculaire, possibles blocs de conduction sur les fibres
motrices, atteinte volontiers multifocale. LCR : hyperprotéinorachie.
syndrome de Guillain-Barré. Biopsie nerveuse inutile.
polyneuropathie de la diphtérie.
III. Neuronopathies
Atteinte du corps cellulaire du neurone moteur ou sensitif.
–forme motrice : absence d'altérations sensitives - poliomyélite anté-
rieure aiguë.
–forme sensitive : absence d'altérations motrices - neuropathie sen-
sitive aiguë.
B. FORMES SUBAIGUËS - Installation des troubles en
semaines et mois ou en quelques années.
I. Formes axonales
Conduction motrice normale ou peu ralentie, potentiel évoqué mus-
culaire réduit, potentiel évoqué sensitif altéré. Atteinte à prédomi-
nance distale des membres inférieurs. LCR le plus souvent normal.
Atteinte du système nerveux autonome assez fréquente. La biopsie
nerveuse est généralement peu informative, sauf cas particuliers.
polyneuropathies métaboliques : diabète, insuffisance rénale,
hypothyroïdie.
polyneuropathies nutritionnelles : alcoolo-carentielles, carences
vitaminiques diverses.
polyneuropathies toxiques : *environnement ou toxiques indus-
triels : plomb, N-Hexane et N-méthyl-butyl-ketone, acrylamide ;
*médicaments : vincristine, amiodarone, isoniazide, disulfirame,
métronidazole, cis-platine, taxol, DDI.
polyneuropathies des maladies systémiques : une vascularite est
fréquemment en cause, biopsie nerveuse souvent informative.
Sarcoïdose, formes polyneuropathiques des vascularites nécrosantes.
polyneuropathies des hémo- et lymphoréticulopathies : lymphomes,
polyglobulie.
polyneuropathies des dysglobulinémies : *malignes : principale-
ment le myélome multiple (signes de dénervation active fréquents).
*autres : cryoglobulinémies (associées à une hépatite C).
polyneuropathies infectieuses : sida, hépatite C.
polyneuropathies de l'amylose primitive. Signes végétatifs fré-
quents. Biopsie nerveuse indispensable.
II. Formes démyélinisantes
Ralentissement des conductions nerveuses motrices et sensitives,
aspect souvent hétérogène et non proportionnel de l'atteinte, poten-
tiels sensitifs altérés, blocs de conduction des fibres motrices pos-
sibles. LCR : hyperprotéinorachie. La biopsie nerveuse est souhaitable
mais non indispensable au diagnostic dans la plupart des cas.
polyradiculonévrites inflammatoires idiopathiques subaiguës.
–polyneuropathies subaiguës secondaires à une maladie systémique,
une dysglobulinémie : lupus, sarcoïdose, myélome condensant et
plasmocytome solitaire, POEMS syndrome, sida.
III. Neuronopathies
–motrices : rares, parfois rencontrées dans les lymphomes hodgki-
niens ou non hodgkiniens.
sensitives (ganglionopathies) : *syndrome de Gougerot-Sjögren :
évolution subaiguë-chronique, biopsie nerveuse indispensable (infil-
trat inflammatoire), biopsie des glandes salivaires.*neuronopathie
sensitive paranéoplasique de Denny-Brown (anticorps anti-Hu). *neu-
ronopathie sensitive progressive en l'absencede cancer. *neuronopa-
thie au cisplatine. *intoxication par la vitamine B6.*neuronopathie
subaiguë après infection par Rickettsia conorii.
C. FORMES CHRONIQUES - Installation en années, par-
fois depuis l’enfance. Intérêt de l'examen des membres de la
famille.
I. Formes axonales
Ralentissement de la conduction motrice modéré, parfois plus mar-
qué. Potentiels sensitifs altérés ou absents.
héréditaires : *Polyneuropathies sensitivo-motrices héréditaires :
formes axonales de CMT (type 2 et X). *Polyneuropathies avec trouble
biochimique connu. *amyloses héréditaires : fréquence des signes
végétatifs associés. Biopsie nerveuse indispensable. Intérêt de l'étude
génétique (biologie moléculaire). *polyneuropathies sensitives hérédi-
taires.
–acquises : rares formes associées aux gammapathies monoclo-
nales bénignes à IgG.
II. Formes démyélinisantes
héréditaires : *ralentissement homogène de la conduction nerveuse
sur tous les nerfs. Intérêt de la biopsie nerveuse : aspects en bulbes d'oi-
gnon (non spécifiques). *polyneuropathie de type CMT : CMT1A (liée
auchromosome 17). *polyneuropathies avec anomalie biochimique
connue : maladie de Refsum, leucodystrophie métachromatique.
– acquises : *ralentissement non homogène de la conduction nerveu-
se, possibilité de blocs de conduction. Intérêt de la biopsie nerveuse.
*polyradiculonévrites inflammatoires chroniques idiopathiques pro-
gressives ou à rechutes. *polyneuropathies associées aux gammapa-
thies monoclonales bénignes à IgM. (dosage de l'anti-MAG).
III. Neuronopathies
–motrices : formes spinales de CMT
–sensitives : *neuropathies héréditaires sensitives ? *neuropathie
ataxiante chronique idiopathique.
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